«Mais nous qui sommes du jour, soyons sobres,
revêtant la cuirasse de la foi et de l'amour, et pour casque l'espérance du
salut».
Dès les premières
lignes de cette épître, les trois grands principes du christianisme, «la foi,
l'espérance et la charité», sont placés devant nous: les trois principes
formatifs de la vie divine du croyant sur la terre, comme l'épître elle-même
nous le montre dans un exemple très remarquable. Selon toute probabilité, cette
épître aux Thessaloniciens fut le premier écrit inspiré de l'Apôtre; elle est
l'expression de l'affection ardente qu'il portait à ces hommes, qui avaient
reçu avec tant de puissance le témoignage de l'Evangile par son moyen; on y
retrouve, en même temps, la fraîcheur brillante et pleine de charme de ce matin
du christianisme auquel elle appartient tout spécialement. Avec un coeur
heureux, l'Apôtre peut dire à ces Thessaloniciens: «car notre Evangile n'est
pas venu à vous en parole seulement, mais aussi en puissance, et dans la vertu
de l'Esprit saint, et en pleine certitude»; et puis il ajoute: «et vous êtes
devenus nos imitateurs et ceux du Seigneur, ayant reçu la parole accompagnée de
grande affliction avec la joie de l'Esprit saint, de sorte que vous êtes
devenus des modèles pour tous ceux qui croient dans la Macédoine et dans
l'Achaïe» (1 Thessaloniciens 1: 5-7),
Il est consolant
d'entendre Paul déclarer plus tard dans une autre de ses épîtres, que, parmi
tant de choses qui distinguaient l'Eglise primitive et qui passeraient, les
trois grands principes, mis en évidence ici d'une manière si particulière,
demeureraient aussi longtemps que le christianisme, comme la puissance et la
force caractéristique de celui-ci. «Or maintenant ces trois choses demeurent,
la foi, l'espérance et l'amour; mais la plus grande de ces trois choses, c'est
l'amour» (1 Corinthiens 13). «La foi», qui saisit, dans le passé et dans le
présent, les révélations que Dieu fait de Lui-même et de ses voies, et qui
apporte à l'âme «la démonstration des choses qui ne se voient pas», la foi demeure,
car sans la foi le salut de Dieu n'est pas réalisé et Dieu Lui-même reste
inconnu. — «L'espérance» aussi demeure; elle est, pour l'âme, la
puissance de la patience, comme il est écrit: «Si nous espérons ce que nous ne
voyons pas, nous l'attendons avec patience» (Romains 8: 25). L'espérance est si
essentielle à la vie chrétienne, que Paul dit que si l'avenir, ce domaine de
l'espérance, devait ne plus exister, rien n'égalerait la misère de son sort:
«Si nous n'avons d'espérance en Christ que pour cette vie seulement, nous
sommes les plus misérables de tous les hommes» (1 Corinthiens 15: 19). — Et,
Dieu en soit béni, l'amour aussi demeure: car lorsque la foi nous aura
conduits jusqu'au seuil du monde invisible, caché encore pour nous derrière le
voile; lorsque l'espérance n'aura plus rien à attendre, parce que tout
ce qu'elle espérait sera devenu une scène de jouissance présente et éternelle, l'amour
demeurera encore. La foi peut fermer ses yeux, l'espérance peut éteindre son
flambeau, elles étaient nos compagnes nécessaires dans un monde de ténèbres et
de douleur; — mais si l'amour nous quittait, le ciel ne serait plus le ciel.
Car «Dieu est amour», et le ciel est le lieu où l'amour éternel et universel a
son empire.
Quel est, chers
amis, le coeur qui n'a assez appris ce que sont la souffrance et le combat,
pour ne pas languir après un monde de paix et de bonté parfaites — un monde
d'amour parfait? Quel est le chrétien qui ne voudrait volontiers reposer son
coeur meurtri sur le sein de l'amour éternel? Eh! bien, ce monde à venir, ce
jour du repos et de l'éternelle félicité viendra; et jusque-là, nous attendons!
Mais dans
l'épître qui nous occupe, les trois grands principes dont nous parlons se
suivent dans un ordre différent de celui que nous venons de voir: l'Ecriture,
nous montre leur action puissante comme formant la vie du chrétien dans ce
monde. «Nous souvenant, dit l'Apôtre, de votre oeuvre de foi, de votre travail
d'amour et de votre patience d'espérance de notre Seigneur Jésus Christ, devant
notre Dieu et Père» (1: 3). — Chaque aspect de la vie chrétienne est vu ici
comme découlant de ce qui en est la seule vraie et légitime source, et en rapport
avec son véritable et céleste objet. Les Thessaloniciens ne se distinguaient
pas seulement par les «oeuvres, le travail et la patience», ces choses qui
peuvent exister dans l'Eglise, et toutefois laisser place à la répréhension;
car Celui qui dit à Ephèse: «Je connais tes oeuvres, et ton travail et ta
patience», ajoute après: «mais j'ai contre toi que tu as abandonné ton premier
amour» (Apocalypse 2: 2, 4)! Mais ici, à Thessalonique, l'oeuvre était
l'inspiration immédiate et directe de la foi; le travail était entrepris et
continué à la sollicitation de l'amour divin; la patience se soutenait en
regardant constamment à l'objet de l'espérance chrétienne; et Dieu nous en
donne la preuve dans le changement total que, selon le témoignage du monde
lui-même l'acceptation de l'Evangile avait produit dans le coeur, la vie, les
habitudes des Thessaloniciens, ainsi que dans le but qu'ils poursuivaient. «Car
eux-mêmes, dit l'Apôtre, racontent de nous quelle entrée nous avons eue auprès
de vous, et comment vous vous êtes tournés des idoles vers Dieu, pour servir le
Dieu vivant et vrai, et pour attendre des cieux son Fils qu'il a ressuscité
d'entre les morts» (1: 9, 10), montrant ainsi, sans les nommer, l'oeuvre
de la foi, le travail de l'amour et la patience de l'espérance dans la vie des
chrétiens de Thessalonique. — Et combien n'avons-nous pas à veiller à ce que,
dans un temps comme celui dans lequel nous vivons, rien ne vienne séparer la
vie active de ce qui seul en est la vraie et divine source.
Mais je laisse cette
partie de mon sujet, pour faire remarquer comment les trois principes qui nous
occupent reparaissent sous une autre forme à la fin de l'épître. Après avoir
tracé le brillant tableau de la vie chrétienne, telle que la manifestaient ces
hommes convertis à la puissance de l'Evangile, au premier matin de ce jour dont
nous sommes près d'atteindre le soir, l'Apôtre s'interrompt pour jeter un
regard prophétique sur ce que seraient la condition du monde et les pensées des
hommes, au milieu desquels le christianisme aurait poursuivi son chemin. «Mais
pour ce qui est des temps et des saisons, frères, vous n'avez pas besoin qu'on
vous en écrive; car vous savez vous-mêmes très-bien que le jour du Seigneur
vient comme un larron dans la nuit. Quand ils diront: «paix et sûreté», alors
il leur surviendra une subite destruction, comme les douleurs à celle qui est
enceinte, et ils n'échapperont pas. Mais vous, frères, vous n'êtes pas dans les
ténèbres, de sorte que ce jour-là vous surprenne comme un larron. Car vous êtes
tous fils de la lumière, et fils du jour; nous ne sommes pas de la nuit ni des
ténèbres. Ainsi donc ne dormons pas comme les autres, mais veillons et soyons
sobres; car ceux qui dorment, dorment la nuit, et ceux qui s'enivrent,
s'enivrent la nuit. Mais nous qui sommes du jour, soyons sobres, revêtant la
cuirasse de la foi et de l'amour, et pour casque l'espérance du salut. Car Dieu
ne nous a pas destinés à la colère, mais à l'acquisition du salut par notre
Seigneur Jésus Christ, qui est mort pour nous, afin que, soit que nous
veillions, soit que nous dormions, nous vivions ensemble avec Lui» (5: 1-10).
Le christianisme
ne transforme pas les circonstances, ni ne change le cours du monde, mais par
la puissance qui lui est propre, il élève le chrétien au-dessus des choses du
monde par la communication d'une vie qui est divine, et dont la puissance,
comme nous l'avons vu, découle tout entière de la relation avec Dieu et avec
Christ et avec les choses invisibles et éternelles. Dans ces premiers jours, le
christianisme détachait le coeur de la terre et de toutes les choses qui se
voient; il amenait l'âme à se frayer, par la lutte, un chemin vers
l'immortalité et une couronne de gloire;— de plus, il fournissait au chrétien
une armure pour lutter contre les principautés et les puissances qui voudraient
l'empêcher de jouir de la part que l'oeuvre et la victoire de son Seigneur lui
ont acquise. Et, dans cette sphère, où le combat n'est pas son oeuvre (comparez
2 Chroniques 20: 17), mais l'attente tranquille de la délivrance par la venue
du Seigneur, le christianisme lui présentait «les armes de la lumière», —
l'armure de ceux qui sont «les fils de la lumière et les fils du jour».
Lorsqu'il s'agit du monde, il faut nous en souvenir, c'est à la séparation
d'avec lui par l'énergie de la grâce que nous sommes exhortés, et non pas à
lutter contre lui sur son propre terrain. Quand il jette les yeux sur le flot
toujours montant du mal, et sur la fausse sécurité de ceux que la trompette du
jugement seule réveillera pour leur faire entendre la proclamation des droits
de Dieu, que convient-il au chrétien de faire? — ce n'est pas de chercher à
dégager quelque vérité ou quelque puissance nouvelle dans le christianisme,
mais simplement de saisir les grands principes fondamentaux de celui-ci, Pour
les lier plus fortement sur son coeur, «revêtant la cuirasse de la foi et de
l'amour, et pour casque l'espérance du salut», — se maintenant ainsi debout,
comme un fils de la lumière, et un fils du jour.
Dieu veuille
qu'il en soit ainsi de plus en plus pour nous tous!