Les Psaumes, ou même les Prophètes, si nous
les examinons, pour constater le caractère du résidu d'Israël dans les derniers
jours, et les circonstances que ce résidu aura à traverser alors, nous montrent
un peuple dans la détresse et opprimé, après qu'il a subi diverses déceptions
de la part de ceux dont il avait cru posséder l'amitié:
«Les oiseaux de proie sont sur eux tout le long de l'été, et toutes les
bêtes des champs tout le long de l'hiver» (Esaïe 18: 6). Tel sera l'état de
la nation quand l'Assyrien l'enserrera du dehors, et que la Bête l'opprimera au
dedans. Au centre de leur nationalité, là où leur coeur
aura cherché du repos, là il y aura un trouble tel qu'il n'y en a pas eu depuis
qu'il y a eu une nation, et qu'il n'y en aura plus jamais (Matthieu 24: 21): c'est le temps auquel Dieu fera une oeuvre abrégée sur la terre (comp.
Romains 9: 28).
Bien que la nation en général doive passer
par cette terrible affliction, l'effet que celle-ci produira sur les méchants
et sur les saints sera bien différent. La masse de la nation se sera jointe à
la Bête et aura embrassé l'idolâtrie; elle aura reçu
celui qui doit venir en son propre nom (Jean 5: 43); l'esprit impur d'idolâtrie
sera entré en Israël avec sept autres esprits plus méchants que lui (Matthieu
12: 43-45). Israël aura abandonné son Dieu, rejeté son Messie, reçu l'Antichrist! Que lui restera-t-il quand l'oppression arrive? «Il se dépitera,
et maudira son Roi et son Dieu: et il regardera en haut, puis il regardera vers
la terre, et voilà la détresse et les ténèbres, une effrayante angoisse, et il
sera enfoncé dans l'obscurité» (Esaïe 8: 21, 22).
Mais nous avons à nous occuper du résidu
attaché à Israël, aux espérances d'Israël, plus particulièrement à la relation
d'Israël avec Jéhovah, mais réveillé au sentiment du mal qui règne et, là où il
n'a pas fui (comp. Apocalypse 12:
6), souffrant de toutes parts de ce mal. L'Esprit et la Parole de Dieu agissent
dans les coeurs des fidèles: ils se rappellent les
promesses faites au peuple comme peuple de Dieu; ils recherchent la fidélité à
Jéhovah et, pour cette raison, sont opprimés et chassés du pays, haïs d'Israël
infidèle, et cruellement persécutés par ceux qui dominent sur eux; mais, amenés
au sentiment des péchés de la nation, y compris les leurs propres, ils mènent
deuil sur la ruine d'Israël; ils voient l'approche des jugements et la main de
Dieu déjà étendue sur eux en dur châtiment. Quoique chassés dans les repaires
des dragons, et bien que trouvant difficile d'espérer en Celui contre lequel
ils ont péché et dont la main est étendue contre eux, ayant peine à compter sur
des promesses quand tout paraît obscur, ils espèrent cependant en Jéhovah et
attendent le Messie. Quoi qu'il en soit, les promesses sont là, et Dieu
établira certainement son Roi sur sa sainte montagne de Sion (Psaumes 2).
Depuis le chapitre 32 du Deutéronome, les prophètes avaient prédit cet état de
choses, en sorte que quelque sombre et terrible et, humainement parlant,
désespéré qu'il soit, cet état dans les menaces mêmes qui l'accompagnent,
renfermait quelque chose qui soutient l'espérance.
Les Psaumes, comme nous avons souvent eu
l'occasion de le faire remarquer, répondent à cet état
de choses, et nous donnent une expression divine des espérances et des
afflictions de ces coeurs exercés. Je ne ferai ici
qu'en rappeler les grands principes pour faire ressortir d'une manière plus
claire le caractère particulier du Cantique de Salomon, et ce qu'il apportera
au coeur et à la foi du résidu. — Deux grands
principes caractérisent l'état du résidu au milieu de son affliction:
d'abord, l'intégrité, et ensuite la confiance en Jéhovah. L'Esprit de Christ
forme les fidèles à cela. Christ, parfait dans l'intégrité aussi bien que dans
la confiance en Jéhovah, les rend capables par sa grâce, dans les expressions
qu'il leur fournit dans ces Psaumes, d'exprimer leur confiance en dépit de tous
les manquements qui rendent cette confiance plus
difficile encore que même les eaux profondes par lesquelles ils passent. Cette
intégrité même et l'opération de l'Esprit de Christ en eux, les conduisent
nécessairement à la confession du péché et d'une longue iniquité qui était
allée jusqu'à les rendre coupables de sang (comp.
Psaumes 51). Il est remarquable de voir ici comment la déclaration de
l'intégrité et la confession des péchés se trouvent réunis ensemble. La même
chose se voit dans Job, et même dans Pierre. C'est pourquoi aussi, quand les
fidèles regardent à Dieu, la miséricorde précède toujours la justice dans leurs
pensées: Dieu les avait renfermés dans l'incrédulité
afin qu'ils devinssent des objets de miséricorde (Romains 11: 31). Sans doute
Dieu était juste en accomplissant ses promesses; mais
il fallait que les fidèles fussent amenés à la véritable et juste position qui
convenait à l'accomplissement des promesses, à cette position dans laquelle le
seul «interprète», «un entre mille» (comp. Job 33:
23) pouvait les placer. Or cet «interprète» est
précisément l'Esprit de Christ dans les Psaumes: Il leur montre la position de
l'intégrité en confessant leurs péchés; et alors ils peuvent compter sur la
miséricorde, et ainsi sur la justice.
Telles sont les voies morales de Jéhovah; elles sont des plus instructives et des plus
intéressantes. Les Psaumes, et aussi les Prophètes, ajoutent que ce sera par
l'intervention du Messie que tout cela s'accomplira, et les Prophètes, dans
tous les cas, nous disent clairement que ce sera sous, «la nouvelle alliance».
Le Cantique de Salomon, il me semble, nous
apprend quelque chose de plus nous y voyons la formation dans les fidèles qui
attendent, dans l'âme enseignée de Dieu, — (effet réalisé dans quelques âmes
cachées, en même temps que révélé et découvert à tous) d'affections présentées
ici figurativement; puis la révélation de l'amour dévoué du Messie pour le
peuple, pour Jérusalem, le centre du peuple, sur laquelle il pleura
lorsque, dans sa folie, elle le rejeta, afin que le coeur
humble et enseigné de Dieu eût la conscience de cet amour et se confiât en lui
quoiqu'il ne fût pas encore révélé de fait.
Le Cantique commence par la reconnaissance
de la félicité qu'il y a dans l'amour du Messie. Son nom, à cause des grâces
qui sont en Lui, est comme «un parfum qui se
répand»; il est aimé des «hommes droits», de ceux, je présume, qui
se sont gardés de l'idolâtrie et de la corruption, C'est la même classe de
personnes, exactement, que nous retrouvons au chapitre 14 de l'Apocalypse; et
qui, évidemment donc, en attendant Christ, a souffert, en un certain sens,
comme Lui.
Ensuite, l'Epouse (Jérusalem) demande à
être «tirée» par le Messie. «Tire-moi, et nous courrons après toi» (1: 4);
mais elle dit «nous», parce qu'elle représente réellement tous les
fidèles. Alors «le Roi» apparaît, le Roi
Messie. Il aime Jérusalem intimement, et elle apprécie cet amour. Ce
sont les «hommes droits» qui aiment le
Messie. Nous savons déjà que c'est là le caractère du résidu. Les versets 5 et
6 du chapitre 1, disent l'histoire de Jérusalem, de la longue persécution et de
la désolation de Jacob: le soleil l'a regardée, le feu
de l'épreuve; elle avait été établie gardienne des nations pour en tirer du
fruit, et elle n'avait pas gardé sa propre vigne. Ensuite, au verset 7, elle ne
voudrait être nulle part ailleurs qu'avec les troupeaux du Messie, elle ne
voudrait pas, comme une voyageuse dissolue, être avec d'autres qu'avec Lui. Les
sentiers, tracés par ceux que Dieu reconnaît comme étant guidés et qu'il guide,
le témoignage au milieu du peuple de Dieu, doivent la conduire. Ceci l'amène au
témoignage que le Messie rend Lui-même du plaisir qu'il prend en elle, et à la
conscience que la grâce est ainsi formée en elle pour répandre son parfum
(verset 12). L'acte de Marie, blâmé par Judas, et qui répondait si bien aux
circonstances du moment, n'est-il pas l'expression frappante de ce que nous
lisons ici? Tout ce qui précède est une sorte
d'introduction qui nous montre les aspects sous lesquels l'Epoux et l'Epouse
sont envisagés, ainsi que la position qu'ils occupent, en sorte que nous
reconnaissons l'Epouse.
L'action et son effet vont commencer
maintenant. L'Epouse prend sa place, et l'Epoux ne reconnaît qu'elle seule.
Elle est «le muguet»; le reste sont des
épines (2: 1, 2). Elle est soumise à Christ, elle le reconnaît comme la vrai
arbre fruitier, «le pommier entre les arbres de la
forêt» (2: 3). Son ombre la protège; elle en jouit et
son fruit est sa joie. Jérusalem et Israël sont relevés et bénis sous le Messie; ils se réjouissent en Lui; ils sont abrités sous
Lui. Nous voyons maintenant combien le Cantique va plus loin que les Psaumes; car il nous fournit l'expression de la confiance
dévouée du coeur de l'Epouse en l'amour du Messie,
cet amour étant la source de la joie, sa joie, et la comblant de bénédiction.
Lui aussi se repose dans son amour; et elle, dans son coeur, pèse et estime la valeur de cet amour; elle trouve
ses délices en ce que Lui se repose dans son amour (2: 3-7) (*). (Voy. Sophonie 3: 17.) Le résidu
entre, par la foi, dans la joie que le Messie aura dans son amour d'Epoux pour
les fidèles, et il exprime le repos que le propre coeur
de la Bien-aimée trouve là.
(*) Quoique j'aie pensé différemment, je
crois qu'il faut lire au verset 7: «jusqu'à ce qu'Il
le veuille».
Remarquez le verset 8 de ce chapitre 2, et
sa liaison avec ce qui précède, car c'est une clef pour l'intelligence de la
portée de ces paroles: «C'est la voix de mon
Bien-aimé! Voici, il vient!» Ce rapport n'est pas accidentel; nous retrouvons la forme du verset 7 au verset 5
du chapitre 3, et au verset 4 du chapitre 8, et chaque fois elle est suivie par
la venue du Bien-aimé, mais d'une manière qui marque un progrès. Ici, le Messie
vient, se révélant Lui-même. Après le verset 8 du chapitre 3, il vient couronné comme Roi Messie, le Fils de David, le Prince de
Paix, couronné au jour de ses épousailles, comme le coeur
de sa mère (Israël) le couronne. Après les versets 3 et 4 du chapitre 8,
l'Epouse remonte du désert avec Lui, appuyée sur son Bien-aimé. Ici, dans ce chapitre
8, nous revenons au premier principe de bénédiction posé au verset 3 du
chapitre 2. La Bien-aimée a été «suscitée sous le
pommier» (8: 5); c'est là qu'elle a pris naissance. Ce n'est pas sous Moïse, ni
sous l'ancienne alliance, qu'Israël ou Jérusalem pouvaient vraiment trouver la
bénédiction, encore moins sous l'Egypte; mais sous
Christ: Christ était pour «l'Epouse» la source, l'arbre de la bénédiction et la
vie. — Ainsi, pour compléter cette suite de pensées, au lieu que d'autres
vignes lui soient confiées et qu'elle ne sache pas garder la sienne propre,
Salomon, Christ comme Prince de paix local, a une vigne en Baal-Hamon (8: 11). Le sens de ce mot est difficile;
mais quoi qu'il en soit, c'est maintenant Salomon, le Messie lui-même, qui a la
vigne. J'incline à croire que ceci a rapport à la domination universelle de
Christ sur la terre, sur les peuples, la vigne qui désormais portera son fruit.
Mais il y a ici une vigne spéciale, qui une fois n'avait pas été gardée, mais
qui est maintenant devant l'Epouse, savoir Israël, qui, par grâce, gardera
maintenant diligemment sa vigne. L'Epouse a sa vigne devant elle.
Le Cantique finit par l'expression du désir
que l'Epoux se hâte: les amis (ses compagnons) sont
attentifs à écouter, pour entendre le son de sa voix. Tel est le désir des
hommes droits; mais, comme Epouse, elle demande
à l'entendre (8: 13, 14).
Tout ceci signale, je crois, deux choses.
D'abord, nous voyons comment la foi de ceux, dont les coeurs
ont été ouverts, entre dans la parfaite joie que l'amour de Christ trouve dans
la bénédiction d'Israël, et spécialement de Jérusalem. Ce sentiment est exprimé
ici par anticipation pour mettre cette foi en activité et pour l'encourager. Le
Cantique n'est donc pas une déclaration prophétique de principes moraux,
quelque profondément importants que soient ceux-ci en rapport avec les voies de
Jéhovah à l'égard d'Israël, mais il est l'expression de l'amour d'Epoux que le
Messie a pour son peuple, pour le peuple et pour la ville qu'Il a choisie, non
à cause de ses pierres, cela va sans dire (comp. Luc 21: 5, 6) — mais comme siège de l'élection (comp. Psaumes 132: 13, 14, et même tout le Psaume).
Ensuite, le Cantique est seulement l'anticipation de la foi;
car chaque fois que l'Epouse réalise cette anticipation et qu'elle contemple
l'Epoux se reposant dans son invariable amour, la pensée de sa venue suit
immédiatement. Elle ne le possède pas encore de fait;
et il y a là, comme nous avons vu, quelque chose de progressif. A la fin du
chapitre 2, l'Epouse a la conscience que le temps est venu, la grâce du
Seigneur produisait et faisait germer et fleurir la bénédiction (comp. Psaumes 102). Je ne mentionne pas en détail les
divers exercices de coeur qui accompagnent tout cela: Il y a une vraie affection dans l'Epouse, mais elle a
failli (chapitre 5). Je fais remarquer seulement que l'Epoux lui parle, à elle,
son Epouse: cela est juste. Christ peut donner
son approbation à ceux qu'il aime. Un saint, juif ou céleste, jouit de son
amour, il peut décrire ses grâces excellentes avec joie;
mais il ne prend pas sur lui de les Lui dire, à Lui. Il y a progrès aussi dans
la conscience du caractère de la relation. Comme on l'a remarqué ailleurs, nous
avons d'abord: «Mon bien-aimé est à moi, et je suis
à lui» (2: 16), c'est le premier sentiment de consciente relation: «Nous
l'avons trouvé!» Lui reconnaît sa Bien-aimée; —
s'il en était autrement, il n'y aurait aucun soulagement; — et il jouit avec
délices de sa beauté (3: 6; 4, etc.); mais la première pensée est: «Il est à
moi». Ce n'est qu'après maints exercices, après qu'elle est tombée
en faute, et qu'elle a reçu l'assurance du prix qu'elle a pour Lui, qu'elle dit
avec un esprit plus calme: «Je suis à mon Bien-aimé» (6: 3); je lui
appartiens; — quoique la première vérité reste toujours vraie et soit même plus
profondément gravée dans le coeur, car sa valeur à
Lui et son droit sont plus sentis et mieux connus; et dans tout cela il est à
nous, quel que soit son droit sur nous, et sa joie est dans la beauté et les
grâces des siens.
Après ceci, il ne s'agit plus d'exercices; mais nous trouvons l'expression des pensées de
l'Epoux: Sa «colombe», sa «parfaite» est unique (6: 9,
10). Il peut y avoir des nations et plusieurs peuvent se trouver en relation
plus ou moins intime avec Lui, mais sa «Bien-Aimée»
est unique. Israël, seul sur la terre, a cette place. Mais dès que le
Messie considère ainsi sa Bien-aimée, aussitôt il remplit son coeur, — les coeurs des fidèles.
Il descend pour voir les fruits de la vallée, pour voir si la vigne a
fructifié, si au moins elle montre ses bourgeons, et si ce qui représentait la
vraie fidélité dans laquelle Il prenait plaisir (comme les grenades sur le
vêtement d'Aaron), a fleuri (6: 11). Tel est Israël
montrant, dans son humiliation, le bourgeonnement des fruits vivants. Avant
même que l'Epouse s'en aperçoive, son affection le porte sur les chariots de
son «peuple de franche volonté»; car tel
est le sens «d'Amminadab», comme
aussi au Psaume 110: 3; (dans le Psaume 47: 9, ce mot, «Nadibim»
est traduit «princes des peuples». Israël devient ainsi immédiatement
comme «deux armées», ou comme Manahajim,
les armées du Dieu d'ancienneté (6: 12, 13; cf. Genèse 32: 1). Après que tout
ceci a eu lieu, et quand l'Epoux (7: 1 et suivants) a
fait connaître à la Bien-aimée combien il estime sa beauté, celle-ci (7: 9 ou
10 et suivants) répète, avec le juste sentiment du droit qu'il a sur tout, et
la conscience de la grandeur de la bénédiction qu'il y a à être ainsi à sa
vraie place: «Je sais à mon Bien-aimé». Il est cela:
son Bien-aimé! Mais elle est à Lui; et alors tout son coeur peut se réjouir de ce que: «Son désir est vers
moi». Or, c'est là la pensée à laquelle Israël avait à être formé. Les
Psaumes nous présentent les exercices — les justes exercices — d'Israël; mais cette pensée du plaisir que le Messie prend
en lui, en «la Bien-aimée», — s'y trouve à peine; mais Israël devait le sentir.
Ceci découvre un élément nouveau et des plus intéressants de la condition
d'Israël, de ce dont la grâce le pourvoit, afin que
tous les sentiments que la grâce peut produire lui soient divinement donnés et
qu'il soit amené à cette confiance et à cette connaissance bienheureuse du
Messie.
Il me semble, je le répète, que non
seulement quelques images ou quelques expressions particulières, mais la structure
tout entière de ce remarquable et mystérieux poème, se rapportent à Israël, au
résidu fidèle de Jérusalem, au dernier jour, et nous fait comprendre, mieux que
toute autre portion de l'Ecriture, ce qui est préparé pour Israël, quoique le
livre se rattache en même temps à un grand nombre de passages des Psaumes, qui
confirment l'interprétation que nous en donnons. Les parties que j'ai signalées
suffiront pour indiquer le fil des pensées qui nous y sont présentées.