Réponses à des correspondants

1ère série

Ne nous rendant pas responsable de toutes les vues exprimées par les frères qui nous envoient des articles et étant porté, par caractère, à laisser une grande marge à l'exposition des pensées de ceux que nous estimons sans peine comme plus excellents que nous-même, nous avons cru pouvoir publier sans annotations, dans nos numéros 10 et 11, un article qui donne lieu maintenant à des observations de la part de quelques lecteurs. Nous avouons qu'il contient des phrases malheureuses, que nous aurions dû modifier ou annoter; entre autres à la page 197 [pagination de l’original] [Quelques remarques pratiques sur le culte et le ministère]. Nous prions pourtant nos critiques de ne pas en changer le sens, comme le fait l'un d'eux, en omettant un mot essentiel: l'auteur ne dit pas que «la Parole de Dieu fait sortir du sanctuaire, etc.»; ce serait un blasphème que nous n'aurions jamais toléré: il est question de «la méditation de la Parole», ce qui est autre chose et peut-être tout autre chose. Nous ne concevons pas une réunion de culte sans la Parole, au moins lue; mais si la méditation de cette Parole n'a lieu, comme c'est quelquefois, hélas! le cas, que pour se conformer à un usage, pour s'accommoder aux désirs de ceux qui et sortiraient mécontents, s'ils n'avaient pas entendu, ne fût-ce que quelques mots de méditation», nous ne pensons pas que ce soit là un profit pour l'assemblée. Voilà tout ce que nous avions su voir dans ces phrases, où l'auteur a tort aussi en laissant entendre qu'une méditation puisse être utile seulement «à quelque enfant de Dieu non affranchi». Pour corriger ce qu'il y a de trop absolu, et ce qui peut paraître un peu mystique dans cet article, nous invitons nos lecteurs à en relire un autre plus sobre et mieux pesé, qu'ils trouveront dans le Messager de 1862, pages 252 à 258 [pagination de l’original] [Le bagage à la frontière] . Au reste nous avons envoyé les critiques que nous avons reçues à l'auteur de l'article, qui consent volontiers à rectifier certaines phrases incriminées ou mieux encore à retirer tout à fait la page 197, où elles se trouvent.

2ème série

Nous avons reçu une lettre, signée L.B., venant du département du Doubs. S'il nous avait envoyé son adresse, nous lui aurions expédié une brochure, où les questions qui le troublent sont traitées. Les difficultés ou les contradictions qu'il rencontre dans quelques passages de l'épître aux Hébreux viennent de son manque de connaissance ou n'existent que dans son esprit. Nous l'invitons à demander au frère F.-A. Schuttel, à Montbéliard le No 13 de la série de Traités chrétiens. Nous l'engageons surtout à lire avec soin et avec prières, dans les Etudes sur la Parole de Dieu, par J.N. Darby, sixième partie du Nouveau Testament, pages 104 à 113 et pages 147 à 172, l'instructive et édifiante explication des chapitres 6 et 10 de l'épître aux Hébreux. Et nous demandons à Dieu de se servir de ces écrits pour éclairer et affranchir cette âme mal assurée.

Au reste, voici ce que, dans une Feuille analogue à la nôtre, notre frère C.H.M. répondait à quelqu'un qui lui avait fait part des difficultés qu'il trouvait dans les mêmes passages qui embarrassent notre frère du Doubs:

«Des centaines de personnes, de même que notre correspondant, ont été vivement troublées Par Hébreux 6: 4-6; et tout en nous réjouissant de voir des âmes sondées jusqu'au fond par la Parole, nous n'avons certes pas sujet de nous réjouir en les voyant heurter contre des pierres d'achoppement.

«Nous pensons que notre correspondant n'a bien saisi ni le but ni l'objet de cet important passage. L'apôtre presse les Hébreux (car c'est à des Hébreux qu'il écrit; il est bon de s'en souvenir pour comprendre cette épître) de laisser les éléments ou les premiers principes du Christ, contenus dans le rituel juif, dans lequel ils avaient été élevés, tels que les actes purement cérémoniels des ablutions et de l'imposition des mains, et les doctrines que, comme Juif, ils avaient apprises et reçues. Il ne parle pas ici de principes ou de privilèges chrétiens; car quelque élémentaires qu'ils eussent pu être, il n'aurait jamais pu presser les Hébreux de les abandonner. Les toutes premières vérités de l'Évangile, qui ont jadis frappé mon oreille, sont aussi celles que je dois retenir le plus fermement jusqu'à la fin. Les rachetés dans la gloire célèbrent l'amour de Dieu et le sang de l'Agneau; et ne sont-ce pas là les tout premiers principes du christianisme? Comment donc l'apôtre pourrait-il nous exhorter à les laisser derrière nous? A notre jugement, c'est une erreur de confondre «la repentance (juive) des oeuvres mortes», avec «la repentance (chrétienne) pour la vie», ou les «ablutions» juives, avec le «baptême» chrétien.

«En outre, nous ne croyons pas que les personnes mentionnées dans Hébreux 6: 4, 5, eussent jamais été régénérées. Aucune des expressions ici employées ne s'élève jusqu'à la notion de la nouvelle naissance. Les mots: «qui sont devenus participants de l'Esprit Saint» peuvent s'appliquer à des individus ayant certains dons de l'Esprit, que plusieurs ont pu posséder sans être régénérés (voir, par exemple, Matthieu 7: 22, 23). Aucun homme vraiment régénéré ou né de Dieu ne peut tomber de manière à être perdu pour toujours; car la naissance d'en haut lui communique une vie ETERNELLE (Jean 1: 12, 13); mais si un Juif professait de recevoir le système chrétien, et que, ensuite, il retournât au système juif, il était impossible de plus rien faire pour lui, vu qu'il avait abandonné la seule chose, par laquelle Dieu pouvait bénir et qu'il retournait en arrière à ce qui s'était montré totalement incapable de sauver qui que ce fût. En effet, le Judaïsme ne pouvait pas le sauver, et il avait renoncé au Christianisme. Que faire pour lui?

«Le manque de place nous empêche de nous étendre davantage sur l'exposition de cet important sujet; mais il nous semble que nous en avons assez dit pour en faire comprendre la portée et le sens à notre correspondant».

Si non nous pourrons, Dieu voulant, y revenir.

3ème série

Le frère M. à Gory nous écrit: «Que signifie le verset de Jérémie 4: 10, et ce n'est pas le seul dans ce sens? Comment Dieu a-t-il abusé le peuple?»

La réponse nous semble facile: — parce qu'il n'est pas dit proprement que Dieu ait abusé le peuple; c'est le prophète qui, à la vue de tant de mal et dans la prévision de tant de tribulations, s'écrie: «Hélas! Seigneur Eternel, oui certainement, tu as abusé ce peuple et Jérusalem, en disant: Vous aurez la paix; et l'épée et venue jusqu'à l'âme». Ce n'est pas Dieu qui a trompé le peuple: mais c'est le prophète qui, dans sa précipitation angoissée, se trompe, soit en appliquant aux Juifs, ses contemporains, corrompus et rebelles, des promesses de Jéhovah annonçant la paix pour la nation fidèle dans les derniers temps; soit en prenant pour des promesses du Seigneur les paroles fallacieuses de faux prophètes, qui pansaient à la légère la plaie d'Israël et répétaient: «Paix! paix! quand il n'y avait point de paix» (6: 14; 8: 11). On pourrait et l'on devrait peut-être traduire ainsi: «Aurais-tu trompé ce peuple? est-ce Toi qui aurais dit etc. savoir, par la bouche des prophètes de mensonge qui, pour être agréables au peuple, lui annonçaient toujours la paix, et qui allaient être rendus confus» (voir verset 9)?

Toutefois, Dieu peut aussi se servir — il s'est servi et il se servira encore de prédicateurs de mensonge, par un juste jugement sur les hypocrites et les incrédules, qui n'ont pas voulu écouter ses paroles et ses fidèles témoins, — cela pourrait expliquer les épouvantables égarements de tant de savants de nos jours; et c'est ce qui aura lieu, d'une manière bien plus frappante, sous la domination et la puissance de déception de l'Antichrist, d'après 2 Thessaloniciens 2: 10, 11. Voyez-en un exemple anticipé dans 1 Rois 22.

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Dans une lettre de plus fraternelles et des plus encourageantes pour l'éditeur du Messager évangélique, un bien cher frère, E. M., de Mazel Girard, nous parle d'une question qui a embarrassé plusieurs amis de la contrée qu'il habite. Si j'ai bien compris, ils ont de la peine à concilier le cri d'angoisse du Seigneur Jésus sur la croix: «Mon Dieu! mon Dieu! pourquoi m'as tu abandonné?» ainsi que le verset 6 du Psaume 22, avec ce qu'ils ont lu dans un article du Messager, No 15: «La paix avec Dieu, la paix de Dieu, la paix de Christ», tout en disant que cet article a été presque une réponse pour eux, mais que, pourtant, il laisse encore une lacune.

Voici les phrases du Messager que cite notre frère E.M. On lit à la page 300, ci-dessus, en parlant du Christ: «Sa vie fut une vie de douleurs ici-bas, mais il n'y eut jamais, durant tout son cours, un nuage entre Lui et son Père» (c'est notre frère qui souligne). Et trois lignes plus bas: «Alors qu'Il faisait l'expiation de nos péchés, il y eut un moment solennel, trois heures d'obscurité et de jugement sur le substitut des pécheurs en la croix, où Il fut exclu de la communion avec Dieu, abandonné de son Dieu, Hors ce moment, tout le reste de sa vie fut une paix inaltérable».

La difficulté pour nos frères de la Haute-Loire provient de l'apparente contradiction entre ces deux assertions:  «Mais il n'y eut jamais, durant tout son cours un nuage entre Lui et son Père»; — et: «Hors ce moment, tout le reste de sa vie fut une paix inaltérable». — «Maintenant, ajoute notre frère, je fais la question: Est-ce que le Seigneur Jésus n'a jamais perdu le sentiment de sa relation avec le Père? ou plutôt la relation du Seigneur comme Fils de Dieu n'a-t-elle jamais été interrompue?»

A ces deux questions, nous pensons que l'on peut et doit répondre: non. Non, Jésus n'a pas perdu un seul instant le sentiment et la jouissance de sa relation avec le Père. C'est avec Dieu qu'Il eut affaire comme substitut des pécheurs; c'est Dieu qui le frappait et l'abandonnait pour un instant; c'est la justice de Dieu qu'Il devait satisfaire; c'est Dieu qui a fait Celui qui n'a point connu de péché, être péché pour nous. Peu avant, et peu après avoir dû s'écrier dans l'angoisse de son âme: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné», le saint Fils de Dieu avait montré qu'Il était en pleine communion avec le Père, en disant: Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font» — et: «Père, entre tes mains, je remets mon esprit».C'est un exemple de plus de la parfaite exactitude de la Parole de Dieu qui n'emploie jamais, indifféremment, un mot pour un autre.

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Notre frère P. F., à St-Cybardeau (Charente), nous demande notre avis sur la fin du verset 7 du chapitre 5 de l'épître aux Hébreux. «Dans les versions ordinaires, nous écrit-il, il y a ceci: «ayant été exaucé et délivré de ce qu'Il craignait», tandis que la nouvelle dit: «ayant été exaucé à cause de sa piété»: d'où vient cette différence? — A quoi nous répondons:

La version d'Ostervald est la seule, croyons-nous, de nos versions ordinaires, qui ait rendu ce passage, comme notre frère le cite; encore le donne-t-elle un peu différemment — «fut exaucé et délivré de ce qu'il craignait». Mais remarquez que les mots: et délivré sont en italiques, ce qui veut dire qu'ils ne se trouvent pas dans le texte grec et qu'ils ont été ajoutés par le traducteur. — Martin dit: «ayant été exaucé de ce qu'il craignait», ce qui, certes, n'est guère clair. Arnaud: «qui ayant été délivré de la crainte», bon pour ces deux derniers mots, car le texte ne dit pas: sa, mais le verbe signifie bien exaucer et non délivrer. La version, dite de Lausanne: «ayant été exaucé à l'égard de sa crainte», et en note: ou, «eu égard à sa piété». Rilliet: «Après avoir été exaucé à cause de sa piété». Et enfin la version nouvelle: «ayant été exaucé à cause de sa piété», et en note: ou «crainte»; ce qui fait voir que toutes ces traductions peuvent, au fond, se justifier.

Le mot eulabeia traduit par «piété», ou par «crainte», ou par «ce qu'il craignait», vient d'un adjectif: eulabès, d'où procède aussi le verbe eulabéomai, comme qui dirait en français: craindre, crainte, craintif ou craignant.

L'adjectif (eulabès) ne se rencontre que trois fois dans le Nouveau Testament. Dans Luc 2: 25, où il est rendu par «craignant [Dieu]», ce dernier mot étant ajouté; dans Actes des Apôtres 2: 5 et 8: 2, où il est traduit par «pieux».

Le verbe se trouve deux fois: Actes des Apôtres 23: 10; Hébreux 11: 7: «craignit», ce qui autorise le sens de crainte, donné au substantif eulabeia, qui n'est employé, non plus, que deux fois: Hébreux 5: 7: piété, ou crainte; Hébreux 12: 28: avec crainte; ce qui nous parait montrer que, si l'on traduit ce nom par crainte, ce doit être dans le sens de crainte de Dieu ou de respect pour Dieu, sens qui se rapproche de celui de piété.