Aucun homme ne devient enfant de Dieu par un acte de sa propre volonté

 (Lettre à un ami)

Cher ami,

J'ai souvent pensé à la dernière conversation que nous avons eue, lorsque nous nous promenions sur le rivage à S., et souvent aussi j'ai éprouvé, comme je vous l'exprimai alors, un vif regret de voir que l'on traite ordinairement le sujet de l'éternelle sécurité des enfants de Dieu au moyen de passages et de considérations que plusieurs regardent, comme présentant de grandes difficultés; tandis que l'on devrait rechercher sincèrement quelle est la substance du témoignage que nous rend la Parole de Dieu sur ce point, qu'elle traite abondamment; puis examiner les difficultés et les objections, à la lumière qui nous est ainsi offerte. Mais en abordant le sujet, avec la pensée de satisfaire à la demande que vous m'avez faite, de vous indiquer brièvement ce que je regarde comme le témoignage positif de la Sainte Ecriture à cet égard, j'ai été indécis dans mon esprit et j'ai hésité entre deux différentes manières de vous le présenter, savoir: de prendre les passages dans l'ordre dans lequel on les trouve en lisant le Nouveau Testament, ou de classer ces passages en les rangeant sous plusieurs titres. J'étais à peu près résolu à ne me renfermer exclusivement ni dans l'une ni dans l'autre de ces méthodes; mais, tout en commençant par employer la première, à saisir chaque occasion qui pourrait s'offrir de me servir aussi de la dernière; une recherche scrupuleuse sur un passage quelconque nécessitant souvent un renvoi à d'autres, d'une signification analogue, quand bien même ces passages ne se suivraient pas exactement dans l'ordre dans lequel nous les rencontrons — lorsqu'il me sembla, qu'avant de commencer à employer l'une ou l'autre de ces méthodes, il était presque indispensable d'accorder auparavant quelque attention à rechercher comment un homme devient un enfant de Dieu. Si c'est, comme tant de personnes le supposent, par un acte dépendant de notre propre volonté, en prenant la résolution d'aller à Dieu et de croire en Christ, que nous devenons chrétiens; alors, on peut soutenir avec assez de vraisemblance, que par un autre acte ou par d'autres actes de notre propre volonté, nous pourrions, à la fin, cesser d'être tels. Mais si la proposition placée en tête de cet écrit est d'accord avec la vérité de Dieu et s'il peut être prouvé qu'elle le soit, alors il sera manifeste que la défection complète et finale d'un chrétien exigerait, non seulement un changement dans sa volonté (qui, à la vérité, est mobile et inconstante comme le vent); mais un changement dans la volonté de Celui, par le vouloir et la puissance duquel il est devenu chrétien — enfant de Dieu. Que le Seigneur nous accorde une simplicité et une soumission sincères à sa Parole, dans l'examen de ces matières!

Deux passages seraient suffisants, à eux seuls, pour fixer nos âmes, quant au sujet qui nous occupe, si nous les lisons réellement avec une entière simplicité de foi: — «lesquels ne sont nés, ni de sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu» (Jean 1: 13). Et «Il nous a de sa propre volonté engendrés par la parole de la vérité, pour que nous soyons comme une sorte de prémices de ses créatures» (Jacques 1: 18). Dans le premier de ces passages, il est expressément déclaré que la nouvelle naissance ne provient pas «du sang», c'est-à-dire de la naissance naturelle; «ni de la volonté de la chair» ou de la volonté naturelle et du choix de la personne qui est née de nouveau; ni de la volonté de l'homme, ni quelle que soit l'action que d'autres hommes puissent prétendre ou vouloir exercer sur lui. Dans les deux passages, il est expressément déclaré que c'est «de Dieu» et «de la volonté de Dieu». Ici, je pourrais abandonner ce sujet; mais sachant combien la pensée ou le raisonnement dont je vais parler obsède l'esprit de ceux qui l'ont nourrie, comme nous l'avons fait tous deux: — «Mais la vie et la mort ne sont-elles pas placées devant nous dans l'Ecriture? et ne sommes-nous pas appelés à choisir la vie, afin que nous vivions?» je ne veux ni ne puis passer ainsi sommairement par-dessus cette question. Il y a, il est vrai, des paroles telles que celle-là dans l'Ancien Testament; il y en a aussi d'un caractère quelque peu semblable dans le Nouveau; et chacune des paroles de Dieu étant sacrée, il est donc bien important d'en saisir la véritable signification. Mais il me paraît évident que ceux qui se servent de passages tels que ceux auxquels nous venons de faire allusion, pour démontrer que la nouvelle naissance dépend d'un acte de la volonté humaine, quant à la réception de Christ ou de l'Evangile qui nous le fait connaître, ceux-là se sont entièrement mépris sur la portée et la signification de ces passages et ils trahissent leur ignorance du but et de l'intention d'une grande partie de la Parole de Dieu.

Pour vous, j'ai à peine besoin de vous dire que, indubitablement, tous ceux qui ont été sauvés, dans tous les âges, ont été sauvés par grâce, par la foi; mais il y a une immense différence entre le témoignage et le gouvernement de Dieu avant le crucifiement de Christ et depuis cet événement. Jusqu'à cet événement, la manière dont Dieu agit avec le genre humain fut une épreuve continue, pour ainsi dire, tendant à rechercher si, dans l'homme, il existait quelque chose qui pût le rendre capable, sous des circonstances quelconques, de se rétablir ou de sa sauver lui-même. Non pas qu'une telle épreuve fût nécessaire pour Dieu; Il savait depuis le commencement, bien plus, dès avant la création du monde, quelle serait la conduite de l'homme et combien elle démontrerait la ruine totale de sa condition, s'il était abandonné à lui-même; quoiqu'étant excité au bien par toute espèce de motifs. Mais ceci devait être démontré à l'homme lui-même; et de là, l'épreuve. Je ne veux pas insister, en ce moment, sur l'épreuve de l'homme en Eden, où elle consistait à voir s'il pourrait conserver son innocence, en résistant à la tentation du dehors. Il n'y avait pas alors de penchant au mal au dedans de l'homme. Mais quand il eut failli — quand le grand séducteur eut réussi à empoisonner toutes les sources d'action morale dans la nature de l'homme — Dieu n'anéantit pas instantanément le délinquant; mais il n'envoya pas non plus tout de suite le Sauveur. A la malédiction prononcée contre l'Ennemi, Il joint la promesse d'un Sauveur; puis Il laisse l'homme, chassé désormais d'Eden, se multiplier sur la terre, et démontrer clairement quel est le penchant de sa volonté (n'étant retenu par aucune loi expresse, telle que celle sous laquelle Adam avait été placé); la promesse offrant, pendant tout ce temps, un lieu de refuge pour la foi, partout où se trouvait un coeur, tel que ceux d'Abel, d'Enoch, ou de Noé, pour la recevoir.

Quel fut le résultat de cette épreuve? «Et l'Eternel vit que la malice des hommes était très grande sur la terre, et que toute l'imagination des pensées de leur coeur n'était que mal en tout temps» (Genèse 6: 5). «Et la terre était corrompue devant Dieu et remplie d'extorsion. Dieu donc regarda la terre; et voici, elle était corrompue: car toute chair avait corrompu sa voie» (versets 11, 12). Le mal s'accrut tellement que Dieu ne put le tolérer plus longtemps; c'est pourquoi le déluge fut envoyé pour détruire l'homme de dessus la face de la terre.

Noé avait trouvé grâce devant les yeux du Seigneur et il fut préservé avec sa famille, pour repeupler la terre. L'homme fut ainsi mis à l'épreuve encore une fois. Après le déluge, un nouveau principe fut introduit, afin de réprimer la violence qui avait auparavant rempli la terre. Cette ordonnance: «Celui qui aura répandu le sang de l'homme, son sang sera répandu» (Genèse 9: 6) devait modérer et réprimer la violence de l'homme envers son semblable. Mais sous ce nouveau principe de gouvernement de l'homme, ainsi introduit dans son essence, comment l'homme se comporta-t-il? Hélas! Noé, celui qui, naturellement, était investi de l'autorité, s'avilit par le vin; et lorsque son propre fils le voit dans cet état de dégradation, il en profite pour le dégrader encore davantage! Babel aussi et les villes de la plaine, l'Egypte avec ses idolâtries et son oppression, puis les villes des Amorrhéens (voyez Deutéronome 18: 9-12): tout cela nous donne un échantillon de ce que l'homme devient dans l'intervalle qui s'écoula entre le déluge et la promulgation de la loi. Romains 1: 21-32 nous présente un sombre tableau de ce qu'étaient, à cette époque, les désirs du coeur de l'homme et le penchant de sa nature; aussi bien que des conséquences auxquelles Dieu abandonna le monde gentil. Mais quand Il abandonna ainsi les Gentils, Dieu se choisit Israël, afin que, dans ses relations avec ce peuple approché ostensiblement de Lui-même et favorisé par tous les avantages possibles, une nouvelle épreuve pût être faite, et cela dans une sphère plus étroite, de ce que le coeur et la volonté de l'homme pouvaient produire. Ce fut à ce peuple que la loi fut donnée. Et Moïse, en récapitulant les diverses manières dont Dieu agit avec ce peuple dans le désert, établit que le but en était: «de t'humilier et de t'éprouver, pour connaître ce qui était en ton coeur, si tu garderais ses commandements ou non» (Deutéronome 8: 2).

C'est à Israël que furent adressées ces paroles, si souvent citées pour chercher à prouver qu'il est en notre pouvoir de choisir entre la vie et la mort: «Regarde, j'ai mis aujourd'hui devant toi la vie et le bien, la mort et le mal; car je te commande aujourd'hui d'aimer l'Eternel ton Dieu, de marcher dans ses voies, de garder ses commandements, ses ordonnances et ses droits, afin que tu vives et que tu sois multiplié», etc. (Deutéronome 30: 15, 16). Et encore «Je prends aujourd'hui à témoin les cieux et la terre contre vous, que j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction; choisis donc la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité» (verset 19).

Cela signifie-t-il qu'un seul homme fut sauvé en choisissant ainsi la vie, afin qu'il pût vivre? Ce serait là affirmer que la loi peut donner la vie, et Paul dit clairement: «S'il avait été donné une loi qui eût le pouvoir de vivifier, en réalité la justice serait sur le principe de la loi» (Galates 3: 21). Mais il dit encore. «Si la justice est par la loi, Christ est donc mort pour rien» Galates 2: 21). Ce serait là, en vérité, une terrible conclusion à laquelle il faudrait arriver. Et si vous demandiez, comme quelques-uns le faisaient aux jours de l'apôtre: «Pourquoi donc la loi?» écoutez la réponse de l'apôtre: «Elle a été établie à cause des transgressions, jusqu'à ce que vînt la semence à laquelle la promesse est faite» (Galates 3: 19). Et si vous disiez encore: Pourquoi fut-elle ajoutée à cause des transgressions? écoutez ces paroles du même apôtre, qui se trouvent dans un autre endroit: «Par la loi est donnée la connaissance du péché» (Romains 3: 20). Et «la loi est intervenue, afin que l'offrande abondât» (Romains 5: 20) «Mais le péché, afin qu'il parût péché, m'a causé la mort par ce qui est bon, afin que le péché fût rendu, par le commandement, excessivement pécheur» (verset 13): Et encore: «la loi produit de la colère» (Romains 4: 15). Maintenant, il me semble que c'est une chose sérieuse, en face de tant de déclarations inspirées qui nous montrent à quelles fins la loi devait aboutir, d'affirmer qu'un seul homme fût sauvé «en choisissant la vie» selon la teneur des paroles de Moïse, citées ci-dessus. La loi leur fut alors offerte sous la condition qu'ils obéiraient à la loi; et l'Esprit Saint nous assure solennellement que «nulle chair ne sera justifiée… par des oeuvres de loi» (Romains 3: 20. Voir aussi Galates 2: 16, 21; 3: 11), c'est-à-dire, en d'autres termes, qu'ils ne purent obtenir la vie aux conditions imposées par Moïse.

Quant à cela, Moïse lui-même le savait bien. Dans le chapitre qui suit celui dans lequel se trouvent les paroles citées, nous voyons que le Seigneur lui apparut et lui dit: «Voici, tu t'en vas dormir avec tes pères, et ce peuple se lèvera et se prostituera en allant après les dieux des étrangers qui sont au pays où il va, et il m'abandonnera et il enfreindra mon alliance que j'ai traitée avec lui» (Deutéronome 31: 16). Ils avaient déjà rompu une alliance qui demandait des oeuvres; en témoignage de quoi, Moïse brisa les deux tables de la loi qui étaient dans ses mains, lorsqu'il descendit de la montagne (voyez Exode 32: 19). Avec une nature semblable, et placé sous une alliance de cette nature, c'est-à-dire qui exigeait encore des oeuvres de la part de l'homme, que pouvait-on attendre? Quoi? si ce n'est les résultats mêmes que le Seigneur prédit à Moïse et Moïse au peuple? «Maintenant donc, écrivez ce cantique et l'enseignez aux enfants d'Israël; mets-le dans leur bouche, afin que ce cantique me serve de témoin contre les enfants d'Israël. Car je l'introduirai en la terre découlant de lait et de miel, de laquelle j'ai juré à ses pères, et il mangera et sera rassasié et engraissé; puis il se détournera vers d'autres dieux: et ils les serviront et ils m'irriteront par mépris et enfreindront mon alliance. Et il arrivera que quand plusieurs maux et angoisses les auront trouvés, ce cantique déposera contre eux comme témoin; parce qu'il ne sera point oublié pour n'être plus en la bouche de leur postérité. Car je connais leur imagination et ce qu'ils font déjà aujourd'hui, avant que je les introduise au pays duquel j'ai juré» (Deutéronome 31: 19-21). Peut-il y avoir quelque chose de plus solennel ou de plus décisif que ces dernières paroles? Dieu déclarait à Moïse qu'au lieu de choisir la vie, le peuple se tournerait vers d'autres dieux, l'irriterait et enfreindrait son alliance; et Il parle de ces futures mauvaises oeuvres comme étant seulement le développement de ce qu'Il savait s'opérer dans leur coeur dans le temps présent. «Je connais leur imagination» etc. Aussi Moïse leur dit: «Prenez ce livre de la loi et mettez-le à côté de l'arche de l'alliance de l'Eternel, votre Dieu». Pourquoi? Afin qu'ils pussent choisir la vie et vivre en gardant la loi? Non; mais «afin qu'il soit là pour témoin contre toi». «Car je connais ta rébellion et ton cou roide», continue-t-il. «Voici, moi étant encore aujourd'hui avec vous, vous avez été rebelles contre l'Eternel; combien plus donc le serez-vous après ma mort?» (versets 26, 27). «Car je sais» leur dit-il encore, qu'après ma mort vous vous corromprez entièrement et que vous vous détournerez de la voie que je vous ai prescrite; mais à la fin il vous arrivera du mal, parce que vous aurez fait ce qui déplaît à l'Eternel, en l'irritant par les oeuvres de vos mains» (verset 29). Assurément nous n'avons pas besoin de répondre davantage à ceux qui se servent des paroles de Moïse pour prouver que le salut dépend de la volonté de l'homme. S'il en était ainsi, qui pourrait être sauvé?

Les paroles de Josué sont quelquefois citées dans ce but, aussi bien que celles de Moïse, et cela avec aussi peu de raison et de poids. Après avoir rappelé à Israël dans quelle condition se trouvaient ses pères, servant d'autres dieux, lorsque le Seigneur prit Abraham de delà le fleuve; après avoir cité les merveilles que le Seigneur avait opérées et dont ils avaient contemplé un grand nombre de leurs propres veux, il les exhorte à craindre le Seigneur, à le servir en toute intégrité et vérité et à ôter les autres dieux; puis il ajoute: «Et s'il vous semble mal de servir l'Eternel, choisissez-vous aujourd'hui qui vous voulez servir: ou les dieux que vos pères, qui étaient au delà du fleuve, ont servis; ou les dieux des Amorrhéens au pays desquels vous habitez; mais pour moi et ma maison, nous servirons l'Eternel» (Josué 24: 15). Le fait est, qu'il ne leur donne pas à choisir entre le Seigneur et les idoles. Il dit: «S'il vous déplaît de servir le Seigneur, choisissez» alors, si vous voulez servir telle ou telle classe d'idoles. Lui, par grâce, comme nous le savons, était résolu à servir le Seigneur. Mais quand le peuple, avec de bonnes intentions peut-être, mais l'esprit plein de suffisance, déclare que lui aussi veut servir le Seigneur, comment Josué reçoit il ses protestations? «Et Josué dit au peuple: Vous ne pourrez pas servir l'Eternel; car c'est le Dieu Saint; c'est le Dieu Fort qui est jaloux: il ne pardonnera point vos transgressions ni vos péchés. Si vous abandonnez l'Eternel, et si vous servez les dieux étrangers, il se retournera et vous fera du mal et vous consumera après qu'il vous aura fait du bien» (verset 19). Et lorsque le peuple continue à protester et à faire des promesses, disant: «Non; mais nous servirons l'Eternel», Josué leur dit: «Vous êtes témoins contre vous-mêmes que vous avez vous-mêmes choisi l'Eternel pour le servir. Et ils répondirent: Nous en sommes témoins» (versets 21, 22). Ah! oui; que nos paroles soient un témoignage contre nous; voilà le seul résultat que puissent avoir nos promesses de choisir le Seigneur et son service, et comme pour montrer dans quelle triste condition ils se trouvaient pour prendre de tels engagements sur eux-mêmes, Josué les exhorte immédiatement en ces termes: «Maintenant donc, ôtez les dieux étrangers qui sont parmi vous, et tournez vos coeurs vers l'Eternel, le Dieu d'Israël» (verset 23). Il y avait, dans ce moment même, des dieux étrangers parmi eux! Et ces mêmes coeurs éprouvaient néanmoins le besoin de se tourner vers le Seigneur et de le servir! C'est là une preuve évidente que leurs coeurs (comme est toujours le coeur de l'homme, nous le savons) ne ressentaient que de la répugnance pour le service du Seigneur.

Nous trouvons encore une démonstration de cette vérité dans cette partie de leur histoire, qui suit immédiatement. Le livre des Juges n'est que le récit de leurs péchés et des malheurs qui en résultèrent; ainsi que de la miséricordieuse intervention du Seigneur pour leur délivrance. Je n'insiste pas sur ce sujet en ce moment. Je ne poursuivrai pas non plus le cours de leur histoire tout entière. Cela me conduirait trop loin. Un point, cependant, ne doit pas être omis; je veux parler du ministère des prophètes. Alors même qu'on ne l'examine que superficiellement, on peut se convaincre qu'il différait essentiellement de celui de la loi. La loi ne laissait pas de place à la repentance.Elle demandait l'obéissance, mais ne parvenant pas à l'obtenir, elle n'avait rien à prononcer et à donner que la malédiction et la condamnation. C'était l'obéissance, une obéissance uniforme et constante que la loi exigeait; non pas la repentance et le retour à l'obéissance. Mais les prophètes furent envoyés pour proposer, pour ainsi dire, de nouvelles conditions. «Que le méchant abandonne sa voie et l'homme injuste ses pensées; et qu'il retourne à l'Eternel, et Il aura pitié de lui; et à notre Dieu, car Il pardonne abondamment» (Esaïe 55: 7). «Tu t'es prostituée à beaucoup d'amoureux: toutefois retourne-toi vers moi, dit l'Eternel» (Jérémie 3: 1). «Va donc et crie ces paroles-ci vers l'Aquilon, et dis: Retourne-toi, Israël la revêche, dit l'Eternel; et je ne ferai pas tomber ma colère sur vous; car je suis miséricordieux, dit l'Eternel et je ne vous la garderai point à jamais» (Jérémie 3: 12). «Ma voie n'est-elle pas bien réglée? Ne sont-ce pas plutôt vos voies qui ne sont pas bien réglées? Quand le juste se détournera de sa justice et qu'il commettra l'iniquité, il mourra pour ces choses-là; il mourra pour son iniquité qu'il aura commise. Et quand le méchant se détournera de sa méchanceté qu'il aura commise et qu'il fera ce qui est juste et droit, il fera vivre son âme. Ayant donc considéré sa conduite, et s'étant détourné de tous ses crimes qu'il aura commis, certainement il vivra, et ne mourra point» (Ezéchiel 18: 25-28). Tel fut le ministère des prophètes. Mais ceci devait-il, plus que le langage de Moïse et de Josué par rapport à la loi, prouver qu'il était possible à la propre volonté de l'homme, de se détourner ainsi de sa méchanceté et de faire ce qui est juste et droit, afin de vivre par ce moyen? Assurément non. C'était une épreuve de plus — une épreuve plus douce — tendant à démontrer s'il était possible au coeur et à la volonté de l'homme, de se tourner vers Dieu, de le servir et de lui obéir. C'était comme si Dieu eût dit: Je ne veux pas revendiquer rigoureusement les droits de ma loi; elle demande une obéissance non interrompue et universelle. Quant à cela, vous avez complètement failli et la loi ne sait ce que c'est que la repentance. Mais maintenant je vous donne une occasion de recommencer. «Que si le méchant se détourne de tous ses péchés qu'il aura commis et qu'il garde tous mes statuts, et fasse ce qui est juste et droit, certainement il vivra, il ne mourra point. Il ne lui sera point fait mention de tous ses crimes qu'il aura commis; mais il vivra pour sa justice à laquelle il se sera adonné» (Ezéchiel 18: 21, 22). C'était une offre généreuse que celle d'effacer tout le passé et de proposer de tout recommencer; et cette offre était faite (qu'on s'en souvienne) à ceux qui se plaignaient que leurs destinées ne fussent pas entre leurs mains. Pouvait-on faire une plus belle offre? Mais cependant, ai-je besoin de vous demander, mon ami, s'il était possible à un homme tombé, d'être sauvé de cette manière? Quoi! en gardant toutes les ordonnances de Dieu et en faisant à l'avenir ce qui est juste et droit! Assurément, faire ces choses et vivre par elles, c'eût été là ce que Paul déclare être la justice qui est par la loi. C'était simplement offrir, à ceux qui pensaient qu'ils auraient mieux agi que leurs pères, une occasion de leur montrer ce qu'ils pouvaient faire!

Et quelle fut l'issue de cette épreuve de l'homme, par ces nouvelles propositions de repentance et de changement de vie qui lui étaient faites? «Or le Seigneur, Dieu de leurs pères, les avait sommés par ses messagers qu'Il avait envoyés en toute diligence, parce qu'il était touché de compassion envers son peuple et envers sa demeure. Mais ils se moquaient des messagers de Dieu, et méprisaient ses paroles, ils traitaient ses prophètes de séducteurs, jusqu'à ce que la fureur de l'Eternel s'embrasa contre son peuple et qu'il n'y eût plus de remède» (2 Chroniques 36: 15, 16). Ces patientes manières d'agir de Dieu avec Israël furent reprises après la captivité; et Jean Baptiste fut le dernier de cette longue succession de prophètes qui furent ainsi envoyés à Israël: «car tous les prophètes et la loi ont prophétisé jusqu'à Jean» (Matthieu 11: 13). Ai-je dit qu'il fut le dernier? Oui, il fut le dernier de la série des serviteurs qui furent ainsi employés; mais il y en avait Un, plus grand que tous ces serviteurs de Dieu, qui vint après eux tous pour remplir le même message. Voulez-vous, cher ami, lire Matthieu 21: 33 à 22: 14, où vous trouverez la récapitulation de tout ce que nous venons d'examiner ensemble, et cela, des lèvres de notre Sauveur Lui-même. Vous connaissez les deux paraboles rapportées dans ce passage. Un certain maître de maison plante un vigne et la loue à des cultivateurs. Quand la saison des fruits approche, il envoie ses serviteurs aux cultivateurs, pour qu'ils puissent les recueillir. Les cultivateurs prennent les serviteurs; ils battent l'un, tuent l'autre et en lapident un autre. Le maître envoie de nouveau des serviteurs, plus nombreux que les premiers, et ils sont traités de même. «Enfin il envoie son fils, disant: Ils auront du respect pour mon fils» (verset 37). Ainsi,le Fils de Dieu fut envoyé, tout d'abord, pour demander des fruits à ceux auxquels la vigne avait été confiée. Comment fut-Il reçu? «Mais les cultivateurs voyant le fils dirent entre eux: Celui-ci est l'héritier; venez, tuons-le et saisissons-nous de son héritage. Et l'ayant pris, ils le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent» (versets 38, 39). On ne peut se méprendre sur la signification de ceci. Les cultivateurs sont la nation juive. La vigne, ce sont tous les privilèges que Dieu avait départis à cette nation. L'obéissance qu'Il demandait d'Israël était le fruit que ce peuple aurait dû lui apporter. La loi l'exigeait, mais en vain. Les prophètes, l'un après l'autre, vinrent le chercher; mais les mauvais traitements et la mort, voilà tout ce qu'ils reçurent. Enfin Jésus, l'héritier, vient; Lui aussi, ils le mettent à mort. Que peut-il être fait de plus? — Quelle nouvelle épreuve serait possible pour montrer ce qu'est le coeur et la volonté de l'homme? Eh! bien, il en est encore une, d'épreuve; et le détail de cette dernière tentative, avec son résultat, nous est donné dans la parabole suivante, au commencement du chapitre 22.

Jésus ne vint pas seulement comme le dernier de ceux que Dieu envoya pour réclamer du fruit de la part de son peuple, — Il vint, aussi et surtout, comme le messager et le ministre de la grâce de Dieu envers l'homme. «Le royaume de Dieu a été fait semblable à un roi qui fit des noces pour son fils. Et il envoya ses esclaves pour convier ceux qui étaient invités aux noces, et ils ne voulurent pas venir» (versets 2, 3). Ici, ce n'est pas le maître de la vigne, venant pour en recueillir les fruits: — Dieu exigeant de l'homme le service et l'obéissance qui Lui sont dus. Non; c'est un roi invitant à des noces — Dieu qui, dans sa grâce, a tout préparé pour le bonheur de l'homme et qui l'invite à venir y participer. Mais celui-ci n'est pas plus disposé à accepter la libéralité de Dieu qu'à satisfaire à ses droits. ILS NE VOULURENT PAS VENIR. Mais ce n'est pas tout; le premier refus n'est pas regardé comme définitif. «Il envoya encore d'autres esclaves disant: Dites aux conviés: Voici, j'ai apprêté mon dîner; mes taureaux et mes bêtes grasses sont tués et tout est prêt: venez aux noces» (verset 14). Christ venant chercher du fruit est rejeté et mis à mort. Il est également rejeté lorsqu'Il invite Israël, par le moyen de ses disciples, à venir participer à la fête que Dieu avait préparée. Mais lorsqu'ils l'ont ainsi rejeté, la grâce demeure encore sur eux et sa mort même devient une occasion de renouveler ses invitations. «Tout est prêt (ceci aurait à peine pu se dire auparavant): venez aux noces». «Mais eux n'en tenant point de compte s'en allèrent, l'un à son champ, et l'autre à son trafic. Et les autres s'étant saisis de ses esclaves, les outragèrent et les tuèrent» (versets 5, 6). Telle est la réception que toutes les propositions de Dieu rencontrent de la part de l'homme; celui-ci ne les accepte pas plus qu'il ne reconnaît les droits de Dieu. Le Seigneur demande l'obéissance, vient chercher du fruit — l'homme ne veut pas en donner. Dieu publie la grâce, préparant des noces et invitant des convives — «ils ne voulurent pas venir». Il réitère ses invitations, insistant sur l'abondance des provisions et déclarant que toutes choses sont prêtes. Tout cela, sans aucun résultat. Quelques-uns dédaignent inconsidérément sa générosité, préférant leur trafic, ou leur ferme; d'autres, plus cruels dans leur rejet de la grâce, traitent outrageusement et tuent les serviteurs qui sont envoyés pour les convier. Tel est l'homme et telle est sa volonté, avec tous les avantages possibles, sans cette grâce toute-puissante qui surmonte son opposition et le fait consentir à recevoir Christ et le salut qu'Il a apporté. C'est par une telle grâce, et par une telle grâce seulement, qu'on devient enfant de Dieu.

Les noces étaient faites par le roi pour son fils. La fête était préparée pour embellir ce mariage. Le fils du roi doit-il être privé de ses noces à cause de la méchanceté et de l'obstination de ceux qui furent d'abord invités? Ceux-ci, pour la plupart, périssent à cause de leur mépris de la grâce de Dieu; mais d'autres messagers sont encore envoyés — non plus maintenant à ceux qui auraient pu s'attendre à être invités, mais à ceux qui sont dans les carrefours; ils doivent en inviter autant qu'ils en pourront trouver. «Et ces esclaves-là, sortant par les chemins, assemblèrent tous ceux qu'ils trouvèrent, tant mauvais que bons, et la salle des noces fut remplie de gens qui étaient à table» (verset 10). Dans Luc 14: 16-24, où nous avons une parabole semblable, le maître de la maison dit à son serviteur, «Va-t'en promptement dans les rues et dans les ruelles de la ville et AMENE ici les pauvres et les estropiés, et les boiteux, et les aveugles». Il devait les amener. Ce n'est plus un appel fait à leur volonté; on ne leur demande plus s'ils veulent venir; ils doivent être amenés. Quand ceci est fait, le serviteur dit: «Seigneur, il a été fait ainsi que tu as commandé, et il y a encore de la place. Et le Seigneur dit au serviteur: Va dans les chemins et le long des haies et CONTRAINS les gens d'entrer, afin que ma maison soit remplie». Si donc nous sommes réellement des convives à la table de Christ, ce n'est pas parce que, nous avons, de nous-mêmes, désiré venir, quand nous y avons été invités, ni même après avoir été pressés; mais c'est parce que nous avons été amenés, ou contraints de venir C'est-à-dire que l'opposition de notre nature a été vaincue par cette grâce toute-puissante qui, en surmontant ainsi notre opposition nous a rendus consentants, et nous a amenés. Ceci est parfaitement exprimé dans des vers bien connus, dont nous essayons une imitation:

Je ne résiste plus; je ne puis davantage

Lutter contre l'amour de mon Dieu Rédempteur.

La grâce est triomphante, et je lui rends hommage;

Je m'incline à tes pieds, ô Jésus! mon vainqueur!

Aucun homme ne devient enfant de Dieu par un acte de sa propre volonté!

Votre affectionné en Christ.