L'intimité divine

L'intimité, qui existe entre le Seigneur et ses élus, surpasse, on peut le dire, tout ce qui en est connu ailleurs. Les anges font son commandement, ils se tiennent devant Lui, ils ont gardé leur première origine, et ils excellent en cette force qui fait sa volonté (Psaumes 103: 20); mais ils ne sont pas là où sont les pécheurs élus. Ils apprennent par l'Eglise la sagesse diversifiée de Dieu (Ephésiens 3: 10); mais à nous, Christ a fait connaître tout ce qu'il a reçu de son Père (Jean 15: 15).

Le Sauveur entre dans la connaissance des secrets du coeur du pécheur, tandis qu'il communique à celui-ci les secrets du coeur de Dieu. C'est là de l'intimité, et il y a dans cette intimité, que nous la contemplions au puits de Sichar, ou dans l'histoire d'Abraham ou de Moïse, de David ou de tant d'autres, quelque chose de merveilleux, et d'infiniment doux pour le coeur. L'Ecriture, et par la doctrine et par des images, nous fait connaître cette intimité pour que nous y croyions et que nous en jouissions.

L'Esprit de Dieu dans l'épître aux Romains, par le moyen de l'apôtre Paul, conduit les siens dans deux sentiers différents, celui de la grâce, décrit dans les chapitres 1 à 8, et celui de la connaissance, développé dans les chapitres 9 à 11.

Il nous trouve dans un état de ruine, et il nous prend là où nous sommes, dans nos péchés, des pécheurs qui n'atteignent pas à la gloire de Dieu et qui sont en révolte contre Dieu et éloignés de lui. C'est le point de départ. Mais le Saint Esprit nous amène, des profondeurs de notre misère jusqu'à la hauteur de Dieu, de notre état de ruine aux richesses et aux merveilles de sa miséricorde et enfin il nous établit sur un lieu élevé, d'où nous pouvons défier tous nos ennemis, et où nous dominons tout ce qui peut être contre nous. Qui sera contre nous, dit celui qui est arrivé là? Qui nous accusera? Qui nous condamnera? Qui nous séparera?

Nous ayant conduits ainsi tout le long de cette voie de la grâce, et ayant vidé pour toujours toutes les questions qui pouvaient s'élever contre nous, l'Esprit nous conduit aussi, tout le long de la voie de la connaissance, dans cette voie où nous apprenons, non pas ce qui nous concerne comme pécheurs, mais les richesses diversifiées et les secrets des conseils divins, depuis le commencement jusqu'à la fin. L'Esprit ne laisse pas le pécheur sauvé dont il a pris la main qu'il ne l'ait établi sur un autre lieu élevé, et qu'il ne l'ait mis dans un autre ravissement, qui n'est pas la joie triomphante du bonheur sous les dons de la grâce, telle qu'elle est exprimée à la fin du sentier précédent (voyez Romains 8: 31-39), mais la joie qui résulte de la connaissance des voies et des desseins de Dieu par la lumière des communications divines qui nous sont faites à leur égard.

Tout cela n'est-il pas de l'intimité? Dieu, commençant par ramener dans la maison du Père un pauvre proscrit, le rendant tel qu'il puisse se tenir dans sa présence, l'y établissant dans la liberté, la force et la joie, et puis lui révélant tous ses conseils!

La femme de Sichar fut instruite dans la première de ces voies, mais non pas dans la seconde, au moins pour lors: et cela était parfaitement juste. Le Sauveur lui dit tout ce qu'elle était, et puis se manifesta lui-même à elle, de telle sorte que le coeur de la femme fut rempli de cette joie qui couronne le premier des deux sentiers que nous a tracés l'épître aux Romains; mais le temps n'était pas encore venu de lui faire connaître le second de ces sentiers.

Mais si nous regardons en arrière, aux chapitres 18 et 19 de la Genèse, nous verrons un pécheur sauvé, un saint de Dieu conduit dans chacun de ces deux sentiers, dans celui de la grâce et dans celui de la connaissance des conseils de Dieu, ou plutôt, un pécheur sauvé déjà arrivé au bout du premier, et de là conduit tout le long du second.

L'Eternel apparaît à Abraham, comme il était assis à la porte de sa tente, près de Hébron. Abraham le connaît bien, et il se lève, va au-devant de lui, se prosterne en terre, et lui offre «une bouchée de pain pour le fortifier»: son offre est acceptée, le repas est préparé et Dieu mange à la table d'Abraham. Ainsi Abraham jouit de la grâce dans laquelle il est (comparez Romains 5: 2). La présence de Dieu est sa demeure. Il nous présente l'image d'une âme qui peut tenir le langage des versets 31-39 du chapitre 8 de l'épître aux Romains. Mais placé là, il est prêt à marcher plus loin en compagnie de son divin Maître, et il fait ainsi. Ils se lèvent ensemble de dessous l'arbre où le repas a eu lieu; et pendant qu'ils marchent, ensemble, l'Eternel communique ses secrets à Abraham.

Quelle intimité est semblable à celle-ci: «Je ne vous appelle plus esclaves, car l'esclave ne sait pas ce que son maître fait; mais je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai ouï de mon Père» (Jean 15: 15). Ce n'est pas ainsi que les anges nous sont présentés, ni Adam, non plus dans l'innocence du jardin d'Eden; mais c'est la part des pécheurs sauvés, et cela, sans usurpation. Ils prennent le caillou blanc et y lisent un nouveau nom que nul ne connaît sinon celui qui le reçoit (Apocalypse 2: 17).

L'évangile de Jean et l'Apocalypse de Jean nous présentent les mêmes choses. Dans l'évangile, un pécheur après l'autre est amené et conduit dans la voie de la grâce, tiré des profondeurs de sa misère et mis en possession des gloires divines, du salut et de la paix, pour qu'il se réjouisse dans le triomphe qui clôt le chapitre 8 de l'épître aux Romains. Dans l'Apocalypse, Jean lui-même (lui, un pécheur sauvé, déjà arrivé au bout du sentier de la grâce), est conduit tout le long de la voie des conseils divins, il est instruit des secrets des sceaux, des trompettes et des coupes, jusqu'à ce qu'il soit laissé devant la sainte Jérusalem, dans une extase pareille à celle qui couronne le chapitre 11 de l'épître aux Romains.

Quelles voies merveilleuses! Au terme de l'une, le pécheur, sauvé d'un salut sûr et éternel, triomphe dans la position à laquelle il a été amené. Au terme de l'autre, le saint triomphe dans la contemplation des conseils de Dieu, qui tous lui ont été révélés, en sorte qu'il peut désormais marcher dans la lumière comme Dieu est dans la lumière. Quel mal atteindrait l'élu de Dieu que le Seigneur «prend plaisir d'honorer» (comparez aussi Esther 6: 6 et suivants)

J'ajouterai encore que les Psaumes 23 et 24 sont l'expression des sentiments d'une âme qui marche dans ces deux voies de la grâce et des conseils de Dieu, qui nous occupent ici. Dans le Psaume 23, le saint poursuit le sentier dans lequel la grâce l'a placé: il compte par conséquent sur tout ce dont il pourra avoir besoin. Toutes choses sont à lui, et il peut avoir besoin de toutes. Il sait qu'il est sous la conduite et les soins d'un Berger qui peut les lui donner toutes: édification, rafraîchissement, relèvement, un bâton et une houlette pour traverser la vallée de l'ombre de la mort, une table abondante et une coupe qui déborde, une onction d'huile pour la présence même de ses ennemis, et une position de bonté et de grâce, qui durera jusqu'à ce que le sentier se termine dans la maison du Seigneur, et que les soins, la direction et les ressources de la grâce aboutissent là où le saint est chez lui, dans la gloire. Ainsi le pécheur sauvé contemple son propre bonheur et le célèbre dans le secret de son coeur, comme l'y instruisent les chapitres 1-8 de l'épître aux Romains; on le voit, dans ce Psaume, sur le sentier que l'Ecriture place devant lui.

Dans le Psaume 24, le saint poursuit un chemin éclairé d'une merveilleuse lumière, sur lequel l'Esprit de sagesse et de révélation l'a placé. Il contemple, non son propre bonheur et les bénédictions dont il est comblé, comme dans le Psaume 23, mais les desseins de Dieu, les secrets des conseils divins, les gloires de Christ, ses actes, ses jugements, ses vertus, ses titres, sa destinée. Il écoute en esprit cette salutation qui attend Christ aux portes mêmes du séjour de la gloire, lorsqu'il aura accompli le jugement qu'il devait exécuter, et maintenu le caractère qu'il devait manifester, aux acclamations qui lui sont adressées là de la part de ceux qui prenaient plaisir à entendre toujours de nouveau le récit de ses faits et de ses gloires. Ainsi le pécheur sauvé contemple la sagesse et les voies de Dieu; non la grâce qui l'a visité, mais les conseils de Dieu qui ont donné à Christ sa place et ses gloires; on le voit sur le sentier que les chapitres 9-11 de l'épître aux Romains avaient ouvert devant lui.