Notes sur le chapitre 5 de l'Apocalypse

Nous avons vu, au chapitre 4 (*), le trône de Dieu dressé dans le ciel, afin que l'Héritier de toutes choses soit amené dans le monde, selon l'expression de l'épître aux Hébreux: «quand il introduit le premier-né dans le monde habitable» (Hébreux 1: 6). Mais nous ne voyons pas que toutes choses lui soient encore assujetties, et que les desseins de Dieu à cet égard soient accomplis, car dans le livre qui nous occupe ici, ce premier-né n'apparaît qu'au chapitre 19.

(*) Voir ci-dessus, page 300 [page de l’original].

La fin du chapitre 3 nous a dit le témoignage du Seigneur Lui-même à l'égard de la chute de l'Eglise sur la terre, car il vomit l'Eglise de sa bouche. Nous avons vu aussi que Christ prend la place, dans laquelle l'Eglise n'a pas su se maintenir, et qu'il se présente lui-même comme «l'Amen, le témoin fidèle et véritable…». Le pouvoir judiciaire du Seigneur ayant ainsi pris fin an milieu des chandeliers sur la terre (voyez les chapitres 1: 9-20; 2; 3), nous avons trouvé au chapitre 4 un trône, — non pas de grâce, mais de jugement, établi dans le ciel, et autour de ce trône les saints glorifiés, assis sur leurs trônes, parfaitement tranquilles au milieu des tonnerres et des éclairs, procédant du trône qui est au milieu d'eux: mais quand les animaux célèbrent la majesté de Dieu, alors les saints jettent leurs couronnes devant le trône et se prosternent et adorent Celui qui y est assis, le Créateur.

Le chapitre 5, dont nous allons nous occuper maintenant, nous donne l'état de choses qui remplit l'espace de temps, depuis le moment où Christ vomit de sa bouche ce qui a le nom d'Eglise sur la terre, moment où ont lieu les jugements qui précèdent la prise de possession de son trône sur la terre.

Il n'est pas question, au chapitre 5, de la manifestation de la gloire générale de Dieu, mais de l'ouverture, ou plutôt de la préparation à l'ouverture d'un livre qui n'est réellement ouvert qu'au chapitre 6. Ce chapitre 5 ne nous parle pas davantage d'un trône qui promet des bénédictions à la terre, comme au chapitre 4, où nous le voyons entouré de l'arc-en-ciel, ce signe de la fidélité de Dieu à son alliance avec la terre. Nous ne retrouvons pas non plus les titres de Dieu, qui appartiennent à l'Ancien Testament; il ne s'agit plus du «Seigneur Dieu le Tout-Puissant», il n'est pas question du «Créateur», de Celui qui «a créé toutes choses et à cause de la volonté duquel elles existent et furent créées», mais c'est le «Rédempteur» qui est loué et béni. Le chapitre 5 nous place en présence des conseils de Dieu, quand l'Eglise a disparu. Dieu toujours patient, même en jugement, va intervenir maintenant de diverses manières, jusqu'à l'accomplissement de son premier et principal dessein qui est d'amener «le premier-né» dans le monde. Le chapitre 4 ne contenait rien à ce sujet, parce que si ce dessein doit s'accomplir, la création ne suffit pas et il faut que la rédemption intervienne. Remarquez aussi que les conseils de Dieu ici sont liés à la terre, et non pas, en aucune manière, à ses desseins de grâce envers les pécheurs individuellement. Il faut que la rédemption intervienne, si Dieu doit être glorifié comme Sauveur aussi bien que comme Créateur.

«Et je vis dans la droite de Celui qui était assis sur le trône un livre…» (verset 1). Les desseins de Dieu sont dans la main de Celui qui était assis sur le trône, dans la droite de la puissance, afin qu'ils soient accomplis, car Celui qui est assis sur le trône est capable de les accomplir. Il y a une grande consolation dans cette pensée que, quelque terribles que puissent être les jugements, — et certes ils sont terribles, — le livre est dans la main de Dieu en sorte que, s'il est question des sceaux, des trompettes, des coupes de la colère, nous les voyons dans la main de Dieu, comme expression de l'accomplissement de ses desseins. Il en est de même ici, quand nous voyons que l'Agneau qui nous a aimé et qui s'est donné pour nous, est Celui qui va prendre le livre avec la même tranquillité, avec laquelle Dieu le tient dans sa main.

Le coeur naturel, car nous sommes encore «dans le corps», tremblerait à la vue de ces choses, comme dit Luc: «les hommes rendent l'âme de peur à cause de l'attente des choses qui viennent sur la terre habitable» (Luc 21: 26). Mais la foi a une place assurée dans les conseils de Dieu; elle voit tout entre les mains de Dieu et pour la gloire de Dieu. Dieu, dans la stabilité de sa propre puissance, tient le livre sur le trône, car Lui seul connaît ses propres conseils, — et la foi le reconnaît. Ainsi, Celui qui nous a aimé et qui nous a lavé de nos péchés dans son propre sang, c'est Christ, qui est la sagesse de Dieu et la puissance de Dieu, et qui vient ouvrir le livre de ces conseils de Dieu. Les choses qui sont écrites dans le livre ne concernent pas l'Eglise; mais le chrétien doit en avoir pourtant l'intelligence, car il a «la pensée de Christ» (1 Corinthiens 2: 16). Quand une prophétie est donnée, le Seigneur en ouvre le livre pour nous et nous l'expose, afin que nous intercédions avec Lui pour d'autres. Ainsi après que Dieu eut appelé Abraham hors de son pays et l'eut placé sur le chemin de la foi, se révélant Lui-même à lui, et lui donnant les promesses, il lui révéla d'autres choses qui ne le concernaient pas, lui Abraham; il lui donna non seulement la seconde promesse: «J'ai donné ce pays à ta postérité»; mais il lui parla de ses desseins à l'égard de Sodome (Genèse 18: 16-23; 15: 18). Il en est de même pour le chrétien; il est entièrement en dehors de la scène du jugement. Il participe sans doute, tandis qu'il marche ici-bas, au jugement présent du mal, sous la forme de discipline pour son profit, mais quand Dieu lui parle de jugement, prophétiquement, ce jugement se rapporte toujours à d'autres personnes qu'à lui-même. Enoch marcha avec Dieu, et eut le secret de Dieu à l'égard des jugements qui devaient tomber sur le monde. «Voici, le Seigneur vient avec ses saintes myriades pour exécuter le jugement, etc.» (Jude 15). Mais Enoch ne supposa pas que ce jugement tomberait sur lui: il fut retiré de la scène sur laquelle le jugement devait être exécuté; et, comme je viens de le dire, il en est de même pour l'Eglise: les terribles jugements qui procèdent du trône ne la touchent pas, quoiqu'elle soit appelée le vase du témoignage à l'égard de ce qui doit arriver et qu'elle doive intercéder, comme il en fut d'Abraham. Dieu dit: «Cacherai-je à Abraham ce que je m'en vais faire?». Puis quand Abraham a la connaissance de ce que Dieu va faire, il est comme un sacrificateur dans la présence de Dieu, et il intercède pour Sodome. Telle est aussi, dans un sens plus élevé, la position de l'Eglise: «Nous avons la pensée du Christ»; et c'est dans ce sens que le chrétien est un prophète: il a la pensée de Christ; il est aussi un sacrificateur, car il a l'esprit d'intercession; il est encore serviteur, pour porter l'Evangile aux pécheurs, et il régnera quand Christ régnera. L'Eglise, ayant reçu grâce, par la croix de Christ, est, dans le temps présent, le messager de la grâce auprès de ceux qui s'en vont périr.

Mais revenons à notre sujet: Quand Dieu commence à manifester ses desseins, il faut que Christ entre sur la scène, car non seulement il a droit à toutes choses en vertu d'un droit divin, mais il est aussi héritier de toutes choses par le décret de Dieu. C'est pourquoi, quand il s'agit de la rédemption de la possession acquise, de la délivrance de l'héritage d'entre les mains de l'usurpateur, par des jugements, l'Ecriture nous présente le livre des conseils de Dieu, comme l'acte de transmission de l'héritage au vrai Héritier, à Celui qui a acquis son droit à l'héritage par l'oeuvre qu'il a accomplie. C'est pourquoi aussi, quand ce livre des conseils de Dieu apparaît, le Fils aussi, qu'«il a établi héritier de toutes choses» (Hébreux 1: 2) entre sur la scène. Les Juifs avaient la coutume (comparez Jérémie 32: 11), quand il s'agissait de transmission de propriété, d'avoir deux livres, l'un ouvert, dans lequel se trouvaient les actes ou titres, et un autre scellé, qu'on gardait en réserve, afin de prévenir toute erreur: et ce livre que Dieu plaça dans la main de l'Agneau était un livre scellé, «scellé de sept sceaux».

«Et je vis un ange fort proclamant à haute voix: Qui est digne d'ouvrir le livre et d'en rompre les sceaux?… Et moi je pleurais fort, parce que nul n'était trouvé digne d'ouvrir le livre, ni de le regarder» (versets 2-4). L'âme du prophète n'était pas préoccupée de la manière dont Dieu accomplirait ses desseins, car quand le coeur est près de Dieu, il ne cherche pas indiscrètement à pénétrer dans ce que Dieu lui cache, ce serait pécher; mais quand Dieu a des desseins qu'il veut nous révéler, ce serait un sujet de peine pour nous que de ne pas les connaître. Mais quelqu'un dira peut-être: sans doute le salut est une matière d'une importance capitale, mais n'est-il pas assuré? Oui, il est assuré; et s'il ne l'était pas encore pour quelqu'un, c'est lui, ce salut, qui doit être la première préoccupation. Mais une fois que je suis enfant, j'ai à coeur les intérêts de la famille, et aussi lorsque ce qui concerne le Premier-né est révélé je m'y intéresse, parce que mes affections sont réveillées par Lui. Il y a en effet des afflictions qui découlent de la relation elle-même dans laquelle on se trouve, comme il y en a qui découlent du fait qu'on est sauvé. S'occuper de la prophétie, avant que la grande question du salut soit réglée entre l'âme et Dieu, n'est que vaine curiosité; mais quand la conscience est en paix avec Dieu, les affections qui découlent des nouvelles relations dans lesquelles l'âme est placée, ont leur libre essor. Ces affections découlent de la relation elle-même, quel que soit le degré de la réalisation de celle-ci dans l'âme, dès que l'âme s'y trouve réellement placée, et avant qu'elle ait la connaissance de sa position. Il y a des personnes qui ont le coeur réellement tourné vers Dieu, sans qu'elles jouissent d'une paix bien établie. Job disait à Dieu: «Voici, qu'il me tue, je ne laisserai pas d'espérer en Lui» (Job 13: 15). Dieu, brisant sa volonté, l'éprouvait, l'humiliait, afin de lui apprendre ce qu'il était. Job avait pleine confiance en Dieu quoique son âme ne connût pas la vraie paix. Son coeur était tourné vers Dieu, et quand son âme trouva la paix, les affections du coeur, retenues jusque-là, s'épanchèrent, car je n'entends pas dire qu'il n'y ait pas d'affections jusqu'à ce que l'âme jouisse de la paix. Mais quand la question du salut est vidée, les affections ont libre cours et l'âme en paix est ouverte pour apprendre, dans la communion avec Dieu, tout ce que Dieu s'est proposé de faire et qu'il va accomplir.

«Et l'un des anciens me dit: Ne pleure pas» (verset 5). On ne peut qu'être frappé de voir à quel point ces 24 anciens occupent la place qui appartient à l'Eglise auprès de Dieu — et combien leur culte est un culte intelligent. Ils sont toujours ceux qui sont les vases de la connaissance: ils ont été faits «rois et sacrificateurs». L'Eglise a une connaissance d'un ordre bien plus élevé que celle des prophètes qui introduisaient leurs messages par un: «Ainsi a dit l'Eternel». Les prophètes délivraient ce que le Seigneur leur avait communiqué, et, après l'avoir délivré, ils avaient eux-mêmes à en sonder le sens et la portée: «Il leur fut révélé, dit Pierre, que ce n'était pas pour eux-mêmes qu'ils administraient ces choses qui vous sont maintenant annoncées» (1 Pierre 1: 12). Et ainsi Jean, qui apparaît ici sous le caractère de prophète, n'a pas le même degré d'intelligence que les anciens, dans ce qu'il révélait: il a tout juste la lumière que Dieu donnait dans ce moment-là, — tout juste ce qui lui était nécessaire pour la délivrance de son message, et rien de plus. Mais maintenant que le Saint Esprit est venu et que la pleine révélation de la pensée de Dieu a été donnée dans la parole écrite, l'Eglise, comme telle, ayant «la pensée de Christ», non seulement connaît le message, mais a l'intelligence de la pensée de Christ au sujet de ce qui est révélé (comparez 1 Corinthiens 2).

Jean ne voit personne ni dans le ciel, ni sur la terre, ni sous la terre, qui soit digne d'ouvrir le livre ni de le regarder, et, on le comprend trop bien, il «pleura fort». Mais les anciens autour du trône? Pleurent-ils? Sont-ils troublés? — Les éclairs et les tonnerres les avaient laissés en parfait repos — et ici encore d'une voix sereine et calme nous entendons l'un d'entr'eux disant: «Ne pleure pas». Pouvaient-ils douter que Christ fût établi héritier de toutes choses? — Non seulement ils en avaient la glorieuse certitude, mais ils connaissaient Christ comme «le Lion de la tribu de Juda», comme celui qui avait toute puissance pour prendre possession de l'héritage. Les anciens savaient ce que c'était que la rédemption, et par conséquent ils avaient la parfaite et paisible assurance que ce «Lion» avait toute puissance pour ouvrir le livre et ses sept sceaux, pour révéler et accomplir les conseils de Dieu et pour porter le poids de cette gloire. Les deux choses qui appartiennent tout particulièrement à Christ, sont la puissance et la sagesse: «Christ, la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu» (1 Corinthiens 1: 24); et Christ fait participer l'Eglise à sa sagesse: «Il nous a été fait sagesse…» (1 Corinthiens 1: 30), — et il la fera participer à son pouvoir. N'est-ce pas là ce que nous présente, en type, l'histoire de Joseph? Quand Joseph est en prison, Dieu lui donne de la sagesse pour interpréter les songes; plus tard, nous le trouvons, à la droite du trône du roi, exerçant tout pouvoir. L'Eglise partagera le pouvoir avec Christ, car elle régnera avec Lui et elle partagera tout avec Lui, la gloire personnelle de la divinité exceptée; mais le temps de cette participation au pouvoir n'est pas encore venu pour l'Eglise, car je ne parle pas ici de la puissance spirituelle pour remporter la victoire sur le mal. Le temps présent est le temps où l'Eglise est appelée à manifester la sagesse dans l'intelligence des voies de Dieu: elle a le Saint Esprit dont le Seigneur a dit: «Quand celui-là, l'Esprit de vérité, sera venu, il vous conduira dans toute la vérité» (Jean 16: 13), mais l'Esprit agit par la Parole écrite, car la Parole écrite est le seul dépôt de la vérité de Dieu: c'est pourquoi l'Ecriture est le grand instrument dont Dieu se sert pour la communication de cette vérité, par l'enseignement de l'Esprit saint, quoique en même temps Dieu puisse trouver bon de se servir de différents canaux pour répandre ce qui est ainsi communiqué.

«Voici, le lion qui est de la tribu de Juda, la racine de David a vaincu…». Là où les désirs du coeur sont formés par la pensée de Dieu, Dieu ne peut que satisfaire ces désirs. Si même ils sont exprimés par des pleurs, ils rencontrent infailliblement un: «Ne pleure pas», car Christ a accompli ce qui permet à la pensée de Dieu d'être communiquée à toute âme qui a soif. Jusque-là cette communication n'était pas possible, comme Christ le dit Lui-même «Bienheureux sont ceux qui voient ce que vous voyez! Car je vous dis que plusieurs prophètes et plusieurs rois ont désiré de voir les choses que vous voyez etc.» (Luc 10: 23, 24). Dès que l'oeuvre de la rédemption fut accomplie, Jésus s'assit à la droite de Dieu, le Saint Esprit fut envoyé sur la terre en témoignage de l'acceptation de l'oeuvre et de la personne de l'homme ressuscité qui était maintenant dans la gloire. C'est pourquoi partout où maintenant il y a un désir dans le coeur, selon Dieu, Dieu répond à ce désir et y satisfait dans la puissance de l'Esprit, car si Christ est révélé, la pensée de Dieu est aussi que «nous croissions en toutes choses jusqu'à Lui qui est le Chef, le Christ» (Ephésiens 4: 15); mais il faut un coeur humble pour la recevoir, car: «Il fera marcher dans la justice les humbles, et il leur enseignera sa voie» (Psaumes 25: 9).

«Voici, le lion qui est de la tribu de Juda, la racine de David». Juda était celui en qui les promesses avaient leur centre: Quand Jacob bénit ses fils, il dit: «Juda, quant à toi, tes frères te loueront» (Genèse 49: 8). La promesse générale, au commencement (Genèse 3: 15), était que la semence de la femme briserait la tête du serpent. Plus tard toutes les promesses furent dévolues à la semence d'Abraham: «En ta semence seront bénies toutes les nations de la terre» (Genèse 22: 18). Le cercle devint toujours plus étroit: Juda fut choisi au milieu de ses frères, et après, la famille de David, comme il est dit du Sauveur: «Et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père» (Luc 1: 32). Ce trône n'est pas un trône dans le ciel pour dominer sur la création, mais un trône sur la terre pour gouverner la terre. «Quand le Souverain partageait les nations, quand il séparait les enfants des hommes les uns des autres, il établit les bornes des peuples, selon le nombre des enfants d'Israël» (Deutéronome 32: 8).

Christ est appelé «le lion de la tribu de Juda», parce que c'est par puissance qu'il accomplira les conseils de Dieu. Il est aussi «la racine de David». Si nous considérons David comme type, et comme homme responsable, il a failli, et sa famille a fait comme lui; et l'homme a fait de même toutes les fois que Dieu l'a mis à l'épreuve dans une position qui dépendait de sa responsabilité. Mais Dieu ne peut pas faillir, et il faut qu'il suscite une semence à David selon sa promesse. A la fin de l'Apocalypse il est parlé de Christ comme de «la racine» et de «la postérité» «de David», mais avant qu'il puisse être manifesté comme étant «la postérité», il faut qu'il soit démontré «la racine»; car il est la racine et la source de toutes les promesses de Dieu: en Lui elles sont toutes «oui et amen», soit qu'il s'agisse de l'Eglise, ou d'Israël. Si David porte un fruit de bénédiction, il n'est cependant pas la racine, quoiqu'il puisse être le tronc: s'il porte du fruit, ce ne peut être que par Celui qui est «la racine».

«Et je vis au milieu du trône et des quatre animaux et au milieu des anciens, un agneau qui se tenait là, comme immolé». Le Seigneur apparaît ici avec les marques de son humiliation: «comme un agneau mené à la boucherie; comme une brebis muette devant Celui qui la tond, il n'a point ouvert sa bouche» (Esaïe 53: 7). Il revêt un caractère dispensationnel de la rédemption: il est «l'Agneau, qui est comme immolé»; il apparaît dans ce caractère d'humilité, de soumission, dans lequel il a souffert dans un monde de pécheurs; et là, se trouve le secret de la vraie puissance. Nous aussi, maintenant, nous habitons dans un monde où le mal règne, et nous sommes appelés à souffrir comme Christ a souffert, nous sommes appelés à savoir discerner ce qui est bien et ce qui est mal, et à souffrir plutôt que de céder un moment au péché.

Quoique l'Agneau soit un agneau souffrant par rapport à la terre, sa vraie place est toutefois sur le trône lui-même. Christ remplit toutes choses! Si je descends dans «les parties les plus basses de la terre» je l'y trouve; si je monte jusqu'au trône des cieux, je l'y trouve encore, et non seulement comme Dieu, mais comme Celui qui s'occupe du bien et du mal. Et qui est plus près de nous que Lui? Il a été au milieu de nous comme Celui qui sert, et Lui qui a lavé les pieds de ses disciples ne cesse pas de les servir, quoiqu'il n'ait pas pu demeurer avec eux sur la terre, il les sert néanmoins; et il viendra même encore, «et s'avançant, il les servira» (Jean 13: 1 et suivants; Luc 22: 27; 12: 37). Celui qui était un avec le Père, à qui, comme Fils, Dieu avait remis toutes choses, s'est anéanti Lui-même pour être le Serviteur! Depuis les hauts cieux jusqu'au plus bas de la terre, il n'y a rien qui ne soit rempli de la gloire du Seigneur, le Christ Jésus, excepté, hélas! le coeur misérable et vide d'un pécheur incrédule; il n'est pas un lieu, depuis le Calvaire jusqu'au trône de Dieu, qui ne soit rempli de l'amour et de la justice de Dieu; tels qu'ils ont été manifestés en Christ; et si nos coeurs savaient se reposer, sur cette précieuse, toujours puissante et glorieuse vérité, de quelle paix ne seraient-ils pas continuellement remplis? La paix de Dieu Lui-même nous garderait, car nous ne pourrions rencontrer ni lieu, ni circonstance, ni chagrin, ni souffrance, sans que nous y trouvions Christ, et si Christ est entre nous et la souffrance au lieu que la souffrance vienne se placer entre nous et Christ, nous reconnaîtrons que la souffrance qui nous enveloppe est, sur toute la surface de la terre, la meilleure place pour nous, parce que toute souffrance, ainsi, nous rapprochera de Christ. Il n'y a pas de place intermédiaire: «les corps des bêtes dont le sang était porté par le souverain sacrificateur dans les lieux saints pour le péché, sont brûlés hors du camp» (Hébreux 13: 11-13), et si nous voulons jouir du sanctuaire dans le ciel intérieurement, il faut que au dehors nous portions la croix. Dieu était caché derrière un voile pour Israël, mais nous, nous avons «la liberté d'entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus»; en Christ, le voile est déchiré, et dans le ciel nous avons le trône et le temple pour part; — ici-bas la croix et l'Agneau. Ceux qui sont unis dans une céleste association à un Christ ressuscité doivent porter ici-bas l'opprobre d'un Christ crucifié et rejeté; la croix est leur part, parce qu'ils sont vivants et rendus agréables au dedans du voile. Tout ce qu'il y a de précieux est renfermé là. L'Eglise apprend à voir le péché comme Dieu le voit; elle est amenée dans la lumière comme Dieu est dans la lumière; et purifiée du péché, elle est introduite dans le sanctuaire au travers du voile déchiré. Nous sommes séparés de la terre, si ce n'est pour autant que (comme Israël au désert) nous y sommes étrangers et pèlerins et dans la mesure selon laquelle, pratiquement, nous connaîtrons la croix ici-bas, nous jouirons de la communion de Christ là-haut dans les lieux célestes. La lumière remplit tout entre la croix et la gloire, nous ne pouvons nous trouver nulle part sans que nous y trouvions Christ, car pour la foi simple, pour la foi qui a l'oeil net, il n'y a pas de lieu possible entre la croix et la gloire, ou sur la terre, ou dans le ciel, qui ne soit rempli de Christ.

Quand la connaissance de ces choses est donnée à Jean, il voit «un Agneau comme immolé», et le pouvoir est donné à cet Agneau, car «les sept cornes et les sept yeux» sont la figure de la perfection de la puissance et de l'omniscience qui appartiennent à l'Agneau, avant qu'un seul sceau du livre soit ouvert. Avant le développement des desseins de Dieu, la personne du Fils nous est présentée: il en est précisément ainsi dans les voies de Dieu envers une âme, quand l'oeil de l'âme vient à être fixé sur la personne de Christ, l'âme trouve la paix, comme avant qu'elle puisse trouver cette paix par l'oeuvre de Christ, il faut qu'elle ait tourné ses regards vers la personne de Christ. Ainsi il en a été pour le brigand sur la croix, pour «la femme de la ville qui était une pécheresse» et qui pleurait aux pieds de Jésus. Il faut que le regard soit fixé d'abord sur la personne de Celui «qui a fait la paix», avant que l'âme puisse jouir de la connaissance de l'oeuvre qui a fait la paix. Avant tout et après tout, c'est Lui-même qui est présenté.

Nul ne pouvait ouvrir la livre, même le regarder, avant que l'Agneau, si je peux parler ainsi, n'eût illuminé ses yeux. Là est le secret qui donne de la paix et de l'assurance à l'âme dans l'étude de la prophétie; car si nous nous occupons de la prophétie sans Christ, nous pourrons bien peut-être la comprendre, mais elle ne sera pour nous qu'un nouvel ornement de notre esprit profane. Si au contraire nous étudions la prophétie avec Christ, il en sera Lui-même la clef, car s'il est le centre de la gloire qui est prête à être révélée, il en est aussi la clef, et ainsi avec Christ, l'étude de la prophétie sera pour la gloire de Dieu.

«Un agneau qui se tenait là comme immolé, ayant sept cornes, et sept yeux». Il est dit sept et non pas dix ou douze. Le nombre «sept» est l'expression de quelque chose de spirituellement complet: le nombre douze, l'expression de la perfection humaine dans sa puissance administrative; il y a eu douze apôtres, douze patriarches. Les «sept yeux» sont cette sagesse qui voit toutes choses; les «sept cornes» sont l'expression de la puissance. Une «corne» dans l'Ecriture est toujours, comme figure, le symbole de la puissance, qu'il s'agisse d'une personne ou d'un royaume. L'Agneau avait «sept cornes». Il avait aussi «sept yeux»; ou, comme nous venons de le dire, cette sagesse parfaite qui voit toutes choses et qui prend connaissance de toutes choses. La parfaite harmonie des Ecritures, apparaît ici de nouveau pour témoigner (si cela était nécessaire) de la divinité de ces Ecritures. Quelle intelligence humaine eût su sauvegarder et maintenir cette unité et cette harmonie entre des passages écrits à 2000 ans de distance? Mais Dieu est le véritable Auteur des Saintes Ecritures et sa pensée les remplit d'un bout à l'autre. «Les yeux du Seigneur, disent-elles (2 Chroniques 16: 9), regardent çà et là par toute la terre, afin qu'il se montre puissant en faveur de ceux qui sont d'un coeur intègre envers lui». Confiez-vous dans le Seigneur, et appuyez-vous sur Lui en toutes choses, faites tranquillement sa volonté, et il se montrera puissant en votre faveur. Ailleurs nous lisons: «Sur cette pierre qui n'est qu'une, il y a sept yeux»; cette pierre était la figure de l'établissement de l'autorité de Dieu à Jérusalem; et puis: «les yeux de l'Eternel qui vont çà et là par toute la terre, se réjouiront et verront la pierre du niveau en la main de l'Eternel» (Zacharie 3: 9; 4: 10). A côté de la vérité, générale de ce gouvernement providentiel de Dieu, nous voyons que, dans un temps futur, quand le vrai «Germe» est introduit, la perfection sera établie dans Jérusalem comme centre de la paix et de la bénédiction: les «sept yeux» seront là et se réjouiront. En attendant Dieu s'occupe de la terre, prenant connaissance de tout, et manifestant sa puissance en gouvernant toutes choses. Mais pour nous, notre position est de souffrir avec Christ, non pas de régner: «Si nous souffrons avec Lui, nous régnerons aussi avec Lui» (Romains 8: 17). Ici, dans l'Apocalypse, les yeux de Dieu sont au milieu du trône dans le ciel; il n'est pas question du Père et des enfants, ni de Christ comme le Chef du corps et de ses membres, mais l'Agneau rejeté est assis sur le trône du jugement dans le ciel; il n'a pas encore pris possession de son trône terrestre, mais il est assis sur le trône du jugement «placé dans le ciel», ayant les yeux de la sagesse et de l'intelligence pour dérouler le livre des conseils de Dieu.

La personne de l'Agneau ayant été placée devant nos yeux, nous voyons maintenant l'Agneau prenant le livre. Avec quelle parfaite paix et quelle plénitude de puissance (car la toute-puissance est toujours calme et paisible) il prend le livre des conseils de Dieu pour le dérouler et l'accomplir! Quelle différence entre l'Agneau ici au milieu du trône, et l'Agneau quand, pour l'accomplissement des conseils de la grâce, il passe par cette heure terrible dont la seule pensée remplissait son âme de trouble et d'angoisse. «Maintenant mon âme est troublée, et que désiré-je…» (Jean 12: 27)? «Mon âme est, de toute part, saisie de tristesse jusqu'à la mort» (Matthieu 26: 38). Tous les flots de la colère de Dieu passèrent sur Lui pour notre pleine, parfaite et éternelle bénédiction. Le même Agneau, qui est ici au milieu du trône, a bu jusqu'à la lie la coupe de la colère, afin qu'il n'en restât pas une goutte de tourment ou de souffrance pour ceux qui le connaissent: Lui qui est l'Agneau immolé et en même temps la sagesse de Dieu et la puissance de Dieu, il a pu ainsi prendre le livre et dérouler et accomplir tous les profonds desseins qu'il renfermait.

«Et lorsqu'il eut pris le livre, les quatre animaux et les vingt-quatre anciens tombèrent sur leurs faces; et ils chantent un cantique nouveau, disant: Tu es digne de prendre le livre et d'en ouvrir les sceaux…» (versets 8-10). Nous retrouvons ici ceux qui sont «rois et sacrificateurs» pour Dieu; ils chantent un nouveau cantique, non plus la gloire du Dieu Créateur, mais les louanges du Dieu Rédempteur, car l'Agneau immolé est au milieu du trône. Si, au chapitre 4, la gloire du Seigneur Dieu le Tout-puissant a produit l'adoration, la gloire de l'Agneau rédempteur a ici la même puissance si la manifestation de la majesté de Dieu a produit un culte sans frayeur, ainsi ici les mêmes personnes qui ont célébré sa gloire, tombent sur leurs faces devant l'Agneau, la manifestation de sa gloire réveille les affections et les pensées de leurs coeurs. Celui qui est descendu si bas pour nous est l'objet de toutes les pensées et de toutes les affections du ciel; et s'il nous a faits rois et sacrificateurs, nous avons communion avec la pensée du ciel, maintenant déjà; et ce fait se lie de la manière la plus immédiate à notre vie de tous les jours. Si j'étais Juif, j'aurais besoin d'un prêtre; mais je suis chrétien et je ne pourrais jamais si fort méconnaître la rédemption, que de penser que j'aie besoin d'un prêtre, car moi je suis prêtre ou sacrificateur, et nous avons un grand Souverain Sacrificateur «élevé plus haut que les cieux» (Hébreux 7: 26), en sorte que nous allons directement au trône de grâce (Hébreux 4: 14-16), car par Lui, nous avons accès auprès du Père par un seul Esprit (Ephésiens 2: 18). Si nous avons trouvé Christ, nous avons trouvé Dieu, — et n'oublions jamais cette grande et précieuse vérité, que nous avons été amenés à Dieu (1 Pierre 3: 18). Si nous permettons à quoi que ce soit, en dehors de Christ, de s'élever entre notre âme et Dieu, la gloire de Dieu sera obscurcie pour nos yeux. Christ est le grand Souverain Sacrificateur, et puisque Lui entre dans le lieu très-saint lui-même, nous y entrons; en sorte que nous sommes plus que de simples sacrificateurs qui ne pouvaient jamais dépasser le lieu saint: Nous avons une pleine liberté pour entrer dans les lieux saints, parce que Jésus y est; et si nos coeurs ne vont pas ainsi droit à Dieu en témoignage de la valeur du sang de Jésus, nous ravalons l'efficacité de l'oeuvre de Jésus (comparez Hébreux 10: 19-22). Autour du trône où est assis l'Agneau, tout est adoration, adoration de coeurs libres. Un enfant est sur un pied de liberté avec son père; il respecte son père, mais son coeur est libre et ouvert devant lui, sans crainte ni tremblement à l'égard de ce qui lui plaira. Il devrait en être de même dans nos relations avec Dieu: son amour est aussi parfait que sa gloire; — s'il nous approche de Lui pour que nous l'adorions, il approchera nos coeurs de lui dans la confiance de l'amour qui nous a amenés à Lui.

L'intelligence des anciens apparaît ici comme au chapitre précédent; leur culte est vrai et intelligent: «Tu es digne de prendre le livre, disent-ils, car tu as été immolé et tu nous as achetés pour Dieu par ton sang». A côté de la gloire de Christ comme Créateur, comme homme, comme Fils de Dieu, nous trouvons ici, dès que «l'Agneau immolé» parait sur la scène, la gloire du Rédempteur. La rédemption éveille de nouvelles louanges; c'est elle qui manifeste tout ce que Dieu est. Si je pense à la sainteté de Dieu, qui ne peut pas supporter le péché, je la vois glorifiée dans la rédemption; si c'est l'amour pour les pécheurs qui me préoccupe, n'est-ce pas la rédemption qui en est la plus complète et parfaite expression? Si je considère la justice qui doit punir le péché, elle est apparue là encore. Dieu est glorifié dans ce livre, et dans son amour et dans sa sainteté, dans sa majesté, dans sa grâce, dans son jugement contre le péché: — Dieu répond à tout, a triomphé de tout, a tout mis en lumière dans cette grande oeuvre de la rédemption. Le Fils aussi y est glorifié pareillement, car si Adam n'avait jamais péché en mangeant le fruit défendu, Adam eût continué à vivre dans l'innocence, mais qu'eût été son obéissance en comparaison de l'obéissance de Christ, de cette obéissance jusqu'à la mort, à la mort même de la croix? Et le dévouement absolu de Christ, n'est-ce pas la rédemption qui nous le dit? — Dieu a été glorifié en Lui! «Maintenant le Fils de l'homme est glorifié, et Dieu est glorifié en Lui» (Jean 13: 31)! Toutes les différentes gloires de Christ sont manifestées dans la rédemption (comp. Jean 12). Combien les pensées de Dieu sont plus élevées que nos pensées (comp. Psaumes 40: 5)! Elles confondent toutes les pensées de l'homme; car quand les hommes disaient: «Aha! aha!» — et nous étions de ces hommes, — et quand l'inimitié des hommes contre le Fils de Dieu était manifestée en ce qu'ils le mettaient en croix, à ce moment-là, l'amour de Dieu a été à son comble: l'homme insultait Christ et le poursuivait de sa haine implacable, mais Dieu, à ce moment-là, accomplissait le salut, son amour s'élevait au-dessus de l'iniquité de l'homme sans rabaisser dans la plus petite mesure l'absolu de la sainteté divine; le péché était porté à son comble dans la crucifixion de Christ, mais il n'a fait que rehausser et donner un plus libre cours à cet amour divin qui à ce même moment sauvait des pécheurs perdus.

Ainsi, si nous avons pu voir le caractère du Lion de la tribu de Juda sauvegardé et maintenu dans toute son intégrité, Dieu n'abandonnant pas un iota de sa justice ou de sa sainteté, nous pouvons en même temps admirer et adorer la merveilleuse sagesse qui, par la réjection même du Lion de la tribu de Juda, amenait à Lui de pauvres pécheurs d'entre les Gentils. Les dons et la vocation de Dieu sont sans repentir, c'est pourquoi Israël sera rétabli, selon sa parole; mais Dieu, en attendant, ouvre le ciel au Juif et au Gentil; il n'ôte pas au Lion de la tribu de Juda la gloire qui lui appartient d'être la source future de la bénédiction pour Israël, mais il appelle toutes les familles de la terre à le célébrer comme Rédempteur. «Et tu les as faits rois et sacrificateurs pour notre Dieu, et ils régneront sur la terre» (verset 10)! Ils sont faits «rois» et «sacrificateurs »: ils n'ont pas seulement la joie d'être avec Dieu, comme nous avons vu, mais ils ont aussi la première place auprès de Dieu en puissance et dans l'adoration. Si la royauté place les saints dans la plus étroite proximité de Dieu en puissance, et que la sacrificature les place dans cette même proximité pour l'adoration, c'est la personne bénie du Christ — l'Agneau immolé — qui amène de pauvres pécheurs à de si précieux et glorieux privilèges, car Christ étant fait Roi et Sacrificateur, nous aussi nous sommes faits rois et sacrificateurs. Tout ce que Christ a été fait, nous le sommes faits, en Lui maintenant, au jour de la grâce, et avec Lui bientôt, au jour de la gloire. Nous jouissons déjà maintenant de ces choses dans nos âmes quand nous nous tenons, près de Dieu, mais nous sommes encore, par nos corps de péché et de mort, liés à la vieille création, et ainsi nous soupirons étant chargés (2 Corinthiens 5: 1-4): la présence du mal nous fait gémir. Mais quand le trône sera placé dans le ciel, ce sera pour délivrer tout ce qui est maintenant dans la servitude de la corruption, et pour l'introduire dans la glorieuse liberté des enfants de Dieu — dans la liberté, non pas de la grâce, mais de la gloire (Romains 8: 17 et suivants). Maintenant, les âmes de ceux qui croient sont amenées à la liberté de la grâce; dans la gloire, nous serons délivrés du corps dans lequel nous soupirons. La puissance du Saint Esprit nous soutient maintenant contre les flots du mal, mais alors l'exercice de la puissance divine ôtera le mal, le Seigneur régnera. Si le Seigneur gouvernait maintenant d'une manière immédiate et directe, la misère et la corruption qui nous entourent de toute part, subsisteraient-elles? Sans doute Dieu règne en un certain sens, maintenant, et d'une manière tout particulièrement précieuse pour ses enfants, car les cheveux mêmes de nos têtes sont comptés; cependant, comme il est écrit: «Un même accident arrive à tous, au sage comme au fou» (Ecclésiaste 2: 14, 15). Mais quand Christ vient en puissance prendre les rênes du gouvernement de toutes choses comme Fils de l'homme, il distingue entre le juste et l'injuste, entre le mal et le bien: alors le méchant ne prospérera pas. Le soleil de grâce s'est levé dans nos coeurs et il est donné au juste, maintenant, de souffrir pour Christ; mais quand le soleil de justice se lèvera sur la terre, quand la puissance interviendra directement, alors un homme sera un abri contre la tempête (comparez Esaïe 32: 2). Maintenant l'homme ne sait pas où trouver un refuge, «les lieux ténébreux de la terre sont remplis de cabanes de violence» (Psaumes 74: 20); mais alors la terre se réjouira du fruit du règne de Christ. Maintenant nous sommes appelés à souffrir avec Christ, alors nous régnerons avec Lui (Romains 8: 17; 2 Timothée 2: 12; 1 Pierre 2: 19-21; Hébreux 11: 34-36 et suivants). Quand «les cieux régneront», alors les saints du Souverain prendront le royaume et régneront avec Christ. Nous n'aurons pas Christ pour régner sur nous, mais nous régnerons avec Lui; notre joie sera en Christ et avec Christ, mais notre position officielle sera de régner avec Lui.

«Et je vis et j'entendis la voix de beaucoup d'anges autour du trône et des animaux et des anciens, disant à haute voix: Digne est l'Agneau qui a été immolé» (versets 11, 12). Nous ne retrouvons pas dans les anges la même intelligence que nous avons vue dans les anciens. Les anges célèbrent la gloire et l'honneur de l'Agneau, mais nous ne les entendons pas, comme les anciens, motiver leurs louanges: ceux-ci en relation avec la création, disant d'abord: «Tu es digne… CAR tu as créé toutes choses»; et puis, en relation avec la rédemption: «Tu es digne…, CAR tu as été immolé et tu nous as achetés pour Dieu». L'Eglise est bien plus rapprochée de Dieu que les anges, car elle est une avec Christ et nos corps sont les temples du Saint Esprit, ce qui ne peut jamais être dit d'un ange, quoique les anges soient infiniment au-dessus de nous comme créatures, excellant en puissance et qui font son commandement en obéissant à la voix de sa parole» (Psaumes 103: 20). Christ ne mourut jamais pour un ange, c'est pourquoi il ne prit pas la nature d'un ange, mais il fut fait homme pour des pécheurs (Hébreux 2: 16, 17); il n'envoya pas non plus le Saint Esprit à des anges, et quoiqu'ils excellent en force et soient plus élevés que nous en puissance, qu'est-ce que toute cette puissance en comparaison de la manifestation de la grâce de Christ à un pécheur? C'est dans la rédemption que Dieu est parfaitement glorifié; c'est pourquoi ce sont les rachetés auxquels Dieu donne la place la plus rapprochée de Lui, car en eux la rédemption est manifestée. Quelle grâce merveilleuse que celle qui a pu prendre de vils pécheurs dépravés, tels que nous sommes, et les placer plus près du trône que ces saintes créatures qui n'ont jamais péché et qui obéissent toujours à sa voix, «afin qu'il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans le Christ Jésus» (Ephésiens 2: 7)! Est-ce que nos coeurs ne devraient pas être touchés par une telle grâce? Jamais nous ne pourrons comprendre la bonté de Dieu, si nous ne connaissons pas la valeur de la rédemption: les affections découlent de cette connaissance, et l'adoration en sera la conséquence. Le bégaiement d'un enfant est acceptable, mais nous devrions être capables de dire à un ange ce que Christ a fait pour nous et pourquoi il est si précieux pour nous. Nous serons associés avec Lui dans la présence même de Dieu; les anges seront tout autour du trône; ils savent ce que sont la puissance et la louange, car ils les rendent à Celui qui est assis sur le trône; ils voient la gloire de la personne de l'Agneau, mais ils ne savent rien de la rédemption; ce mot jamais ne passe par leurs lèvres. Tout a sa place dans les conseils de Dieu!

Au verset 13, toutes les créatures et toute la création se joignent au choeur universel, donnant louange, honneur, gloire et force à Celui qui est assis sur le trône et à l'Agneau. Ils sont en relation éternelle avec cette gloire divine; ils n'adorent pas seulement Christ comme Dieu, mais comme l'Agneau. Il est «Dieu sur toutes choses», certainement; mais il revêt une gloire particulière comme Fils de l'homme, et cette gloire particulière que Christ a acquise par la rédemption, ne sera jamais effacée. Comme «l'Agneau», il la possédera toujours: louange à l'Agneau au siècle des siècles! Celui-là même que nous avons aimé, que nous avons vu des yeux de la foi, que nous avons touché comme Parole de vie, sera l'objet d'une adoration incessante et éternelle!

Nous apprenons quels sont les conseils et les pensées de Dieu à notre égard, quand nous voyons les rois et sacrificateurs dans la gloire éternelle: le privilège de l'Eglise, c'est qu'elle rend culte. Tels sont les conseils de Dieu envers nous; l'Eglise est si entièrement identifiée avec Christ que, lorsque Dieu va intervenir en jugement pour Christ, elle a sa place avec Lui dans le ciel. Si elle est son corps, l'épouse, il ne peut pas la laisser en arrière, elle qui est la plénitude de Celui qui remplit tout en tous. Le livre n'est pas ouvert, on n'entend pas les voix et les éclairs du jugement qui va tomber sur le monde, avant que nous soyons en parfaite paix autour du trône devant l'Agneau, rois et sacrificateurs pour Dieu, louant le Rédempteur, célébrant l'oeuvre glorieuse de la rédemption; et tandis que le flot montant du jugement détruit tout devant lui, et comme le déluge s'élève jusqu'aux plus hautes montagnes pour les couvrir et ôter tout lieu de salut, ceux qui sont «rois et sacrificateurs» chantent la gloire de cette rédemption qui les a délivrés de la colère qui vient.

Que le Seigneur nous donne de trouver dans ces choses qui sont le fruit de la Rédemption, non seulement la paix de l'âme, mais l'intelligence de tous les conseils du Dieu de gloire au sujet de l'Agneau Rédempteur!