«Voici, nous défaillons, nous sommes perdus,
nous sommes tous perdus. Quiconque s'approche du pavillon de l'Eternel mourra; serons-nous
tous entièrement consumés?» — Lorsque les enfants d'Israël criaient ainsi à
Moïse, le sentiment qui les faisait parler n'était pas précisément la crainte
d'un Dieu qu'ils ne connaissaient pas, — et qui est celle qu'un pécheur,
nouvellement réveillé, ressent naturellement dans sa conscience; — c'était une
crainte qui provenait de l'orgueil, la chair s'étant introduite dans la
présence de Dieu. Et ceci se rencontre constamment là où il y a eu de
l'arrogance de coeur devant Dieu. Lorsque Dieu se manifeste à un homme qui se
trouve dans cet état, la conséquence en est de le jeter dans le désespoir;
tandis que la crainte que ressent la conscience naturelle, réveillée pour la
première fois, bien que angoissante, est toutefois salutaire.
Lorsqu'on a entièrement vécu sans Dieu,
je n'appelle pas cela de l'arrogance de coeur devant Dieu, quoique, dans un
sens, cela soit. Nous savons tous combien il y a d'hommes qui vivent sans souci
jour après jour et année après année, sans s'inquiéter de Dieu; cherchant des
jouissances et des plaisirs dans ce monde, plongés dans l'indifférence,
quelquefois accablés de peines ou surchargés de travail; — mille choses enfin
qui remplissent et occupent le coeur naturel à l'exclusion de Dieu. Parfois la
pensée qu'il y a un Dieu traverse la conscience, mais bien loin d'être l'objet
de leur vie, Dieu n'est leur objet en aucune façon.
Il y a des pressentiments secrets de ce
genre. Souvent Dieu agit de cette manière dans les coeurs de ceux qu'il veut
appeler à Lui plus tard, bien que, pour le moment, il ne s'en serve pas pour
produire du fruit et après que la conversion est accomplie, le souvenir de ces
appels aide à faire comprendre l'entière et totale perversité de la volonté
de l'homme. Quand le péché est notoire et public, il est plus facile
d'atteindre la conscience, ainsi que le Seigneur le disait aux pharisiens, les
gens religieux de l'époque: «Les publicains et les prostituées vous devancent
au royaume de Dieu» (Matthieu 21: 31). Souvent, dans le cours d'une vie
comparativement irréprochable, il y a eu de ces appels, et Dieu, dans les
richesses de sa miséricorde, de sa longue attente et de sa patience, a toujours
été méprisé.
Quand la conviction de péché arrive, et que
l'Esprit de Dieu place un homme, dans sa conscience, devant Dieu, il voit à la
fois ce qu'il a fait et ce qu'il est. Il découvre qu'il a «amassé pour
lui-même la colère dans le jour de la colère et de la révélation du juste
jugement de Dieu» (Romains 2: 5): et de plus, il trouve que sa condition naturelle
est une condition de péché et de révolte contre Dieu, et qu'il n'y a point de
remède. Mais, lors même que cet état d'âme est toujours plein d'angoisse et,
souvent même, conduit au désespoir, c'est une chose salutaire et précieuse.
Toutes les fois qu'alors on discerne clairement sa position, on désirera d'aller
à Dieu, tout en ayant la conscience que l'on n'a aucun droit à se trouver
là. Il en sera comme du fils prodigue: «Je me lèverai et je m'en irai vers mon
père, et je lui dirai: Mon père, j'ai péché contre le ciel et devant toi; je ne
suis plus digne d'être appelé ton fils» (Luc 15: 18, 19); de même que de
Pierre, aux pieds de Jésus: «Seigneur, retire toi de moi, car je suis un
homme pécheur» (Luc 5: 8). On a le sentiment de son indignité devant Dieu,
parce qu'on a vu que Dieu est saint, et qu'il doit être saint; toutefois, en
même temps, il y a le désir d'aller à Lui, inconséquence apparente, mais qui
est, en réalité, l'oeuvre de l'Esprit de Dieu. Quand l'Esprit agit, il est
naturel que l'on désire aller à Dieu, parce que l'on sent que l'on a besoin de
Lui, bien que la conscience dise que l'on n'est pas en état de s'approcher de
Lui. Le coeur est tourné vers Dieu; on voit qu'il est saint, et qu'il
doit être saint, et ainsi on prend le parti de Dieu contre soi-même. On ne
désire pas qu'il soit moins saint, de manière à ce que l'on pût, pour parler
ainsi, se glisser dans le ciel, par conséquent on justifie Dieu, au lieu de
chercher à le condamner dans le but de se justifier soi-même, ce que plus d'un
pécheur fait, et ce que Adam fit, quand il dit: «La femme que tu m'as
donnée pour être avec moi, m'a donné du fruit de l'arbre et j'en ai mangé»
(Genèse 3: 12). Au lieu de se justifier soi-même, on justifie Dieu et on se
condamne soi-même. C'est ainsi que le coeur est rendu droit. Il est vrai que
l'on ne connaît pas encore la rédemption — ce que Dieu a fait pour nous
en Christ; on est occupé de son état devant Dieu comme d'une chose présente,
mais cela est bon. On n'a pas la paix que Dieu donne et qu'il donnera,
toutefois il y a la droiture du coeur.
Dieu, dans sa grâce, avait établi la
sacrificature, afin de pourvoir aux besoins de son peuple. Mais ces Israélites
prétendaient que parce qu'ils étaient le peuple de Dieu, ils pouvaient
prendre une place devant Lui autrement que sur le fondement donné par Lui. Ils
avaient abusé des privilèges qui leur avaient été conférés; ils avaient murmuré
contre Dieu, fait le veau d'or; ils avaient dit qu'ils valait mieux retourner
en Égypte; ils avaient méprisé les promesses; et à cette longue suite de
manquements et de rébellions, venait s'ajouter ce que la Parole appelle «la
contradiction de Coré» (Jude 11). Et pendant qu'ils sont dans cet état charnel,
ils prétendent pouvoir s'approcher de Dieu. «Et ils s'assemblèrent contre Moïse
et contre Aaron, et leur dirent: Qu'il vous suffise, puisque tous ceux
de l'assemblée sont saints, et que l'Eternel est au milieu d'eux,
pourquoi vous élevez-vous par-dessus l'assemblée de l'Eternel» (16: 5) ?
Ici nous voyons de l'orgueil dans la présence de Dieu; et en effet, il se
glisse facilement dans le coeur. On est porté à revendiquer d'une manière
charnelle les privilèges des enfants de Dieu. Cela peut ne pas être manifesté
sous une forme aussi grossière que dans ce récit, mais n'avons-nous pas bien
souvent le sentiment de pouvoir nous approcher de Dieu, parce que tel est notre
privilège? Il est évident que tel, est en effet, notre privilège; c'est
celui de tous les saints; cependant c'est une chose à déplorer si, comme
une conséquence de cette proximité, lorsqu'un chrétien n'est pas dans la
présence de Dieu, il se montre hautain et indifférent, mettant toujours en
avant sa proximité avec Dieu.
L'histoire de Caïn nous offre un second
exemple d'orgueil dans la présence de Dieu (Genèse 4). Quand Dieu lui dit: «Où
est Abel, ton frère?» Caïn répondit: «Je ne sais; suis-je le gardien de mon
frère, moi?» — Mais aussitôt que Dieu se fait connaître comme Dieu,
disant: «La voix du sang de ton frère crie de la terre à moi!» le désespoir
s'empare de Caïn. Dès que le coeur s'élève devant Dieu, et que Dieu se montre,
il y a du désespoir, et l'on en vient à s'écrier: «Voici, nous défaillons,
nous sommes perdus, nous sommes tous perdus!» Un principe important nous
est donné ici. Même chez le chrétien, dans ce cas, le fondement de la confiance
n'est pas réalisé et le coeur tombe dans le désespoir.
Le chrétien peut toujours être parfaitement
heureux devant Dieu, parce qu'il est parfaitement sauvé. C'est la véritable
condition du chrétien — celle de la confiance — non pas une confiance
charnelle, mais la confiance et la joie dans la présence de Dieu. Mais
il peut aussi se trouver dans un état où il manque de cette confiance, où il
est dans l'incertitude quant à lui-même; il peut y passer à cause même d'une
oeuvre produite en lui par le Saint Esprit; toutefois ce n'est pas l'état qui
lui est propre. Ce que le Saint Esprit donne, c'est de la certitude.
Quand il y a de l'incertitude, elle provient d'une action de notre
propre coeur, bien que ce soit en rapport avec (et même, dans un sens, fondé
sur) ce qui est réellement une oeuvre de l'Esprit. Je puis croire que Dieu est
saint, et, en voyant le péché en moi, je puis commencer à raisonner sur ce que
je suis, me demandant si je puis, ou non, m'approcher de Dieu; si je puis avoir
quelque chose à Lui dire. Ayant le désir d'aller à Lui, je puis ne pas savoir
s'il veut me recevoir. Ceci n'est pas de la foi, et pourtant c'est
l'état dans lequel un très grand nombre de chrétiens se trouvent. A proprement
parler, ce n'est pas un état chrétien; c'est raisonner sur des choses
que l'on connaît par la foi, que l'on a trouvées par la foi, mais
ce n'est pas la foi. La Parole de Dieu nous dit que «le sang de Jésus
Christ, son Fils, nous purifie de tout péché» (1 Jean 1: 7); qu'il a
«fait la paix par le sang de sa croix» (Colossiens 1: 20); que Dieu «ne se
souviendra plus de nos péchés et de nos iniquités» (Hébreux 10: 17); et si nous
avons la foi, pour croire, nous sommes heureux, nous trouvons la paix. La foi,
c'est recevoir avec simplicité de coeur ce que Dieu a dit.
Ne pas croire,
n'est pas un état chrétien. Le chrétien peut s'y trouver, hélas! mais ce n'est
pas un état chrétien. L'incertitude ne peut donc pas être considérée comme une
position qui convienne à l'âme, tout en admettant qu'elle puisse s'y trouver
momentanément; et dans le fait, ceci est assez souvent le cas. En revanche l'assurance
chrétienne est une assurance dans la présence de Dieu, et non point hors de
cette présence. Pour autant que cette assurance est fondée sur la foi en ce
que Dieu a dit, c'est toujours l'assurance devant Lui. La foi trouve son
repos là. Tout ce qui nous fortifie, nous édifie, nous place dans la liberté
pour ce que nous faisons dans le monde, est basé sur ce que nous sommes dans la
présence de Dieu. Le sang est là — sur le trône de grâce — à la vue de Dieu —
et par conséquent, sachant cela, nous pouvons dire que nous sommes justifiés de
toutes choses, et qu'il est impossible que Dieu puisse nous imputer le péché.
Le sang est devant ses yeux, et non pas nos péchés.
Mais il y a un état d'âme qui diffère
entièrement de celui-ci: c'est-à-dire, une confiance hors de la présence de
Dieu. On peut avoir des pensées et raisonner sur le fondement de la
confiance chrétienne et des privilèges chrétiens, exactement comme le faisaient
ces Israélites, sur ce qu'ils appartenaient à Dieu. Leur confiance était une
confiance charnelle. Ils se prévalaient des principes généraux de la vérité
quant aux voies de Dieu envers son peuple, pour vivre dans la présomption de la
chair, et c'est ce qui les conduisit au murmure et à la révolte. Ils
s'avançaient avec assurance, comptant que le Seigneur était avec eux; mais Dieu
parla à Moïse au sujet de Coré, Dathan et Abiram, et intervint en jugement
sur leur impiété (16: 23 et suiv.), et alors nous voyons que «dès le lendemain,
toute l'assemblée des enfants d'Israël murmura contre Moïse et contre Aaron, en
disant: Vous avez fait mourir le peuple de l'Eternel» (verset 41).
Et quel est le remède que le Seigneur donne
dans cet état de choses? Il établit la sacrificature, comme le seul
fondement, sur lequel il puisse continuer ses relations avec eux. Il fallait
que Dieu manifestât sa puissance d'une manière positive et évidente, afin de
mettre un terme aux murmures des enfants d'Israël devant Lui; mais, en le
faisant, il fallait que ce fût en grâce, car agir envers eux sur un
autre fondement, aurait été pour leur destruction. Et il ne peut qu'en être
toujours de même. Si le Seigneur ne devait venir que selon la puissance de sa
présence véritable, cela apporterait le trouble dans l'âme. Nous en voyons
quelquefois des exemples à un lit de mort, pour quelques instants. En amenant
alors l'âme devant Lui-même, Dieu la place sous une ombre de la puissance sous
laquelle Christ passa — rien qu'une ombre.
Il est certain que de la manière dont un
grand nombre de chrétiens sont occupés dans leur vie de tous les jours, ils
réalisent peu la pensée de Dieu. Ce n'est pas qu'ils n'aient pas la paix,
mais ils ne se rendent jamais pleinement compte de ce que la chair est devant
Dieu. Ils savent peu ce que c'est que de se trouver face à face avec
Dieu. Ils peuvent avoir été réveillés sous des convictions de péché peut-être
terribles, et ils ont trouvé la paix; mais depuis lors, ils ont vécu dans la
possession tranquille de certaines connaissances, mais sans réaliser la
présence de Dieu; de sorte que si celle-ci se manifestait à eux tout d'un coup,
ils seraient également «consumés» de terreur. Il est bon de nous rappeler que
la certitude quant au salut est l'état véritable et normal du chrétien. Je le
répète encore ici, pour faire voir que ce que je dis en ce moment n'est pas dit
en vue de le nier le moins du monde; seulement je maintiens, que si Dieu se
montrait à ces chrétiens, tout véritables chrétiens qu'ils soient, dans sa
puissance réelle comme Dieu, il y aurait pour eux du trouble et de
l'angoisse. Il ne devrait pas en être ainsi. Et si cela est, il est évident que
l'on ne vit pas véritablement dans la présence de Dieu. C'est là cependant que
nous avons le privilège d'être placés. Quand nous ne nous y trouvons pas, il y
a une tendance constante dans le coeur à être occupé de certaines choses, qui
sont fondées sur ce qui fait réellement notre relation avec Dieu, et de les
poursuivre sans réaliser la présence de Dieu; et s'il y a en même temps de
l'assurance, cela doit nécessairement endurcir le coeur. L'assurance, je le
répète, doit être la part du chrétien, c'est-à-dire, l'assurance de la foi.
Dieu ne nous la retire pas, mais nous pouvons la perdre. Quand on vit dans l'assurance,
et que l'on ne marche pas dans la présence de Dieu, la conscience n'étant pas
droite, il y a ce qui mine jusqu'au fondement même. Nous pouvons marcher dans
la joie, mais si cette joie n'est pas la joie dans la présence de Dieu, il y
aura un bouleversement tôt ou tard.
Voilà ce que j'entends par une confiance
charnelle ou «de la chair» (Philippiens 3: 5). Ce n'est pas la confiance
d'un homme inconverti, — il y a aussi celle-là, mais ce n'est pas d'elle que je
veux parler. Je veux parler de la confiance d'un homme qui a une paix et une
espérance justement fondées, mais qui sont entretenues en dehors d'une marche
dans la présence de Dieu. C'est une paix véritable, ce sont des espérances
véritables; elles sont fondées sur la vérité, et il les possède véritablement
(la vraie condition d'un chrétien est toujours de les posséder); toutefois
elles ont pris un caractère charnel dans le coeur, lorsqu'elles sont
possédées sans Dieu, c'est-à-dire, lorsqu'elles ne sont pas maintenues par une
marche dans la présence de Dieu. La conséquence en est, qu'au moment où le
Seigneur apparaît, n'importe de quelle manière, fût-ce même en grâce, sa
présence terrifie. Les Israélites n'avaient pas réalisé la puissance de leurs
privilèges dans la présence de Dieu, c'est pourquoi ils tombèrent dans le
désespoir et dirent: «Nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous
perdus».
Je ne dis pas que nous devrions en venir
jusque-là bien que le principe soit le même; mais il y aura du découragement,
la confiance se perdra et on se méfiera de Dieu. Supposons que vous, — chrétien
véritable — vous ayez marché d'une manière négligente, tout en ayant cette confiance
de la chair, et que l'on vous parlât, fût-ce même de l'intercession de
Jésus, — si par là le sentiment de la présence de Dieu s'éveillait dans votre
âme, vous n'en seriez ni réjoui, ni fortifié, mais bien plutôt découragé, et
votre âme s'abattrait au dedans de vous.
Notre position auprès du Seigneur est de
marcher avec joie, mais c'est une joie «dans le Seigneur» (Philippiens
4: 4). Enoch «marchait avec Dieu» (Genèse 5: 24). Pouvez-vous dire que vous
marchez avec Dieu? Je ne vous demande pas si vous faites ce qui est notoirement
mauvais, mais la présence de Dieu vous alarmerait-elle, vous angoisserait-elle?
Quand ceci est le cas, notre confiance, si nous en avons, est une chose de la
chair.
Ne demeurez pas dans cet état; ce n'est pas
à cela que Dieu nous a appelés. Il est tout grâce; grâce envers nous
selon notre besoin; mais c'est auprès de Lui, et dans sa présence, que nous
trouvons sa grâce et que nous en jouissons. Moïse chanta: «Tu as conduit,
par ta miséricorde, ce peuple que tu as racheté; tu l'as conduit par ta force,
à la demeure de ta sainteté» (Exode 15: 13). Et c'est là ce qu'il a fait pour
nous. Il nous a amenés à demeurer en Lui-même. Il nous a donné son
Esprit, pour qu'il fût notre demeure. Vous savez ce que c'est que d'être
«chez soi» — là nous agissons tout autrement qu'ailleurs — aucun lieu n'est
semblable à celui-là. Nous sommes «chez nous» quand l'Esprit agit dans nos
coeurs et nous fait jouir de ce que nous possédons dans la présence de Dieu.
Nous pouvons avoir à aller dans le monde, pour travailler, pour être exercés,
occupés de mille manières différentes — mais quand nous sommes de retour chez
nous, quel changement! Nous ne sortons que pour rentrer — là nous sommes «chez
nous!» Combien cette pensée donne de force! combien elle nous affermit! Combien
il est effrayant, au contraire, de dire: «Voici, nous défaillons, nous sommes
perdus, nous sommes tous perdus!» — et que la présence de Dieu, au lieu d'être
la demeure de nos âmes, ne nous apporte que trouble et terreur! Je suis sûr que
vous rencontrerez des milliers de chrétiens, qui, au lieu de se trouver hors de
chez eux quand ils sont hors de la présence de Dieu, sont à l'aise au
contraire. C'est, je le répète encore, une chose terrible, non seulement parce
qu'elle est mauvaise en elle-même, mais parce que Dieu est grâce. Nous
sommes appelés à être «dans notre demeure» auprès de Dieu. Le Seigneur Jésus
Christ, au moment de retourner dans le ciel, dit à Marie: «Va vers mes frères,
et leur dis: Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu»
(Jean 20: 17). Nous devons être là «chez nous», en Esprit, autant que Lui:
N'était-ce pas avec joie, avec confiance, que Jésus dit qu'il allait vers son
Père? Il était venu de la présence de Dieu, pour agir en amour au milieu de ce
monde perdu, et il retourna auprès de Lui après avoir accompli l'oeuvre qui Lui
était donnée à faire. Et n'était-ce pas, dans un sens, avec le sentiment de
retourner chez Lui? Mais il dit: «Vers mon Père et votre Père,
vers mon Dieu et votre Dieu». — Quelle précieuse pensée! C'est la
place de l'Eglise — nous sommes appelés à être «chez nous» auprès de notre
Dieu et de notre Père, pour la bénédiction de sa maison. Peu importe ce
que peut être le monde — c'est là que nous devons être chez nous — heureuse
demeure! — nous devons nous trouver là aussi réellement, en Esprit, et aussi heureux,
que Christ!
Si c'est là ce que nous possédons en Christ
(et Dieu ne donne rien de moins), nos âmes le réalisent-elles? Quelquefois nous
nous préoccupons d'une mesure de capacité — mais Dieu ne mesure pas la
capacité. — S'il nous reçoit, c'est pour l'amour de Christ; notre titre repose
sur ce que Christ a fait. Nous pouvons passer par bien des expériences, mais
Dieu ne s'arrête pas à nos expériences; dans ce gens, il n'a rien à faire avec
elles. S'il nous reçoit, c'est pour l'amour de Christ, c'est comme Christ, tout
est Christ. — Ce n'est rien de moins.
Voyons maintenant quelle est la réponse de
Dieu. Après tous les murmures du peuple, après la révolte et la contradiction
de Coré, voici comment le Seigneur fait taire les murmures: par la sacrificature,
en grâce. C'est par la verge d'Aaron et non par celle de Moïse, que les
enfants d'Israël seront introduits dans le pays de Canaan. Non seulement ils
avaient été esclaves en Egypte, mais rebelles et pécheurs dans le désert, par
conséquent la seule manière dont Dieu pouvait agir envers eux, c'était par la
sacrificature. Il n'y a pas d'espoir possible de nous conduire dans la Canaan
céleste, à moins de nous placer sous la sacrificature du Seigneur Jésus Christ;
c'est pourquoi il est dit que «Christ est Fils sur sa propre maison» (Hébreux
3: 6).
C'est «sa maison»; voilà la première chose.
— Et comment agit-il envers elle? Supposons que nous trouvions qu'une maison,
qui n'est pas la nôtre, soit en mauvais état et sale, nous la supporterons
peut-être ainsi, mais nous ne le ferons pas, si c'est notre propre
maison. La manière dont Christ agit envers ce qui est sa maison (et il
est de son intérêt, pour m'exprimer ainsi, de le faire), c'est de la nettoyer.
Nous sommes placés sous la sacrificature de Christ: telle est la mesure que
Dieu a prise dans le but de s'occuper du péché dans la «maison». «Si quelqu'un
a péché, nous avons un Avocat auprès du Père, Jésus Christ le juste» (1 Jean 2:
1). Le péché met Christ à l'oeuvre; voilà l'effet qu'il produit; et ce n'est pas
pour qu'il demeure, nous pouvons en être certains; mais en vertu du même
principe d'après lequel nous ne rejetterions pas notre maison en y trouvant de
la souillure, mais nous la purifierions, Christ aussi est occupé, en amour, à
ôter le péché. C'est la sacrificature de Christ qui nous introduit jusque dans
la cité céleste.
Mais ce qu'il faut remarquer ensuite, c'est
que nous sommes des sacrificateurs dans la maison de Dieu; et ce que
nous avons à porter en conséquence, c'est l'iniquité de la maison. «Alors
l'Eternel dit à Aaron: Toi, et tes fils, et la maison de ton père avec
toi, vous porterez l'iniquité du sanctuaire; et toi, et tes fils, avec toi,
vous porterez l'iniquité de votre sacrificature» (18: 1). Ceci est vrai de
l'Eglise tout entière. Nous sommes le sanctuaire de Dieu, «la maison de Dieu»
(1 Timothée 3: 15). Il en est de même du saint individuellement. «Ne savez-vous
pas que votre corps est le temple du Saint Esprit qui est en vous, et que vous
avez de Dieu? Et vous n'êtes pas à vous-mêmes» (1 Corinthiens 6: 19). Rien de
souillé n'était toléré dans le camp, encore moins dans le «sanctuaire». Nous
sommes amenés maintenant à demeurer dans le sanctuaire de Dieu, à servir dans
la sacrificature de Dieu. Ceci implique la responsabilité. Nous avons à juger
le péché, mais non pas comme si nous étions sous la loi. Voilà où Dieu nous a
placés — c'est la position dans laquelle nous sommes devant Lui, et ce que nous
avons à porter, Il ne s'agit pas de connaissances ou de maturité en Christ;
vous pourrez être converti d'hier, ou bien être un «père en Christ» et par là
mieux en état de comprendre votre place, mais cela n'affecte en rien la
question. Il pouvait se trouver dans le sanctuaire un sacrificateur jeune ou un
sacrificateur âgé; le jeune sacrificateur aurait eu à porter l'iniquité du
sanctuaire, et de la sacrificature, aussi bien que le sacrificateur âgé, aussi
bien qu'Aaron Lui-même.
Dieu, dans les richesses de sa grâce, a
fait de nous son «sanctuaire»; nos corps sont les temples du Saint Esprit; nous
sommes sacrificateurs dans sa maison, et le mal doit donc être jugé en
conséquence. Si la conscience de ceci ne produit pas en nous de la joie, il est
impossible que nous soyons là où nous devons être. Si nous ne savons pas ce que
c'est que d'être dans le sanctuaire de Dieu, nous ne savons pas ce que c'est
que d'être un chrétien. Je ne dis pas que nous ne soyons pas des chrétiens,
mais nous ne savons pas ce que c'est que de l'être. Si nous ne savons pas ce
que c'est que d'être des sacrificateurs à Dieu, nous ne nous sommes jamais
trouvés à notre véritable place devant Dieu.
Il y a encore autre chose à remarquer. Si
nous avons, par grâce, la conscience d'être des sacrificateurs, n'y aura-t-il
pas, comme une conséquence nécessaire, une sainte confiance — la confiance
devant Dieu? Dieu n'agit pas envers ceux qui sont dans sa maison, comme un
juge, comme s'ils étaient sous la loi. — Il est dit: «Toi et tes fils, etc.?»
Si Dieu nous reçoit dans sa maison, il veut que nous y soyons comme des
sacrificateurs. Si nous disons: «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus,
nous sommes tous perdus; quiconque s'approche du pavillon de l'Eternel mourra,
«nous sommes retournés sous la loi. Nous écoutons les raisonnements de notre
propre coeur, et cela n'est pas de la foi.
Concluons. Nous sommes amenés, par une
grâce merveilleuse, dans le sanctuaire de Dieu, nous sommes faits
sacrificateurs à Dieu; et c'est sous ce caractère que nous devons juger du bien
et du mal. Nous jugeons toujours du bien et du mal d'après la condition dans
laquelle l'individu se trouve; nous n'attendons pas de nos serviteurs qu'ils
soient des fils; ni de nos fils qu'ils soient des serviteurs. Si nous ne
jugeons du bien et du mal que selon la conscience naturelle, nous ne nous
trouvons pas du tout sur le fondement chrétien. Voici ce que nous devons
nous demander: Que convient-il à un homme qui est le temple de Dieu? à un homme
qui est sacrificateur à Dieu?
Reculons-nous devant cette responsabilité?
Si nous ne pouvons pas dire que nous aimons à être là où Dieu nous a placés;
que nous nous intéressons assez à sa gloire, pour désirer nous y trouver; si
nous mettons en avant notre faiblesse, nous ne possédons pas la confiance de la
grâce, nous disons en quelque sorte: «Voici, nous défaillons, nous sommes
perdus». En principe c'est la même chose; je ne parle pas de la mesure.
Pourquoi sommes-nous craintifs? Parce que nos coeurs ne sont pas affermis dans
la pleine et simple confiance de la grâce — d'une grâce actuelle. «Etant
justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus
Christ, par lequel nous avons eu accès aussi, par la foi, à cette faveur dans
laquelle nous sommes» (Romains 5: 1). Bien que nous sachions que Christ est
mort et qu'il a aboli notre péché, nous n'avons pas cependant une entière
confiance dans la grâce de Dieu. Nous pensons qu'il n'est pas tout grâce, car
c'est là ce que veut dire une grâce actuelle. Dieu nous aime de l'amour
le plus parfait. Il ne peut agir envers nous sur aucun autre fondement. Il nous
aime maintenant autant que lorsqu'il a donné Christ pour mourir pour nos
péchés. Il est amour envers nous — rien autre. Il n'a pas un coeur double. La
position dans laquelle nous nous trouvons est celle de la grâce. Et
lorsque l'âme en est assurée, elle dit: Ah! que cette sainteté soit mienne, que
je jouisse de la sainteté du sanctuaire! Si tout est grâce — nous ne
dirons pas: «Nous défaillons, nous sommes perdus!» — Comment pouvons-nous être
perdus quand tout est grâce!
Ce qu'il nous faut, c'est une connaissance
complète, distincte et précieuse de notre position sous la grâce. Alors nous
serons joyeux et pleins de courage. Ce qui nous rendra capables d'agir avec
droiture, ce ne sera pas la «confiance de la chair», et de vivre dans la
jouissance banale de certaines vérités — ce sera la certitude et le bonheur de
la présence de Dieu. Connaissons-nous la présence de Dieu comme étant,
pratiquement, la demeure de notre coeur? Quelle joie il y a alors! Soyez
seulement assurés d'une chose, c'est que si vous venez à Lui au nom de Jésus,
vous trouverez que la présence de Dieu est, pour le coeur, une demeure sûre et
bénie.
Que son Nom soit à jamais béni! Il a dit: «Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi» (Jean 6: 37).