Christ le serviteur  (Jean 1: 1-18; 1 Jean 1 – 2: 1-16)

 «Au commencement était la Parole, et la Parole était auprès de Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au commencement auprès de Dieu. Et la Parole fut faite chair, et habita au milieu de nous; et nous vîmes sa gloire, gloire comme d'un Fils unique de la part du Père, pleine de grâce et de vérité» (Jean 1: 1, 2, 14).

«Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, et que nos mains ont touché, de la Parole de la vie, (et la vie a été manifestée, et nous avons vu et nous déclarons et nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée); ce que nous avons vu et entendu nous vous l'annonçons, afin que vous aussi vous ayez communion avec nous; or notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ» (1 Jean 1: 1-4).

Cette manifestation du Fils — «la vie éternelle qui était auprès du Père», venant dans le monde — avait pour but de faire connaître le Père, et de nous introduire avec le Fils dans une même communion avec l Père. Celui qui était «auprès de Dieu» et qui «était Dieu», s'abaissa Lui-même, prenant la forme d'un serviteur, et descendit jusqu'à nous, afin que nous pussions être rendus participants de sa nature. Quant à la manière dont eut lieu la venue de Christ dans le monde, elle fut certainement inattendue. Jean Baptiste avait rendu témoignage de sa grandeur; mais que celui qui était «le resplendissement de la gloire du Père, l'empreinte de sa substance» (Hébreux 1), apparaîtrait sous cette forme si humble, prenant à lui notre chair, on ne pouvait certainement pas s'y attendre.

Il y a plusieurs motifs pour que Jésus revêtît la chair, à part du motif principal de répandre son sang pour la rémission du péché. Comme un grand Prophète, il vint pour nous parler, dans un langage qui nous fût familier, de toutes les grandes choses cachées du Père: Dieu suscita un prophète «semblable à nous», afin, que les mystères du sein du Père nous fussent révélés par des lèvres d'homme. Ensuite Jésus vint pour faire les oeuvres du Père, marchant parmi les fils des hommes dans le seul but de «révéler» Dieu. Il était le pain vivant descendu du ciel — «fait chair», non pas seulement pour qu'il répandit son sang pour la rémission du péché, mais pour communiquer aussi sa propre vie. «Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel: si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement; or le pain que je donnerai, c'est ma chair, laquelle je donnerai pour la vie du monde». — «Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, a la vie éternelle»; — «celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, demeure en moi et moi en lui» (Jean 6: 51, 54, 56).

Ce personnage extraordinaire, révélé à notre foi comme étant le Fils de Dieu, venant du sein du Père, du ciel, — dit constamment en parlant de Lui-même, qu'il n'a aucune relation avec la terre, si ce n'est pour bénir un monde rebelle. Sans cesse il dit n'avoir d'autre but ici-bas que d'accomplir le «sacrifice pour le péché», afin de sauver ceux qui Lui appartiennent, et, comme Celui qui est «envoyé», de révéler ce qui avait été tenu caché jusqu'alors, communiquant en même temps la capacité de connaître et de comprendre le Père. Il venait du ciel pour parler du ciel. — Toujours et toujours il redit ces paroles mystérieuses: «Vous êtes d'en bas (celui qui est de la terre parle des choses de la terre» (Jean 3: 31) «moi je suis d'en haut» (Jean 8: 23). Il ne cessait pas d'être «le Fils de l'homme qui est dans le ciel» (Jean 3: 13) et comme tel, il «révélait» le Père qui est dans le ciel. Il ne parlait de Lui-même que comme étant «l'envoyé» de Dieu, le serviteur du Père. C'était le message qu'il mettait en avant, jamais le messager; toutes ses pensées étaient tournées vers Celui qu'il venait révéler. «Je ne cherche pas ma gloire; il y en a un qui cherche et qui juge» (Jean 8: 50). Jamais il ne se cherchait Lui-même. Comme étant un avec le Père avant que le monde fût, — étant les délices du Père de toute éternité, il venait dans le monde pour parler de ce qui était dès le commencement, — de toute éternité, — pour révéler les secrets du sein du Père qui n'étaient connus que de Lui, et pourtant, il n'était pas autant le messager de la grâce, que la grâce même du message.

Passant ainsi sur la terre, étranger, mystérieux, l'homme naturel ne pouvait le connaître. Ses concitoyens demandaient: «celui-ci n'est-il pas le fils du charpentier?» D'autres disaient: «nous ne savons d'où il est». Mais quelques-uns étaient rendus capables, par l'Esprit de Dieu, de discerner en Lui l'envoyé de Dieu», le Fils unique du Père plein de grâce et de vérité, et il leur a donné le droit d'être enfants de Dieu, savoir à ceux qui croient en son nom; lesquels ne sont nés ni de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu» (Jean 1: 12, 13). — L'oeil qui le voyait, contemplait la gloire; l'oreille qui l'écoutait, entendait parler du ciel; la main qui le touchait saisissait la vie éternelle. Le Fils fut manifesté, afin de communiquer cela même qu'il venait révéler. Il se présentait à la fois au regard, à l'ouïe, au toucher; la vie éternelle était là pour ceux qui voyaient, qui entendaient, qui touchaient cette Parole de vie. Quand le regard du pauvre pécheur, rendu intelligent par la foi, s'arrêtait sur Lui, il recevait la lumière du ciel, la vie même de Celui qu'il avait appris à discerner; quand l'oreille l'écoutait, elle apportait au coeur ce qu'elle avait entendu; quand la main le touchait, une vertu sortait de Lui.

Toutefois en parlant de ces choses, il ne faut pas oublier qu'elles nous sont révélées comme à des pécheurs graciés, la vie éternelle ne pouvant être donnée avant que la culpabilité n'eût été ôtée et que l'on ne possédât une justice parfaite. Avant que le sang n'eût été répandu, les disciples ne pouvaient guère comprendre la portée de ces paroles: «Bienheureux sont vos yeux, car ils voient etc.». — Et que voyaient-ils? «La gloire du Fils unique du Père, pleine de grâce et de vérité», et ce qu'ils voyaient, ce qu'ils entendaient, ce qu'ils touchaient de leurs mains, leur était donné «la vie éternelle qui était dans le sein du Père».

Et venant d'auprès du Père, Jésus n'avait rien à faire avec le monde, ni avec ce qui était du monde. Il était dans le monde, mais il n'était pas du monde. Venu ici-bas pour un peu de temps, chargé d'un message d'amour, il était séparé du monde, de toutes ses maximes, de toutes ses habitudes. Ce n'est pas qu'il ne se mêlât quelquefois à ses scènes bruyantes, mais ses pensées étaient toujours auprès du Père. Il était d'en haut; sa place était la présence du Père. — Bien-aimés, remarquez, je vous prie, ces paroles du Seigneur au sujet des siens: «Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde» (Jean 17). Ce n'est pas un commandement qu'il leur donne, pour qu'ils s'efforcent d'être comme des hommes du ciel; mais il dit: «Ils ne sont pas du monde», par naissance, de fait, ils sont célestes, ils sont nés d'en haut. «Ce qui est né de la chair est chair; ce qui est né de l'Esprit, est esprit» (Jean 3: 6). L'homme à qui ce souffle du ciel a été communiqué, cet homme est devenu un être céleste. Que de fois Jésus a dit aux Juifs: «Je suis d'en haut. Je ne suis pas du monde. Vous ne savez d'où je viens». Il savait d'où il venait et où il allait; les autres ne le savaient pas. Il en est de même des chrétiens. «Voyez quel amour le Père nous a accordé, que nous soyons appelés enfants de Dieu: C'est pourquoi le monde ne nous connaît pas, parce qu'il ne l'a pas connu. Bien-aimés, nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n'a pas encore été manifesté; mais nous savons que lorsqu'il sera manifesté, nous Lui serons semblables, car nous Le verrons comme il est» (1 Jean 3: 1, 2). Nous possédons réellement la vie de Dieu, nous sommes nés d'en haut, et nous y allons, quoique les autres ne le voient pas; et n'est-ce pas là la signification de ce passage: «le vent souffle où il veut, et tu en entends le son, mais tu ne sais d'où il vient, ni où il va; il en est ainsi de tout homme qui est né de l'Esprit» (Jean 3: 8). Nous sommes d'en haut; nous ne sommes plus du monde, pas plus que Christ n'était du monde. Si l'on demande à un chrétien d'où il est, sa réponse devrait être dans le langage de Christ: «Je suis d'en haut». Ce qui est vrai de Christ, est vrai de ceux qui sont à Lui, quoique les autres ne sachent pas discerner d'où ils viennent ni où ils vont. Chers frères, ceci n'est pas simplement une manière de parler, c'est une vérité; ce n'est pas une ombre, c'est quelque chose de réel. Nous ne sommes pas seulement des êtres corrigés — changés — de manière à avoir de meilleures pensées, de meilleurs sentiments; nous sommes «nés de Dieu, fils et filles du Seigneur tout-puissant» (2 Corinthiens 6: 18); et nous sommes véritablement en possession de cette vie qui était au commencement dans le sein du Père. Nous avons une origine céleste, et nous devrions nous en souvenir, quand nous avons affaire à ce monde, au milieu duquel nous nous trouvons.

Que dit Jésus dans le chapitre 17 de l'Evangile de Jean? «Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde» (verset 18). D'où Jésus est-il venu dans le monde? De Nazareth? Non, d'en haut, — du ciel, — du sein du Père. Nous sommes envoyés d'où Lui-même est venu, nous ne sommes pas du monde, comme Lui n'était pas du monde, — nous sommes nés de Dieu; et le service pour lequel nous sommes envoyés, est celui de Christ. Nous avons à servir ici-bas pour un peu de temps, dans l'amour et le renoncement à nous-mêmes, attendant, mes bien-aimés, comme étant venus de Dieu, que le Seigneur vienne nous prendre à Lui, afin d'être toujours avec Lui.

Dans l'épître aux Hébreux, il est fait mention de Melchisédec qui apparaît brusquement, sans que l'on sache d'où il vient, et qui se retire sans que l'on sache où il va. — Personnage entouré de mystère, il vient vers Abraham, épuisé par le combat, et lui donne du pain et du vin qui le restaurent, et après l'avoir béni, il est de nouveau perdu de vue. C'est ainsi que Christ est venu, «n'ayant ni commencement de jours, ni fin de vie» (Hébreux 7: 3); «fait chair», mais Christ est la Parole éternelle, le Fils unique de Dieu. Il est inconnu de tous, sauf des fidèles dont Abraham est le type, quand il reçoit le corps rompu et le sang versé de l'Agneau de Dieu, et que, en payant la dîme, il rend hommage à la fois à la sacrificature et à la royauté.

Ce qu'il faut comme objet à notre coeur, c'est quelqu'un qui connaisse parfaitement le Père, qui connaisse toutes ses pensées, tous ses sentiments, et qui pourtant soit capable de sympathiser avec nous. Unissez un homme venant de Dieu, venant du sanctuaire secret de sa demeure — un avec Dieu — à un autre homme, sortant du milieu des douleurs et des misères du peuple comme Aaron, — un avec l'homme, — et vous avez la sacrificature du Seigneur Jésus, «fait sacrificateur éternellement, selon l'ordre de Melchisédec». — Unis à cette personne divine, — à cet être humain, — ce Fils bienheureux de Dieu, que sommes-nous? Ce que Lui-même était: «pas de ce monde».

Il est bien vrai que toutes les agitations, tous les raisonnements du coeur doivent avoir pris fin, avant que nous puissions connaître à fond cette gloire; mais, chers frères, tout en sentant notre profonde misère, si nous avions le sentiment distinct que nous sommes nés de Dieu, et ainsi unis à Christ, la puissance de cette vérité entrerait dans notre âme et nous nous demanderions ce que nous avons à faire, et quel devrait être le but de nos efforts dans ce monde. L'homme moral va son chemin d'une manière honorable, — le chrétien, comme homme corrigé, n'a-t-il pas autre chose à faire qu'à être plus moral qu'il ne l'était auparavant? N'a-t-il qu'à se conduire avec plus de convenance? Non; du moment que nous savons que nous sommes nés d'en haut — nés de Dieu — nous sentons que par nature, par naissance, nous sommes placés plus haut que les anges, plus haut que Gabriel (Gabriel n'est qu'un serviteur quoiqu'il soit dans la gloire): — nous sommes des enfants, les fils et les filles du Seigneur tout-puissant. Nous avons donc à savoir comment nous pouvons marcher d'une manière qui soit digne de notre position d'enfants de Dieu, et à nous demander pourquoi nous sommes laissés dans le monde comme n'étant pas du monde? — «Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde». — Quels sont les sentiments, les pensées, les besoins, quelle est l'activité d'un homme né d'en haut? quels sont ses motifs? Ah! mes frères, si je pouvais faire pénétrer dans votre âme, ainsi que dans la mienne propre, ce que disent ces paroles: «envoyés dans le monde». — Elles expriment si clairement que nous en avons été sortis auparavant. Quoique laissés ici-bas, nous sommes des hommes placés dans le ciel, non pas seulement quant à nos affections, mais aussi quant à notre nature: elle est d'en haut, nous sommes nés d'en haut, rendus participants de la vie de Celui qui demeurait dans le sein du Père, qui était le Fils de l'homme qui est dans le ciel, quoiqu'il portât la chair ici-bas.

Et dans la mesure où cette vie est développée en nous, nous aurons des pensées, des sentiments, des motifs semblables à ceux de Christ; ses désirs, ses jouissances, ses affections seront les besoins de la nouvelle nature. Ce sera Christ en nous. Et que faisait Christ ici-bas, sinon de paître, de conduire, de réunir ses brebis? Il n'était occupé que de ceux que le Père Lui avait donnés, de ses brebis, de ses agneaux; ils étaient les objets de sa sollicitude constante, de ses tendres soins. — Et quand son ministère fut près de finir, il dit au Père: «Père saint, garde-les en ton nom, ceux que tu m'as donnés, afin qu'ils soient un comme nous. Quand j'étais avec eux au monde, je les gardais en ton nom; j'ai gardé ceux que tu m'as donnés etc.» (Jean 17). Dans sa vie comme dans sa mort, Christ est venu pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés, les recueillant hors du monde, les sortant du milieu du mal, veillant sur eux, priant pour eux, leur parlant du Père. — Voilà ce qu'il faisait quand il était sur la terre, et ce qu'il faisait alors, il le fait encore aujourd'hui. —Avant de quitter ce monde il dit à Pierre: «M'aimes-tu? — Pourquoi lui demandait-il cela? Pour Lui-même? Non; et quand Pierre répond: «Tu sais que je t'aime!» Jésus lui dit: «Pais mes brebis! Pais mes agneaux!». — Voilà ce qu'il dit à Pierre, et ce qu'il dit à chacun de nous. Il ne s'est pas seulement donné Lui-même, mais il voudrait que tout ce qu'il nous a communiqué de sa grâce, fût employé en faveur de ses brebis et de ses agneaux.

C'est pour cela qu'il est venu sur la terre, et nous qui connaissons sa pensée, si nous voulons agir comme Lui, nous avons à porter les regards autour de nous, et à chercher dans ce vaste monde quels sont les brebis et les agneaux de Christ. Sous quelque forme, dans quelque mesure de mal qu'ils soient plongés, ils sont, les objets de la sollicitude et de la tendresse du grand Berger, et ils doivent l'être de nos soins. Christ demande de nous que nous paissions ses brebis; son désir est de les bénir, de les rassembler, afin de les amener dans une jouissance qu'un grand nombre d'entre nous ont appris à connaître, quoique au milieu de bien des misères — celle de «l'amour fraternel». Nous n'avons pas à nous préoccuper du caractère des enfants de Dieu, pour les repousser; ils sont aimés de Lui. Peut-être sont-ils bien ignorants, bien insensés, obstinés, méchants — ils n'en ont que d'autant plus besoin de notre ministère de grâce et d'amour.

Il est impossible que les impulsions de la «vie éternelle» puissent agir en nous en dehors du modèle que nous a laissé notre Maître, Celui qui est tout pour nous. Voyez Jésus se ceignant, supportant patiemment les ignorants, poursuivant son travail d'amour, lavant les pieds de ses disciples, jusqu'à faire dire à Simon Pierre: «Non pas mes pieds seulement, mais aussi mes mains et ma tête». Voilà la place que nous sommes appelés à prendre, Il est plus doux de donner que de recevoir. Nous sommes les débiteurs de Christ, nous Lui devons notre service — eh! bien, sa grâce en nous fera de nous des serviteurs. Son amour sera répandu dans nos coeurs si abondamment, que l'Esprit nous pressera de servir ceux qui nous entourent, de leur laver les pieds. Il se peut qu'on nous dise: «tu ne me laveras pas les pieds!» mais Christ ne cessa pas pour cela. Si Christ est en nous comme le serviteur, notre serviteur, nous ne pouvons faire autrement que de servir. Comment pouvons-nous contempler le Seigneur dans sa grâce infinie, se ceignant pour nous laver les pieds, sans être poussés à nous ceindre afin de faire comme Lui! Comment pouvons-nous nous trouver en présence de ce Fils de Dieu qui s'abaisse et se courbe devant nous, sans nous abaisser profondément nous-mêmes! Comment le voir ainsi et demeurer oisifs et indifférents! Ah! soyons ses débiteurs en effet pour toutes ces choses! — aimons le, remplissons ses désirs, briguons le privilège de faire comme il a fait! S'il nous lave les pieds, une vertu sort de son contact, et nos coeurs sont rendus conformes à son image sous cet aspect de grâce, dans l'exercice de cet amour. — Sa grâce qui nous est donnée devient en nous ce qu'elle est en Lui; fait de nous des serviteurs, et nous remplit de ce qui remplit le coeur de Christ.

La vie de Dieu dans l'âme, c'est l'amour. Quand l'amour de Dieu est répandu dans le coeur, il détruit cet égoïsme affreux et toutes ces passions haineuses qui s'y trouvent, pour l'occuper de ceux que le Père a donnés à Jésus, ses brebis et ses agneaux. Nous avons été rendus participants de la nature divine, non pas seulement pour que nous soyons heureux d'être ainsi bénis, mais pour que nous ayons la joie de voir rendus heureux les autres, car c'est en cela que consiste l'amour, cet amour divin qui aime lorsqu'il n'y a rien d'aimable dans l'objet aimé. Eh! bien, soyons les serviteurs des autres quand ils voudront nous laisser les servir, et quand ils ne le voudront pas, que notre amour toutefois les suive. L'Eglise de Dieu est mêlée aux ténèbres; au milieu d'une corruption de toute nature les saints reluisent comme des parcelles d'argent dans la poussière. Il est écrit: «N'aimez pas le monde, ni les choses qui sont dans le monde; si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est point en lui» (1 Jean 2: 15). Qu'avons-nous à faire? A recueillir les saints hors du monde. Dans l'Evangile de Luc, 15, nous voyons Christ rassemblant ses brebis et restaurant leurs âmes; dans l'Evangile de Matthieu chapitre 18, versets 12 et 13, il les cherche et les ramène. Notre service sera peut-être d'une nature différente, mais l'activité de l'amour ne se lasse jamais. Y a-t-il un enfant de Dieu qui s'égare? l'impulsion de la «vie éternelle», de l'amour, sera de Lui laver les pieds. Supposons qu'il rejette notre service — ne nous décourageons pas, jusqu'à ce qu'il nous soit dit: «non pas seulement mes pieds, mais aussi mes mains et ma tête». Y a-t-il des saints qui vont mal? veillons sur eux si nous sommes assez près; s'ils sont éloignés, écrivons-leur; s'ils se trouvent au bout du monde, envoyons vers eux, mais que de toute manière la circulation de la vie et de l'amour ait lieu, active et saine. Il est certain que le caractère de notre service sera différent de celui de Christ, toutefois son désir doit être le nôtre: de «rassembler en un tous les enfants de Dieu dispersés». Partout où se trouve un enfant de Dieu, et quel que soit le préjugé qui l'aveugle, l'impulsion de la vie éternelle doit parvenir jusqu'à lui. Il est dit — tous les enfants de Dieu dispersés, tous les saints; le coeur de Christ, son amour, les embrassent tous. Tandis qu'en esprit nous reposons sur son sein, nous sommes dans bien des misères — Christ porte tous les saints devant le Père, sur le pectoral, où ils resplendissent comme des pierres brillantes, montrant ainsi à quoi ils sont prédestinés comme héritiers de la gloire.

Nous n'avons rien à faire avec les circonstances; Satan n'est pas plus puissant que Christ et la «vie éternelle» ne peut être empêchée. Marchons en avant, non pas dans un esprit de secte, mais comme les serviteurs de tous les saints. Là où il y a un enfant de Dieu, quel que soit l'état ou la situation dans lesquels il se trouve, il nous est dit: «Pais mes brebis — pais mes agneaux». La «vie éternelle» comprend tous ceux qui sont de Christ, qu'ils soient près ou éloignés, ce sont des brebis qu'il faut paître.

Ce service d'amour n'est pas exigé seulement de ceux qui ont reçu un don spécial; il n'est aucun d'entre nous qui ait connu l'amour dont il a été aimé, à qui cette parole ne soit adressée: «Pais mes brebis!». Ah! si nous avons compris quelque chose de cet amour de Christ qui le fait s'abaisser devant nous, tout ce qu'il y a de ce même amour dans notre coeur ne répondra-t-il pas à cette parole: «Pais mes brebis!». — C'est ainsi que notre égoïsme, notre indifférence seront vaincus: la pensée de l'amour de Christ étant en nous, il nous souviendra de ce qu'il a dit: «Pais mes brebis». — Nous rencontrerons peut-être du mépris, un dur accueil, eh! bien quoi! — L'amour de Christ fut dépensé tout entier envers des ingrats, des indignes. — La «vie éternelle» manifestée parmi les hommes, de quelle manière a-t-elle agi? Comment fut employée sa puissance? Dans quel chemin a-t-elle marché? Dans un chemin facile, négligeant les brebis, se laissant repousser par le dédain et la froideur? Non; l'amour de Christ a cherché les ingrats enfants de Dieu, les a gardés, a lavé leurs pieds. Ah! ne cherchons, ne prenons pas de repos! Souvenons-nous que Christ est ceint, et qu'il nous dit, à chacun de nous: «Si moi, votre Seigneur et votre Maître, j'ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres» (Jean 13: 14).

Je ne parle pas de ce à quoi nous pouvons parvenir: nous attendons le Seigneur qui viendra du ciel. N'aimerions-nous pas être trouvés de Lui, ayant nos reins ceints, occupés à laver les pieds de ses disciples? L'amour, semblable à une pierre jetée dans l'eau, forme un cercle, puis un autre autour de celui-là, puis un autre encore. — Le principe qui unit étroitement deux coeurs doit les embrasser tous. Dès qu'une seule brebis du troupeau de Christ s'égare ou souffre, pensons à cette parole: «Pais mes brebis!» Que le Seigneur nous donne de voir quelle est notre place, afin que nous puissions dire: «la mort opère en nous, mais la vie en vous» (2 Corinthiens 4: 12). Ne souhaiterions-nous pas en effet que l'amour de Christ fût tellement répandu dans nos coeurs, que pas une seule pensée égoïste n'y demeurât?

Que la grâce nous soit donnée de nous oublier entièrement nous-mêmes!