La mort est à nous

 «Toutes choses sont à vous, soit Paul, soit Apollos, soit Céphas, soit monde, soit vie, soit mort, soit choses présentes, soit choses à venir: toutes choses sont à vous, et vous à Christ, et Christ à Dieu» (1 Corinthiens 3: 22-23).

Un ami me disait dernièrement: «La mort est un monstre terrible, je la hais». Mon âme répondit: «Que serais-je et où serais-je sans ce monstre que vous haïssez?» La mort est à moi dans le sens le plus élevé; non simplement dans le sens le plus vulgaire, c'est-à-dire que, comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, je peux mourir; mais la mort est à moi dans le sens le plus élevé; car la mort elle-même, dans la manière dont Dieu l'a employée, dans l'usage qu'Il en a fait, est merveilleusement à moi: ma gloire et ma louange.

Et en parlant sur ce sujet, vers quoi tournerai-je d'abord mes pensées, si ce n'est vers la mort de notre Seigneur? «La mort du Seigneur» (1 Corinthiens 11: 26); «la mort du Fils de Dieu» (Romains 5: 10); «la mort du prince de vie» (Actes des Apôtres 3: 15); voilà des expressions qui peuvent bien servir d'introduction à ce merveilleux sujet. «Je suis la résurrection et la vie», a dit le Seigneur. Mais sans la mort, Il ne pouvait pas être, dans sa propre Personne, la résurrection selon les conseils divins; Il ne pouvait pas non plus être ouvertement manifesté comme étant la vie, le dernier Adam, Esprit vivifiant (1 Corinthiens 15), sans mourir d'abord. «A moins que le grain de froment ne tombe en terre et ne meure, il demeure seul; mais s'il meurt il porte beaucoup de fruits» (Jean 12: 24). «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que je laisse ma vie, afin que je la reprenne. Personne ne me l'ôte, mais je la laisse de moi-même; j'ai le pouvoir de la laisser, et le pouvoir de la reprendre: j'ai reçu ce commandement de mon Père» (Jean 10: 17, 18). Et tout le long de sa carrière, Il pouvait dire: «J'ai à être baptisé d'un baptême, et combien suis-je à l'étroit jusqu'à ce qu'il soit accompli» (Luc 12: 50). Car le but de la carrière qu'Il a parcourue comme Fils de Dieu descendu de la gloire divine, telle qu'elle est déployée dans les cieux, pour devenir le Fils de l'Homme ici-bas, ce but, était «la mort, la mort même de la croix» (Philippiens 2: 9). Merveille des merveilles, et merveille inexplicable pour la raison humaine! Le Fils de Dieu — Celui qui a créé toutes choses et qui soutient toutes choses — Celui qui est établi Juge des vivants et des morts, a été, comme Fils de l'Homme, crucifié en faiblesse (2 Corinthiens 13: 4) ! Et jamais sa gloire divine n'a brillé d'un plus vif éclat qu'alors. Une créature, si élevée qu'elle soit, n'a pas le droit d'abandonner la sphère qui lui a été assignée, sa propre sphère. Une telle restriction ne pesait pas sur le Fils de Dieu. Il avait le droit d'être adoré dans les cieux, et le droit, s'Il voulait, d'être crucifié comme Fils de l'Homme. La gloire d'une créature consiste dans l'honneur qui est mis sur elle. La gloire divine s'est manifestée ici, en ce que Christ s'est dépouillé de toute la gloire extérieure attachée à la sphère ou à la position qu'il occupait, s'abaissant lui-même, afin qu'il pût montrer la parfaite expression de sa sympathie avec la pensée de son Père. Il avait une même pensée avec le Père; et Il voulut montrer cela dans la mort, la mort de la croix. La mort, salaire du péché pour le premier Adam, était, dans le cas du dernier Adam, le payement, fait par le Fils dans un amour libre, d'un tribut dû aux conseils divins et l'expression de la parfaite sympathie du Fils de Dieu comme Fils de l'Homme, avec la justification du caractère du Père devant le monde et Satan, et devant toute la race humaine en chute. Cette croix du Calvaire, de laquelle jaillit ensuite la gloire de l'Agneau mis à mort, et maintenant vivant à la droite de Dieu, — cette croix montre que la mort, la mort dans son expression la plus terrible, ta mort même, Seigneur! est à moi, ma louange et ma gloire. Si nul autre ne la réclame, moi je le fais: monstrueuse, mais pas terrible, pas haïssable, car c'était TA mort.

Ensuite, je dois faire observer que c'est de cette manière que la gloire de Dieu, comme le Dieu de la résurrection, était manifestée. Eden, avec un homme dans l'innocence, proclamait la puissance éternelle et la divinité, et après le déluge, dans l'alliance de l'arc-en-ciel, ce signe de la longue patience de Dieu envers un monde méchant fut mis au jour.

Mais j'ai perdu l'innocence et Eden; et des actes de bonté envers moi, comme pécheur dans le temps, ne peuvent pas résoudre la question du péché, ni me sauver de la colère à venir. Mais la mort du Seigneur Jésus est la porte étroite, à travers laquelle coule à flots la lumière de la gloire de Dieu, comme le Dieu de résurrection et d'une résurrection d'entre les morts.

Premièrement, Celui qui est mort est devenu Seigneur de tous dans le vaste univers; et Il s'assiéra sur le trône pour juger tous les hommes ressuscités à la résurrection générale des morts. Or Il possède certainement cette gloire comme le Fils de l'Homme. «Car l'heure vient, en laquelle tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix, et ils sortiront, ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie; et ceux qui auront mal fait, en résurrection de jugement» (Jean 5: 28, 29). Etre ressuscité par la puissance irrésistible du Seigneur pour répondre de toutes les oeuvres faites dans le corps, dans cette vie, voilà une pensée bien propre à inspirer de la terreur.

Mais, secondement, béni soit Dieu! si nous voyons la lumière du grand trône blanc, nous savons aussi qu'en Celui qui y est assis et qui juge, il y a une première résurrection. «En vérité, en vérité, je vous dis que celui qui entend ma parole et croit à celui qui m'a envoyé a la vie éternelle et ne viendra point en jugement, mais il est passé de la mort à la vie»… «L'heure vient et elle est maintenant que les morts (moralement morts dans les fautes et les péchés) entendront la voix du Fils de Dieu, et l'ayant entendue, ils vivront. Car comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils aussi d'avoir la vie en lui-même» (versets 24-26). Ce n'est qu'à cause du résultat de sa mort que l'apôtre pouvait écrire: «Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, et après cela d'être jugés, ainsi le Christ, ayant été offert une fois pour porter les péchés de plusieurs, apparaîtra une seconde fois, sans péché, à salut à ceux qui l'attendent» (Hébreux 9: 27, 28); et dans les circonstances de cette mort humiliante, les résultats certains sont ces «nouveaux cieux et cette nouvelle terre, dans lesquels la justice habite» et que «nous attendons» selon sa promesse (2 Pierre 3: 13).

«Dieu a ressuscité d'entre les morts, Jésus, notre Seigneur» (Romains 4: 24). «Par lui vous croyez en Dieu qui l'a ressuscité des morts et lui a donné la gloire, en sorte que votre foi et votre espérance fussent en Dieu» (1 Pierre 1: 21). Oh! que serais-je, à quoi en serais-je quant au salut, et quant à l'espérance, si la gloire de Dieu, comme le Dieu de résurrection, n'avait pas été manifestée; et comment aurait-elle été manifestée autrement que par la résurrection du Seigneur Jésus d'entre les morts, prémices si précieuses de la nôtre?

Puis, en troisième lieu, on trouve encore la lumière, la lumière de la vie dans sa mort, et cette lumière ainsi trouvée manifeste toutes les choses qui sont dans les ténèbres, en découvre le vrai caractère et en neutralise le pouvoir; Satan, le monde, l'homme, tout est manifesté par la mort du Seigneur Jésus, et leur puissance aussi est mise de côté pour la foi. La puissance de Satan a été annulée. «Puis donc que les enfants ont part à la chair et au sang, lui aussi semblablement y a participé, afin que, par la mort, il rendit impuissant celui qui avait la puissance de la mort, c'est-à-dire, le diable; et qu'il délivrât tous ceux qui, par la crainte de la mort, étaient assujettis toute leur vie à la servitude» (Hébreux 2: 14, 15).

Le Seigneur faisait allusion à sa mort quand il disait: «Maintenant le chef de ce monde sera jeté dehors» (Jean 12: 31). Le monde aussi trouvait son jugement dans cette même mort: «Maintenant est le jugement de ce monde» — jugement du croyant aussi, mais en bénédiction, comme Paul dit»: «Mais qu'il ne m'arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m'est crucifié et moi au monde» (Galates 6: 14). C'est à la croix aussi qu'on trouve la mesure et le vrai caractère de la chair et de la vie qui est dans le sang. Quand Christ donna sa vie en rançon pour nous, il montra à la fois, dans ce seul et même acte, sa propre perfection et l'abjection de la chair. En lui-même, il était saint, sans tache, sans souillure, séparé du péché. «La justice ne pouvait trouver aucune faute en lui; il était le seul qui ne pouvait pas être justement abandonné à cause de ce qu'il était. En lui tout était parfait. Il pouvait porter nos péchés en son corps sur le bois. Mais dans ce qu'il a enduré sur la croix, il y avait l'expression de ce que les hommes sont, de leur inimitié contre Dieu sous la puissance de Satan; et en même temps, dans l'abandon de Jésus, nous trouvons, à la croix, l'estimation que Dieu fait de notre péché. Le seul juste — substitut pour plusieurs injustes, — prend la coupe de la colère des mains du Père; et en s'écriant: «Mon Dieu! mon Dieu! pourquoi m'as-tu abandonné?» il a donné la mesure vraie, parfaite, divine — de l'estimation que Dieu fait de l'homme en chute. L'oeil fixé sur Jésus, je ne puis pas dire: «La mort est un monstre terrible, je la hais!» Sa mort — la mort dans son expression la plus complète — la mort, comme lui seul pouvait l'endurer, est très précieuse et merveilleuse. C'est une merveille que Jésus soit devenu un homme en la présence de Dieu; Il est pour moi un sujet d'étonnement; oui, je suis comme éperdu d'admiration, quand je pense à la mort, à la mort du Seigneur qui est comme une porte ouverte, par laquelle toute la gloire du Dieu de résurrection a coulé par torrents sur le monde et qui m'a rendu capable de dire: «De celui qui dévorait est procédé la viande et du fort est procédé la douceur».

Mais, en quatrième lieu, si la mort elle-même, la mort dans ce qu'elle a de pire, la mort vue dans sa puissance terrible manifestée, entre Dieu et le Fils de l'homme comme substitut — si alors même la mort nous tient un langage qui laisse le croyant béni en l'entendant, quoique cependant il y ait dans ce sujet une hauteur et une profondeur qui passe toute intelligence, une profondeur et une hauteur éternelles et divines, que dirons-nous des gages de la mort? Certes la foi dit: «En toutes choses nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés» (Romains 8: 37). Je suis à Christ, et Christ est à Dieu. Caché dans le rocher qui fut frappé, l'ombre de la mort ne repose plus sur moi, sur ma conscience, sur mes pensées:

«Jésus est mort! Je suis lavé,

Pas une tache dans mon âme!

Jésus est mort! Je suis sauvé!

L'amour de Dieu, céleste flamme,

M'a fait en haut un ciel serein:

Pas un nuage sur mon âme,

Pas une ride dans mon sein!

Le Fils, maintenant sur le trône du Père dans la gloire qu'il avait auprès de Lui avant que le monde fût — le Fils m'a rendu aussi libre de tous les péchés dont j'étais chargé, qu'il fut toujours lui-même personnellement libre de toute culpabilité. Dieu n'avait jamais rien contre lui; et maintenant par cette mort, il n'a rien contre moi. Dieu a toujours trouvé son bon plaisir dans le Fils de son amour. Et même maintenant, chose merveilleuse, mais vraie, Dieu en Christ trouve son bon plaisir en moi.

Je fais mon compte que je suis racheté, mis à part par Dieu pour sa propre gloire. Il a pris occasion des circonstances de la chute pour manifester sa miséricorde, sa compassion et sa grâce; et Christ, au milieu des ruines de la première création, a montré sa compétence pour s'occuper de la question du péché à l'égard de Dieu, de Satan, du monde en chute et de l'homme. L'oeuvre de l'humiliation de Christ est achevée, mais elle proclame avec force sa compétence personnelle pour résoudre toute question.

Et maintenant qu'il est en haut, Il prend occasion de notre position dans le désert où nous sommes, entre un monde égyptien et esclave et la gloire, afin de nous apprendre ce qu'il est et aussi ce que nous sommes. Et bientôt quand la gloire paraîtra, Il mettra la dernière main à son oeuvre et manifestera sa fidélité au peuple de son choix, et Il fera ceci au moins mille ans avant que la nouvelle création soit manifestée comme l'expression de la compétence qu'il a à finir ce que sa main a commencé. Et si, individuellement, je suis retiré de la scène de ce monde, ce sera seulement une occasion dans laquelle, selon la sagesse divine, les gloires personnelles du Fils, comme étant la Résurrection et la Vie, trouveront leur expression. Il m'a donné la vie, une vie éternelle, la vie qu'il possède dans sa résurrection et son ascension glorieuses. Si, avant qu'Il se lève de la droite du Père, Il m'appelle, je meurs; mais je sais que le «je meurs» signifie seulement «à tout ce qui est mortel», à tout ce qui est corruptible ici-bas, et que je cesse, pour jamais, et selon Dieu, toute relation avec les choses corruptibles; absent du corps, je suis présent avec le Seigneur; et j'attends avec lui-même le jour où sa gloire sera publiquement manifestée, et alors mon corps ressuscité et glorieux ira à sa rencontre en l'air. Si Christ ne m'appelle pas avant qu'Il se lève, alors je ne verrai jamais la séparation du corps et de l'âme, mais sa puissance vivifiante, qui a déjà donné à mon âme une vie, en vertu de laquelle je pouvais surmonter un corps de mort, remplira tout de vie et éloignera de mon corps la mortalité et la corruptibilité, sans qu'il soit jamais séparé de mon âme qui possède déjà la vie.

Mais l'absence de la scène de se monde et d'un corps de péché et la présence avec le Seigneur, être chez soi, est-ce là la mort? C'est l'incrédulité qui l'affirme, parce qu'elle ne voit pas, ne connaît pas, n'attend pas la nouvelle place que Christ a ouverte et dans laquelle il est meilleur pour nous d'entrer; elle parle comme si le caractère plus ou moins obscur de l'état intermédiaire dont parle Ezéchias (Esaïe 38) subsistait encore, maintenant que la vie et l'incorruptibilité ont lui par l'évangile. Qu'est l'agonie pour un homme céleste, un enfant de Dieu dont la conscience est libre par la foi en un Seigneur ressuscité et monté en haut, et dont le coeur déborde de la joie que donne l'Esprit de Dieu, non contristé? qu'est la sueur froide du corps, quand sa vie tend à briser son enveloppe? la vie éternelle que le croyant possède, concentrant à la fois le coeur et la pensée sur la personne du Seigneur Jésus Christ lui-même en haut. Oui; mais il y a un cercueil devant nous, et là repose le corps d'un frère pieux, qui, au milieu de nous, était heureux dans le Seigneur et rempli d'amour pour ses saints, et maintenant, il est parti! Oui, encore, mais parti pour aller où?… Vers le Seigneur Jésus! n'est-Il pas digne d'avoir ses bien-aimés avec lui? Pensez-vous qu'en appelant un tel «chez lui», chez Lui-même, Il ait manqué au conseil de Dieu? Non, certes; ces paroles: «Si vous m'aviez aimé, vous vous seriez réjouis de ce que je m'en vais au Père, car le Père est plus grand que moi», ces paroles peuvent être rappelées comme étant vraies dans ce cas aussi. Ou n'avons-nous point d'amour pour ceux qui s'en vont; point d'amour si ce n'est relativement à nous-mêmes, point de satisfaction à les voir bienheureux, encore que leur bonheur nous cause quelque privation? C'est un misérable égoïsme qui oublie la joie de Dieu et la joie de Christ accueillant en sa présence une âme qui nous quitte; qui oublie aussi le grand gain qu'a obtenu cette âme, et qui fait que nous ne pensons qu'à nous-mêmes et à notre perte. Vous qui êtes ainsi pleins de vous-mêmes, qui pouvez ainsi oublier Dieu et Christ et les amis que vous dites avoir aimés; vous pouvez bien être indignés contre l'amour étroit et personnel de votre coeur. Mais il y a une jalousie de l'amour en Dieu. Il veut que vos coeurs sachent que Christ est suffisant pour vous satisfaire au milieu de toutes les expériences du désert. Il veut, dans cette jalousie de l'amour, que vous vous souveniez de Celui qui vous a acquis et de la joie qu'Il éprouve au sujet de ceux qui se sont endormis en Lui; et que vous appreniez à penser et à sentir selon cette sphère dans laquelle Christ est maintenant et de laquelle il est lui-même le centre.

Que puis-je dire de la bénédiction des saints qui nous ont quittés? Je ne puis répondre à cette question que par une autre: que savez-vous de la beauté de Christ et du bonheur qu'il y a d'être avec Lui? Car si le moi vous domine, pourquoi donc eux trouveraient-ils leur aliment dans ce monde? Si vous êtes pleins de vous-mêmes, de vos plaisirs et de vos peines, de vos gains et de vos pertes, vous ne profiterez pas beaucoup de la doctrine concernant ceux qui sont absents du corps et présents avec le Seigneur. Cette doctrine ne plaît pas à votre égoïsme, et vous ne pouvez pas aimer qu'on vous demande si vous trouvez plus d'attraits en Christ qu'en toute autre chose. Le Seigneur dit au brigand converti cette parole bénie: «Aujourd'hui, tu seras avec moi dans le paradis»; qu'est-ce que ce brigand connaissait du paradis et de sa bénédiction? Probablement rien du tout. Mais il se fit justement un ami de Celui dont on ne pouvait pas trouver le pareil. La foi lui révéla le coeur compatissant et attrayant du Seigneur. La foi du brigand avait ouvert son coeur à la sainteté, à la confession, à la confiance dans son juge; aussi lui fit-elle savourer la douceur de cette promesse: «En vérité, je te dis qu'aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis» (Luc 23: 45). «Avec lui», c'était assez. «Absent du corps, présent (chez soi) avec le Seigneur» (2 Corinthiens 5: 3), c'était là le «beaucoup meilleur» que Paul connaissait quant à l'état d'un saint délogé. Oui, et quant à la gloire, quelle description peut atteindre à cette hauteur: «Et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur» (1 Thessaloniciens 4: 17) ?

Mais ceci nous amène à la question de la mesure de notre connaissance et de notre appréciation du Seigneur Jésus Christ. Ceux qui le connaissent beaucoup et qui ont beaucoup affaire avec lui, trouveront aussi beaucoup dans cette pensée d'être avec Lui. Ils ont son Esprit et marchent dans l'Esprit, et pour un saint il n'y a rien tel que «la présence avec le Seigneur. Si le moi nous gouverne, nous passerons par des circonstances propres à nous faire recueillir ce qui convient à l'homme lorsqu'il pense à lui-même.

Mais si vous aimez un saint qui s'en est allé en haut, comme Etienne, que la pensée de la joie de celui que vous aimez et qui a apprécié et savouré la présence du Seigneur, ait au moins aussi une place dans votre coeur et dans votre esprit. Il est heureux maintenant dans la présence du Seigneur. Si vous l'avez aimé, que sa félicité actuelle contrebalance le sentiment de votre perte et de votre privation. Dans peu de temps, très peu de temps, le Seigneur le ressuscitera. Si le Seigneur le ressuscitait en ce moment, ce corps ne serait pas enterré, mais ressuscité pour la vie et la gloire, et vous seriez changés et enlevés ensemble en l'air à la rencontre du Seigneur pour être toujours avec lui. Quand nous rencontrerons le Seigneur, nous le connaîtrons, comme si nous l'avions vu. Il n'y aura pas de méprise: en la présence de Dieu, on ne peut jamais prendre une autre personne pour Lui. Il connaîtra tous les siens qui seront autour de lui en ce jour, et les siens connaîtront comme ils ont été connus.

Il y a, dans plusieurs esprits maintenant, une affreuse incrédulité; ils pensent que, parce que les relations et les liens terrestres sont rompus, les personnes ne se reconnaîtront pas, ou que ce qui fait notre mutuel intérêt n'existera plus. Une telle pensée est superficielle. Je connais et j'aime plusieurs de ceux qui ont été mes maîtres, mes compagnons ou mes serviteurs sur la terre; je suis connu et aimé d'eux; la relation a passé, mais non pas, grâces à Dieu, l'estime et l'amour mutuel que nos coeurs ont formé dans cette relation. Quand un enfant est marié, il cesse d'être un enfant dans la maison paternelle; il est, selon Dieu, relevé du lien, mais l'amour et l'intérêt continuent; est-ce qu'une fille cesse d'être aimée, parce qu'elle a passé sous l'autorité d'un mari et qu'elle n'a plus la relation et la responsabilité d'une enfant dans la maison? Dans le divorce la douleur cesserait-elle pour un coeur aimant, parce que Dieu a déclaré que la relation entre l'homme et la femme a été rompue? Les premiers liens de Paul avec les Thessaloniciens pouvaient cesser, mais non pas son amour pour eux, ni leur amour pour lui, comme formé quand ils étaient ensemble sur la terre. Les Thessaloniciens entoureront Paul dans la gloire et seront sa joie et la couronne dont il se glorifiera. «Car quelle est notre espérance, ou notre joie, ou la couronne dont nous nous glorifions? N'est-ce pas vous qui l'êtes devant notre Seigneur Jésus Christ à sa venue» (1 Thessaloniciens 2: 19) ? Voyez aussi l'expression: «que vous ne soyez point attristés comme les autres qui n'ont pas d'espérance» (4: 13). Triste est la condition de ceux qui ne peuvent pas discerner ceci: occupés d'eux-mêmes et des circonstances, ils ne peuvent pas voir au loin, ils ne peuvent pas entrer dans les joies et la grâce du Seigneur.

Je n'ajouterai plus qu'un mot. Quelqu'un pourrait me dire: «Selon vous, il semble que la mort ne soit rien». A cela je réponds que ce n'est nullement ma pensée. Que la mort soit ce qu'elle pourra, Christ est davantage, et Il rend l'amer doux et change les ténèbres en lumière. Celui qui est en Christ, et celui-là seulement peut dire: «Plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés!» Celui-là seulement peut dire: «O mort! où est ton aiguillon? O sépulcre! où est ta victoire?» La mort dans l'homme était le fruit du péché; il y avait dans la mort du corps une terrible expression, montrant la ruine complète que le péché avait amenée sur ce corps, et ensuite elle indiquait cette seconde mort, «où le ver ne meurt point et où le feu ne s'éteint point». Si le Fils de Dieu, comme Fils de l'homme, a rencontré les difficultés de la position dans laquelle l'homme se trouvait comme pécheur, Il ne put pas, Lui, en rencontrant et en portant lui-même le jugement dû au pécheur, Il ne put pas, dis-je, ni moralement, ni judiciairement, tenir pour rien le péché. Au contraire, quand Il porta sur la croix le jugement dû à nos péché, il fut bien clairement montré que les gages du péché sont beaucoup plus terribles que tout ce que l'homme peut en penser et en connaître, même par ce qui est révélé sur la perdition éternelle du pécheur dans le lac de feu et de soufre, préparé pour le diable et pour ses anges. La croix de Christ a prouvé qu'Il ne pouvait y avoir aucune communion entre Dieu et le Fils de l'homme fait péché et fidèle jusqu'à la mort — Christ ne reçut aucune lumière de Dieu, pendant qu'il occupait la place de substitut du pécheur. Il s'écria: Mon Dieu! mon Dieu! pourquoi m'as-tu abandonné? Mais il vainquit, quoiqu'il dût laisser sa vie dans le chemin de la victoire. Il ne reste aucun jugement de péché sur l'âme de celui qui croit en Jésus Christ. Son jugement fut notre délivrance; mais si nous sommes délivrés, nous ne sommes pas encore, cela est évident, délivrés de nos corps de péché et de mort. Maintenant, «nous portons dans le corps la mort de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle»; et si nous sommes appelés à partir et à quitter le corps, le Seigneur peut se montrer à son peuple comme Il se montra à Etienne. Et arrive ce qui pourra; mais déloger est beaucoup meilleur; c'est être absent du corps et présent avec le Seigneur; or être assimilé par l'expérience à quelque partie de la course du Seigneur ici-bas, ce n'est pas quelque chose d'étrange, quoique ce soit une chose précieuse et bénie. Or nous croyons que Jésus est mort et qu'il est ressuscité. Si je considère sa mort en rapport avec la colère qui m'était due, je puis dire que c'est fini; et la foi en moi éloigne de ma pensée l'idée que je goûterai la mort. Dans ce sens je ne verrai pas la mort. Si je considère sa mort comme l'acte par lequel il a cessé de demeurer parmi les hommes sur la terre, dans un corps qui pouvait mourir, l'heure de cette mort était pour Lui une délivrance, et pourquoi, n'en serait-il pas de même, par Lui, pour moi?