Abigaïl, la femme de Nabal de Carmel - 1 Samuel 25

Pour pouvoir être pratiquement en communion avec la pensée de Dieu, par le moyen des Ecritures, pendant que la lutte entre la chair et l'esprit est là, il faut que l'âme soit bien établie dans la grâce. Or, Satan cherche à nous cacher la simplicité de cette grâce; mais c'est elle seule qui est venue au-devant de nous, quand nous étions morts dans nos fautes et dans nos péchés. De même que le serpent fut élevé dans le desert, ainsi Jésus fut élevé sur la croix, et Dieu le place devant nous comme l'objet de notre foi. Quand nous regardons vers Jésus, Dieu nous dit que nous avons la vie. — Une autre chose encore que Satan cherche à nous faire perdre de vue, par toutes sortes de ruses et d'inventions de son propre fonds, c'est cette grâce de Dieu par laquelle nous sommes gardés. Dieu nous garde par une puissance qui est cachée dans les cieux. Nous sommes portés à nous appuyer sur notre expérience, sur des observances, sur une sacrificature extérieure; mais si nous ne regardons pas à ce qui est caché dans les cieux, en rapport avec le précieux sang de Christ, et avec sa sacrificature à Lui, c'est Satan qui en détourne nos regards, lui qui est «le père du mensonge». Tout ce qui tend à nous faire croire que nous sommes gardés en dehors de Christ, ne sert qu'à nous égarer.

Il y a donc, pour tous ceux qui croient, une acceptation certaine et éternelle, par le sang de Jésus qui a été répandu pour eux. «Christ étant venu, souverain sacrificateur des biens à venir, par le tabernacle plus grand et plus parfait qui n'est pas fait de main, c'est-à-dire, qui n'est pas de cette création, et non avec le sang des veaux et des boucs, mais avec son propre sang, est entré une fois pour toutes dans les lieux saints, ayant obtenu une rédemption éternelle» (Hébreux 9: 11, 12); Ceci assure à jamais notre paix et notre bonheur.

Mais nous connaissons d'autres bénédictions encore. Dieu veut que nous le comprenions et que nous l'aimions dans ses voies ici-bas; — dans tout ce qu'il fait au milieu d'un monde impur où Satan règne. Il veut que nous soyons en communion avec lui-même et avec ses pensées au sujet de ce qui nous entoure. Bientôt l'Eglise partagera avec le Seigneur l'exercice de la puissance envers la terre, — nous aurons part à sa gloire, car nous sommes «cohéritiers de Christ» (Romains 8); mais, en outre, nous sommes associés avec Christ dès maintenant pour le service, ce qui ne peut avoir lieu que dans l'humiliation. — Jésus Servit Dieu dans une situation où le mal avait le dessus, et devant «la contradiction de la part des pécheurs», et Dieu veut que nous le servions fidèlement dans ce monde qui est le domaine de Satan, et où nous n'avons pas seulement à lutter contre le mal qui est en nous-mêmes, mais contre le mal chez les autres. Il n'y a que sa grâce qui puisse nous en rendre capables. C'est aussi bien la «grâce de Dieu» qui nous donne de servir, et la «grâce de Dieu» qui nous rend propres au service, que c'est la «grâce de Dieu» qui nous a sauvés au commencement.

Lorsque Christ «est monté en haut, il a donné des dons aux hommes, les uns apôtres, les autres prophètes, les autres évangélistes, les autres pasteurs et docteurs; en vue de la perfection des saints, pour l'oeuvre du service, pour l'édification du corps de Christ» (Ephésiens 4). Nous voyons par là comment la grâce de Dieu tend vers ce but, c'est-à-dire, à fortifier et à qualifier pour le service. C'est pourquoi, lorsque nous sommes enseignés par un homme, ce n'est pas seulement pour que nous en recevions du bien pour nous-mêmes, mais pour que nous en recevions tellement de bien que nous devenions les serviteurs des autres; pour que la vie qui est en nous les vivifie, fortifiant en eux ce qui a besoin d'être raffermi. Quand ceci n'est pas compris, que nous ne reconnaissons pas nos privilèges à cet égard, nous pourrons jouir beaucoup d'être enseignés, mais notre foi sera faible et nos prières seront languissantes, par la raison que nous n'aurons pas devant les yeux ce qui doit être notre véritable objet. L'enseignement parmi les saints ne doit pas seulement avoir pour but de leur développer la vérité, de leur dire ce qu'est le salut, ou de leur offrir des encouragements; il doit tendre aussi à diriger les coeurs vers ces choses dont Dieu veut qu'elles soient les objets de notre service, dans la foi, ainsi qu'il est dit: «votre oeuvre de foi, votre travail d'amour, votre patience d'espérance de notre Seigneur Jésus Christ» (1 Thessaloniciens 1). Je n'ai pas besoin de dire, chers amis, combien souvent nous manquons à cet égard, nous contentant de nos jouissances personnelles. Mais quand une fois nous avons compris que l'intention de Dieu, en nous donnant de nouvelles forces, est que nous le servions en servant les autres, nous avons un motif d'agir tout nouveau, un but pour lequel il vaut la peine de vivre.

Je ne connais rien de plus important, et de plus doux en même temps, que d'être capable de discerner le vrai serviteur de Christ dans le monde; rien ne distingue davantage une âme enseignée de l'Esprit de celle qui ne l'est pas. Lorsque le Seigneur Jésus était sur la terre, c'était une chose précieuse, c'était la grande pierre de touche de la foi, que de pouvoir le reconnaître pour ce qu'il était en effet, le Fils, l'Envoyé de Dieu, et de pouvoir le confesser comme tel. Maintenant encore, le Saint Esprit tend toujours à nous faire voir clairement ce qui, dans le monde, est de Dieu; et, jusqu'à ce que Jésus revienne, cela ne se trouvera que dans des conditions humbles, qui ne sont pas agréables à la chair, mais que l'Esprit distingue. Lui-même conduit l'âme à dire: «C'est là que je prendrai ma place, car là est la bénédiction».

Les récits de l'Ecriture, tels que celui dont nous nous occupons en ce moment, nous mettent en rapport avec les serviteurs de Dieu, la famille de la foi, des temps écoulés. Nous y voyons que, dans le principe, leurs épreuves étaient semblables à nos épreuves, leurs luttes semblables à nos luttes, de sorte que nos coeurs sont unis aux leurs, comme rien autre ne saurait le produire.

David avait pris la place où nous le trouvons ici, parce qu'il marchait par la foi, ce que Saül ne faisait pas. David est la figure de l'homme avec lequel est la vérité et la vocation de Dieu. Déjà comme «jeune garçon» (1 Samuel 17: 33), David avait appris à se confier dans le Seigneur, le Dieu d'Israël. Quand le lion et l'ours se présentèrent, ce fut dans la foi qu'il alla au-devant d'eux et les terrassa. Ceci se passait dans le secret entre David et Dieu; mais bien peu de temps après, David fut, par la foi, rendu capable de se mettre en avant, non pas pour sa propre délivrance, mais pour celle de l'Israël de Dieu. La foi le fait entrer dans le courant des pensées de Dieu. A mesure qu'un chrétien marche en avant, lors même que les épreuves qu'il rencontre deviennent toujours plus grandes, il suit le courant des conseils de Dieu, et comme le dit l'apôtre Paul: «il est mené en triomphe dans le Christ» (2 Corinthiens 2). Il peut être appelé à accomplir des choses de plus en plus pénibles, mais dans un sens, elles lui paraîtront moins difficiles, parce qu'il connaîtra mieux la puissance de Dieu. Seulement les premiers pas dans ce chemin doivent se faire dans le secret, alors Dieu nous conduira plus loin.

Mais revenons à notre sujet. Dieu avait oint David comme roi; Saül était toujours au pouvoir, remplissant des charges, etc., que celui-là seul qui était de la foi, aurait dû remplir. David ne lève pas sa main contre Saül, il renonce à tout ce qui était de la chair, et prend sa place, simplement et uniquement, comme un exilé dans le désert; — et quand il fut là, il jouissait de la moindre preuve de bienveillance, du moindre secours. Il en est de même, à cette heure, de tous les serviteurs de Dieu, qui cherchent à marcher selon la vérité, et qui, dans le sens spirituel, sont des descendants de David. Plus ils seront fidèles, plus ils seront sensibles au moindre témoignage de bonté et d'affection qu'ils trouveront sur leur chemin, car leurs coeurs seront souvent épuisés et fatigués. Il n'est rien de plus doux pour celui qui désire le bien des autres et la gloire de Dieu, que de voir quelqu'un se joindre à lui pour l'amour de la vérité. Le «verre d'eau froide», la plus petite marque de bon vouloir, met en rapport celui qui les donne avec la vérité de Dieu, et devient un service réel et précieux. «En tant que vous avez fait ces choses à l'un des plus petits de ceux-ci, qui sont mes frères, vous me les avez faites à Moi-même» (Matthieu 25: 40). Dieu seul lit dans les coeurs; mais pour celui qui accueille, qui assiste ceux qui marchent dans la vérité et souffrent pour la justice, et qui s'associe à leurs souffrances, il y a de la bénédiction.

David était dans le besoin; près de là était un homme qui n'était pas dans le besoin — un riche de la terre, environné des biens de ce monde, vivant dans l'abondance. C'était Nabal (verset 2). David ne lui enviait pas ses richesses (au contraire, sans doute, il n'aurait pas voulu changer son sort contre celui de Nabal), et le message qu'il lui faisait parvenir n'avait rien de désobligeant (versets 6-8): «Que ces gens donc soient dans tes bonnes grâces, puisque nous sommes venus en un bon jour. Nous te prions de donner à tes serviteurs, et à David, ton fils, ce qui te viendra en main». Le cœur de David était assez large pour qu'il pût se réjouir de tout ce qui aurait identifié la position de Nabal avec la sienne. Il en sera toujours ainsi chez le chrétien dont le coeur est rempli de la grâce; il n'enviera rien à ceux qui l'entourent, et ne sera nullement porté à dire: «vois ce que je suis et ce que tu n'es pas» — non, il cherchera plutôt le lien qui peut unir les autres avec lui-même.

Dieu agit en grâce — Dieu savait quelle serait la fin de Nabal; néanmoins Il le met miséricordieusement à l'épreuve, et s'il y avait eu, dans le coeur de Nabal, un atome de grâce, ou d'un sentiment quelconque selon Dieu, il aurait répondu à cet appel. Mais il n'y avait rien de pareil dans ce coeur. Les circonstances extérieures l'occupent seules. Il suppute avec dureté la position de David et dit: «qui est David, et qui est le fils d'Isaï? Aujourd'hui est multiplié le nombre des serviteurs qui se débandent d'avec leurs maîtres» (verset 10). Et ici nous avons à nous souvenir, chers amis, que tous par nature nous avons les mêmes sentiments que Nabal; il n'y a pas de coeur qui ne les renferme, aussi bien que tout autre mal; et à ce sujet, nous avons, même comme chrétiens, à veiller et à nous juger. Puisque nous désirons servir Dieu, y a-t-il en effet cette bonne volonté, en toute franchise de coeur, pour soutenir, encourager, autant que nous le pouvons, ceux qui en ont besoin, en les assistant, en les soulageant, en leur montrant de la sympathie dans les choses temporelles comme dans les choses spirituelles? L'amour sait trouver bien des moyens.

Il y a, dans les temps où nous vivons, bien des chrétiens qui paraissent craindre et vouloir éviter les circonstances dans lesquelles ils sont placés. — Prenons garde, toutefois, de les juger légèrement, et de dire ce que Nabal dit, sans égard pour les luttes intérieures et la profonde angoisse par lesquelles ils ont peut-être passé. David avait renoncé à bien des choses: avant de prendre sa place d'exilé, il avait rompu plus d'un lien, passé par plus d'un combat avec lui-même, de sorte que, quoiqu'il fût vrai que, dans un sens, il se fût enfui loin de son maître, l'action était bien différente aux yeux de Dieu qu'à ceux de l'homme. Ce qui est extérieur attire promptement le regard, tandis que souvent il faut une recherche patiente et active pour découvrir la vérité cachée. Si l'on veut vivre dans la communion de Dieu, de ses pensées, de ses voies, cette recherche doit être là, sinon nous ne saurons jamais ce qu'il faut ou non encourager. Soyons assurés que plus une vérité sera connue et acceptée, plus elle nous isolera du reste des hommes.

Il y a pour nous une leçon profondément pratique dans ce qui est mis à découvert ici du coeur de David. Il était encore dans la chair et (ainsi que cela nous arrive fréquemment quand une chose vient à nous inattendue), il n'était pas préparé à recevoir, dans la fermeté de la grâce, ce qui, par la volonté de Dieu, se trouvait ici sur son chemin. Sans nul doute, il considérait l'affront que Nabal lui infligeait, comme étant plus qu'il ne pouvait supporter. — Que de fois il en est de même chez les saints de Dieu! Ils s'arrêtent aux circonstances, au lieu de s'en détourner pour regarder à Dieu et d'agir alors selon Lui en toutes choses! Ils se plaignent, ils murmurent — et c'est ainsi que le témoignage de la grâce se perd. Une foule de choses agissent sur nous qui nous affectent d'une manière sensible et douloureuse. — Si elles nous trouvent en communion avec Dieu, elles seront certainement une occasion de produire des fruits à sa gloire; sinon, nous serons souillés par elles, et nous aurons à confesser le péché, de manière que Satan, au lieu de trembler et de s'enfuir loin de nous à chaque difficulté, a au contraire l'avantage sur nous. C'est un grand bonheur quand nous pouvons louer Dieu de ce qu'Il nous a rendus capables de triompher pratiquement et de remporter la victoire. Et c'est à cela que nous devrions tendre. L'apôtre Paul pouvait dire: «J'ai combattu le bon combat; j'ai achevé la course; j'ai gardé la foi» (2 Timothée 4: 7). Nous pouvons toujours bénir Dieu ce qu'Il est en Lui-même, et de ce qu'Il nous a faits en Christ, mais nous pourrions aussi arriver à Le bénir de la victoire que nous remportons sur Satan et sur le monde.

Malheureusement, la condition morale dans laquelle nous nous trouvons est souvent, un obstacle à ce que nous puissions bénir Dieu ainsi. Je ne dis pas cela pour que nous soyons découragés, mais plutôt pour que nous distinguions ce que nous sommes en Christ, et ce que nous sommes pratiquement comme vainqueurs. Voyez encore David. Non seulement il était en danger de ne pas vaincre, mais d'être lui-même vaincu et de faire une chute profonde. Car comment le voyons-nous agir? Est-ce comme un serviteur de Dieu? Supportant avec douceur les paroles ironiques et mordantes de Nabal — les acceptant pour l'amour de Dieu? Hélas! non. C'est dans un esprit d'orgueil blessé qu'il les reçoit.

Cependant il y avait dans la maison de Nabal un être bien différent de Nabal, et qui lui était uni par des liens que Dieu seul pouvait rompre: c'était une femme, appartenant au Seigneur et marchant par la foi. Abigaïl avait su discerner en David, exilé et dans le besoin, celui que le Dieu d'Israël avait oint, et auquel Il devait donner la puissance comme au chef élu de son peuple: «L'Eternel ne manquera point d'établir une maison ferme à mon seigneur, car mon seigneur conduit les batailles de l'Eternel» (verset 28). Abigaïl pouvait suivre du regard de la foi le chemin de David, et anticiper le moment de sa gloire, et ceci nous montre qu'elle avait été enseignée de Dieu. Mais à cause même de cet enseignement, sa position dans la maison de Nabal devait être d'autant plus pénible, et sa relation avec lui un pesant fardeau. Journellement éprouvée, n'ayant aucune communion avec celui à qui elle était unie, mais rencontrant de sa part toutes sortes de difficultés — voyant la conduite insensée de Nabal en contraste avec le témoignage de l'homme de foi — elle pouvait se dire que les voies de Dieu envers elle étaient étranges. — Et plus d'une âme est ainsi placée, par le seul désir de servir Dieu, dans des circonstances pénibles et difficiles qu'elle-même n'a pas cherchées. Mais si ce désir est véritable, il ne sera pas déçu. Dieu peut nous donner les moyens de Le servir d'une manière ou d'une autre déjà maintenant, et le moment viendra où nous Le servirons à notre entière satisfaction. En attendant il y a un grand profit et une bonne discipline pour le coeur, d'avoir ainsi à nous courber sous le joug, et à être amenés à nous soumettre à Dieu. Moïse n'était pas lié à la maison de Pharaon, c'est pourquoi il la quitta par fidélité pour le Seigneur; il en fut de même pour Abraham dans sa parenté. Mais il peut y avoir des positions comme celle d'Abigaïl, où il faut supporter et porter le joug, s'attendant à Dieu, et il en résultera certainement d'abondantes bénédictions. On y passe par un brisement secret de la volonté et une mortification de la chair, dont, en servant Dieu plus tard, on reconnaît toute la nécessité.

Abigaïl, dans sa vie isolée, était bien plus en communion avec la vérité que David, tel que ce chapitre nous le présente, et ce fut à elle qu'il fut donné de réprimer le sentiment coupable qui s'élevait dans le coeur de cet homme de foi lui-même. Tandis que David était comme perdu dans les ténèbres de ses propres pensées, Abigaïl apportait et faisait luire devant lui la pure lumière de la vérité: et David l'écouta et rendit grâces à Dieu, «Béni soit l'Eternel, le Dieu d'Israël, qui t'a aujourd'hui envoyée au-devant de moi! Et béni soit ton conseil, et bénie sois-tu, qui m'as aujourd'hui empêché d'en venir au sang, et qui en as préservé ma main!» (versets 32, 33). Telles furent les paroles de David, lorsqu'il eut vu le péché dans lequel son orgueil l'avait entraîné.

Qui aurait pu croire qu'Abigaïl serait jamais le conseiller de David — lui qui passait par tant de souffrances pour la cause du Seigneur, — lui, le bien-aimé de Dieu — son serviteur — haut élevé dans la grâce, dans la foi — bien au-dessus d'Abigaïl, ainsi qu'elle-même le pensait sans doute! — Et pourtant Abigaïl fut mise à l'épreuve et retenue là où elle était seule, jusqu'à ce que le moment fût venu pour elle de montrer à David son devoir et d'intercéder pour Nabal.

Remarquez de quelle manière Dieu enseigne. Ce fut à Abigaïl qu'il fut donné de faire intercession, lorsque David dans sa colère, était sur le point de frapper, de se venger lui-même, au lieu de tout abandonner à Dieu; et ainsi un des plus beaux côtés du caractère de David, celui de remettre toutes choses entre les mains de Dieu, aurait été perdu. Les paroles d'Abigaïl, au contraire, nous font voir la puissance suprême de la foi: «l'âme de mon seigneur sera liée dans le faisceau de la vie par devers l'Eternel, ton Dieu; mais il jettera au loin, comme avec une fronde, l'âme de tes ennemis. Et il arrivera que l'Eternel fera à mon seigneur selon tout le bien qu'il t'a prédit, et il t'établira conducteur d'Israël. Que ceci donc ne te soit point en achoppement, ni un sujet de regret dans l'âme de mon seigneur, d'avoir répandu du sang sans cause et de s'être vengé lui-même. Et quand l'Eternel aura fait du bien à mon seigneur, tu te souviendras de ta servante» (versets 29-31).

Si David s'était placé par la pensée au temps de sa gloire future, il n'aurait jamais songé à lever le bras pour répandre le sang innocent; car peu s'en fallut, nous le savons, que ses mains ne se fussent trempées dans celui du jeune homme, qui parla de lui à Abigaïl avec tant de bienveillance (versets 14-17). S'il s'était demandé sous quel jour cette action lui apparaîtrait au temps de sa gloire, il se serait arrêté. — La foi nous fait regarder au delà des circonstances présentes vers le moment de la fin, et de cette manière on apprend à considérer et à juger les choses selon Dieu. Abigaïl agissait ainsi; et si nous réalisions notre union avec Dieu et le but promis de gloire, nous ferions comme elle. Si dans les choses pénibles qui nous arrivent, nous pouvions, par la foi, nous identifier avec Dieu et voir en Lui notre ami, Celui qui dit: «A moi la vengeance; moi, je rendrai la pareille, dit le Seigneur» (Romains 12: 19), nous ne songerions jamais à nous venger nous-mêmes, ou à nous préoccuper d'autre chose que d'intercéder pour ceux qui nous ont affligés ou maltraités. Les voies actuelles de Dieu sont en grâce et en miséricorde. Nous devons plutôt chercher à ramener, à subjuguer, à adoucir. «Ne sois pas surmonté par le mal, mais surmonte le mal par le bien» (Romains 12: 21). Rien ne convient mieux, maintenant, que d'agir en grâce, et de tâcher d'en faire sentir la puissance à tout ce qui se trouve sur notre chemin, à chacun de nous individuellement. — Quel honneur pour cette pauvre femme éprouvée, témoin solitaire de Dieu dans la maison de Nabal!

L'heure doit venir où la main du Seigneur portera le coup final. David avait épargné Nabal, mais Dieu allait le rencontrer dans son propre chemin. Nabal ne se souciait de rien de ce qui se passait autour de lui. Il ne comprenait pas. On avait intercédé pour lui, il ne s'en préoccupait guère, et quant à la grâce, peu lui importait. «Et voici, il faisait un festin en sa maison, comme un festin de roi; et Nabal avait le coeur joyeux, et était entièrement ivre» (verset 36). Mais quand tout fut terminé, sa femme lui fit part, simplement de ce qui s'était passé — ce récit, empreint de miséricorde et de grâce, fait dans la simplicité de la vérité, fut pour Nabal comme une parole de mort. — Son coeur s'amortit en lui, et «il devint comme une pierre» (versets 37, 38). La main de Dieu s'était levée contre lui.

Ceci donne au chapitre un caractère profondément solennel. Telle est la fin de tout ce qui n'est pas de la foi. Les choses mêmes qui sont faites pour bénir, deviennent une puissance de destruction; et ceux-là le reconnaîtront un jour dans toute son étendue, qui, en faisant le compte des appels de la grâce qu'ils ont entendus, se trouveront séparés de toute bénédiction et loin de Dieu qui la donne. Ce sera le remords; — et rien ne sera plus affreux; car ce sera la conscience d'avoir laissé passer pour toujours les occasions où la grâce venait à nous, et d'être séparé de Dieu pour toute l'éternité!

«La voie» de Nabal était celle «du fou», et sa fin fut celle de «l'insensé». Il en sera de même de tous ceux qui refusent de prendre part aux souffrances et à l'humiliation du vrai David. Nabal disait: «Et prendrai-je mon pain, et mon eau, et la viande que j'ai apprêtée pour mes tondeurs, afin de la donner à des gens que je ne sais d'où ils sont» (verset 11)? Abigaïl savait «d'où ils étaient», et ces choses auxquelles Nabal attachait tant de prix n'étaient rien pour elle, en comparaison du service de Dieu. Nous ne sommes peut-être pas tout à fait comme Nabal, toutefois chacun de nous a le même penchant à vaincre, la même pensée qui fait dire: «mon pain — ma réputation — ma position», aussitôt que le moi peut se mettre en travers du privilège de l'identification avec Christ dans l'abaissement. Rien ne peut nous rendre plus malheureux que d'avoir la conscience que l'Esprit nous condamne, et du moment qu'il y a cette recherche des choses qui sont de nous et non de celles qui sont de Christ, l'Esprit de Dieu doit nous condamner.

Nous avons vu la fin de Nabal; mais quelque terrible qu'elle fût, elle délivra Abigaïl de son état de souffrance, et l'unit à celui dont elle savait que la bénédiction du Seigneur reposait sur lui (versets 39-42). Elle abandonna sa maison, ses richesses, tout, à ce qu'il paraît, pour partager le sort de cet étranger, pourchassé et «poursuivi comme une perdrix dans les montagnes» (1 Samuel 26: 20). — C'est à nous de voir dans quelle condition nous nous trouvons. Nous pouvons ne pas être en état de prendre la position élevée de David — mais alors il y a celle d'Abigaïl, et nous pouvons du moins nous associer à ceux qui souffrent pour la cause de Jésus, et renoncer à tout, ou à une partie de ce que nous possédons. Il s'agit moins de la mesure ou de la valeur de ce que nous abandonnons, que du lien qui existe entre ces choses et nous.

Ce n'est qu'en entrant dans les épreuves et les difficultés des autres, que nous apprendrons à mieux connaître les Ecritures, et que notre pensée sera éclairée quant aux choses de la vie et quant aux serviteurs de Dieu avec lesquels nous devions chercher à nous identifier. Apprenons à juger les circonstances présentes, en nous plaçant, par la foi, au temps de la fin. Alors David verra devant lui Urie — Paul verra Etienne, à la mort duquel il consentit. — Etonnante pensée! — mais le bonheur de Paul ou de David en sera-t-il affaibli? Nullement: — il y aura alors une puissance de bénédiction comme Dieu seul peut la donner, et qui éloignera tout souvenir amer de ce genre. Croyez que si je m'exprime ainsi, ce n'est pas que je fasse peu de cas du péché, mais c'est afin de familiariser nos âmes avec ce moment. Rien ne peut annuler les conséquences des péchés passés — mais tâchons de ne pas avoir devant l'esprit maintenant le souvenir des personnes ou des choses, auxquelles nous ne pouvons penser avec sérénité. En nous plaçant devant la perspective de ce dernier jour, nous serons rendus capables de discerner la véritable nature de tout ce qui nous entoure. Jamais un homme ne s'est placé sérieusement en face du jugement de Dieu, sans glorifier Dieu, et c'est à cela que la foi, quelque faible quelle soit, doit nous amener. Souvent nous avons de la foi pour les choses ordinaires, eh! bien, c'est là que nous éprouvons combien Dieu est près. Par conséquent, que nous soyons menacés par un danger à venir ou tourmentés par des choses passées ou actuelles, recherchons la puissance de la foi — que Dieu soit notre conseiller. Que votre refuge et votre force soient réellement en Dieu. Cela seul peut soutenir le coeur. «Car si, étant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, beaucoup plutôt, ayant été réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie. Et non seulement cela, mais nous nous glorifions même en Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, par lequel nous avons maintenant obtenu la réconciliation» (Romains 5: 10, 11).

Notre bonheur est de savoir non seulement que nous avons la paix avec Dieu, mais aussi qu'Il veille sur nous et nous conduit dans le chemin du service. Puissions-nous en faire l'expérience, comme nous trouvant sous sa main, et si nous désirons être amenés dans une communion pratique avec Lui-même et avec ses voies, recherchons-la par des prières et des supplications.