Je viens considérer avec vous, cher
lecteur, quelques-unes des circonstances de Jonas le prophète, espérant que,
par la bonté de Dieu, il nous sera donné, à vous et à moi, d'en retirer
quelques instructions propres à diriger nos coeurs dans le chemin de Dieu, au
milieu de ce monde rempli d'écueils. L'ennemi de nos âmes rôde toujours et met
en activité toutes les ressources de son art pour tendre ses pièges, afin de
nous faire tomber. Que le Seigneur soit avec nous dans cette courte étude, et
que nos âmes, renouvelées par sa grâce, en reçoivent beaucoup de bien pour sa
gloire.
Il est dans la Parole, des principes
généraux qui, selon le degré de foi avec lequel ils sont reçus dans l'âme,
produisent sur le coeur des impressions profondes, et le lient fortement à la
personne du Seigneur; ils lui impriment une direction propre à le rendre un
vrai témoin. L'un de ces principes, sur lequel je désire attirer votre
attention, repose sur la rédemption de notre être entier par le sang de Christ.
Quelques passages serviront à l'établir, la conséquence en découlera
naturellement.
On lit, 1 Corinthiens 6: 19, 20: «Ne
savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint Esprit qui est en vous,
et que vous avez de Dieu? Et vous n'êtes pas à vous-mêmes; car vous avez été achetés
à prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps». 7: 23: «Vous avez été achetés
à prix, ne devenez pas esclaves des hommes». Tite 2: 13, 14: «Attendant la
bienheureuse espérance, et l'apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur
Jésus Christ, qui s'est donné lui-même pour nous, afin qu'il nous rachetât
de toute iniquité, et qu'il purifiât pour lui-même un peuple acquis,
zélé pour les bonnes oeuvres». 3: 4 et 5: «Mais quand la bonté de Dieu notre
Sauveur, et son amour envers les hommes sont apparues, il nous a sauvés,
non sur le principe des oeuvres etc. etc.». 1 Pierre 1: 17, 18: «…
Conduisez-vous avec crainte durant le temps de votre séjour ici-bas, sachant
que vous avez été rachetés de votre vaine conduite… par le précieux sang
de Christ».
Ces passages montrent clairement que nous
sommes rachetés, sauvés, pour être un peuple consacré à Dieu; nous ne
sommes plus les esclaves du démon, «car nous appartenons à Celui qui est mort
et ressuscité pour nous». Nous ne sommes pas non plus nos maîtres, et «comme
autrefois nous avons livré nos membres au péché pour commettre l'iniquité, nous
devons maintenant les livrer à Dieu pour servir à la justice en sainteté»; mais
comme nous aurons l'occasion de le remarquer, la chair s'oppose à
l'accomplissement de la volonté de Dieu; ce n'est pas volontairement qu'elle
s'y soumet, et l'histoire de Jonas nous en fournira la preuve.
L'obéissance à la volonté de Dieu, tout en
mettant à mort la chair (car elle lui est contraire), apporte au coeur une joie
qu'a expérimentée celui qui a été à l'école de Dieu. Abraham a goûté cette joie
quand, ayant saisi le couteau pour mettre à mort Isaac, l'objet de ses
espérances, il a entendu cette voix lui disant: «Ne mets pas ta main sur
l'enfant et ne lui fais rien car maintenant, j'ai connu que tu crains Dieu,
puisque tu n'as point épargné pour moi, ton fils, ton unique»
(Genèse 22: 12; voyez encore Jean 8: 56). Job, David et Paul l'ont connue
aussi, cette joie, chacun dans ses propres circonstances; comparez: Job 1: 21;
42: 10-14; 2 Samuel 24: 17, 18, 24, 25; Psaumes 32: 5; 2 Corinthiens 1: 5; et
par la bonté de Dieu, chaque chrétien peut l'expérimenter encore. Le Seigneur
daigne produire en nos coeurs l'obéissance par sa grâce, nous rappelant que
c'est le vrai chemin de la bénédiction.
«La parole de l'Eternel fut adressée à
Jonas, fils d'Amitthaï, en disant, Lève-toi et t'en vas à Ninive, la grande ville
et crie contre elle, car leur malice est montée jusqu'à moi». Si les yeux du
Seigneur sont sur les justes, et ses oreilles attentives à leurs cris, sa face
est contre ceux qui se conduisent mal, pour exterminer de la terre leur
mémoire. La conduite des habitants de Ninive, comme jadis celle des habitants
de Sodome, était montée devant Dieu qui, avant d'exercer ses jugements, use de
longanimité envers cette ville coupable, en lui accordant encore pour se
repentir l'espace de quarante jours. «Lève-toi et t'en vas à Ninive», dit Dieu
à son serviteur; la volonté de l'Eternel est catégorique et exprimée avec
clarté, au point qu'il est impossible de s'y méprendre. Mais le coeur de
l'homme est rusé et désespérément malin par-dessus toute chose; cette mission ne
convient pas à Jonas, qui cherche à s'enfuir en descendant à Japho, où est
ouvert devant lui le chemin de la désobéissance. Un navire, dans ce port,
allait mettre à la voile pour se rendre en Tarsis, et Jonas en profite. Hélas!
le prince de ce siècle ne manque pas de fournir toutes les occasions favorables
pour faire sortir de la dépendance de Dieu, ou même pour empêcher les âmes de
recevoir le témoignage qu'Il a rendu de son Fils. Y a-t-il rien de plus simple
et de plus positif que la volonté de Dieu à l'égard de ses créatures, laquelle
est conçue en ces termes: «Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et
viennent à la connaissance de la vérité» (1 Timothée 2: 4) ? Et cependant
combien peu de personnes répondent à cet amour en recevant par la foi Jésus
pour Sauveur!
Je voudrais ici faire remarquer l'immense
différence qui existe entre Jonas et le prophète Elie. Tous les deux avaient
une mission difficile à accomplir et qui répugne beaucoup à la chair: s'opposer
aux flots débordés de la corruption générale et annoncer que le jugement de
Dieu va fondre à cause de la corruption même. L'un dénonçait ce jugement à une
ville païenne, l'autre à Israël apostat. Or Elie, dans le sentiment de sa
faiblesse (car il était un homme sujet aux mêmes infirmités que nous), avait
puisé dans la prière la force dont il avait besoin, et lorsque le moment arrive
de se présenter sur la scène il s'y rend dans la conscience que Dieu est avec
lui: «L'Eternel en la présence duquel je me tiens est vivant». Il savait qu'Il
se déclare le protecteur de ceux qu'il envoie; il est leur force et leur
bouclier, qui pourrait leur faire du mal? (Genèse 15: 1; Proverbes 30: 5).
Jonas, au contraire, regarde à lui-même, et aux circonstances, telles qu'elles
se présentent; convaincu de son impuissance, au lieu de se fortifier en Dieu,
il cherche à fuir de devant sa face, et tombe dans le filet de l'oiseleur. En
étudiant la désobéissance du prophète, n'oublions pas cette exhortation qui
nous concerne particulièrement: «Que celui qui croit être debout prenne garde
qu'il ne tombe» (1 Corinthiens 10: 12).
L'homme essaie de se persuader à lui-même,
qu'il peut se soustraire à Dieu, comme il se soustrait aux poursuites des
hommes; l'expérience lui prouve le contraire: «Où irai-je loin de ton Esprit,
et où fuirai-je loin de ta face? si je monte aux cieux, tu y es; si je me
couche au sépulcre, t'y voilà. Si je prends les ailes de l'aube du jour et que
je me loge au bout de la mer; là même ta main me conduira, et ta droite me
saisira» (Psaumes 139: 7-10). Telle est la leçon que recevra notre prophète.
Une fois qu'il a fait dévier le chrétien de
sa route, Satan cherche à le lier aussi étroitement que possible, pour
l'empêcher de rebrousser chemin vers les témoignages de Jéhovah. Trop souvent,
dans les difficultés qui nous surviennent, nous oublions qu'elles sont permises
par Celui qui coordonne divinement toutes les choses de la vie, en vue de notre
bonheur spirituel. Et si nous ne comprenons pas d'abord pourquoi nous ne
réussissons ni dans nos récoltes, ni dans nos entreprises, sachons nous
incliner, du moins, devant la volonté de Celui qui fait tout concourir au bien
de ceux qui l'aiment. Que de fois n'a-t-on pas vu le chrétien (après avoir
examiné de près les difficultés qui lui sont survenue) confesser que le
rempart, dont il a été entouré et qu'il n'a pu franchir, a été pour lui un
préservatif, dont Dieu s'est servi pour l'empêcher de se fourvoyer, en
s'unissant avec le monde sous quelque forme que ce soit. Ne pouvons-nous pas
exprimer cette pensée, en nous appuyant sur ce passage: «Et ayant payé le port,
il y entra, etc.», que si Jonas n'eût pas eu de quoi pouvoir payer, il
n'aurait pas suivi cette route? Sans doute qu'il aurait pu persister dans la
désobéissance et prendre un autre chemin, car la pente était glissante, mais,
en tout cas, rappelons-nous que ces choses sont arrivées pour nous servir
d'instruction. Un moment arrive dans la vie, où Dieu permet que soit mis en
relief l'état moral de nos coeurs, pour nous apprendre à ne pas présumer de
nous-mêmes. Qu'il nous soit accordé la faveur, d'avoir nos reins ceints de la
vérité et notre lampe projetant une brillante clarté.
Il est une chose difficile à comprendre,
mais que Dieu nous explique dans sa Parole; je veux parler de la position de
certains chrétiens qui,tout en ayant connaissance du mal où ils sont, y
persistent cependant. N'ayant pas gardé une bonne conscience, ils se sont
enchevêtrés dans le péché, d'où la grâce de Dieu en puissance peut seule les
sortir. Une exhortation, que nous ne saurions trop apprécier à sa juste valeur,
se trouve en 1 Timothée 1: 19: «Gardant la foi et une bonne conscience,
laquelle quelques-uns ayant rejetée ont fait naufrage quant à la foi». Lui,
Paul, s'étudiait à avoir une conscience pure; c'est-à-dire qu'il servait
Dieu, selon la connaissance qu'il avait de sa volonté; c'est, je crois, dans ce
sens qu'il pouvait dire devant le sanhédrin, (Actes des Apôtres 23: 1): «Hommes
frères, je me suis conduit en toute bonne conscience devant Dieu jusqu'à
ce jour» et; (2 Timothée 1: 13): «Je suis reconnaissant envers Dieu, lequel je
sers dès mes ancêtres, avec une conscience pure». Autre, chose est
d'ignorer la volonté de Dieu, et autre chose de désobéir à cette volonté. Dans
l'ignorance, on peut persécuter les enfants de Dieu, tout en croyant le servir
(Jean 16: 2, 3). «Le temps vient que quiconque vous fera mourir, croira
servir Dieu, et ils vous feront ces choses, parce qu'ils n'ont pas connu le
Père ni moi» Paul disait (1 Timothée 1: 13): «Moi qui étais auparavant un
blasphémateur, et un persécuteur et un outrageux, mais miséricorde m'a été
faite, parce que j'ai agi dans l'ignorance, dans l'incrédulité». La
transgression provient de la désobéissance à la volonté de Dieu, connue
positivement par le coeur. Dans ce cas, la conscience ne cesse
d'accabler de reproches, à moins qu'on ne l'oblige à se taire. Si la conscience
est exercée devant Dieu et que la tentation arrive, le mal se présente tel
qu'il est, et nous en avons horreur; mais si, au lieu de fuir la tentation, on
la contemple, le jugement spirituel diminue; bientôt on s'habitue au mal, et la
bonne conscience, étant rejetée, la chute s'ensuit. N'avons-nous pas vu un
certain nombre d'âmes faire cette triste expérience? Averties du danger
qu'elles couraient, elles ont été vivement agitées, au premier pas qu'elles ont
fait dans le mal; leur conscience étant en exercice, la souffrance morale s'en
est suivie, mais bientôt après elles ont cru d'y mettre un terme en s'y
plongeant davantage. Pauvres âmes, laissées pour un moment à elles-mêmes, afin
d'apprendre la différence qui existe entre servir le Seigneur, et servir Satan
et les convoitises de leurs coeurs, le repos dont elles semblent jouir n'est
qu'éphémère, et sous peu le trouble lui succédera.
Arrivé à Japho, Jonas, après avoir payé son
passage jusqu'en Tarsis, entra dans le navire qui bientôt après quitta le port
et vogua sur la mer. Qui pourrait dépeindre ce qui se passa dans l'âme du
prophète, au moment où, s'éloignant de Japho, il ne voyait que l'espace éthéré
et l'immense nappe d'eau? Ne dirait-on pas que, ne pouvant résister aux
reproches de sa conscience, il descend au fond du navire et va chercher du
repos dans l'inconscience de son existence, essayant par ce moyen d'émousser
ces paroles plus pénétrantes qu'aucune épée à deux tranchants: «Lève-toi et
t'en vas à Ninive». Mais Dieu veille sur lui, il le suit de ses yeux et bientôt
sa puissance va le faire sortir de son profond sommeil. Tout, entre les mains
de Dieu, devient un instrument propre à servir à l'accomplissement de ses
desseins: que ce soit la pluie comme aux jours de Noé, le feu comme aux temps
de Lot, les éclairs accompagnés du roulement du tonnerre comme en Sinaï, le
tremblement de terre comme aux jours de Josias, ou le vent et la tempête comme
dans la circonstance qui nous occupe. «Mais l'Eternel éleva un grand vent sur
la mer, et il y eut une grande tourmente en la mer, de telle sorte que le
navire se pensa rompre». Quelle consternation dans tout l'équipage, quel
trouble au milieu de ces matelots qui élèvent leurs mains suppliantes vers
leurs dieux impuissants à les secourir, incapables de les délivrer! La mort est
bien sombre pour quiconque n'a point d'espérance; elle est le roi des
épouvantements, pour quiconque n'a pas la paix avec Dieu. Aussi, n'est-il pas
étonnant de voir ces matelots jeter à la mer la charge du navire, quelque
précieuses que fussent les choses qu'ils transportaient,pas plus qu'il ne l'est
de voir les personnes malades faire tous leurs efforts pour prolonger leur
existence. Leur vie leur est plus précieuse que tout le reste, et rien ne leur
coûte, soit qu'il s'agisse de consulter les plus célèbres médecins, soit de se
rendre aux eaux thermales les plus éloignées. Encore s'estime heureux, celui
qui parvient à calmer sa souffrance à défaut de guérison.
Mais revenons à Jonas qui, tandis que le
vaisseau est ballotté par la tempête, se trouve au fond du navire à dormir
profondément. Ne serait-on pas tenté de croire que lui seul sera préservé de
participer à l'agitation de tout l'équipage? Cependant, en s'aperçoit qu'il
manque à l'appel, et le pilote va le trouver dans sa profonde retraite, en lui
disant: «Que fais-tu, dormeur? lève-toi, crie à ton Dieu». C'est maintenant
qu'il fait l'expérience décrite au Psaume 139: 11, 12: «Si je dis: au moins les
ténèbres me couvriront, la nuit même sera une lumière tout autour de moi». Dès
lors, il assiste à cette scène émouvante de la mer en courroux, et si, jusqu'à
ce moment, il a joui d'un repos peu commun, l'effroi, dorénavant, va le
remplacer. Il n'y a rien de si communicatif que l'effroi, comme chacun de nous
a pu l'expérimenter dans sa vie. Qu'une catastrophe arrive, ou qu'un incendie
se déclare chez notre plus près voisin, et nous sommes dans l'anxiété; que le
tonnerre gronde et que la foudre se décharge près de l'homme le plus impie, on
le verra devenir momentanément sérieux. Essayons ici de nous représenter le
prophète, sur le pont du navire, consultant d'un regard et la mer en courroux,
et le visage décomposé des marins, car tout en eux trahit qu'ils sont dans un
péril imminent. Le seul espoir qui leur reste est celui-ci. «Crie à ton Dieu,
peut-être qu'il pensera à nous, et nous ne périrons point». Comme ces mots:
«crie à ton Dieu» devaient péniblement l'affecter! la pensée qu'il s'enfuyait
de devant sa face devait agir avec puissance sur son coeur, pour réveiller sa
conscience trop longtemps endormie. Que de choses se passent dans son âme en ce
moment! et cependant ce n'est pas la fin, car tout devient plus sérieux encore;
les matelots parlent de jeter le sort pour savoir à cause de qui ce mal leur
était arrivé. Sans entrer dans des détails sur cet usage, je me bornerai à
faire remarquer que Dieu est juste, ne tenant point le coupable pour innocent.
(Genèse 18: 25): «Celui qui juge la terre ne fera-t-il, pas justice?» Il a fait
saisir le coupable Acan (Josué 7: 16-22), et il fait tomber le sort, sur Jonas,
qui est obligé de déclarer et son origine et sa profession: «Je suis Hébreu, et
je crains l'Eternel, le Dieu des cieux, qui a fait la mer et le sec». Mais quelle
contradiction entre les paroles et les actes du prophète: «Je crains
l'Eternel», dit-il, et il leur déclare «qu'il s'enfuyait de devant la face de
l'Eternel!» N'est-ce pas là aussi, ce qui nous arrive? confessons-le
sincèrement; nous avons trop souvent le langage du ciel, tandis que nos coeurs
sont tournés vers les choses de la terre; nous faisons la profession d'être
étrangers et voyageurs, d'attendre Jésus qui va transformer le corps de notre
abaissement pour le rendre conforme au corps de sa gloire, pour nous introduire
dans la cité qui a des fondements, — et nous laissons traîner nos affections
dans ce pauvre monde! Trop souvent, notre langage est démenti par notre
conduite, et que personne ne se fasse illusion, car le monde même connaît
quelle devrait être notre vie, et si nous manquons, il sait souvent le faire
remarquer. «Pourquoi as-tu fait cela?» On pourrait comparer les chrétiens qui
ont un beau langage sans avoir les effets, à un arbre qui, paré de fleurs au
printemps, donne de bonnes espérances pour une récolte abondante de fruits,
quand viendra l'époque de les cueillir, espérance qui disparaît à mesure qu'on
avance, car ils tombent, et c'est à peine s'il en reste quelques-uns. L'unique
moyen de porter du fruit qui soit bon, est de demeurer en Christ (Jean 15: 5),
car hors de Lui on ne peut produire que le mal. Qu'il nous soit donné, non
seulement de dire que nous lui sommes chers, mais de montrer qu'il nous est
précieux par un attachement toujours plus grand à sa volonté, nous rappelant
qu'il vaut mieux marcher dans ses sentiers, attirés par son amour, que d'être
obligés d'y marcher par contrainte.
Le Seigneur a sur ses rachetés des droits
incontestables, qu'il fait valoir pour le maintien de sa gloire. Aussi, toute
âme qui se fourvoie du chemin de l'obéissance oblige Dieu à la poursuivre sur
le chemin de sa propre volonté; et, atteinte, elle devra boire jusqu'au fond le
fiel qu'elle aura versé dans sa coupe. En sages architectes, calculons toute la
dépense ayant de prendre le détour de la route, ce qui nous préservera d'entrer
dans le chemin ouvert par l'ennemi. «Ne soyez pas sans intelligence, mais
comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur» (Ephésiens 5: 17). Si Jonas
eût pensé à la tempête et à ses résultats, il ne se fût jamais embarqué; mais
maintenant, il est obligé de prononcer sa condamnation; combien c'est solennel!
«Prenez-moi, et me jetez dans la mer et la mer s'apaisera envers vous, vous
laissant en paix, car je connais que cette grande tourmente est venue sur vous
à cause de moi» (versets 11 et 12). David en a aussi compris tout le sérieux,
lorsque, après avoir fait le dénombrement du peuple, le prophète Gad est venu
vers lui pour lui dire de choisir l'un des trois châtiments que, de la part de
Dieu, il venait lui proposer. Il répond: «Je suis dans une très grande
angoisse» (2 Samuel 24: 14); mais il n'existe pas de juste milieu, il n'y a pas
moyen d'échapper, pas plus dans la circonstance de David, que dans celle de
Jonas qui est obligé de dire: «Jetez-moi à la mer». Sans doute que la pensée de
jeter à la mer un homme plein de vie répugne fort aux mariniers qui, avec les
ressources de leur art, déploient une sagacité peu commune pour relâcher à
terre; mais leurs efforts sont inutiles et leur force dégénère en faiblesse,
«car la mer s'agitait de plus en plus». Ils hésitent encore, la tempête se
courroucera davantage, et la séjour prolongé du prophète au milieu d'eux ne
pourra que compromettre leur existence. Cependant la pitié qu'il leur inspire
touche à sa fin, et le prenant avec résolution, ils le jettent dans les flots;
c'est seulement alors que le vaisseau peut tranquillement poursuivre sa route,
car Dieu satisfait apaise la tempête.
Et maintenant, chers frères, puissions-nous
profiter de la sérieuse leçon que nous donne ce chapitre de Jonas. Qu'il nous
soit accordé d'avoir une conscience délicate, éclairée par la lumière divine,
pour ne jamais laisser passer sous silence le moindre péché; apprenons à
appeler chaque chose par son nom, et non pas le mal bien, et le bien mal; n'essayons
jamais d'excuser le péché sous quelque forme qu'il apparaisse, nous rappelant
que le Seigneur a dit: «Celui qui est injuste en ce qui est très
petit est injuste aussi dans ce qui est grand» (Luc 17: 10).
Rappelons-nous surtout que la persévérance dans un mal connu oblige Dieu, pour
sauvegarder l'honneur de son témoignage et la gloire de son saint nom, à faire
même disparaître de la scène de la vie ceux qui le déshonorent. Le chrétien,
négligent à se juger sincèrement devant Dieu, laisse accumuler son compte, au
point d'être déclaré débiteur insolvable, d'où s'ensuit, comme chez les
Corinthiens, le jugement à la mort du corps, pour ne pas être plus tard
condamné avec le monde (1 Corinthiens 11: 30-32). Oh! apprenons à balancer le
chemin de nos pas.
Avant de poser la plume pour clore ces
lignes, dans la pensée qu'elles pourront tomber entre les mains de personnes
encore en dehors de la jouissance du salut, je désire attirer leur attention
sur les paroles que Christ prononce en Matthieu 12: 39, 40: «Une race méchante
et adultère recherche un signe; et il ne lui sera pas donné de signe, si ce
n'est le signe de Jonas, le prophète. Car comme Jonas fut dans le ventre du
cétacé trois jours et trois nuits, ainsi le Fils de l'homme sera trois jours et
trois nuits dans le sein de la terre».
Le coeur de l'homme, naturellement raisonneur,demande des signes, tandis que la foi lui est proposée; par ce moyen, il rejette le témoignage de Dieu. Les Juifs peuvent demander des miracles, et les Grecs, par leur philosophie, chercher la sagesse: ils auront la confusion pour partage, tandis que l'âme qui, par la foi, reçoit Jésus, possède la sagesse de Dieu et ne viendra point en jugement. Oui, chères âmes, si Jonas, à cause de sa désobéissance, passa trois jours dans le ventre du gros poisson, Jésus a passé un même espace de temps dans la mort, à cause de votre désobéissance. Mes transgressions, vos transgressions, il les avait si bien prises sur Lui, il s'était si bien substitué à notre place, qu'il a pu dire en vérité: «Les outrages de ceux qui t'outrageaient sont tombés sur moi», et: «Mes iniquités m'ont atteint et je ne les ai pu voir» (Romains 15: 3; Psaumes 40: 12). Et maintenant, pouvez-vous dire, cher lecteur, que, dans votre coeur, vous croyez que ce sont vos iniquités qui ont cloué sur le bois le Fils de Dieu? croyez-vous que c'est pour vous qu'il a souffert de la part de Dieu? Si vous le croyez, sachez que de vos péchés, il ne sera plus fait mention devant Dieu. N'est-ce pas Lui, qui a fait celui qui n'a pas connu le péché, être péché pour nous, afin que nous fussions justice de Dieu en Lui (Jésus) (2 Corinthiens 5: 21) ? Répétons donc avec Esaïe 53: 5, 6: «Or, il était navré pour nos forfaits, et froissé, pour nos iniquités; l'amende qui nous apporte la paix, a été sur lui, et par sa meurtrissure, nous avons la guérison… l'Eternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous». Et avec Paul (Romains 5: 1): «Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ», et encore (8: 1): «Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Dieu est immuable dans ses promesses; il donne gratuitement; ce qu'il a dit, il l'accomplira infailliblement, en dépit de toutes les — machinations de l'adversaire; il ratifiera ses promesses qui sont toutes oui et amen en Christ. En voici quelques-unes. (Jean 3: 17, 18): «Car Dieu n'a pas envoyé son Fils au monde pour juger le monde, mais afin que le monde soit sauvé par Lui. Celui qui croit en Lui, n'est pas jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé.» (5: 24): «En vérité, en vérité (dit Jésus), je vous dis que celui qui entend ma parole, et croit à celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle, et ne viendra point en jugement.» (6: 40, 47): «C'est ici la volonté de celui qui m'a envoyé, que quiconque voit le Fils et croit en Lui, ait la vie éternelle… En vérité, en vérité, je vous dis: celui qui croit en moi a la vie éternelle». Lisez encore: Actes des Apôtres 10: 43; 16: 31; Romains 5: 1; Ephésiens 2: 8 et 9. Et si vous dites encore: je crois ces choses, mais je ne sens pas dans mon âme la paix de Dieu, j'ai à vous dire que Dieu ne veut en aucune manière que vous fassiez reposer votre paix sur le pauvre fondement de vos sentiments, mais plutôt sur l'unique objet de ses affections, Christ. Lui est invariablement le même, tandis que vos sentiments peuvent changer, et changent en effet plus que le caméléon ne change de couleurs. Regardez donc à Jésus, chère âme, et non au dedans de vous, car que ce soit un signe extérieur, ou intérieur, que vous demandez, vous êtes dans le cas de la nation méchante et adultère qui demandait un signe. Le signe a été donné, Christ a été élevé sur la croix, il a connu la souffrance, et elle était si réelle, que sa divine bouche a prononcé ces paroles qui exprimaient son angoisse: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as tu abandonné?» Il était cependant l'Etre par excellence, parfait en lui-même; il a parfaitement satisfait la justice divine qui l'a reçu à votre place, et le pardon vous est offert, pourquoi ne le recevriez-vous pas? Auriez-vous la pensée de pouvoir faire quelque chose? Mais Jésus, avant d'expirer sur la croix, a dit: «Tout est accompli». Son oeuvre est parfaite, on ne peut rien ajouter. Attendez-vous qu'un ange du ciel vienne vous dire: Je suis envoyé de Dieu pour t'annoncer que grâce t'a été faite, ou de n'avoir plus aucune mauvaise pensée pour croire que Christ vous a sauvé? Un ange, il est vrai, a parlé à Corneille, mais ce n'était pas dans ce que l'ange lui dit qu'était le salut; il dut envoyer chercher Pierre qui lui exposa le salut accompli par Christ, et c'est la foi aux paroles des prophètes et de Pierre qui fit jouir Corneille et ceux qui étaient assemblés, de la rémission de leurs péchés. Or nous avons ces paroles mêmes, et la foi, aujourd'hui comme jadis, donne la paix au coeur. Croyez donc, pour en faire l'expérience. Alors même que vous croirez, les tentations ne manqueront pas de vous assaillir, mais vous trouverez, en Jésus, la force de leur résister, car ayant été tenté, il est puissant pour secourir ceux qui sont tentés, ayant remporté lui-même une parfaite victoire. Peut-être, chère âme, croyez-vous et vous n'osez guère vous réjouir; la pensée de tomber dans la tentation vous afflige, votre foi est faible; ce que vous avez à faire c'est de crier — «Seigneur, augmente ma foi». Que Dieu, dans sa grâce, vous donne assez de confiance en son amour pour vous, pour que vous puissiez vous réjouir dans l'espérance.