(Extrait
d'une lettre) (*)
(*) On s'est permis, dans cet article, de
changer quelques expressions, et d'ajouter des indications de passages.
Il reste encore deux questions que vous
m'avez adressées dans votre lettre, et auxquelles je n'ai pas répondu: celles
de savoir si nous verrons le Père «face à face», et ce que veut dire: «l'image
de Dieu». Il faut se souvenir que «face» ici est une figure, renfermant une
importante et précieuse vérité, mais une figure; aussi l'expression de «face
à face» est-elle employée pour montrer une manière de connaître et non pas
un fait matériel. Voici ce qui est très clair; c'est qu'au lieu de connaître
Dieu par la foi, il y aura une révélation de Lui pleine et immédiate; et
quand je dis: «de Lui», je parle de Lui-même, non pas d'une révélation à
son sujet; et je dis une révélation immédiate, subjectivement, à l'égard
de la manière de connaître, non pas une révélation par des communications
intermédiaires. C'est Lui qui se révèle; c'est plein, c'est sans
l'intervention d'un moyen, quelle que soit la manière de sa révélation de
Lui-même. Le coeur, enseigné du Saint Esprit et participant à la nature divine,
a besoin de cela: «Mon âme a soif de Toi: ma chair te souhaite… pour voir ta
puissance et ta gloire, ainsi que je l'ai vu dans ton sanctuaire» (Psaumes
63: 1, 2). La connaissance qu'on a de Dieu imprime dans le coeur le besoin de
le connaître immédiatement, d'être sciemment avec Lui-même. Prenez Christ
Lui-même comme homme, Lui qui est «de Dieu», Lui «a vu le Père», Lui, «le Fils
de l'homme qui était dans le ciel». Appliquez à Lui le Psaume 63: il devait,
comme présent dans ce monde, désirer avec une vive ardeur de voir Dieu qu'il
connaissait parfaitement, qu'il avait vu même dans son sanctuaire. Mais alors,
on sent de la manière la plus profonde et la plus intime qu'on a vu Dieu en
Christ Lui-même. Le coeur est satisfait; il n'y a pas «un autre» à rechercher
(comp. Luc 7: 20; Jean 1: 14, 18; 12: 44-46; 14: 7-11 etc.). C'est Dieu qu'on
cherche et qu'on désire, qu'on veut, par la grâce, — et parce qu'il s'est
révélé; — mais on l'a trouvé! C'est Lui qu'on connaît. Rien de plus profond que
cette conviction! Elle domine la conscience de notre propre existence, chose merveilleuse
et inintelligible pour celui qui ne le connaît pas, mais vraie, car la présence
de Dieu saisit plus que la conscience de soi-même et efface le moi, en nous le
faisant oublier, quoi qu'on la connaisse pour soi. Mais c'est une révélation
réelle, et l'éclat et le bonheur de la connaissance de Dieu efface l'homme à
ses propres yeux; on s'oublie en s'occupant de Lui, et lui est révélé
parfaitement, — s'est manifesté en Christ. Aussi faut-il distinguer «le Père».
Quand «le Fils» s'est fait homme et prend place comme Fils avec nous,
c'est toujours «le Père» qu'il présente comme vrai Dieu (voyez Jean 6: 27; 17:
1-8; et comp. 1 Corinthiens 8: 6). Tout en disant aux incrédules: «Avant
qu'Abraham fût, je suis», et à l'incrédulité de ses disciples: «Celui
qui m'a vu, a vu le père»; — à l'homme, il présente Dieu; avec l'homme, il
reconnaît «Dieu et le Père» comme tel. Il s'est anéanti Lui-même, Lui qui avait
la gloire et était un avec le Père, comme nous avons le privilège de le faire,
nous qui avons la misère: «Mon Dieu et votre Père», dit-il, «mon Dieu
et votre Dieu». Souvenons-nous encore que, quoique «le Père» dans ce sens
tienne proprement et essentiellement la place de «Dieu» pour nos âmes, ce nom
de «Père» est un nom de relation, comme «Dieu» est un nom de
nature. Quand nous parlons de «voir», il faut tenir compte de cela.
Maintenant examinons quelle est
l'instruction que la Parole nous fournit sur ce point, sur ce voir. 1°
Dans un certain sens, Dieu est, dans son essence, invisible; nous lisons: «l'image
du Dieu invisible», «Dieu manifesté en chair», «vu des anges»;
«lequel habite dans la lumière inaccessible» (Colossiens 1: 15; 1 Timothée
3: 16; 6: 16). Quant à son «essence», on ne le voit pas. Quelques phrases,
auxquelles on pourrait donner un autre sens, ne me semblent pas parler d'une
vue matérielle, pour dire ainsi. Moïse a parlé avec Dieu «face à
face», ou «bouche à bouche» (Exode 33: 11; Deutéronome 34: 10; comp.
Deutéronome 5: 4): mais c'était en contraste avec «en songes» et «en
visions» (Nombres 12: 6-8). Or, dans les passages dont il est question ici,
ce n'était que la nuée qui était descendue; puis Dieu parlait avec Moïse
directement par des paroles, comme ailleurs, dans le buisson (Exode 3), c'était
«dans une flamme de feu». Ainsi quand il est dit (Apocalypse 22: 3): «les
esclaves le serviront, et ils verront sa face», je ne doute nullement que
ces expressions ne présentent l'idée d'être devant Dieu; mais je crois
en même temps que c'est une image empruntée de la cour d'un roi (comp. 2
Chroniques 9: 7 ou 1 Rois 10: 8; Esther 1: 14.) Aussi personne ne peut aller
au-devant de Dieu pour le connaître, indépendamment des choses dans lesquelles
il se révèle: Il nous cache pendant qu'Il passe, puis nous voyons ce qu'Il est,
quand il a passé (comp. Exode 33: 12; 34: 1 etc.). A l'égard de la rédemption
et de l'amour de Dieu, cela est évident.
Voilà quelques données de la Parole pour
corriger négativement l'idée de la vue de Dieu.
Maintenant, quand Dieu s'est fait voir aux
hommes, cela a été par le Fils, je n'en doute pas (comp. Esaïe 6 avec Jean 12:
37-43, Sinaï avec Hébreux 12: 25, 26; Esaïe 51 et d'autres passages, qui ne
laissent aucun doute à cet égard dans mon esprit); de sorte que nous verrons
Dieu, Jéhovah, en Christ: c'est là que les anges le voient. Ainsi dans
l'Apocalypse, les «Il» et «Lui», au singulier, se rapportent à
Dieu et à l'Agneau. Lorsqu'ils sont distingués, C'est «la gloire de
Dieu» qui a illuminé la cité, et «l'Agneau est sa lampe», Il est le
«porte gloire», l'objet qu'on reconnaît dans la gloire et en qui cette gloire
se manifeste. «Et je ne vis pas de temple en elle», car Dieu, «le
Seigneur Dieu le Tout-puissant et l'Agneau en sont le temple»; mais, ici
même, le caractère immédiat de la manifestation est évident. Un temple entoure
Dieu de gloire, de solennité, d'un appareil de gloire où il demeure, mais qui
le cache, Lui. Or, c'est Dieu lui-même, c'est sa présence qui est le temple; Il
se manifeste, Il se déploie Lui-même pour être avec nous, et c'est cette
manifestation qui est le lieu de notre adoration, et qui caractérise notre
adoration: au lieu que Dieu se revête de ce qui est fait de main pour attirer
l'attention de l'homme en se soustrayant à ses yeux, Lui-même, Dieu,
s'entourera de sa propre gloire comme temple et sera l'objet propre de notre
adoration en se révélant à nous (voyez Jude 24, 25; Actes des Apôtres 7: 55).
Comment, matériellement, pour ainsi dire? — Je ne sais; — je ne sais pas ce que
sera un corps glorieux. Je ne crois pas que ce soit seulement le Christ
glorifié que nous verrons, quoique ce soit sûrement Lui, parce que ce
sera avec Lui, «premier-né entre plusieurs frères».
Outre la gloire de Dieu, il y a la relation
de fils avec le Père dont nous jouirons immédiatement. C'est Christ qui
nous a révélé le Père, comme Il nous a manifesté Dieu. Mais nous allons vers
notre Père comme vers notre Dieu. Le Père Lui-même nous aime (Jean 16: 27);
nous serons dans sa maison. Christ viendra dans la gloire du Père (Luc 9: 26)
comme dans la sienne propre, ainsi que le Père s'est manifesté moralement et en
puissance en Lui, dans son humiliation. Mais ici, c'est plutôt une relation que
la gloire publique. Nous serons dans la maison, le royaume du Père; nous aurons
la place de fils. Le Père lui-même nous aime nous le connaîtrons «immédiatement»
comme tel nous le connaissons (Jean 17: 26). Mais tout en nous plaçant comme
ses enfants devant Lui, la Parole parle plus de son amour, de la communication
de ses paroles, de sa maison, que de le voir, pour autant que les Ecritures ont
été saisies de ma part sur ce sujet, par sa grâce. Il est dit dans un endroit: «Non
pas que quelqu'un ait vu le Père, sinon celui qui est de Dieu; celui-là a vu le
Père» (Jean 6: 46), celui qui est Père; — nous voyons au moins sa gloire,
comme Dieu. Le nom communique une relation qui ne se voit pas; seulement, nous
sommes devant Lui pour en jouir dans sa maison comme fils. Nous ne nous
asseyons pas sur son trône; Christ s'y assied; nous nous asseyons sur le trône
de Christ. Dans sa distinction personnelle, si c'est de cela qu'il est
question, je ne sache pas qu'il soit dit dans la Parole que nous le voyions. Je
ne pense pas que nous devions le voir; mais je crois que nous serons
«immédiatement» devant Dieu comme Père, le connaissant, parce que nous
connaissons sa relation avec le Fils et que nous sommes avec le Fils et, par
grâce, dans cette relation. Dieu est connu par la révélation du Père dans le
Fils. La prière, fondée sur le titre de «Père», que nous trouvons au chapitre 3
de l'épître aux Ephésiens, confirme ce que je viens de dire, car elle suppose
la relation la plus intime et la plus immédiate qui soit connue, et avec
Christ; mais l'idée de voir n'est pas présentée dans la Parole, sauf
quant à Christ: «Celui-là a vu le Père», et je ne crois pas que cette
prérogative soit communiquée ailleurs aux enfants. Je vois, dans les chapitres
14, 15, 16, 17, de l'évangile de Jean, les relations les plus intimes, la
connaissance la plus profonde du coeur, car Il nous aime comme Il aime Jésus,
et Lui demeure en nous pour que nous en jouissions: mais l'Esprit nous conduit,
il me semble, sur un autre terrain que celui de voir. Tandis que, quel
que soit le moyen de répondre en haut à la vision physique d'en bas, il est
bien dit: «Nous verrons sa face» (la face de Dieu). Ce sera avec Jésus;
nous le verrons, et Il est notre Père, et nous serons dans sa maison. Cette
idée d'être dans sa présence est vérifiée par l'expression de: «Je le
confesserai devant mon Père». Je crois que Matthieu 18: 10 est aussi une
figure d'une cour royale.
Quant à «l'image (*) de Dieu» je ne sais si mes idées sur ce point sont
aussi claires que sur le sujet dont je viens de m'occuper; vous ne les
trouverez guère telles, parce que la Parole en dit très peu de chose. A ce que
nous lisons, Ephésiens 4: «Renouvelés dans l'esprit de votre entendement»
et «ayant revêtu le NOUVEL HOMME créé selon Dieu en justice et en
vraie sainteté», répond le passage de l'épître aux Colossiens, chapitre 3: «Renouvelés
en connaissance selon l'image de Celui qui l'a créé»; mais ceci me semble
une autre chose que l'homme-créature, parce que ici la connaissance entre, et
c'est moralement, «en justice et en sainteté», c'est-à-dire le bien selon la
puissance de Dieu, lorsque la connaissance du bien et du mal est entrée,
L'homme avant sa chute n'était pas juste et saint: il était innocent. Il était
saint dans le sens de l'absence du mal, ce qui est vrai de la nature de Dieu;
mais, n'ayant pas la connaissance du bien et du mal, il n'était pas séparé de
coeur de ce mal, ainsi que l'est Dieu. Il n'y avait pas d'injustice non plus,
mais le mal n'existait pas.
(*) Quand je dis: image, ce n'est
que la lettre, parce que l'image suggère une réalité beaucoup plus puissante
qu'elle-même.
Mais il me semble qu'il y avait un autre
point capital dans la ressemblance de l'homme avec Dieu: l'homme était centre
d'un immense système créé tel, système qui dépendait de lui. Les anges n'ont
jamais, eu cette position. L'homme devait avoir les sentiments, la responsabilité,
les affections qui découlent d'une telle position, et en sont, pour ainsi dire,
le devoir. Il était an commencement seul dans cette position; je ne
parle pas ici de la domination sur ce que ce système renfermait, ce qui est
ajouté à l'idée de «l'image», mais de ce que la position elle-même renfermait
de moral pour l'homme, quant à ses sentiments intérieurs. Eloigné de Dieu,
l'homme fait un effort continuel pour se rendre centre. — Que de misères en
découlent! C'est le désordre du principe de sa position sans Dieu. Adam était «l'image
de celui qui devait venir»: sous ce rapport, Christ occupera cette place,
maintenant; ce sera le résultat de l'accomplissement de tout ce qui était
nécessaire pour la gloire de Dieu, alors que la connaissance du bien et du mal,
et de la justice relative et de la sainteté qui s'y rapportent, est entrée, et
non plus seulement «l'image», en tant que le mal fût intrinsèquement absent de
la nature d'une manière positive.
Je ne saurais dire en quoi d'autre l'homme
a été créé «à l'image de Dieu»; que l'homme ait été ainsi créé, était beaucoup,
car cela formait la nature intrinsèque et la position nécessaire, et centrale
de Dieu Lui-même. Le reste est contraste, quand l'imperfection, le départ du
bien, est entrée. Il ne devait pas être créé en cela, ce n'aurait pas été
simplement bon. On peut ajouter, peut-être, à ce qui précède l'idée de
bonté positive envers tout ce avec quoi il était en relation comme centre et
supérieur; mais ce que j'ai dit renferme cette pensée. Un ange, tout en étant
bon comme serviteur quand il devait rendre service, n'était pas dans ce sens bon;
il n'était pas placé comme centre et supérieur de ce qui l'entourait et à
l'égard de quoi il devait se montrer bon.
Vous trouverez peut-être mes explications un peu vagues; mais je ne sais rien de mieux;… heureux sommes-nous d'avoir ce que Dieu est pour nous et notre nouvel état clairement révélés.