«La bonté de Dieu te pousse à la repentance» - Romains
2: 4
Il existe à
peine un sujet sur lequel on rencontre plus de malentendus que celui de la repentance.
L'ennemi de la vérité de Dieu et des âmes a certainement réussi à faire
présenter cette doctrine, dans l'enseignement et la prédication, dans les
livres et les traités modernes, d'une manière subversive de l'Evangile de la
grâce de Dieu et, par conséquent, de la paix des pécheurs.
Il est d'usage
de représenter la repentance comme un certain état d'âme que l'on doit
traverser, avant de saisir pleinement le pardon des péchés et la paix de Dieu.
On définit, en général, cet état, en disant: «C'est une
vive douleur du péché et un désir sincère de l'abandonner». On soutient que
sans cette «vive douleur» et ce «sincère désir», il ne
peut y avoir ni vraie foi, ni justification, ni pardon, ni paix; — mais que
lorsque ces sentiments existent, le pécheur a de justes raisons d'entretenir
l'espoir qu'il sera l'objet de la miséricorde de Dieu par Jésus Christ. C'est
de cette manière qu'on présente ordinairement ce qu'on appelle l'Evangile.
Mais, hélas! on peut à peine concevoir un Evangile
plus mutilé, plus corrompu, et plus décourageant. Les fruits de cet Evangile
sont manifestes, il ne donne ni paix de la conscience, ni spiritualité, ni
liberté du coeur, ni joie;
mais, au contraire, la tristesse, le désespoir, le doute, la crainte, les
perplexités, les difficultés, un constant regard sur soi-même l'accompagnent,
qui ne produisent que des fluctuations et des incertitudes dans les
expériences. Or nous savons que d'aussi tristes fruits ne peuvent jamais suivre
l'acceptation de l'Evangile de Dieu, et s'il est vrai que les faux prophètes
sont connus par leurs fruits, il est également vrai qu'on reconnaîtra toujours
un faux Evangile par les fruits qu'il porte partout où l'on reçoit dans sa
plénitude le précieux Evangile de la grâce de Dieu, les fruits propres à cet Evangile
sont manifestés, et réciproquement, partout où apparaît un Evangile amoindri,
corrompu et mutilé par les hommes, les fruits s'en montrent aussi bientôt.
Toujours les fruits sont un critère très sûr, quoique non absolu. Ce dernier ne
peut provenir que de la parole de Dieu seulement.
Or, il vaut la
peine de remarquer qu'un faux Evangile, non seulement est impuissant à produire
la joie du coeur provenant du pardon des
péchés, mais aussi qu'il ne peut pas davantage produire cette tristesse
de coeur provenant du sentiment du péché.
C'est-à-dire qu'il ne peut jamais produire ce qu'il déclare être toujours
nécessaire. — Or ne pouvant procurer une «vive douleur
du péché» — il ne peut pas donner «un sincère désir de l'abandonner», ni «la
repentance pour la vie»; il est, par conséquent, incapable d'après les
conditions qu'il impose, d'offrir jamais une base convenable, sur laquelle on
puisse fonder «l'espérance d'obtenir la miséricorde de Dieu par Jésus Christ».
En résumé, il est essentiellement faux, défectueux, sans valeur pratique, et
même pire que cela. Et comme il n'est pas l'Evangile de Dieu, nous savons de
quelle source il provient.
Mais mon lecteur
peut me demander sur quelle autorité je me fonde pour affirmer que cet Evangile
ne peut produire les trois résultats dont nous venons de parler. — La réponse à
cette question est aussi simple que possible. En premier lieu, la douleur du
péché ne peut jamais provenir de la contemplation du mal et de ses
conséquences. Si même il était possible de peindre le péché et ses conséquences
sous les couleurs les plus effrayantes, cette vue ne pourrait pas même faire
naître un seul «sentiment de tristesse selon Dieu».
Elle pourrait conduire au remords, à l'angoisse d'esprit, à la honte de
soi-même, au sentiment de sa dégradation morale et à de semblables pensées; mais tout cela n'est pas «la tristesse selon Dieu».
Rien ne peut conduire à la tristesse selon Dieu à cause du péché, si ce n'est
un regard porté sur la croix du Seigneur Jésus; et
lorsque je regarde cette croix la tristesse à cause du péché est mêlée à la
joie de sa parfaite expiation. En d'autres termes, je ne puis connaître, selon
Dieu, ce que c'est que le péché, que par ce qui m'annonce qu'il est pour
toujours ôté. Je pourrais contempler le péché pendant
une éternité, sans en éprouver une tristesse selon Dieu, tandis qu'un seul
regard de la foi, tourné vers la croix de Jésus Christ, révèle à mon coeur toute la noirceur et toute l'énormité du péché, mais
en même temps me montre la divine efficacité du sang qui l'a effacé.
En second lieu,
il en est de même quant au «sincère désir d'abandonner
le péché». Comment pourrai-je l'éprouver, si je n'ai pas un coeur
qui le haïsse, et qui aime la sainteté, c'est-à-dire, une nature divine? Le vieil homme aime le péché, il s'y complaît, il y
trouve son aliment. Comment donc pourrait-il désirer sincèrement d'abandonner
une chose, dans laquelle il aime à se plonger et qu'il savoure avec délices? Impossible. Comme l'Apôtre Pierre nous l'enseigne,
avant de pouvoir haïr le péché et désirer l'abandonner, il faut être
participant de la nature divine. Il faut avoir une vie nouvelle.
Mais comment
peut-on obtenir cette vie? Est-ce en traversant des
phases diverses de tristesse ou de tout autre sentiment?
Nullement. Que faire alors? «En
vérité, en vérité, je vous dis que l'heure vient, et elle est déjà venue, que les
morts entendront la voix du Fils de Dieu et ceux qui l'auront entendue
vivront» (Jean 5: 25). C'est ainsi, en entendant la voix de Jésus Christ,
qu'on obtient la vie; mais que me dit cette voix?
Est-ce qu'elle m'appelle à m'éloigner du péché, à en être vivement affligé, à
l'abandonner, avant de pouvoir obtenir le pardon? Ah! non, Dieu en soit béni! — Cette voix de Christ me révèle
cette vérité sublime, que mon péché a été ôté, qu'il a été cloué à la croix du
Christ — que je suis mort au péché — crucifié avec Christ — enseveli avec
Christ — ressuscité avec Christ; — elle me dit que les chaînes du péché qui me
tenaient lié sont brisées pour toujours — que le péché ne dominera plus sur
moi, parce que je ne suis plus sous la loi, mais sous la grâce — elle me dit
que je suis possesseur privilégié d'une nouvelle vie, même de la vie de Christ
ressuscité — le second Adam, l'Esprit vivifiant, le Seigneur venu du ciel. Dans
la puissance de cette nouvelle nature, je puis haïr le mal d'une parfaite
haine, en abhorrer cordialement les conséquences et le traiter comme un ennemi
vaincu et mort. «Quiconque est né de Dieu ne pratique
pas le péché, car la semence de Dieu demeure en lui, et il ne peut pécher,
parce qu'il est né de Dieu» (1 Jean 3: 9). Et cependant si le croyant dit qu'il
n'a pas de péché, il se séduit lui-même, et la vérité n'est pas en lui (comp. 1 Jean 1: 8).
Demander à
l'homme naturel, mort dans ses fautes et dans ses péchés, d'être affligé
de ses péchés, et de les abandonner pour obtenir la miséricorde de Dieu par
Christ, c'est l'oeuvre la plus inintelligente et le
labeur le plus ingrat que l'on puisse imaginer. Car cette manière d'agir ou
d'enseigner plonge le pécheur dans le désespoir et ôte à la croix de Jésus
Christ toutes ses divines gloires. Quelle différence entre cet Evangile humain
et l'Evangile de Dieu, qui nous montre Christ venant du sein du Père pour
accomplir une entière rédemption, en tirant la vie de la mort et en procurant
une justice éternelle; en faisant de toutes ces grâces réunies, un don
parfaitement gratuit au pécheur, — non en considération de sa «vive douleur» ou
de son «sincère désir», de ses larmes, de ses soupirs, de ses prières, de ses voeux, de ses résolutions; mais uniquement en vertu
de l'oeuvre qu'Il a lui-même accomplie, œuvre dont la
divine efficacité est telle que Dieu peut, sans porter atteinte à l'harmonie de
ses perfections, pardonner tous les péchés, effacer toutes les fautes, couvrir
toutes les iniquités de tous ceux qui croient son témoignage ou qui entendent
la voix de Jésus.
Finalement,
quant au vrai mode de produire «la repentance pour la vie»,
le passage, qui est placé en tête de cet écrit, déclare formellement que c'est «la
bonté de Dieu» qui nous y conduit. Donc ce n'est pas ma méchanceté, mais la
bonté de Dieu, qui produira la repentance. Je puis tout aussi bien essayer de
produire la chaleur en regardant la neige, la lumière en regardant les
ténèbres, la richesse en contemplant la pauvreté, la santé en regardant la
maladie, la vie en regardant la mort, que de produire la vraie repentance en
contemplant mes péchés. Je pourrais même les regarder, y penser, en rougir et
en gémir, pleurer sur eux, trembler à la pensée de leur grand nombre et de leur
gravité, être épouvanté de leurs terribles conséquences, et en même temps ne
pas avoir un atome de vraie repentance, de repentance pour la vie. Je pourrais
écrire le catalogue de mes péchés, je pourrais le lire et le relire, je
pourrais le voir noir comme la nuit et comme l'enfer, et avec tout cela ne pas
être amené à la repentance. Nous verrons bientôt ce que c'est que cette repentance; pour le moment, nous nous occupons de la
question de savoir ce qui y conduit. Or le Saint Esprit, par l'Apôtre, nous dit
positivement que c'est la «bonté de Dieu».
Il ne dit pas «la bonté de Dieu et nos péchés».
— Non, nous n'y trouvons rien que cette seule chose qui suffit largement, qui
ne veut, qui ne supporte aucune aide; — «La bonté
de Dieu te pousse à la repentance».
On est
continuellement porté à perdre de vue ce que nous venons de dire — et ainsi le
conseil de Dieu est obscurci, l'Evangile perverti et les âmes sont égarées ou
perdues. C'est en présentant à l'âme, par son côté objectif, la grande et
éternelle vérité de la bonté de Dieu, sa bienveillance, sa miséricorde, sa
grâce, son amour, que le Saint Esprit produit la vraie repentance. — On devrait
faire plus d'attention à ce sujet dans l'enseignement, les prédications, les
livres et les traités. On exhorte les pécheurs à se repentir, sans qu'ils
sachent ce que c'est, ni comment il faut s'y prendre. On leur dit que, s'ils ne
se repentent, ils ne peuvent être sauvés; mais ils
sentent leurs coeurs aussi durs que le diamant, aussi
froids que l'a glace. On leur représente, sous des couleurs impressives et
frappantes, leur culpabilité, la colère de Dieu, la crainte du jugement, les
terreurs de l'enfer, sans qu'il s'élève au dedans d'eux le moindre sentiment de
repentance. Cette manière d'agir nous rappelle la fable si connue du Vent et du
Soleil, faisant au défi à qui des deux obligerait un voyageur à quitter son
manteau. — Le vent du nord commence à souffler avec une extrême violence; ce qui n'a d'autre effet que de porter le voyageur
à serrer plus étroitement son manteau autour de lui. Le soleil, à son tour, se
met à paraître, et bientôt sa bienfaisante chaleur oblige le voyageur à
détacher son manteau et à s'en débarrasser tout à fait.
Il en est de
même du coeur du pécheur. Il n'y a que la puissante
influence de la bonté divine qui soit en état de briser son coeur
et de l'amener à la vraie repentance. Si je cherche à produire cette contrition
du coeur, cette repentance par tout autre moyen que
la bonté de Dieu, je dépense ma force pour néant et sans fruit. Je pourrais
inviter les pécheurs à se repentir, au point, que ma langue s'attacherait à mon
palais, sans obtenir aucun résultat, à moins que je ne les place en présence de
«la bonté de Dieu», qui seule peut engendrer la vraie
repentance.
Ayant ainsi
prouvé qu'un Evangile faux et mutilé manque complètement de puissance pour
produire ce qu'il déclare pourtant être nécessaire au salut, c'est-à-dire,
qu'il ne fait naître ni vive douleur du péché, ni sincère désir de
l'abandonner, et ne conduit personne à la repentance, nous allons maintenant
montrer comment il dépouille le sacrifice de Christ de sa divine gloire et de
son efficacité aux yeux du pécheur. Il le fait en disant qu'un certain travail
d'esprit du pécheur doit être ajouté à l'oeuvre de
Christ, avant de pouvoir obtenir la paix, le pardon, la vie, et la justice par
cette oeuvre. De cette manière, l'oeuvre
de Christ est représentée comme insuffisante pour donner la paix sans une
préparation spéciale et antérieure. En agissant ainsi on annule l'oeuvre de Christ. Si quelqu'un vient me dire: «Si vous
n'éprouvez pas de la tristesse, vous ne pouvez pas être sauvé», il renverse
tout l'édifice du christianisme, il détruit l'Evangile, il anéantit la croix de
Christ et prive mon âme de tout espoir; tandis que s'il présente à mon coeur l'étonnant amour de Dieu, tel qu'il l'a manifesté
dans l'envoi, la vie, la mort, la résurrection et l'ascension de son Fils
éternel, il m'apporte la vérité dont le Saint Esprit se servira pour produire
en mon coeur la vraie tristesse — «la tristesse selon
Dieu», qui fera naître, en même temps, la paix, la joie et la liberté, par
l'assurance que mes péchés sont tous effacés, non par mes larmes de pénitence,
mais par le sang expiatoire de l'Agneau de Dieu. Si la tristesse doit exister,
avant que l'amour de Dieu soit connu et senti, alors je suis perdu sans
ressource, car je ne puis absolument rien produire de moi-même pour Dieu. Mais
si je connais l'amour de Dieu et si j'en jouis, la vraie tristesse est
produite, sans aucun doute; mais alors je suis sauvé,
éternellement sauvé, — non par ma tristesse, mais par l'amour qui l'a produite.
Je m'afflige d'avoir pu pécher si longtemps contre un amour si parfait —
d'avoir pu si longtemps nourrir des doutes et des soupçons concernant Celui qui
m'a aimé jusqu'à donner son Fils unique, pour porter tous mes péchés en son
corps sur le bois.
Voilà une
manière bien différente d'envisager la question. L'amour de Dieu en Christ,
présenté objectivement à mon coeur et produisant «une vive douleur du péché», est une tout autre chose
qu'une contrition qui servirait de fondement à mon espérance d'obtenir la
miséricorde de Dieu par Jésus Christ. Dans le premier cas, je fais de la
tristesse une condition du salut, et dans le second cas, elle n'est que
la conséquence de mon salut. Il ne faut jamais confondre l'Evangile et
les effets qui lui sont propres. En agissant ainsi, il en résulte pour beaucoup
d'âmes une grande confusion, des perplexités et des doutes. Un grand nombre de
prédicateurs, estimés évangéliques, prêchent les effets de l'Evangile, au lieu
de prêcher l'Evangile lui-même. La repentance, la régénération, la sainteté de
la vie, — tout cela est produit par l'Evangile; mais
si je prêche ces choses au lieu de prêcher l'Evangile qui les produit, je
déplace la vérité de Dieu, je détruis sa grâce, je plonge les âmes dans
l'incertitude et les ténèbres et, en conséquence, le but que, je veux atteindre
est manqué.
Sans doute, je
lis dans les Ecritures des paroles comme celles-ci:
«Repentez-vous», — «il vous faut naître de nouveau». — «Sans
la sainteté nul ne verra le Seigneur; — mais j'en trouve aussi d'autres, qui me
montrent quelle est la cause efficiente de la repentance, de la vie nouvelle,
et de sa sainte activité. Je n'y vois nulle part la repentance présentée comme
un supplément à la croix de Christ, ou comme étant la cause déterminante de
l'amour de Dieu pour le pécheur. Je ne lis jamais dans le livre inspiré des
paroles telles que celles-ci: «Si vous n'avez pas une
vive douleur de vos péchés, vous ne pouvez pas être reçus en grâce». On
pourrait citer une multitude de passages qui montrent que l'Evangile est
clairement distingué de ses effets. J'en indiquerai un qui vaut, à lui seul, un
volume. Au commencement du chapitre 15 de la première épître aux Corinthiens,
l'Apôtre résume ainsi l'Evangile qu'il prêchait: «Or
je vous fais savoir, frères, l'Evangile que je vous ai annoncé, et que
vous avez reçu, et dans lequel vous êtes, par lequel aussi vous êtes sauvés,
si vous tenez ferme la parole que je vous ai annoncée, à moins que vous n'ayez
cru en vain. Car avant toutes choses, je vous ai communiqué ce que j'ai aussi
reçu, savoir, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Ecritures, et
qu'il a été enseveli, et qu'il est ressuscité le troisième jour, selon les Ecritures».
Or, le même
apôtre déclare ailleurs qu'il insiste, «et auprès des Juifs et auprès des Grecs
sur la repentance envers Dieu, et la foi en notre Seigneur Jésus Christ» (Actes des Apôtres 20: 21). En rapprochant ces deux
passages, on apprendra par quel moyen l'Apôtre cherchait à produire la
repentance dans le pécheur, c'est-à-dire en présentant la vérité de la mort et
de la résurrection de Christ, comme un fait objectif et indépendant des
dispositions subjectives du pécheur. L'Apôtre ne dit pas aux Corinthiens:
— «Je vous ai annoncé ce que j'avais aussi reçu, que vous devez être affligés
de vos péchés et que par là vous obtiendrez la
miséricorde de Dieu par Christ». Ce n'était pas l'Evangile de Paul. Il présente
tout simplement l'amour de Dieu, comme il a été manifesté dans la mort et dans
la résurrection de Christ; et partout où cette
doctrine était reçue dans le coeur par la foi, au
moyen de la puissance du Saint Esprit, elle portait les hommes à se repentir et
à «se tourner vers Dieu, en faisant des oeuvres convenables
à la repentance» (littéralement: dignes de la repentance, ˆxia
tÒv metano°av) (Actes des
Apôtres 26: 21).
En un mot,
l'Apôtre n'a jamais confondu l'Evangile avec ses fruits, mais il a toujours
maintenu entre eux la distinction qui leur est propre. D'un bout à l'autre du
livre inspiré, le Saint Esprit présente l'oeuvre
accomplie par Jésus Christ, sur la croix, comme l'unique fondement de la grâce
de Dieu qui justifie le pécheur, et lui donne la paix. L'Evangile parle d'un
seul sacrifice de Jésus Christ, et dans cette «seule
offrande», je vois un amour qui brise mon coeur et
qui purifie, en même temps, ma conscience. Je ne puis pas contempler, par la
foi, Christ crucifié et ressuscité, sans que mon coeur
ne soit saisi et que ma conscience ne trouve le repos. Mais ceci est
entièrement différent d'une contrition que le pécheur s'efforce de produire,
d'abord, en lui, pour être autorisé à aller à Jésus Christ pour obtenir grâce.
Dans ce dernier cas l'objet de ma confiance, c'est la contrition de mon coeur, la miséricorde de Dieu par Jésus Christ ne vient
qu'après et comme résultat; tandis que dans
l'Evangile, l'amour de Dieu en Christ est l'objet de ma confiance, et le coeur brisé, le résultat.
Et encore, si la
vive douleur du péché est une condition préalable et nécessaire pour aller à
Christ, comment saurai-je si je me suis suffisamment affligé?
Ou qu'arrivera-t-il, si ma tristesse n'est pas de bon aloi?
Que ferai-je, si elle n'est pas assez sincère et assez profonde?
Enfin pendant combien de temps devrai-je m'affliger, avant d'avoir le droit
d'aller à Christ? Ces questions sont graves, et
l'Evangile faux et mutilé les laisse entièrement sans solution. Il ne peut y répondre; au lieu de le faire, il place sur le pauvre coeur chargé un travail ardu et incessant; il lui impose la
recherche assidue «des moyens de grâce», c'est-à-dire de se livrer à des
pratiques extérieures, d'écouter des sermons, de dire des prières, en un mot
d'accomplir diverses oeuvres, propres aux religions
formalistes. Ce formalisme religieux, je le dis avec douleur, est souvent
entretenu par les doutes et les difficultés des consciences angoissées. En
effet, si j'espère trouver la paix de mon âme par l'exactitude à assister aux
offices et à me soumettre à un système régulier de pratiques religieuses, j'y
mettrai toute l'ardeur possible. Plus mon anxiété sera grande, plus je serai
fidèle à soutenir le mouvement du mécanisme religieux. Partout ce que le monde
appelle religion, dans ses nuances diverses, prospère et s'enrichit par les
misères de ses sectateurs les plus dévoués. Ces fausses religions exploitent
les doutes, les obscurités et les incertitudes, qu'elles ont elles-mêmes
enfantés, et il est de leur intérêt de tenir les âmes dans ces ténèbres
spirituelles.
Le glorieux
Evangile de la grâce de Dieu se dessine hardiment et magnifiquement sur le fond
ténébreux de l'erreur. Dans l'Evangile la question n'est pas. «Me suis-je suffisamment affligé?» mais, Christ a-t-il
accompli l'oeuvre de ma rédemption? A-t-il
parfaitement révélé l'amour de Dieu? A-t-il
entièrement ôté mes péchés? Il rattache tout ce qui
concerne la paix de mon âme, non pas à quelque chose qui soit en moi — mais
absolument à la personne et à l'oeuvre de Christ. —
S'il a accompli son oeuvre, ma paix est éternellement
assurée. S'il était possible de verser des larmes de repentance pendant toute
l'éternité, ces larmes ne pourraient servir de fondement à ma paix, par la
raison même qu'elles ne pourraient servir de fondement à la justice de Dieu. Il
faut que ces deux choses reposent sur la même base et cette base est fournie,
non par la pratique des formes impuissantes et des rites traditionnels d'une
religion corrompue, mais par l'expiation du Fils de Dieu, dont l'efficacité est
éternelle. Cette expiation, étant divinement parfaite, il n'est pas plus
nécessaire d'y ajouter un travail d'esprit qu'un exercice corporel quelconque.
Elle a une telle puissance que, dès l'instant qu'un pécheur en entend parler et
y croit, il a trouvé la paix indépendamment de tout travail intérieur. Il a trouvé
la paix de Dieu que rien ne peut ébranler — il a obtenu la justice de Dieu que
rien ne peut affecter — il a reçu la vie de Christ, qui doit de toute nécessité
se manifester par une sainte conduite: «Etant rempli
des fruits de la justice, qui sont par Jésus Christ à la gloire et à la louange
de Dieu».
Cherchons
maintenant à comprendre ce qu'est cette repentance, dont on a tant abusé, qui a
donné lieu à tant de confusion et qui est devenue, entre les mains de la fausse
religion, un moyen si puissant d'envelopper les âmes dans le doute et la
perplexité. Le mot grec (metano°a) traduit par «repentance» dans la plupart des versions des
Saintes Ecritures et par «pénitence» dans la version catholique,
signifie strictement un changement de pensée ou d'avis sur un sujet quelconque»
(*).
Si un homme, ne connaissant que la langue grecque, entendait prononcer ce mot,
il n'aurait jamais l'idée d'y attacher la notion de pénitence, ni de
contrition, ni d'aucune espèce de tristesse, comme un élément nécessairement
lié à ce mot, parce qu'il est possible qu'un homme éprouve de la joie aussi,
bien que de la peine, lorsqu'il a changé d'avis sur un sujet quelconque. Dans
tous les cas, l'effet moral dépend de la nature de la communication qui a
modifié le sentiment.
(*) Le verbe,
dérivant de ce mot, signifie littéralement «penser
après» — «réfléchir ensuite», — «changer d'avis». Il y a un autre mot qu'on
trouve dans la version des 70 et aussi dans le Nouveau Testament, que nos
traducteurs rendent aussi par le mot «se repentir».
J'indiquerai deux ou trois passages où il se trouve. Dans Matthieu 21: 29: «Il répondit: je n'y veux point aller; mais après
s'étant repenti [ayant du remords], il y alla». Au verset 32: «Et vous l'ayant vu, vous ne vous êtes point repentis
[vous n'en avez point eu de remords] ensuite, pour le croire». Encore Matthieu 27: 3: «Alors Judas qui l'avait livré, voyant qu'il était
condamné, «se repentit [ayant du remords]». Dans 2 Corinthiens 7: 8: «Car lors même que je vous ai attristés par ma lettre,
je ne m'en repens plus [je n'en ai pas de regret], bien que je m'en
fusse d'abord repenti [si même j'en ai eu du regret]». Dans Hébreux 7: 21: «Le Seigneur l'a juré et il ne s'en repentira pas».
Dans tous ces passages le mot dont on s'est servi n'est pas le mot ordinaire metanoew, mais metamelomai, qui
signifie proprement «se soucier après», ou «avoir un
plan subséquent, un autre dessein».
Quant au mot «pénitence» et à l'idée qu'il présente, il
est facile de comprendre comment il éloigne de la lumière vivifiante et de la
bienfaisante chaleur de l'Evangile de Christ. Si on m'appelle à faire
pénitence, alors assurément la croix de Christ est virtuellement méconnue, ou
s'il en est question, ce ne peut-être que dans le but de suppléer à ce qui
manque à mes bonnes dispositions. Or, la croix doit être tout ou elle n'est
rien pour le pécheur. La pénitence humaine et l'expiation divine ne sauraient
jamais occuper le même plan. Si Christ a pris sur lui, dans son oeuvre parfaite, toutes les conséquences de nos péchés et
que nous ajoutions à cette oeuvre l'idée de
pénitence, ce n'est rien moins que faire une injure blasphématoire à son
sacrifice précieux, pleinement suffisant et éternel.
Il n'est pas
étonnant que les religions d'origine humaine aient ainsi porté atteinte à la
croix de Jésus Christ. Il en a toujours été ainsi. Mais mon but, dans cet
écrit, n'est pas de combattre les erreurs et les principes de ces funestes
systèmes, mais plutôt de montrer que l'idée généralement attachée au mot de repentance
et la définition populaire qu'on en donne, renferment la plus déplorable
méconnaissance et l'ignorance la plus positive due pour Evangile de la grâce de
Dieu. Quand je vois une pauvre créature ignorante et abusée faire pénitence
pour ses péchés, je pense aussitôt que ses yeux n'ont jamais été ouverts pour
contempler la glorieuse plénitude et l'immense valeur de l'expiation offerte
sur le Calvaire — que son oreille n'a jamais entendu les accents de paix
prononcés par le Sauveur mourant: «TOUT EST ACCOMPLI»
— Je pense que son âme enveloppée de ténèbres n'a jamais éprouvé la puissance
lumineuse du glorieux Evangile de la libre grâce de Dieu. Tout cela se comprend
aisément dans le cas d'un malheureux, appris à faire pénitence pour expier ses
péchés. Mais que penser d'un homme qui, sous le nom de prédicateur évangélique,
dit au pécheur: «Il faut que vous soyez vivement
affligé de vos péchés avant de pouvoir aller à Christ, et si vous usez
diligemment des moyens de grâce, vous pourrez enfin espérer d'obtenir la
miséricorde de Dieu par lui. Mais quelle espèce d'Evangile est-ce là? Quelle bonne nouvelle? Comment
un tel message pourrait-il porter la paix au coeur ou
à la conscience du pécheur? Et cependant, bien-aimé
lecteur, c'est bien là le genre d'Evangile que la motion vulgaire sur la repentance
a produit. Il n'est pas nécessaire d'avoir beaucoup de sagacité pour
comprendre, combien cette idée de la repentance touche de près à celle de la
pénitence des papistes, et pour voir que l'une et l'autre enlèvent au sacrifice
de Christ la place et la gloire qui lui appartiennent. Si l'on me dit qu'un
certain labeur d'esprit doit être ajouté à l'oeuvre
de Christ, pour que je puisse jouir d'une paix assurée, je ne vois pas en quoi
je suis beaucoup supérieur à l'homme qui croit qu'un certain exercice corporel
est nécessaire à son salut. Quand il s'agit de la paix et du salut de l'âme, il
ne peut y avoir qu'une bien légère différence, s'il y en a, entre les exercices
du corps et ceux de l'esprit. Si le Seigneur Jésus n'a pas opéré une parfaite
expiation, mais qu'un travail mental y doive être ajouté, alors, je l'affirme,
je suis perdu, perdu sans ressource, de la même manière que si une peine
corporelle m'était imposée.
Mais qu'est-ce
donc que la repentance? C'est un changement de pensée.
— A l'égard de quoi? A l'égard de Dieu. — Comment ce
changement est-il produit? En entendant la vérité et
en y croyant. — Où trouve-t-on cette vérité? Christ
est la vérité. — Pourquoi avons-nous besoin de ce changement de pensée? Parce que nous avons tous, par nature, une fausse
idée de Dieu. De qui et d'où vient cette fausse idée de Dieu?
Elle vient du serpent dans le jardin d'Eden. — Comment le serpent a-t-il pu
communiquer à l'homme cette fausse idée? En
représentant Dieu sous un faux jour, en insinuant à l'homme que Dieu n'était
pas bon en lui défendant de toucher au fruit de l'arbre de la connaissance du
bien et du mal. — C'est là le fond de la question. L'homme se fait une idée
totalement fausse de Dieu, une estimation fausse de son caractère. Il ne
connaît pas Dieu. Toutes ses pensées sur Dieu l'égarent entièrement. C'est la
source de toute sa misère, de tout le mal dans lequel il est, de toute sa
dégradation mentale et morale. De là découlent toutes les souillures dont
l'homme tombé et corrompu est capable. Que le péché, revête la forme qu'on
voudra, qu'il se montre sous l'apparence brutale du meurtre ou de l'adultère,
ou qu'il prenne des allures assez raffinées pour échapper aux avertissements
d'une conscience délicate et sensible, tout cela provient de la même source,
c'est-à-dire de l'ignorance dans laquelle l'homme est au sujet de Dieu, de ses fausses
pensées quant à Dieu. Le démon a empoisonné le coeur
de l'homme en noircissant, dans son esprit, le caractère de Dieu;
il l'a plongé dans les ténèbres de telle sorte qu'il est devenu craintif,
défiant, incrédule, infidèle, haïssant Dieu. Tel est l'état naturel de chaque
homme, de chaque femme, de chaque enfant. L'homme civilisé aussi bien que le
sauvage, le savant comme l'ignorant, l'homme moral comme l'homme immoral, le
philosophe et l'illettré, grands et petits, riches et pauvres, — tous ont une
fausse idée de Dieu — tous le redoutent — tous sont ses ennemis — tous
préfèrent instinctivement l'anéantissement à la pensée de paraître devant Dieu.
Tous avoueraient, s'ils étaient sincères, qu'ils portent envie aux oiseaux des
cieux, aux bêtes des champs, parce que ces êtres inintelligents et
irresponsables ne doivent pas aller à la rencontre de Dieu. Mais pourquoi cette
crainte à la pensée de Dieu? Parce qu'«ils ne connaissent point Dieu et n'obéissent pas à
l'Evangile de notre Seigneur Jésus Christ» (2 Thessaloniciens 1: 8). Ils
croient et agissent toujours sous l'influence du mensonge de Satan et non sous
celle de la vérité telle qu'elle est en Jésus. Satan est un témoin infidèle et
trompeur. Il a représenté Dieu d'une manière contraire à sa nature et l'homme a
cru à cette fausse image. C'est là la racine de tout le mal. L'homme a une
fausse idée de Dieu. C'est pourquoi il a besoin d'en avoir une qui soit juste —
il lui faut «la repentance pour la vie».
Mais comment
est-ce que cette repentance est produite? Par la foi à
la vérité. — Et qu'est-ce que la vérité? Dieu tel
qu'il est. — Où est-ce que je puis le voir? Dans
la personne de Christ: «Personne ne vit jamais Dieu —
le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l'a fait connaître»
(Jean 1: 18). «Jésus Christ est le témoin fidèle et
véritable» (Apocalypse 3: 18). — Le témoin de quoi? De
ce que Dieu est. Quand je considère la vie, le ministère, les souffrances, et
la mort de Christ — je vois ce que Dieu est; je vois
la parfaite manifestation de la grâce, de la miséricorde, de l'amour, de la
sainteté, de la vérité, de la puissance, de la majesté, de la sagesse. Je le
vois nourrir ceux qui ont faim, guérir les malades, nettoyer les lépreux,
ressusciter les morts, ouvrir les yeux des aveugles, pardonner les péchés,
montrer une tendresse exquise, une patience inépuisable, une sympathie
profonde, répondre à toutes les misères humaines, sans murmure, sans aucune parole
de reproche, avec une charité infinie. Là je vois Dieu, — là je vois LA VERITE.
Connaître cette vérité — c'est la vie — c'est la vie éternelle. — Ne pas
connaître Dieu — avoir de lui un sentiment faux,—
c'est la mort. — Connaître Dieu, — avoir de lui des notions exactes, c'est la
vie. Satan est l'auteur de la première, et Christ de la seconde. Satan est un
menteur, Christ est LA VERITE. Satan est un meurtrier, Christ est LA VIE.
Et ne
voyons-nous pas par quel motif, lorsque le Seigneur Jésus vint dans le monde,
il commença son ministère public par ces mots:
«REPENTEZ-VOUS?» Que pouvait-il dire, Celui qui était par excellence la vérité,
en s'adressant aux coeurs qui avaient reçu le
mensonge de Satan relativement à Dieu, sinon: «repentez-vous?»
— Lorsque Celui qui est venu du sein du Père, et qui était la parfaite
expression de sa grâce, se trouvait en présence de l'homme imbu, jusqu'au fond
de l'âme, de ce sombre et horrible outrage fait par Satan au caractère de Dieu,
par quel appel plus convenable pouvait-il débuter, dans sa miséricordieuse
mission, que par celui-ci: «Repentez-vous?»
Quand Celui qui «était Dieu manifesté en chair, — la
splendeur de la gloire de Dieu et l'image empreinte de sa personne» —
s'adressait à des hommes dirigés en toutes choses, dans leur vie, par une idée
foncièrement fausse de Dieu, quel autre langage pouvait-il tenir, sinon
celui-ci: «Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche» — royaume, dont
il était lui-même la vivante expression?
Que renferme ce
mot si compréhensif? Quelle est sa signification?
Il signifie tout simplement: entendre la voix de
Christ, et recevoir sa parole dans le coeur par la
foi. C'était là «la repentance pour la vie» Tous ceux
qui croyaient au Seigneur Jésus, qui le recevaient comme l'expression de ce que
Dieu était, comme la parfaite manifestation de l'amour de Dieu, et en même
temps, comme Celui qui devait porter, dans son propre corps, sur le bois, le
châtiment du péché, la colère de Dieu et la malédiction de la loi — tous
ceux-là étaient vraiment repentants, tous ceux-là étaient participants de la
vie éternelle, d'une justice divine, et d'une paix parfaite.
Telle est la
doctrine selon Dieu de la repentance, comme on peut s'en convaincre par une
lecture attentive des Evangiles et des Actes des Apôtres. — Voyez, par exemple,
Actes 3. L'Apôtre, après avoir déclaré que Dieu a ressuscité d'entre les morts
celui-là même que les Juifs avaient crucifié, les exhorte à «se repentir», — à changer de sentiments, parce qu'ils
avaient des pensées entièrement erronées sur Dieu, et sur son Christ, et quand
leurs yeux furent ouverts pour contempler, par la foi, Celui qu'ils avaient
cloué à la croix, assis à la droite de Dieu, c'était là la vraie repentance,
c'était «la repentance pour la vie». Ils étaient aussitôt remplis de paix et de
joie, non parce que leurs esprits avaient passé par un certain travail de
tristesse, mais parce que la grande vérité objective, touchant un Christ
crucifié et ressuscité, leur avait été exposée, et qu'ils l'avaient reçue dans
leurs coeurs par la foi avec la puissance de l'Esprit
saint. De même encore, dans Actes 10: L'apôtre Pierre
venait d'annoncer à des Gentils la bonne nouvelle de l'amour de Dieu pour les
pécheurs, amour signalé par la mort et par la résurrection de Jésus Christ,- et
comme il parlait encore, l'Esprit saint tomba sur tous ceux qui l'écoutaient,
et ils furent baptisés au nom du Seigneur. Or, dans cette occasion, Pierre ne
parle pas de repentance, mais il dit: «Tous les
prophètes lui rendent témoignage, que, par son nom, quiconque croit
en lui, reçoit la rémission des péchés». Il venait d'exposer l'histoire simple
et bénie de la croix, et tous ceux qui l'écoutaient et qui crurent, furent à
l'instant sauvés pour l'éternité. Croire la bonne nouvelle d'un salut complet
et éternel, grâce à l'oeuvre accomplie par Christ,
c'est la vraie repentance — «la repentance pour la vie»,
aussi bien pour un pauvre Gentil que pour un Juif. De là vient que, dans Actes 11: 18, voici comment il est parlé de la conversion des
Gentils: «Ayant ouï ces choses, ils se turent et glorifièrent Dieu, disant: —
Dieu a donc en effet donné aux nations la repentance pour la vie!».
Ailleurs, lorsque
l'apôtre Paul prêchait aux Juifs dans la synagogue d'Antioche, il termine son
discours par ces paroles: «Sachez donc, hommes frères,
que par lui vous est annoncée la rémission des péchés, et que tout ce
dont vous n'avez pu être justifiés par la loi de Moïse, quiconque croit est
justifié par lui» (Actes des Apôtres 13: 38, 39). De même il
dit à un Gentil, le geôlier de Philippe (Actes des Apôtres 16:
31): «Crois au Seigneur Jésus Christ, et tu seras sauvé, toi et ta
maison». Et cependant, en Actes 17: 30, il dit aux
Athéniens — «Dieu annonce maintenant à tous les hommes, en tous lieux,
qu'ils se repentent». Et encore, Actes 20: 20, il
dit: «Je n'ai rien caché des choses qui pouvaient vous être profitables,
et je n'ai pas manqué de vous les annoncer, et de vous instruire en publie et
en particulier, insistant, et auprès des Juifs et auprès des Grecs, sur la repentance
envers Dieu, et la foi en notre Seigneur Jésus Christ». Nous apprenons de tous
ces passages que la repentance et la foi à la bonne nouvelle du pardon des
péchés par le sang de Christ sont une seule et même chose. Elle n'est pas un
travail de contrition qu'il faille préalablement éprouver avant d'aller à
Christ. — Elle est essentiellement l'acceptation de Christ par la foi, comme la
parfaite révélation de la nature de Dieu, la base de ses conseils et de la paix
du pécheur. Du moment même où un homme croit au témoignage de Christ, il est
repentant envers Dieu et sa repentance est réelle et sincère en raison même de
la simplicité et de la candeur de sa foi. Mais si je fais, de ma repentance, un
sentiment que je dois d'abord éprouver avant d'être autorisé d'aller à Christ,
je renverse entièrement le plan de la rédemption, — j'annule la croix de Christ
et je prive le pécheur du seul vrai fondement de paix qu'il puisse trouver.
C'est la révélation du caractère véritable de Dieu en Christ qui conduit à la
repentance et qui sauve l'âme du croyant. Ce ne sont ni les pénitences, ni la
repentance humaine, mais c'est l'expiation divine qui fait que Dieu demeure
juste en justifiant le pécheur. Ce ne sont ni les mortifications de la
pénitence, ni les larmes de la repentance, qui peuvent ôter les péchés. Le sang
de Jésus Christ a «UNE FOIS» et POUR TOUJOURS décidé
la question, et l'âme qui le croit a obtenu «la repentance pour la vie» — un
pardon parfait — une parfaite paix. Le croyant a renoncé à ses anciennes idées,
aux fausses opinions qui venaient de Satan et il est devenu possesseur d'autres
idées et d'un «esprit droit», qui vient de Jésus
Christ. C'est perdre son temps que de chercher à produire la repentance par
tout autre moyen. Ni la dégradation morale, ni les dures conséquences du péché
ne peuvent y conduire l'homme. Ces choses peuvent l'effrayer pour un moment,
mais une terreur momentanée n'est pas une repentance permanente, ni un
changement d'esprit pour la vie. Il est à craindre que certains prédicateurs ne
donnent parfois une place plus importante, dans leurs prédications, à l'odieux
du péché, aux terreurs de l'enfer, qu'à la puissance de la grâce de Dieu, seule
capable de soumettre les âmes, de briser les coeurs
et de les attirer vers les joies immortelles de la patrie céleste.
Or, si nous
considérons le Seigneur Jésus et ses apôtres, nous ne trouverons pas que de
tels sujets aient jamais occupé la première place dans
leur prédication. Il est vrai qu'ils en ont parlé quelquefois, lorsque les
circonstances l'exigeaient. Le Seigneur lui-même parle d'un homme qui «élevait ses yeux, comme il était dans les tourments»,
Terrible pensée! L'apôtre Paul aussi a pu «discourir
sur la justice, sur la tempérance et sur le jugement à venir», de manière à
faire trembler Félix. Tout cela est très vrai, et sans doute il peut se
présenter des occasions, où l'homme de Dieu se sente appelé à exposer à des coeurs charnels et incrédules les terreurs de «la colère à venir»; mais c'est là tout autre chose que de faire de
telles questions le sujet principal du témoignage.
Si mon lecteur
veut lire les paroles adressées aux Juifs par Pierre, en Actes 3; aux Gentils, en Actes 10, et celles de Paul adressées aux
Juifs, en Actes 13, et aux Gentils, en Actes 17, il y trouvera des modèles
inspirés de la vraie et fidèle prédication de l'Evangile. Quel est, ami
lecteur, le sujet de ces prédications? Est-ce le péché
et ses affreuses conséquences? Est-ce l'enfer et ses
inexprimables terreurs? Nullement. — C'est Christ,
depuis le commencement jusqu'à la fin — Christ, comme la vivante expression du coeur même de Dieu — Christ, comme le canal d'où découle,
du sein du Père, l'amour éternel — Christ, reposant dans le sein de Dieu dès
avant tous les siècles, — Christ manifesté ici-bas, comme un homme parfait,
révélant Dieu dans chaque détail de sa sainte vie — Christ, cloué au bois
maudit, «livré par le conseil défini, et par la préconnaissance de Dieu», comme
une offrande et un sacrifice pour le péché — Christ couché dans le sombre
tombeau — Christ ressuscité d'entre les morts, par la gloire du Père et assis à
la droite de la majesté dans les cieux, comme preuve du parfait accomplissement
de la rédemption — Christ, revenant sur les nuées du ciel pour poser la pierre
du faîte de gloire, au magnifique édifice de sa grâce. Tel est le sujet
principal du témoignage apostolique, auquel vient s'ajouter le don du Saint
Esprit, comme témoignage, sceau, onction, arrhes, capacité de jouissance, et
produisant dans le coeur du pécheur cette foi qui le
met en communication avec toute la plénitude de la grâce et de la bénédiction
en Christ.
En un mot, les
Apôtres présentaient simplement à leurs auditeurs la vérité telle qu'elle est
en Jésus, laissant au Saint Esprit de revêtir cette vérité d'une puissance
divine. Ils ne cherchaient jamais, dans leurs appels aux âmes inconverties, à
les entretenir des sentiments, des émotions, des affections et des résultats
pratiques, qui découlent d'une croyance sincère à la bonne nouvelle. Leur
prédication est objective — c'est-à-dire qu'ils présentent «le salut» comme quelque chose d'accompli, et de totalement
indépendant de tout ce que le pécheur a pu ou peut faire, penser ou sentir.
Ceci est d'une très grande importance. On devrait prêcher l'Evangile de telle
manière que ceux qui l'entendent pussent immédiatement jouir d'une paix
éternelle. Le pécheur n'a pas un clin d'oeil à faire,
ni à bouger le doigt, pour ainsi dire, il n'a pas à produire une seule émotion,
ni à verser une larme, pour rendre plus complet le salut que l'Evangile lui
apporte. Il pourra répandre bien des larmes, et ressentir de vives et profondes
douleurs, lorsque toute la plénitude de l'amour rédempteur inondera son coeur soulagé et son âme affranchie;
mais, alors, il y a une grande différence entre la cause et l'effet.
Bien des
personnes semblent croire que les luttes et les angoisses morales, les
alternatives de doute et de crainte, les hauts et les bas de leur état
spirituel, par lesquels ils ont passé pour arriver au salut, constituent une
partie essentielle et nécessaire de la rédemption elle-même. C'est là une grave
erreur. Les combats spirituels d'un Luther où d'un Bunyan ne faisaient
nullement partie du fondement de la paix, dont ces âmes d'élite ont finalement
joui. Sans doute, de telles luttes les ont fait saisir, avec d'autant plus de force; la vraie paix de l'Evangile, lorsque, par grâce, ils
l'ont trouvée; ils ont acquis par là une plus grande expérience de la vie
divine, et une plus grande aptitude à conduire les âmes. Il n'y a personne qui
ait un sentiment plus profond du prix d'un bateau de sauvetage, et qui soit
plus propre à parler des services qu'il peut rendre, qu'un homme qui a été
sauvé des eaux par ce moyen. Tout le monde sentira cependant que c'est le
bateau qui sauve et non pas les angoisses par lesquelles le naufragé a passé.
Il en est précisément de même du pécheur. Ses doutes et ses craintes peuvent
lui faire mieux apprécier l'oeuvre et l'amour de Christ; mais ces doutes et ces craintes ne sont pas Christ.
Quelle que soit la voie, la condition, les circonstances d'un pécheur; il ne trouvera, après tout, jamais la paix qu'en
Christ. Ce n'est pas le bourbier du désespoir qu'adorait l'âme affranchie de
Bunyan, c'était uniquement le Christ qui l'en avait tiré pour toujours (*).
(*) Voyez: «Voyage du chrétien», par J. Bunyan.
Puisse l'Esprit de
vérité amener l'âme de mon cher lecteur, qu'il soit simplement auditeur ou
prédicateur de l'Evangile, à sentir le prix et la valeur des vérités du pur Evangile!
«Tel que je suis — pêcheur rebelle,
Au nom
du sang versé pour moi,
Au nom
de ta voix qui m'appelle,
Jésus,
je viens à toi!
Tel que
je suis — dans ma souillure,
Ne
cherchant nul remède en moi,
Ton sang
lave mon âme impure,
Jésus,
je viens à toi!