Epître aux Romains

Chapitres 10; 11

Dans les chapitres 9, 10 et 11 de cette épître, nous apprenons comment l'Esprit, par le ministère de l'apôtre Paul, concilie la fidélité de Dieu quant aux promesses qui sont le privilège particulier des Juifs, avec la vérité générale présentée dans ce livre, savoir que la grâce de Dieu n'a pas égard à l'apparence des personnes, tous les hommes étant également pécheurs par nature; et qu'ainsi il y a une seule et même justice pour tous. En effet, si les choses sont telles, il se présente une difficulté à laquelle il fallait répondre. Les promesses avaient été faites à Israël. Abraham avait reçu des promesses, non pas seulement des promesses conditionnelles, mais des promesses incondi-tionnelles. Comment Dieu concilierait-il ces promesses absolues et inconditionnelles, faites aux Juifs, avec une doctrine qui ne tenait plus compte de ceux-ci, si ce n'est pour les traiter comme des pécheurs d'entre le nations?

Le Saint Esprit, par le moyen de l'apôtre, résout cette difficulté au chapitre 9, en nous montrant les Juifs forcés de reconnaître, que s'ils revendiquaient les promesses sur le principe de la descendance, ils étaient obligés d'accorder le même privilège à Ismaël qui était fils d'Abraham aussi bien qu'Isaac, et aussi aux Edomites qui descendaient du fils aîné de Jacob, mais que les Juifs abhorraient (versets 6-13). D'autre part, si les Juifs revendiquaient les promesses sur le principe de l'obéissance, ils avaient évidemment perdu tout droit à le faire, lorsqu'au mont Sinaï, ils avaient élevé le veau d'or pour se prosterner devant lui; et Dieu, afin de pouvoir les épargner, avait dû recourir à son droit souverain (versets 14-18). En conséquence, si les Juifs ne reçoivent pas ces promesses sur le principe de la grâce souveraine, ils sont perdus; s'ils sont épargnés et bénis par grâce, Dieu montrera sa souveraineté en amenant aussi les nations (versets 19-26). Enfin, et c'est ici le troisième point de l'instruction de l'apôtre, au chapitre 9, Paul montre que les Juifs ont heurté contre la pierre d'achoppement (versets 27-33). Dans les chapitres 10 et 11, il continue à démontrer que Dieu n'a pas oublié ses promesses; qu'il les accomplira aux derniers jours, alors qu'Israël, recevant tout absolument de Dieu, sera béni sur le même principe que les nations, sans avoir aucun droit par promesse ou autrement.

Au premier verset du chapitre 10, Paul exprime son affection pour Israël. Puis il ajoute, en faveur des Israélites, tout ce qu'il peut dire pour eux: «Car je leur rends témoignage qu'ils ont du zèle pour Dieu, mais non selon la connaissance. Car ignorant la justice de Dieu, et cherchant à établir leur propre justice, ils ne se sont pas soumis à la justice de Dieu» (versets 2, 3).

Depuis le commencement de l'épître, l'apôtre avait mis en avant la justice qui est sur le principe de la foi. Non seulement Israël, pour ce qui regarde la justice, n'avait pas pu établir sa propre justice, mais il avait persisté à faire une justice de ce en quoi il avait failli; et lorsque Dieu envoya sa justice dans la personne de son Fils, Israël le rejeta, cherchant ainsi à établir sa propre justice, en refusant celle de Dieu. La justice de la loi (verset 5) n'avait pas accompli ce que l'homme désirait; c'est pourquoi, au verset 6, la justice qui est sur ce principe de la foi, est introduite, parlant ainsi: «Ne dis pas en ton coeur: qui montera au ciel,c'est à savoir pour en faire descendre Christ; ou, qui descendra dans l'abîme; — c'est à savoir pour faire monter Christ d'entre les morts. Mais que dit-elle?

«La parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur», c'est-à-dire la parole de la foi, laquelle nous prêchons, savoir que si tu confesses le Seigneur Jésus de ta bouche, et que tu croies dans ton coeur que Dieu l'a ressuscité des morts, tu seras sauvé» (versets 6-9). Ici, dans la résurrection, nous trouvons le grand principe de la justice par la foi, qu'Israël avait rejeté. Israël, comme nation, avait totalement failli, quant à sa propre justice, car il avait rompu le lien le plus élevé et le plus intime entre lui et Dieu, en élevant et en adorant le veau d'or. Dès lors, pour obtenir la bénédiction, il ne lui restait que cette justice, par la foi, dont Moïse lui avait parlé, comme nous le voyons au chapitre 30 du Deutéronome.

Au chapitre 27 du même livre, Moïse avait placé, de la part de Dieu, le grand principe de la justice légale, devant les Juifs, comme observateurs de la loi: s'ils n'y persévéraient pas, la malédiction les attendait. Remarquez ici que les malédictions ordonnées par Moïse dans ce chapitre (*) furent prononcées sur le mont Ebal, la montagne des malédictions (versets 13 et suivants), tandis que les bénédictions, annoncées au verset 12, ne furent jamais formulées, car elles ne pouvaient pas l'être, Dieu lui-même y mettant obstacle, parce que ceux qui étaient sous la loi n'avaient pas gardé la loi, et se trouvaient nécessairement sous sa malédiction. Le véritable effet qui résulte du fait qu'on se trouve sous la loi, c'est qu'on est maudit. Où trouvons-nous la bénédiction que Moïse avait ordonnée au verset 12? Nulle part. Mais le fait que la malédiction est sur le mont Ebal, est notre sécurité, car Christ a porté la malédiction, ayant été fait malédiction pour nous, et nous sommes au delà de la malédiction, là où elle ne peut jamais nous atteindre: Nous n'avons plus rien à redouter, car «Christ est la fin de la loi, en justice à tout croyant» (verset 4). Le chapitre 28 place devant nous les principes du gouvernement de Dieu au milieu d'Israël, faisant dépendre le sort du peuple de sa conduite présente. «Si tu obéis exactement à la voix de l'Eternel ton Dieu, et que tu prennes garde de faire tous ses commandements que je te prescris aujourd'hui, l'Eternel ton Dieu te rendra haut élevé par-dessus toutes les nations de la terre. Et toutes ces bénédictions-ci viendront sur toi, et t'atteindront, quand tu obéiras à la voix de l'Eternel ton Dieu» (versets 1, 2). «Mais si tu n'obéis pas à la voix de l'Eternel ton Dieu, pour prendre garde de faire tous ses commandements et ses statuts que je te prescris aujourd'hui, il arrivera que toutes ces malédictions-ci viendront sur toi, et t'atteindront» (verset 15). Ensuite, au chapitre 30, Moïse suppose que le peuple a encouru toutes les conséquences de l'obéissance ou de la désobéissance, il avait été amené, sous le gouvernement de la loi, dans le pays; et il a complètement failli; il a attiré sur lui la malédiction de la loi. Le verset 28 du chapitre 29, nous le montre arraché de sa terre par la colère, la fureur et la grande indignation de Jéhovah, à cause de son infidélité, et au verset 29, qui forme comme le résumé de tout ce qui précède, nous lisons: «Les choses cachées sont pour l'Eternel, notre Dieu; mais les choses révélées sont pour nous et pour nos enfants à jamais, afin que nous fassions toutes les paroles de cette loi». Les choses révélées étaient celles selon lesquelles les enfants d'Israël étaient appelés à agir. Ils avaient été placés dans le pays pour y être obéissants, afin de faire toutes les paroles de cette loi, et pour en jouir et y être bénis, à la condition d'être aussi obéissants. Leur réjection complète en fut le résultat; ils furent arrachés de leur terre. Telle est la règle de conduite pour Israël. Mais au-dessus de tout cela il y avait une autre chose, — une chose secrète dans le coeur de Dieu, — c'était la grâce. Au verset 1, Dieu avait dit: «Or il arrivera que lorsque toutes ces choses seront venues sur toi, soit la bénédiction, soit la malédiction que je t'ai représentées, et lorsque tu les auras rappelées dans ton coeur, parmi toutes les nations vers lesquelles l'Eternel ton Dieu t'aura chassé» (Deutéronome 30: 1). Nous sommes ici en présence de quelque chose de tout différent. Tout l'effet du gouvernement de Dieu avait eu son accomplissement. Les choses qui avaient été révélées aux enfants d'Israël, comme devant être leur règle de conduite, ne sont plus reconnues désormais; et un autre genre de bénédictions est présenté. Tout ce qu'ils auraient dû obtenir par leur conduite était perdu; mais il y avait au delà de tout cela cette chose secrète, savoir, les pensées de Dieu en grâce. Par conséquent le chapitre 30 nous présente la justice qui est par la foi; car si Israël, chassé loin de son pays, se retourne jusqu'à l'Eternel, l'Eternel aura compassion de lui, et mettra fin à sa captivité, et le rassemblera d'entre tous les peuples, parmi lesquels il l'avait dispersé. Toute question de justice par la loi a ainsi pris absolument fin. S'il reste quelque espérance pour le Juif, c'est sur un autre principe, le principe de la justice qui est par la foi. Or, dès que l'on introduit la justice qui est par la foi, Christ est «la fin de la loi en justice à tout croyant» (verset 4). La justice par la loi n'existe plus, Israël en a porté la malédiction; et Paul démontre qu'Israël est placé sur une voie nouvelle, où il a affaire avec Dieu, sur le principe de la justice qui est par la foi et qui est Christ lui-même.

(*) Le lecteur attentif se convaincra facilement qu'au chapitre 28, commence une nouvelle partie du sujet renfermé dans les chapitres 27 à 29; et que le chapitre 27 forme un tout indépendant.

 «La parole est près de toi» (verset 8, et Deutéronome 30: 14). Vous n'avez pas à aller à Jérusalem ou à passer la mer pour la trouver, car «la parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur, c'est-à-dire, la parole de la foi, laquelle nous prêchons, savoir que si tu confesses le Seigneur Jésus de ta bouche, et que tu croies dans ton coeur que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, tu seras sauvé» (verset 9). Du moment que vous saisissez la loi dans ce sens spirituel, vous trouvez Christ, ce que l'apôtre confirme par cet autre passage de l'Ecriture: «Quiconque croit en lui ne sera pas confus» (verset 11 et Esaïe 28: 16). Et quand Dieu amène le Juif sur ce principe, il introduit aussi le Gentil: «Car il n'y a pas de distinction de Juif et de Grec, car le même Seigneur de tous est riche envers tous ceux qui l'invoquent», «car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé» (10: 12, 13). Or s'il est dit «quiconque», il ne peut plus y avoir désormais aucune différence entre Juifs et Gentils.

Remarquez le beau et touchant rapport qu'il y a entre ce passage et le commencement de l'épître. L'apôtre, au chapitre 3, avait réduit les hommes à un seul et même niveau, comme étant tous également pécheurs. «Tous ont péché et n'atteignent pas à la gloire de Dieu» (chapitre 3: 23). Ici, il les élève tous à la hauteur de la grâce salutaire de Dieu qui peut prendre et bénir un Gentil; et comme il n'y a plus désormais aucune différence entre Juif et Grec, il n'y en a plus non plus devant Dieu: «Car le même Seigneur de tous est riche envers tous ceux qui l'invoquent; car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé». Le «quiconque» du verset 11 est encore une fois répété! La puissance de Dieu est merveilleuse dans ces paroles qui disent quelle plénitude de bénédiction il y a dans son coeur pour les pauvres pécheurs!

Mais «comment donc invoqueront-ils celui en qui ils n'ont point cru? Et comment croiront-ils en celui dont ils n'ont point entendu parler? Et comment entendront-ils parler sans quelqu'un qui prêche?» (verset 14). Ici Dieu se place sur un autre terrain, sur lequel, par une grâce extrême, il cherche à exciter les Juifs à la jalousie. Ce qui excluait les Juifs, ce n'était pas seulement la réjection de Christ dont ils s'étaient rendus coupables, mais leur réjection des Gentils comme étant d'un même corps, le corps de Christ; ils refusaient la grâce aux Gentils. La même vérité ne nous est-elle pas présentée dans la parabole du Roi qui demande compte de leur administration à ses serviteurs (Matthieu 18: 23, 35)? — Le Juif refuse de faire grâce au Gentil. «Méchant esclave, je t'ai remis toute cette dette, parce que tu m'en avais prié; n'aurais-tu pas dû aussi avoir pitié de celui qui est esclave avec toi, comme moi aussi j'ai eu pitié de toi?». N'est-ce pas encore ce que Paul dit dans la première épître aux Thessaloniciens, chapitre 2: 16 : «Qui nous empêchent de parler aux nations, afin qu'elles soient sauvées, pour combler ainsi toujours la mesure de leurs péchés?». Christ vient, accomplissement de toutes les promesses; et ils le rejettent. Non seulement ils ont failli quant à la justice, auparavant; — mais maintenant ils rejettent le Messie. Or, Christ sur la croix avait prié: Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font» (Luc 23: 34); et cette prière de Christ fut exaucée pour ce qui regarde Dieu, et Pierre dit: «Je sais que vous l'avez fait par ignorance, de même que vos chefs aussi», repentez-vous donc et Christ reviendra (Actes des Apôtres 3: 17, 19-21). Mais avant que Pierre pût terminer son discours, les sacrificateurs survinrent et le firent taire, et ainsi ils ne rejetèrent pas seulement Christ lui-même, mais le témoignage de l'Esprit Saint quant à sa seconde venue. C'est de ce péché qu'Etienne les accusa: «Vous résistez toujours à l'Esprit Saint; comme vos pères, vous aussi, vous faites» (Actes des Apôtres 7: 51), et alors au lieu que Christ revienne vers eux sur la terre, Etienne va vers Christ dans le ciel.

Si vous considérez Christ sur la terre, comme homme, — quoiqu'il soit «Dieu béni éternellement», — dès qu'il prend sa place comme homme au milieu des hommes, le Saint Esprit vient sur lui et le scelle. Le Saint Esprit vient et rend témoignage à ce qui se trouve sur la terre. Lorsque Christ parle à Nathanaël, il en est autrement: «Désormais vous verrez le ciel ouvert, et les anges de Dieu montant et descendant sur le Fils de l'homme» (Jean 1: 52). Dans ce passage-ci, nous voyons Christ comme le Fils de l'homme, et les anges le servent; dans le précédent, le ciel s'ouvre, et le Saint Esprit descend et scelle Jésus comme le Fils de Dieu. Dans ce que le Seigneur dit à Nathanaël, il nous montre le ciel s'ouvrant et le Fils de l'homme sur la terre, l'objet du service des anges. Mais au chapitre 7 des Actes, le ciel est ouvert à Etienne et le Fils de l'homme est vu dans le ciel. Le ciel ne s'ouvre pas pour qu'un sceau soit mis sur le Fils de l'homme ici-bas, mais pour nous montrer le Fils de l'homme dans le ciel. Le ciel n'est pas ouvert maintenant pour que les regards se portent sur ce qu'il y a ici bas, mais le ciel est ouvert pour l'Eglise, pour qu'elle contemple ce qu'il y a là-haut. Telle est la position de l'Eglise, maintenant l'Eglise est remplie du Saint Esprit, afin qu'elle regarde dans le ciel et qu'elle ait communion avec Christ à la droite de Dieu.

Mais les Juifs arrêtèrent ce témoignage du Saint Esprit; ils jetèrent Etienne hors de la ville et le lapidèrent, amenant ainsi sur eux-mêmes leur réjection définitive; et partout, tout le long du livre des Actes, notamment au chapitre 22, versets 21, 22, nous les voyons rejeter toujours la grâce envers les Gentils. Paul, dans ce chapitre 22, raconte les détails de sa conversion, et quand il arrive à ces paroles: «Va, car je t'enverrai au loin, vers les nations», nous lisons: «Et ils l'écoutèrent jusqu'à ce mot, et ils élevèrent la voix disant: Ote de la terre un tel homme, car il ne convient pas qu'il vive». Paul était le ministre de la grâce, mais les Juifs ne voulaient pas entendre parler de grâce, «pour combler ainsi toujours la mesure de leurs péchés; or la colère est venue sur eux au dernier terme» (1 Thessaloniciens 2: 16).

Le même esprit fut manifesté en Saul de Tarse, car nous le rencontrons pour la première fois, gardant les vêtements des hommes qui lapidaient Etienne, alors que le ciel ouvert montrait Christ à l'Eglise, et mettait fin à la grâce pour le Juif, comme tel. Plus tard ce même Saul fut arrêté sur la route de Damas, et la gloire de Dieu lui fut révélée. Et que vit-il alors? L'unité de l'Eglise. Il ne vit pas simplement le Fils de l'homme en gloire; mais dans la gloire, il vit le Seigneur unissant tous les saints avec Lui-même en une seule et même unité. Il lui fut révélé que les saints mêmes qu'il persécutait, étaient un avec ce Seigneur dans la gloire; car le Seigneur reconnaissait les saints persécutés comme étant un avec lui, et Paul, en les persécutant, persécutait le Seigneur.

Plein de cet évangile de la gloire du Christ, Paul s'en va édifier l'Eglise. Il s'en va, exposant cette vérité merveilleuse, que les croyants sont un esprit avec Jésus (1 Corinthiens 6: 17), que l'Eglise est un corps avec Lui, son Chef glorifié dans le ciel (1 Corinthiens 12: 11-27; Ephésiens 1: 22, 23; 3: 4; 4: 15, 16; 5: 29-32; Colossiens 1: 18; 2: 19). Paul fut ainsi l'instrument de Dieu pour rendre ce glorieux témoignage de l'union des saints avec le Seigneur dans la gloire, ce témoignage contre lequel on a toujours tellement contesté; et comme jadis, le témoignage rendu par Esaïe, 700 ans auparavant, trouva Israël, ayant le coeur engraissé, jusqu'à ce qu'il n'y eût plus de remède.

Dans ce chapitre 10 de l'épître aux Romains, Paul montre que l'Evangile était allé jusqu'aux bouts de la terre, et que les Juifs auraient dû l'avoir reçu. Toutefois il touche le sujet très délicatement, disant: «Tous n'ont pas obéi à l'Evangile», car leur propre prophète Esaïe avait dit: «Seigneur, qui est-ce qui a cru à ce qu'il a entendu de nous?». «Ainsi la foi est de ce qu'on entend, et ce qu'on entend par la parole de Dieu» (versets 16-17). C'est en vain qu'on se placerait ici sur le terrain de la loi; la justice de la loi ne consiste pas à croire ce qu'on entend. Esaïe dit qu'ils n'ont pas cru ce qu'ils entendaient. «Mais je dis: n'ont-ils pas entendu? Oui, certes, «leur voix est allée par toute la terre» (verset 18). La création elle-même manifestait que l'oeil de Dieu était sur les nations. Dieu pensait aux nations. «Moïse, le premier, a dit: Je vous exciterai à la jalousie par ce qui n'est point une nation; je vous exciterai à la colère par une nation destituée d'intelligence» (verset 19). Mais vous, Juifs, vous ne permettez pas aux nations d'entrer, et vos propres prophètes l'ont déjà annoncé: «Mais Esaïe s'enhardit tout à fait et dit: J'ai été trouvé de ceux qui ne me cherchaient point; mais quant à Israël il dit: Tout le jour, j'ai étendu mes mains vers un peuple désobéissant et contredisant» (versets 20, 21). Ainsi l'apôtre traite les Juifs avec une grande douceur, disant en réalité, en se servant des paroles d'Esaïe: «J'ai été manifesté à ceux qui ne s'enquéraient point de moi»; mais en ajoutant: tel est votre caractère, vous êtes «un peuple désobéissant et contredisant!».

Chapitre 11. «Je dis donc: Dieu a-t-il rejeté son peuple?» (verset 1). Est-ce que, réellement, en parlant ainsi, je veux dire que les Juifs sont tous rejetés et mis de côté. Qu'ainsi n'advienne, car moi aussi je suis un Israélite. Comment pourrais-je dire que Dieu a rejeté son peuple, puisque je suis l'un de vous? Paul ramène les coeurs des Juifs en se plaçant lui-même au milieu d'eux.

Ce chapitre présente trois preuves que Dieu n'a pas rejeté son peuple. Premièrement: il y avait alors un résidu selon l'élection de grâce. Secondement: si Dieu provoque les Juifs à la jalousie, ce n'est pas pour les rejeter, mais pour les amener. Enfin, Dieu a promis de les ramener comme nation, par Christ: «et ainsi tout Israël sera sauvé» (verset 26).

Il ne faut pas oublier que l'apôtre parle ici, «d'Israël» comme peuple, et non comme résidu élu, car il ne fait mention de celui-ci que pour prouver que Dieu n'avait pas rejeté son peuple. Il est également évident, comme nous le verrons d'ailleurs, que ce que Paul dit ici ne peut pas s'appliquer à l'Eglise de Dieu, car comment pourrait-il être question de rejeter ce qui est un avec Christ dans le ciel? Dieu a eu dès le commencement un résidu élu qu'il ne pouvait pas rejeter. «Dieu n'a pas rejeté son peuple, lequel il a préconnu. Ne savez-vous pas ce que l'Ecriture dit dans l'histoire d'Elie?» (verset 2). L'apôtre se sert ici de l'histoire d'Elie dans son argumentation, histoire remarquable, car Elie vint avec un jugement, afin de ramener Israël; mais il dit que c'est en vain, et «il fait requête à Dieu contre Israël, disant: Seigneur, ils ont tué tes prophètes, et ils ont démoli tes autels, et moi je suis demeuré seul, et ils cherchent ma vie» (verset 3). Je ne dis pas qu'Elie ait raison de parler ainsi, car il ne comprenait pas la grâce de Dieu. «Mais que lui dit la réponse divine? Je me suis réservé sept mille hommes qui n'ont point fléchi le genou devant l'image de Bélial» (verset 4). Elie n'a pas eu assez de foi pour voir ces sept mille hommes. La vie intérieure du coeur d'Elie n'était pas dans ce moment à la hauteur de son témoignage extérieur. Il était rempli de lui-même, disant: «moi» et «moi»; et par suite il ne pouvait pas envisager Israël comme Dieu l'envisageait. L'autel du Seigneur avait été relevé; mais aussitôt après, Elie dit: «Seigneur, ils ont démoli tes autels», les prophètes de Baal avaient été tués tous, et aussitôt après il dit: «Ils ont tué tes prophètes». La mesure personnelle de sa foi n'était pas à la hauteur de son témoignage extérieur.

J'ajouterai ici que, dans aucun cas, notre témoignage extérieur ne devrait dépasser la mesure de notre communion avec Dieu. L'effet du témoignage public amènera certainement un grand danger pour nous, si notre vie intérieure n'y répond pas. Quelquefois nous permettons au témoignage extérieur de continuer, longtemps après que la vie intérieure avec Dieu a cessé d'agir. Il en fut ainsi chez Elie. Sa vie intérieure ne marchait pas de pair avec son témoignage, lorsqu'il fit descendre le feu du ciel (quoique ce fût par la puissance de Dieu) et qu'il tua les prophètes de Baal, car ce fut aussitôt après toute cette manifestation de la puissance de Dieu, qu'il succombe devant les menaces d'une femme. Ah! s'écrie-t-il, tout est inutile; et il s'enfuit pour sauver sa vie. Elie était un homme béni de Dieu, mais dans ce moment il était faible. Mais Dieu est au-dessus de toutes les pensées d'Elie; car si Elie n'a pas le discernement spirituel nécessaire pour découvrir les élus de Dieu, Dieu les connaît (comparez 2 Timothée 2: 19); et si un homme tel qu'Elie fait requête contre Israël, Dieu, dans sa grâce, intercédera pour eux. C'est pourquoi nous avons ici une preuve que Dieu n'abandonne pas Israël. Dans les versets 7 à 10, Paul cite ces terribles déclarations des propres prophètes d'Israël: Dieu leur a donné un esprit d'assoupissement»; et: «que leur table leur devienne un filet, etc». Puis au verset 11, il demande: «Ont-ils bronché afin qu'il tombent? Qu'ainsi n'advienne. Mais par leur chute, le salut parvient aux nations, pour les exciter à la jalousie». Et au verset 14: «Si, en quelque façon, dit-il, je puis exciter ma chair à la jalousie». Ceci ne peut se rapporter à l'Eglise, car comment pourrait-il être question de provoquer à la jalousie la chair de l'Eglise? l'Eglise n'est pas «dans la chair», mais «dans l'Esprit». Toutefois la chair est dans le croyant, et par négligence on peut la laisser agir. Ce qui est dit au verset 15: «car si leur réjection est la réconciliation du monde, quelle sera leur réception, sinon la vie d'entre les morts», ne peut pas non plus s'appliquer à l'Eglise, car comment pourrait-on parler de retrancher et de recevoir de nouveau ceux qui sont rendus parfaits à toujours en Christ? C'est d'Israël, selon la chair, que Paul parle; et la réception d'Israël, quand le moment en sera venu, sera une nouvelle naissance pour le monde, une vie d'entre les morts.

Pour ce qui suit, il faut nous souvenir de la différence qu'il y a entre les voies de Dieu quant à une série de promesses pour la terre et quant à l'élection de l'Eglise. L'apôtre, dans la portion de l'Ecriture que nous étudions, s'occupe de la manière dont Dieu agit pour l'accomplissement de ses promesses, ici bas, et non pas de l'unité de l'Eglise dans le ciel. «Or, si quelques-unes des branches ont été arrachées, et si toi, qui étais un olivier sauvage, as été enté, etc.» (verset 17). Cet olivier figure la nation juive, et ne peut en aucune manière représenter l'Eglise de Dieu; et l'Esprit, en se servant de l'image d'un arbre, a prouvé qu'il s'agit de la terre et non pas du ciel. Ensuite, si l'apôtre parlait de l'Eglise et du salut, il ne pourrait être question de branches coupées, car comment aurait-on pu dire de l'Eglise qui «est en Dieu le Père et dans le Seigneur Jésus Christ», que quelques-unes de ses branches pouvaient être coupées? «Tu diras donc: Les branches ont été arrachées, afin que je fusse enté» (verset 19). Ce n'est pas de l'Eglise qu'il est ici question, car nous ne sommes pas entés au milieu des Juifs, mais nous sommes «un homme nouveau»,comme nous voyons au chapitre 2 de l'épître aux Ephésiens. Ceux qui sont entés sont les Gentils ou nations, dans la position de témoignage.

Il y a trois choses qui se rattachent à Abraham: l'élection, l'appel de Dieu et la promesse de Dieu. Noé avait reçu la puissance gouvernementale sur la terre; mais les hommes s'adonnèrent à l'idolâtrie, comme nous le voyons dans le livre de Josué (chapitre 24: 2); et dès lors, tout ce qui leur inspirait de la terreur ou éveillait leur gratitude fut attribué par eux à Satan. «Ils ont sacrifié aux démons et non pas à Dieu» (1 Corinthiens 10: 20). L'idée qu'ils se faisaient de Dieu, ou les terrifiait, ou bien les encourageait à s'abandonner à leurs passions. Alors, Dieu appelle un homme du milieu d'eux pour être son témoin sur la terre. Abraham fut appelé pour être séparé de l'idolâtrie qui l'environnait. «Or l'Eternel avait dit à Abraham: Sors de ton pays, et d'avec ta parenté, et de la maison de ton père» (Genèse 12: 1): «Ainsi a dit l'Eternel, le Dieu d'Israël: Vos pères, Taré, père d'Abraham et père de Nachor, ont anciennement habité au delà du fleuve, et ont servi d'autres dieux, mais j'ai pris votre père Abraham» (Josué 24: 2)… Ainsi donc, comme nous le voyons, quand cet état de choses fut survenu, Dieu appelle Abraham hors de tout ce système, et lui donne des promesses; et ainsi il planta l'olivier sur la terre. Puis à cause de l'incrédulité, quelques branches ont été retranchées; mais remarquez bien que Dieu n'arrache pas l'arbre, il ne fait que couper quelques branches. «Toi qui étais un olivier sauvage, as été enté au milieu d'elles et es devenu coparticipant de la racine et de la graisse de l'olivier» (verset 17); ce qui veut dire, que les nations ont été entées sur le tronc de la promesse, et elles seront retranchées en leur temps, si elles ne persévèrent pas dans la bonté de Dieu. Quant aux Juifs, qui sont les branches naturelles, «s'ils ne persévèrent pas dans l'incrédulité, ils seront entés» de nouveau sur leur propre tronc de promesse, «car Dieu est puissant pour les enter de nouveau» (verset 23). L'apôtre ne parlerait jamais «d'enter de nouveau» s'il s'agissait du salut personnel.

Toutes ces voies de Dieu à l'égard du tronc de la promesse sont tout à fait différentes de cette chose nouvelle et glorieuse, que les croyants sont maintenant membres du corps de Christ dans les cieux. Il n'y a pas de retranchement là; il n'y a pas «à greffer de nouveau». Les branches naturelles sont les Juifs. Paul, comme nous l'avons dit, traite des dispensations de Dieu et, considérées comme dispensations, les nations sont placées sous une même responsabilité avec les Juifs. Or dans cet ordre de choses le système gentil a maintenant son temps. Désormais le Juif doit se placer au niveau des nations; ce que l'apôtre dit à celles-ci, c'est que, si elles faillissent, elles seront traitées exactement comme les Juifs, — Il ne s'agit pas, je le répète encore, du salut personnel; il ne s'agit pas de l'union de l'Eglise avec Christ, mais ce que l'apôtre dit, c'est que le témoignage, qui est établi par Dieu sur la terre, sera mis de côté, s'il y a chute, et au verset 24 il ajoute: «combien plus ceux qui en sont selon la nature, seront-ils entés sur leur propre olivier!». C'est une absurdité, de même qu'une preuve d'ignorance profonde, que de dire de l'Eglise, dont la «vie est cachée avec Christ en Dieu» (Colossiens 3: 3), qu'elle peut-être «entée sur son propre olivier» — Il ne s'agit pas ici du tout de l'âme, mais de l'ordre des choses sur la terre. Lorsque Dieu me révèle ses voies envers un peuple sur la terre, j'apprends: qu'un endurcissement partiel est arrivé à Israël jusqu'à ce que la plénitude des nations soit entrée, et ainsi tout Israël soit sauvé», c'est-à-dire que quand l'Eglise de Dieu sera complétée et enlevée, alors, tout Israël, — non pas individuellement, mais comme un tout, — sera sauvé. Les Juifs ne seront pas introduits dans l'Eglise, car celle-ci aura été enlevée, mais ils seront sauvés comme peuple sur la terre. Actuellement un Juif entre dans l'Eglise comme un Gentil, et prend sa place là où «il n'y a ni Juif, ni Grec, ni esclave ni libre, ni mâle ni femelle, car tous sont un en Christ» (Galates 3: 28).

«Car je ne veux pas, frères, que vous ignoriez ce mystère-ci, afin que vous ne soyez pas sages à vos propres yeux: c'est qu'un endurcissement partiel est arrivé à Israël, jusqu'à ce que la plénitude des nations soit entrée, et ainsi tout Israël sera sauvé, selon ce qui est écrit: Le libérateur viendra de Sion, etc.» (versets 25-26). Je ne doute pas que l'Eglise professante ne soit maintenant aussi partiellement endurcie. L'apôtre écrit trente ans après la mort de Christ, et cependant il dit: «Le libérateur viendra de Sion», et il nous apprend comment. Son vrai but est de provoquer ainsi Israël à la jalousie. Il montre quelle est la responsabilité des nations à persévérer de participer à la graisse de l'olivier, et fait ressortir que le véritable secret de Dieu, en agissant ainsi, c'est, «qu'un endurcissement partiel est arrivé à Israël»,jusqu'à ce que l'Eglise de Dieu soit entrée tout entière, et alors «tout Israël sera sauvé». «Ils sont ennemis à l'égard de l'Evangile, à cause de vous; mais ils sont bien-aimés selon l'élection, à cause des pères (verset 28). Si ceci se rapportait à un Israël spirituel, ce serait une vraie absurdité. Ils sont «bien-aimés à cause des pères». Qui? Les nations? Non, jamais; — mais Israël; car Dieu est «le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob». — «Ils sont ennemis à cause de vous». Ceci peut-il s'appliquer à l'Israël spirituel? Non, certainement. On ne peut pas davantage l'appliquer aux Juifs croyants. «Mais ils sont bien-aimés selon l'élection, à cause des pères. Car les dons et la vocation de Dieu sont sans repentir» (verset 29). L'apôtre ne dit pas que les dons et la vocation sont souverains; il a traité la question de la souveraineté au chapitre 9, comme nous avons vu; mais ici il met en évidence la fidélité de Dieu. Dieu appela Israël à être son peuple, et il ne s'en repentira jamais.

Le même principe, exactement, qui garantit notre salut, est ce qui garantit aussi l'accomplissement, à l'égard d'Israël, des promesses faites aux pères.

Je voudrais maintenant dire quelques mots sur les versets 30 et 31. Ce dernier est plus correctement rendu, si on lit: «de même aussi ceux-ci ont été maintenant désobéissants à votre miséricorde, afin qu'ils soient aussi des objets de miséricorde». Jadis vous ne croyiez pas; et maintenant eux ne croient pas à votre miséricorde, c'est-à-dire, ils ne veulent pas croire à votre évangile. Mais quel est en ceci le dessein de Dieu? C'est qu'ils sont bénis sans aucun droit, comme des Gentils perdus. Lorsque Jésus vint, un Juif aurait pu dire: J'ai un droit à ce Christ; c'est pourquoi Jésus dit à ses disciples: Ne dites pas que je suis le Christ, car je dois souffrir et être rejeté. Avant qu'Israël eût rejeté Christ, il avait, par la grâce, un droit aux promesses. Mais maintenant Israël a perdu tout droit, à quoi que ce soit, et ainsi, il sera béni comme un objet de miséricorde. C'est là ce qui fait que l'apôtre s'extasie, non sur la grandeur de la miséricorde, mais sur la sagesse de Dieu, qui amène tous Juif, et Gentil, à être des objets de miséricorde, sans droit aucun, même à la promesse. Sans doute Dieu accomplira les promesses, mais il les accomplira en amenant Israël à reconnaître qu'il n'avait aucun droit à rien.

Il est admirable de voir comment l'apôtre, à travers toutes ces choses, est ramené à Dieu lui-même et conduit ainsi l'âme à adorer sa grâce merveilleuse. Qu'il s'agisse du Juif ou du Gentil, c'est à Dieu que je regarde. Il ne s'agit pas de ce qu'est le saint qui a reçu la grâce, mais de ce qu'est le Dieu qui l'a donnée. Je puis considérer ce que Dieu fait, mais je puis regarder, au delà de la chose donnée, au Dieu qui confère la grâce, qui élit le pécheur. Ce n'est pas le juif élu ou le gentil élu qui possède maintenant un droit quelconque, c'est le pécheur qui est amené à Dieu sur le fondement de la grâce souveraine seule. «Car de lui, et par lui, et pour lui, sont toutes choses! A lui soit gloire éternellement! Amen!».

Quelle consolation pour le coeur n'y a-t-il pas dans ce fait que, tout en contemplant tout l'ordre des voies de Dieu, il puisse retourner à une heureuse communion avec Dieu Lui-même et, de ce centre, embrasser tout ce qui est à l'entour: et dans la présence de Dieu, le coeur voit toutes choses à leur place. Que le Seigneur nous garde toujours là; — et quand nous sommes ainsi gardés dans la vie de tous les jours, «par la vérité qui est en Jésus» (Ephésiens 4: 21), «ayant dépouillé le vieil homme et revêtu le nouveau», nous recevons une capacité divine pour comprendre les voies de Dieu. En terminant, je désire ajouter qu'il est important de distinguer l'ordre des voies de Dieu sur la terre, et de maintenir cette vérité de l'ordre de la promesse sur la terre, juif d'abord, gentil ensuite, et plus tard juif de nouveau, car les branches naturelles seront entées de nouveau sur leur propre olivier, — et de l'union de l'Eglise avec Christ dans le ciel, comme son épouse et son corps. Il est important, je le répète, de distinguer le gouvernement de Dieu sur la terre, l'olivier de la promesse, et notre propre union avec Christ, la Tête de l'Eglise dans le ciel, en qui nous avons toutes choses, car toutes choses ont leur centre en Lui.