Extrait des études sur la Parole

 «Christ est la vérité, il est le centre de toutes les voies de Dieu; mais la Parole est la divine communication de cette vérité, ainsi il peut être dit: «Ta Parole est la vérité». Mais, bien que la vérité révélée soit communiquée par le moyen des hommes, de sorte qu'elle prend une forme adaptée à l'homme, sa source est divine, et celui qui l'a communiquée est divin, de qui est-il dit: «Il ne parlera pas de Lui-même» (Jean 16: 13), c'est-à-dire à part du Père et du Fils. Ainsi la révélation de la vérité a toute la profondeur, l'universalité de relations, la liaison inséparable avec Dieu (sans laquelle elle ne serait pas la vérité, car tout ce qui est séparé de Dieu est mensonge), que la vérité elle-même possède et possède nécessairement, parce qu'elle est l'expression des relations de toutes choses avec Dieu en Christ, c'est-à-dire des pensées de Dieu lui-même dont toutes ces relations ne sont que l'expression. La Parole juge aussi, il est vrai, tout ce qui n'est pas en accord avec ces relations, et juge selon la valeur de la relation qui a été rompue, en rapport avec Dieu lui-même, et avec la place que cette relation a dans ses pensées.

Lorsque cette Parole est reçue par l'opération vivifiante du Saint Esprit dans le coeur, elle est efficace: il y a la vie, il y a la foi; l'âme est en relation vivante, réelle, pratique, avec Dieu, selon ce qui est exprimé dans la révélation qu'elle a reçue. La vérité, qui parle de l'amour de Dieu, de la sainteté, de la purification de tout péché, de la vie éternelle, de la relation d'enfant, — nous place, lorsqu'elle est reçue dans le coeur, en relation réelle, actuelle, avec Dieu selon la force de toutes ces vérités comme Dieu les conçoit et les a révélées à l'âme. Dans l'âme, elles sont vitales et efficaces par le Saint Esprit; et la conscience de cette révélation de la vérité et de la vérité de ce qui est révélé, de l'ouïe réelle de la voix de Dieu dans sa Parole, est la foi. Mais tout est vrai dans la Parole révélée, avant qu'on y croie, autrement on ne pourrait pas croire à la vérité en croyant à la Parole, quoique le Saint Esprit seul y fasse entendre la voix de Dieu et produise ainsi la foi; et ce qui est révélé est, d'un côté, la divine expression de ce qui tient à l'infini, et, de l'autre, s'exprime dans le fini.

Ainsi la Parole est la divine expression de ce qui a la profondeur de la nature de Dieu (duquel tout vient et avec les droits duquel tout est en relation), mais de ce qui est développé, — puisque cette Parole s'occupe de ce qui est en dehors de Dieu — dans la créature et dans le fini. L'union de Dieu et de l'homme dans la personne de Christ est le centre de cette révélation, de ces relations du fini avec l'infini; le centre nécessaire, on peut dire (maintenant que nous avons connaissance de ces relations) de tout ceci ainsi que nous l'avons vu: la Parole inspirée en est l'expression selon la perfection de Dieu, et — Dieu en soit béni comme le Sauveur qui en est le grand sujet, car dit-il: «elles (les Ecritures) rendent témoignage de moi» — dans des formes humaines.

Mais cette Parole étant divine, inspirée, la divine expression de la nature des personnes et des conseils divins, rien que ce qui est ainsi inspiré ne peut avoir cette place, rien autre n'est l'expression divine des pensées et de la vérité divines, car rien autre n'est en union directe avec la source même, coulant ou jaillissant de cette source, sans mélange. En me servant d'autre chose que de la Parole, les rapports directs de mon âme avec Dieu n'existent plus: ce qui est dit n'est plus divin.

Ce qui est dit peut contenir bien des vérités, mais la dérivation vivante, l'infini, la liaison avec Dieu, la dérivation immédiate et non interrompue de Dieu, — manquent; l'infini n'y est plus. L'arbre croît de sa racine, et toutes ses parties, de la racine jusqu'aux feuilles, forment un ensemble; l'énergie de la vie y coule, la sève qui vient de la racine. On peut considérer une partie de l'arbre comme Dieu l'a placée là, comme partie de l'arbre, on peut voir l'importance du tronc, la beauté du développement dans les moindres détails de ses rameaux et de sa verdure, ce qu'il y a de grandiose dans l'ensemble où l'énergie vitale réunit la liberté et l'harmonie des formes; on sent que c'est un tout, uni par cette vie comme ce tout est produit par elle. Les feuilles, les fleurs, les fruits, tout nous parle de ce soleil divin qui les a développés, de la source inépuisable et jaillissante qui les nourrit; — mais on ne peut pas séparer une partie de l'arbre, quelque belle qu'elle soit, et lui laisser l'énergie de la vie et sa relation avec le tout.

Quand la puissance de l'Esprit de Dieu produit la vérité, elle se développe en union avec sa source, soit dans la révélation, soit même dans la vie et dans le service de l'individu, bien que, dans les deux derniers cas, il y ait, par la faiblesse de l'homme, un mélange d'autres éléments. Quand l'esprit de l'homme saisit et veut formuler la vérité, il le fait selon la portée de l'homme, qui n'est pas la source; la vérité, fût-elle même pure, est séparée de sa source et de son ensemble. De fait, la formule porte toujours l'empreinte de la faiblesse de l'homme; l'homme ne la saisit que partiellement; il n'expose qu'une partie de la vérité: dès lors elle n'est plus la vérité. De plus, il faut, quand l'homme la sépare de l'ensemble où Dieu l'a placée, qu'il la revête d'une nouvelle forme, d'une enveloppe qui vient de l'homme; voilà l'erreur qui se mêle avec elle! Ainsi la vérité qu'il reproduit n'est plus partie vitale de l'ensemble; elle est partielle et partant pas la vérité; elle est, de fait, mêlée avec l'erreur. Dans la vérité il y a, quand Dieu l'exprime, l'amour, la sainteté, l'autorité, l'expression des propres relations de Dieu avec l'homme et de la dignité de sa personne. Quand l'homme formule la vérité, tout cela manque et ne saurait se retrouver dans son résumé de la vérité, parce que l'homme le formule; ce n'est plus Dieu qui parle. Dieu formule bien la vérité, c'est-à-dire, il exprime la vérité dans des paroles certaines. Si l'homme se met à formuler la vérité, sa formule n'est plus la vérité donnée de Dieu. Ainsi, retenir ferme la vérité comme Dieu l'a formulée, retenir le type, la forme de son expression, est de toute importance; en la gardant on est en relation avec Dieu, selon la certitude de ce qu'il a révélé.

Cette relation divine de la vérité est la seule ressource de l'âme quand l'Eglise a perdu sa force et son énergie et n'est plus un soutien pour les faibles, et ne répond plus à ce caractère de «colonne et d'appui de la vérité» qu'elle doit avoir. La vérité, la vérité claire, positive, donnée comme révélation de Dieu en des paroles revêtues de son autorité, dans lesquelles il a Lui-même formulé cette vérité, en communiquant les faits et les pensées divines, nécessaires pour le salut des hommes et pour la participation à la vie divine, voilà ce qu'il faut retenir ferme: on n'est sûr de la vérité que lorsqu'on tient les expressions de Dieu qui la renferment. Je peux parler de la vérité en toute liberté par la grâce, chercher à l'expliquer, la communiquer selon la mesure de la lumière et de la puissance spirituelle qui m'ont été accordées; je peux chercher à démontrer sa beauté, les relations de ses diverses parties entre elles-mêmes; tout chrétien, et en particulier ceux qui ont un don de Dieu conféré dans ce but, peuvent et même devraient le faire; mais la vérité que j'explique et que je propose, est la vérité telle que Dieu l'a donnée et formulée dans la révélation qu'il en a faite: je retiens la forme des saines paroles que j'ai reçues d'une source et par une autorité divines; elles m'assurent dans la vérité. Et ici le rôle de l'Eglise est important à remarquer.

L'Eglise reçoit, elle maintient la vérité dans sa propre foi; elle garde la vérité, elle lui est fidèle; elle lui est assujettie comme à une vérité, à une révélation de Dieu lui-même. Elle n'est pas la source de la vérité en tant qu'Eglise; elle ne la propage, elle ne l'enseigne pas. Elle dit: «je crois»; non pas: «croyez». Dire: «croyez», est la fonction du ministère, dans lequel l'homme est toujours individuellement en relation avec Dieu par un don qu'il tient de Dieu, et pour l'exercice duquel il est responsable à Dieu. Cette dernière remarque est de toute importance. Ceux qui ont ces dons sont membres du corps. L'Eglise exerce sa discipline à l'égard de tout ce qui est chair en eux dans l'exercice réel ou apparent d'un don, comme partout ailleurs. Elle se conserve dans la pureté sans avoir égard à l'apparence des personnes, en se dirigeant dans cette discipline par la Parole, car elle est responsable de cette discipline; mais elle n'enseigne pas; elle ne prêche pas. — La parole est avant l'Eglise;celle-ci a été rassemblée par la Parole: les apôtres, un Paul, ceux qui furent dispersés par la persécution, mille autres âmes fidèles ont annoncé la Parole, et ainsi l'Eglise a été rassemblée. On a dit que l'Eglise a été avant les Ecritures: pour ce qui regarde le Nouveau Testament, cela est vrai; mais la Parole prêchée a été avant l'Eglise; l'Eglise n'en est jamais la source, mais le fruit; l'édification de l'Eglise rassemblée vient directement de Dieu par les dons qu'il a accordés, le Saint Esprit distribuant à chacun comme il veut. Les Ecritures sont le moyen que Dieu a employé pour conserver la vérité, pour nous en assurer, vu la faillibilité des instruments de sa propagation. Si, au commencement, il a tellement rempli quelques hommes de l'Esprit, que l'erreur était exclue de leur prédication; si, outre cela, il a agi pour donner des révélations dans lesquelles il n'y avait que sa Parole, il n'en est pas moins vrai que, en thèse générale, la prédication est le fruit de l'oeuvre du Saint Esprit dans le coeur; et il y a mesure de spiritualité et possibilité d'erreur. A l'égard de ces communications, quelle que soit la puissance de l'oeuvre de l'Esprit, il faut juger (voyez Actes des Apôtres 17: 11; 1 Corinthiens 14: 11, 15). Nous verrons plus tard que les Ecritures sont ce qui donne de la sûreté, dans ce jugement, à ceux qui sont conduits de Dieu.