La confiance de la chair et la confiance de la foi - Nombres 17 – 18: 1

 «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous perdus. Quiconque s'approche du pavillon de l'Eternel mourra; serons-nous tous entièrement consumés?» — Lorsque les enfants d'Israël criaient ainsi à Moïse, le sentiment qui les faisait parler n'était pas précisément la crainte d'un Dieu qu'ils ne connaissaient pas, — et qui est celle qu'un pécheur, nouvellement réveillé, ressent naturellement dans sa conscience; — c'était une crainte qui provenait de l'orgueil, la chair s'étant introduite dans la présence de Dieu. Et ceci se rencontre constamment là où il y a eu de l'arrogance de coeur devant Dieu. Lorsque Dieu se manifeste à un homme qui se trouve dans cet état, la conséquence en est de le jeter dans le désespoir; tandis que la crainte que ressent la conscience naturelle, réveillée pour la première fois, bien que angoissante, est toutefois salutaire.

Lorsqu'on a entièrement vécu sans Dieu, je n'appelle pas cela de l'arrogance de coeur devant Dieu, quoique, dans un sens, cela soit. Nous savons tous combien il y a d'hommes qui vivent sans souci jour après jour et année après année, sans s'inquiéter de Dieu; cherchant des jouissances et des plaisirs dans ce monde, plongés dans l'indifférence, quelquefois accablés de peines ou surchargés de travail; — mille choses enfin qui remplissent et occupent le coeur naturel à l'exclusion de Dieu. Parfois la pensée qu'il y a un Dieu traverse la conscience, mais bien loin d'être l'objet de leur vie, Dieu n'est leur objet en aucune façon.

Il y a des pressentiments secrets de ce genre. Souvent Dieu agit de cette manière dans les coeurs de ceux qu'il veut appeler à Lui plus tard, bien que, pour le moment, il ne s'en serve pas pour produire du fruit et après que la conversion est accomplie, le souvenir de ces appels aide à faire comprendre l'entière et totale perversité de la volonté de l'homme. Quand le péché est notoire et public, il est plus facile d'atteindre la conscience, ainsi que le Seigneur le disait aux pharisiens, les gens religieux de l'époque: «Les publicains et les prostituées vous devancent au royaume de Dieu» (Matthieu 21: 31). Souvent, dans le cours d'une vie comparativement irréprochable, il y a eu de ces appels, et Dieu, dans les richesses de sa miséricorde, de sa longue attente et de sa patience, a toujours été méprisé.

Quand la conviction de péché arrive, et que l'Esprit de Dieu place un homme, dans sa conscience, devant Dieu, il voit à la fois ce qu'il a fait et ce qu'il est. Il découvre qu'il a «amassé pour lui-même la colère dans le jour de la colère et de la révélation du juste jugement de Dieu» (Romains 2: 5): et de plus, il trouve que sa condition naturelle est une condition de péché et de révolte contre Dieu, et qu'il n'y a point de remède. Mais, lors même que cet état d'âme est toujours plein d'angoisse et, souvent même, conduit au désespoir, c'est une chose salutaire et précieuse. Toutes les fois qu'alors on discerne clairement sa position, on désirera d'aller à Dieu, tout en ayant la conscience que l'on n'a aucun droit à se trouver là. Il en sera comme du fils prodigue: «Je me lèverai et je m'en irai vers mon père, et je lui dirai: Mon père, j'ai péché contre le ciel et devant toi; je ne suis plus digne d'être appelé ton fils» (Luc 15: 18, 19); de même que de Pierre, aux pieds de Jésus: «Seigneur, retire toi de moi, car je suis un homme pécheur» (Luc 5: 8). On a le sentiment de son indignité devant Dieu, parce qu'on a vu que Dieu est saint, et qu'il doit être saint; toutefois, en même temps, il y a le désir d'aller à Lui, inconséquence apparente, mais qui est, en réalité, l'oeuvre de l'Esprit de Dieu. Quand l'Esprit agit, il est naturel que l'on désire aller à Dieu, parce que l'on sent que l'on a besoin de Lui, bien que la conscience dise que l'on n'est pas en état de s'approcher de Lui. Le coeur est tourné vers Dieu; on voit qu'il est saint, et qu'il doit être saint, et ainsi on prend le parti de Dieu contre soi-même. On ne désire pas qu'il soit moins saint, de manière à ce que l'on pût, pour parler ainsi, se glisser dans le ciel, par conséquent on justifie Dieu, au lieu de chercher à le condamner dans le but de se justifier soi-même, ce que plus d'un pécheur fait, et ce que Adam fit, quand il dit: «La femme que tu m'as donnée pour être avec moi, m'a donné du fruit de l'arbre et j'en ai mangé» (Genèse 3: 12). Au lieu de se justifier soi-même, on justifie Dieu et on se condamne soi-même. C'est ainsi que le coeur est rendu droit. Il est vrai que l'on ne connaît pas encore la rédemption — ce que Dieu a fait pour nous en Christ; on est occupé de son état devant Dieu comme d'une chose présente, mais cela est bon. On n'a pas la paix que Dieu donne et qu'il donnera, toutefois il y a la droiture du coeur.

Dieu, dans sa grâce, avait établi la sacrificature, afin de pourvoir aux besoins de son peuple. Mais ces Israélites prétendaient que parce qu'ils étaient le peuple de Dieu, ils pouvaient prendre une place devant Lui autrement que sur le fondement donné par Lui. Ils avaient abusé des privilèges qui leur avaient été conférés; ils avaient murmuré contre Dieu, fait le veau d'or; ils avaient dit qu'ils valait mieux retourner en Égypte; ils avaient méprisé les promesses; et à cette longue suite de manquements et de rébellions, venait s'ajouter ce que la Parole appelle «la contradiction de Coré» (Jude 11). Et pendant qu'ils sont dans cet état charnel, ils prétendent pouvoir s'approcher de Dieu. «Et ils s'assemblèrent contre Moïse et contre Aaron, et leur dirent: Qu'il vous suffise, puisque tous ceux de l'assemblée sont saints, et que l'Eternel est au milieu d'eux, pourquoi vous élevez-vous par-dessus l'assemblée de l'Eternel» (16: 5) ? Ici nous voyons de l'orgueil dans la présence de Dieu; et en effet, il se glisse facilement dans le coeur. On est porté à revendiquer d'une manière charnelle les privilèges des enfants de Dieu. Cela peut ne pas être manifesté sous une forme aussi grossière que dans ce récit, mais n'avons-nous pas bien souvent le sentiment de pouvoir nous approcher de Dieu, parce que tel est notre privilège? Il est évident que tel, est en effet, notre privilège; c'est celui de tous les saints; cependant c'est une chose à déplorer si, comme une conséquence de cette proximité, lorsqu'un chrétien n'est pas dans la présence de Dieu, il se montre hautain et indifférent, mettant toujours en avant sa proximité avec Dieu.

L'histoire de Caïn nous offre un second exemple d'orgueil dans la présence de Dieu (Genèse 4). Quand Dieu lui dit: «Où est Abel, ton frère?» Caïn répondit: «Je ne sais; suis-je le gardien de mon frère, moi?» — Mais aussitôt que Dieu se fait connaître comme Dieu, disant: «La voix du sang de ton frère crie de la terre à moi!» le désespoir s'empare de Caïn. Dès que le coeur s'élève devant Dieu, et que Dieu se montre, il y a du désespoir, et l'on en vient à s'écrier: «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous perdus!» Un principe important nous est donné ici. Même chez le chrétien, dans ce cas, le fondement de la confiance n'est pas réalisé et le coeur tombe dans le désespoir.

Le chrétien peut toujours être parfaitement heureux devant Dieu, parce qu'il est parfaitement sauvé. C'est la véritable condition du chrétien — celle de la confiance — non pas une confiance charnelle, mais la confiance et la joie dans la présence de Dieu. Mais il peut aussi se trouver dans un état où il manque de cette confiance, où il est dans l'incertitude quant à lui-même; il peut y passer à cause même d'une oeuvre produite en lui par le Saint Esprit; toutefois ce n'est pas l'état qui lui est propre. Ce que le Saint Esprit donne, c'est de la certitude. Quand il y a de l'incertitude, elle provient d'une action de notre propre coeur, bien que ce soit en rapport avec (et même, dans un sens, fondé sur) ce qui est réellement une oeuvre de l'Esprit. Je puis croire que Dieu est saint, et, en voyant le péché en moi, je puis commencer à raisonner sur ce que je suis, me demandant si je puis, ou non, m'approcher de Dieu; si je puis avoir quelque chose à Lui dire. Ayant le désir d'aller à Lui, je puis ne pas savoir s'il veut me recevoir. Ceci n'est pas de la foi, et pourtant c'est l'état dans lequel un très grand nombre de chrétiens se trouvent. A proprement parler, ce n'est pas un état chrétien; c'est raisonner sur des choses que l'on connaît par la foi, que l'on a trouvées par la foi, mais ce n'est pas la foi. La Parole de Dieu nous dit que «le sang de Jésus Christ, son Fils, nous purifie de tout péché» (1 Jean 1: 7); qu'il a «fait la paix par le sang de sa croix» (Colossiens 1: 20); que Dieu «ne se souviendra plus de nos péchés et de nos iniquités» (Hébreux 10: 17); et si nous avons la foi, pour croire, nous sommes heureux, nous trouvons la paix. La foi, c'est recevoir avec simplicité de coeur ce que Dieu a dit.

Ne pas croire, n'est pas un état chrétien. Le chrétien peut s'y trouver, hélas! mais ce n'est pas un état chrétien. L'incertitude ne peut donc pas être considérée comme une position qui convienne à l'âme, tout en admettant qu'elle puisse s'y trouver momentanément; et dans le fait, ceci est assez souvent le cas. En revanche l'assurance chrétienne est une assurance dans la présence de Dieu, et non point hors de cette présence. Pour autant que cette assurance est fondée sur la foi en ce que Dieu a dit, c'est toujours l'assurance devant Lui. La foi trouve son repos là. Tout ce qui nous fortifie, nous édifie, nous place dans la liberté pour ce que nous faisons dans le monde, est basé sur ce que nous sommes dans la présence de Dieu. Le sang est là — sur le trône de grâce — à la vue de Dieu — et par conséquent, sachant cela, nous pouvons dire que nous sommes justifiés de toutes choses, et qu'il est impossible que Dieu puisse nous imputer le péché. Le sang est devant ses yeux, et non pas nos péchés.

Mais il y a un état d'âme qui diffère entièrement de celui-ci: c'est-à-dire, une confiance hors de la présence de Dieu. On peut avoir des pensées et raisonner sur le fondement de la confiance chrétienne et des privilèges chrétiens, exactement comme le faisaient ces Israélites, sur ce qu'ils appartenaient à Dieu. Leur confiance était une confiance charnelle. Ils se prévalaient des principes généraux de la vérité quant aux voies de Dieu envers son peuple, pour vivre dans la présomption de la chair, et c'est ce qui les conduisit au murmure et à la révolte. Ils s'avançaient avec assurance, comptant que le Seigneur était avec eux; mais Dieu parla à Moïse au sujet de Coré, Dathan et Abiram, et intervint en jugement sur leur impiété (16: 23 et suiv.), et alors nous voyons que «dès le lendemain, toute l'assemblée des enfants d'Israël murmura contre Moïse et contre Aaron, en disant: Vous avez fait mourir le peuple de l'Eternel» (verset 41).

Et quel est le remède que le Seigneur donne dans cet état de choses? Il établit la sacrificature, comme le seul fondement, sur lequel il puisse continuer ses relations avec eux. Il fallait que Dieu manifestât sa puissance d'une manière positive et évidente, afin de mettre un terme aux murmures des enfants d'Israël devant Lui; mais, en le faisant, il fallait que ce fût en grâce, car agir envers eux sur un autre fondement, aurait été pour leur destruction. Et il ne peut qu'en être toujours de même. Si le Seigneur ne devait venir que selon la puissance de sa présence véritable, cela apporterait le trouble dans l'âme. Nous en voyons quelquefois des exemples à un lit de mort, pour quelques instants. En amenant alors l'âme devant Lui-même, Dieu la place sous une ombre de la puissance sous laquelle Christ passa — rien qu'une ombre.

Il est certain que de la manière dont un grand nombre de chrétiens sont occupés dans leur vie de tous les jours, ils réalisent peu la pensée de Dieu. Ce n'est pas qu'ils n'aient pas la paix, mais ils ne se rendent jamais pleinement compte de ce que la chair est devant Dieu. Ils savent peu ce que c'est que de se trouver face à face avec Dieu. Ils peuvent avoir été réveillés sous des convictions de péché peut-être terribles, et ils ont trouvé la paix; mais depuis lors, ils ont vécu dans la possession tranquille de certaines connaissances, mais sans réaliser la présence de Dieu; de sorte que si celle-ci se manifestait à eux tout d'un coup, ils seraient également «consumés» de terreur. Il est bon de nous rappeler que la certitude quant au salut est l'état véritable et normal du chrétien. Je le répète encore ici, pour faire voir que ce que je dis en ce moment n'est pas dit en vue de le nier le moins du monde; seulement je maintiens, que si Dieu se montrait à ces chrétiens, tout véritables chrétiens qu'ils soient, dans sa puissance réelle comme Dieu, il y aurait pour eux du trouble et de l'angoisse. Il ne devrait pas en être ainsi. Et si cela est, il est évident que l'on ne vit pas véritablement dans la présence de Dieu. C'est là cependant que nous avons le privilège d'être placés. Quand nous ne nous y trouvons pas, il y a une tendance constante dans le coeur à être occupé de certaines choses, qui sont fondées sur ce qui fait réellement notre relation avec Dieu, et de les poursuivre sans réaliser la présence de Dieu; et s'il y a en même temps de l'assurance, cela doit nécessairement endurcir le coeur. L'assurance, je le répète, doit être la part du chrétien, c'est-à-dire, l'assurance de la foi. Dieu ne nous la retire pas, mais nous pouvons la perdre. Quand on vit dans l'assurance, et que l'on ne marche pas dans la présence de Dieu, la conscience n'étant pas droite, il y a ce qui mine jusqu'au fondement même. Nous pouvons marcher dans la joie, mais si cette joie n'est pas la joie dans la présence de Dieu, il y aura un bouleversement tôt ou tard.

Voilà ce que j'entends par une confiance charnelle ou «de la chair» (Philippiens 3: 5). Ce n'est pas la confiance d'un homme inconverti, — il y a aussi celle-là, mais ce n'est pas d'elle que je veux parler. Je veux parler de la confiance d'un homme qui a une paix et une espérance justement fondées, mais qui sont entretenues en dehors d'une marche dans la présence de Dieu. C'est une paix véritable, ce sont des espérances véritables; elles sont fondées sur la vérité, et il les possède véritablement (la vraie condition d'un chrétien est toujours de les posséder); toutefois elles ont pris un caractère charnel dans le coeur, lorsqu'elles sont possédées sans Dieu, c'est-à-dire, lorsqu'elles ne sont pas maintenues par une marche dans la présence de Dieu. La conséquence en est, qu'au moment où le Seigneur apparaît, n'importe de quelle manière, fût-ce même en grâce, sa présence terrifie. Les Israélites n'avaient pas réalisé la puissance de leurs privilèges dans la présence de Dieu, c'est pourquoi ils tombèrent dans le désespoir et dirent: «Nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous perdus».

Je ne dis pas que nous devrions en venir jusque-là bien que le principe soit le même; mais il y aura du découragement, la confiance se perdra et on se méfiera de Dieu. Supposons que vous, — chrétien véritable — vous ayez marché d'une manière négligente, tout en ayant cette confiance de la chair, et que l'on vous parlât, fût-ce même de l'intercession de Jésus, — si par là le sentiment de la présence de Dieu s'éveillait dans votre âme, vous n'en seriez ni réjoui, ni fortifié, mais bien plutôt découragé, et votre âme s'abattrait au dedans de vous.

Notre position auprès du Seigneur est de marcher avec joie, mais c'est une joie «dans le Seigneur» (Philippiens 4: 4). Enoch «marchait avec Dieu» (Genèse 5: 24). Pouvez-vous dire que vous marchez avec Dieu? Je ne vous demande pas si vous faites ce qui est notoirement mauvais, mais la présence de Dieu vous alarmerait-elle, vous angoisserait-elle? Quand ceci est le cas, notre confiance, si nous en avons, est une chose de la chair.

Ne demeurez pas dans cet état; ce n'est pas à cela que Dieu nous a appelés. Il est tout grâce; grâce envers nous selon notre besoin; mais c'est auprès de Lui, et dans sa présence, que nous trouvons sa grâce et que nous en jouissons. Moïse chanta: «Tu as conduit, par ta miséricorde, ce peuple que tu as racheté; tu l'as conduit par ta force, à la demeure de ta sainteté» (Exode 15: 13). Et c'est là ce qu'il a fait pour nous. Il nous a amenés à demeurer en Lui-même. Il nous a donné son Esprit, pour qu'il fût notre demeure. Vous savez ce que c'est que d'être «chez soi» — là nous agissons tout autrement qu'ailleurs — aucun lieu n'est semblable à celui-là. Nous sommes «chez nous» quand l'Esprit agit dans nos coeurs et nous fait jouir de ce que nous possédons dans la présence de Dieu. Nous pouvons avoir à aller dans le monde, pour travailler, pour être exercés, occupés de mille manières différentes — mais quand nous sommes de retour chez nous, quel changement! Nous ne sortons que pour rentrer — là nous sommes «chez nous!» Combien cette pensée donne de force! combien elle nous affermit! Combien il est effrayant, au contraire, de dire: «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous perdus!» — et que la présence de Dieu, au lieu d'être la demeure de nos âmes, ne nous apporte que trouble et terreur! Je suis sûr que vous rencontrerez des milliers de chrétiens, qui, au lieu de se trouver hors de chez eux quand ils sont hors de la présence de Dieu, sont à l'aise au contraire. C'est, je le répète encore, une chose terrible, non seulement parce qu'elle est mauvaise en elle-même, mais parce que Dieu est grâce. Nous sommes appelés à être «dans notre demeure» auprès de Dieu. Le Seigneur Jésus Christ, au moment de retourner dans le ciel, dit à Marie: «Va vers mes frères, et leur dis: Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20: 17). Nous devons être là «chez nous», en Esprit, autant que Lui: N'était-ce pas avec joie, avec confiance, que Jésus dit qu'il allait vers son Père? Il était venu de la présence de Dieu, pour agir en amour au milieu de ce monde perdu, et il retourna auprès de Lui après avoir accompli l'oeuvre qui Lui était donnée à faire. Et n'était-ce pas, dans un sens, avec le sentiment de retourner chez Lui? Mais il dit: «Vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu». — Quelle précieuse pensée! C'est la place de l'Eglise — nous sommes appelés à être «chez nous» auprès de notre Dieu et de notre Père, pour la bénédiction de sa maison. Peu importe ce que peut être le monde — c'est là que nous devons être chez nous — heureuse demeure! — nous devons nous trouver là aussi réellement, en Esprit, et aussi heureux, que Christ!

Si c'est là ce que nous possédons en Christ (et Dieu ne donne rien de moins), nos âmes le réalisent-elles? Quelquefois nous nous préoccupons d'une mesure de capacité — mais Dieu ne mesure pas la capacité. — S'il nous reçoit, c'est pour l'amour de Christ; notre titre repose sur ce que Christ a fait. Nous pouvons passer par bien des expériences, mais Dieu ne s'arrête pas à nos expériences; dans ce gens, il n'a rien à faire avec elles. S'il nous reçoit, c'est pour l'amour de Christ, c'est comme Christ, tout est Christ. — Ce n'est rien de moins.

Voyons maintenant quelle est la réponse de Dieu. Après tous les murmures du peuple, après la révolte et la contradiction de Coré, voici comment le Seigneur fait taire les murmures: par la sacrificature, en grâce. C'est par la verge d'Aaron et non par celle de Moïse, que les enfants d'Israël seront introduits dans le pays de Canaan. Non seulement ils avaient été esclaves en Egypte, mais rebelles et pécheurs dans le désert, par conséquent la seule manière dont Dieu pouvait agir envers eux, c'était par la sacrificature. Il n'y a pas d'espoir possible de nous conduire dans la Canaan céleste, à moins de nous placer sous la sacrificature du Seigneur Jésus Christ; c'est pourquoi il est dit que «Christ est Fils sur sa propre maison» (Hébreux 3: 6).

C'est «sa maison»; voilà la première chose. — Et comment agit-il envers elle? Supposons que nous trouvions qu'une maison, qui n'est pas la nôtre, soit en mauvais état et sale, nous la supporterons peut-être ainsi, mais nous ne le ferons pas, si c'est notre propre maison. La manière dont Christ agit envers ce qui est sa maison (et il est de son intérêt, pour m'exprimer ainsi, de le faire), c'est de la nettoyer. Nous sommes placés sous la sacrificature de Christ: telle est la mesure que Dieu a prise dans le but de s'occuper du péché dans la «maison». «Si quelqu'un a péché, nous avons un Avocat auprès du Père, Jésus Christ le juste» (1 Jean 2: 1). Le péché met Christ à l'oeuvre; voilà l'effet qu'il produit; et ce n'est pas pour qu'il demeure, nous pouvons en être certains; mais en vertu du même principe d'après lequel nous ne rejetterions pas notre maison en y trouvant de la souillure, mais nous la purifierions, Christ aussi est occupé, en amour, à ôter le péché. C'est la sacrificature de Christ qui nous introduit jusque dans la cité céleste.

Mais ce qu'il faut remarquer ensuite, c'est que nous sommes des sacrificateurs dans la maison de Dieu; et ce que nous avons à porter en conséquence, c'est l'iniquité de la maison. «Alors l'Eternel dit à Aaron: Toi, et tes fils, et la maison de ton père avec toi, vous porterez l'iniquité du sanctuaire; et toi, et tes fils, avec toi, vous porterez l'iniquité de votre sacrificature» (18: 1). Ceci est vrai de l'Eglise tout entière. Nous sommes le sanctuaire de Dieu, «la maison de Dieu» (1 Timothée 3: 15). Il en est de même du saint individuellement. «Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint Esprit qui est en vous, et que vous avez de Dieu? Et vous n'êtes pas à vous-mêmes» (1 Corinthiens 6: 19). Rien de souillé n'était toléré dans le camp, encore moins dans le «sanctuaire». Nous sommes amenés maintenant à demeurer dans le sanctuaire de Dieu, à servir dans la sacrificature de Dieu. Ceci implique la responsabilité. Nous avons à juger le péché, mais non pas comme si nous étions sous la loi. Voilà où Dieu nous a placés — c'est la position dans laquelle nous sommes devant Lui, et ce que nous avons à porter, Il ne s'agit pas de connaissances ou de maturité en Christ; vous pourrez être converti d'hier, ou bien être un «père en Christ» et par là mieux en état de comprendre votre place, mais cela n'affecte en rien la question. Il pouvait se trouver dans le sanctuaire un sacrificateur jeune ou un sacrificateur âgé; le jeune sacrificateur aurait eu à porter l'iniquité du sanctuaire, et de la sacrificature, aussi bien que le sacrificateur âgé, aussi bien qu'Aaron Lui-même.

Dieu, dans les richesses de sa grâce, a fait de nous son «sanctuaire»; nos corps sont les temples du Saint Esprit; nous sommes sacrificateurs dans sa maison, et le mal doit donc être jugé en conséquence. Si la conscience de ceci ne produit pas en nous de la joie, il est impossible que nous soyons là où nous devons être. Si nous ne savons pas ce que c'est que d'être dans le sanctuaire de Dieu, nous ne savons pas ce que c'est que d'être un chrétien. Je ne dis pas que nous ne soyons pas des chrétiens, mais nous ne savons pas ce que c'est que de l'être. Si nous ne savons pas ce que c'est que d'être des sacrificateurs à Dieu, nous ne nous sommes jamais trouvés à notre véritable place devant Dieu.

Il y a encore autre chose à remarquer. Si nous avons, par grâce, la conscience d'être des sacrificateurs, n'y aura-t-il pas, comme une conséquence nécessaire, une sainte confiance — la confiance devant Dieu? Dieu n'agit pas envers ceux qui sont dans sa maison, comme un juge, comme s'ils étaient sous la loi. — Il est dit: «Toi et tes fils, etc.?» Si Dieu nous reçoit dans sa maison, il veut que nous y soyons comme des sacrificateurs. Si nous disons: «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus, nous sommes tous perdus; quiconque s'approche du pavillon de l'Eternel mourra, «nous sommes retournés sous la loi. Nous écoutons les raisonnements de notre propre coeur, et cela n'est pas de la foi.

Concluons. Nous sommes amenés, par une grâce merveilleuse, dans le sanctuaire de Dieu, nous sommes faits sacrificateurs à Dieu; et c'est sous ce caractère que nous devons juger du bien et du mal. Nous jugeons toujours du bien et du mal d'après la condition dans laquelle l'individu se trouve; nous n'attendons pas de nos serviteurs qu'ils soient des fils; ni de nos fils qu'ils soient des serviteurs. Si nous ne jugeons du bien et du mal que selon la conscience naturelle, nous ne nous trouvons pas du tout sur le fondement chrétien. Voici ce que nous devons nous demander: Que convient-il à un homme qui est le temple de Dieu? à un homme qui est sacrificateur à Dieu?

Reculons-nous devant cette responsabilité? Si nous ne pouvons pas dire que nous aimons à être là où Dieu nous a placés; que nous nous intéressons assez à sa gloire, pour désirer nous y trouver; si nous mettons en avant notre faiblesse, nous ne possédons pas la confiance de la grâce, nous disons en quelque sorte: «Voici, nous défaillons, nous sommes perdus». En principe c'est la même chose; je ne parle pas de la mesure. Pourquoi sommes-nous craintifs? Parce que nos coeurs ne sont pas affermis dans la pleine et simple confiance de la grâce — d'une grâce actuelle. «Etant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, par lequel nous avons eu accès aussi, par la foi, à cette faveur dans laquelle nous sommes» (Romains 5: 1). Bien que nous sachions que Christ est mort et qu'il a aboli notre péché, nous n'avons pas cependant une entière confiance dans la grâce de Dieu. Nous pensons qu'il n'est pas tout grâce, car c'est là ce que veut dire une grâce actuelle. Dieu nous aime de l'amour le plus parfait. Il ne peut agir envers nous sur aucun autre fondement. Il nous aime maintenant autant que lorsqu'il a donné Christ pour mourir pour nos péchés. Il est amour envers nous — rien autre. Il n'a pas un coeur double. La position dans laquelle nous nous trouvons est celle de la grâce. Et lorsque l'âme en est assurée, elle dit: Ah! que cette sainteté soit mienne, que je jouisse de la sainteté du sanctuaire! Si tout est grâce — nous ne dirons pas: «Nous défaillons, nous sommes perdus!» — Comment pouvons-nous être perdus quand tout est grâce!

Ce qu'il nous faut, c'est une connaissance complète, distincte et précieuse de notre position sous la grâce. Alors nous serons joyeux et pleins de courage. Ce qui nous rendra capables d'agir avec droiture, ce ne sera pas la «confiance de la chair», et de vivre dans la jouissance banale de certaines vérités — ce sera la certitude et le bonheur de la présence de Dieu. Connaissons-nous la présence de Dieu comme étant, pratiquement, la demeure de notre coeur? Quelle joie il y a alors! Soyez seulement assurés d'une chose, c'est que si vous venez à Lui au nom de Jésus, vous trouverez que la présence de Dieu est, pour le coeur, une demeure sûre et bénie.

Que son Nom soit à jamais béni! Il a dit: «Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi» (Jean 6: 37).