La veuve de Naïn - Luc 7

Le Seigneur a plusieurs fois touché ce qui pouvait souiller. Il semble avoir agi ainsi de propos délibéré, car il l'a fait quelquefois sans nécessité. Sa parole eut suffi pour opérer le dessein de sa volonté, sans l'attouchement de sa main. Néanmoins il toucha le lépreux et la bière, et l'un et l'autre l'auraient souillé, s'il eût été un autre que Lui-même, ou s'il eût été dans la relation d'un simple Juif vis-à-vis de la loi de Moïse. En pareil cas, au lieu que de la puissance, sortit de Lui, il eût eu besoin lui même d'être purifié. Mais il n'avait aucun besoin de purification. Aucune ordonnance de purification ne pouvait lui profiter. Il magnifiait la loi, en toute chose comme Juif obéissant, la rendant honorable, accomplissant toute justice; et cependant si, dans les occasions comme celle qui nous est présentée ici, il n'avait pas été dans une position particulière par rapport à la loi, il aurait été désobéissant à celle-ci; car la loi pour les souillures de ce genre, à la fois, exigeait, cette purification, et en fournissait les moyens. Mais nous savons que Christ n'a pas été désobéissant. La révélation de sa personne explique tout. Quoiqu'il fût Juif, et très certainement et simplement «un homme», participant à la chair et au sang, il était sans tache comme aucun autre ne l'a été, au milieu de la souillure, et la souillure ne pouvait le toucher.

Avec cela, il y a en lui une vie qui déborde. Il fait face à la puissance de la mort sous toutes ses formes et dans tous ses degrés, dans des maladies de toutes sortes, et à la mort elle-même, sur les différentes étapes de ses victoires, sur un lit, dans une bière, ou dans un sépulcre. Il y avait en Lui une exubérance, une plénitude de vie qui faisait qu'il pouvait aller, triomphant toujours, au-devant de toute la puissance de la mort et de la mort elle-même. C'était la vie en victoire.

Ce qui frappe aussi, dans la résurrection du fils de la veuve de Naïn, c'est l'aise avec laquelle, par cette vertu qui est en Lui, Christ accomplit son couvre divine au milieu de cette scène de la puissance de la mort. Il parle, et la chose a lieu; la maladie et la mort font place à la santé et à la vie; au jour d'ancienneté, il avait dit: «Que la lumière soit, et la lumière fut»; ici, avec la même simplicité, il dit: «Je le veux, soit net». En Lui, la vie n'a rien perdu de sa plénitude et de son autorité primitives. Il vivifie tout ce qu'il rencontre; il porte la vie là où il veut, par une parole, comme par un attouchement.

C'est ce que nous voyons dans le récit qui nous occupe. Ce que je voudrais faire remarquer encore, d'une manière particulière, c'est la grâce avec laquelle cette vie, qui est dans le Fils de Dieu se manifeste et opère. Elle déborde pour guérir, et pour guérir parfaitement. Elle déborde pour se communiquer, mais non pas pour s'enrichir.

Par la résurrection du fils de la veuve de Naïn, une double guérison fut opérée: le corps du jeune homme fut ramené à la vie, et le coeur de la mère fut consolé; et chacune de ces guérisons fut parfaite dans son genre. Lorsque le jeune homme fut revenu à la vie, «il s'assit et commença à parler» (verset 15), montrant la plénitude de la vie qui était en lui; tandis que la mère, non seulement voyait son fils revenu à la vie, mais encore le recevait pour elle-même, car nous lisons que: «Jésus le donna à sa mère». C'était agir en parfaite grâce envers elle. Elle ne perdit rien. Jésus ne réclama pas le fils pour lui-même, comme fruit de la vie qu'il lui avait communiquée. Il y aurait eu contradiction de sa part; la vie eût cherché quelque chose pour elle-même: Mais la vie ne fait pas ainsi. Elle déborde en agissant selon la grandeur de sa propre nature, et, riche par elle-même, elle ne se répand que pour donner. Jamais le Seigneur ne réclame la personne, ou les services de ceux qu'Il guérit, il faut le remarquer. Les paroles de Jésus sont: «Va-t'en en paix», «va-t'en», «va-t'en en ta maison», «prends ton petit lit», ou quelque chose de semblable. Il ne se prévaut jamais de ses droits sur ceux qu'il a délivrés. Il ne permit pas que le pauvre démoniaque, appelé Légion, restât avec lui, bien qu'il le lui demandât avec instance (Luc 8: 30-38); mais il le renvoya dans sa maison; il laissa la fille de Jaïrus au sein de sa famille (Luc 8: 42); il rendit à son père l'enfant que sa grâce et son pouvoir guérirent d'un terrible fléau au pied de la sainte montagne (Matthieu 17: 14, etc.). La grâce donne ou partage; elle ne s'enrichit pas. Le Seigneur ne nous sauve pas dans le but que nous le servions, car, alors, la grâce ne serait plus la grâce».

Le fait que le Seigneur n'exige rien de ceux qu'il guérit, n'est pas une chose accidentelle, mais un propos arrêté, l'expression nécessaire de ce qu'Il est. Son temps pour guérir, serait-il, pour lui, un temps de «recevoir de l'argent et des vêtements, des oliviers et des vignes, des brebis et des boeufs» (2 Rois 5: 26). Christ donne-t-il afin de recevoir en retour? L'esprit d'Elisée pourrait nous répondre; combien plus l'esprit du Seigneur d'Elisée!

Le Seigneur faisait du bien et prêtait sans rien espérer en retour. Il donnait, — et sa main gauche ne savait pas ce que faisait sa droite. Il trouva, il est vrai, des serviteurs dans le monde; mais ils étaient le fruit de son appel et de l'énergie de son Esprit; le fruit aussi des affections de coeurs pressés par son amour. Il appela Lévi, et Lévi le suivit. Il appela André et Simon, Jacques et Jean, et ils le suivirent. Il ne les guérit pas d'abord pour les appeler ensuite. Il les appela et les doua pour l'oeuvre à laquelle ils les appelait, puis, en les envoyant, il leur dit: «Vous l'avez reçu gratuitement, DONNEZ-LE GRATUITEMENT» (Matthieu 10: 8). Il les choisit, afin qu'ils allassent et qu'ils portassent du fruit, et que leur fruit demeurât, pour leur être une récompense et un honneur au jour où le royaume sera établi; mais c'est là tout autre chose que de donner pour recevoir. Ils ont pu dire en eux-mêmes: «L'amour de Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous aussi son morts, et qu'il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent, ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux» (2 Corinthiens 5: 14, 15), et cela était parfaitement juste; mais cela encore est autre chose. Jésus aimait, il guérissait, il sauvait, sans rien attendre en retour, ne réclament jamais, en aucun cas, les promesses ou les services de ceux qu'il avait guéris ou délivrés: la grâce autrement eût failli dans sa plus belle expression. Mais Christ était venu, afin que, en Lui et dans ses voies, la grâce brillât dans les immenses richesses et la gloire qui lui sont propres. La grâce agit, comme nous le répétons, pour guérir, et pour guérir parfaitement; non pour s'enrichir, mais pour se donner.

Le premier devoir de la foi, c'est de nous placer devant cette grâce. Si nos coeurs s'appliquent à connaître ce secret, au lieu de nous tourmenter en nous-mêmes pour savoir si nous payons de retour le Fils de Dieu pour les guérisons qu'il a opérées en nous et la vie qu'il nous a donnée, nous croirons plutôt qu'il nous a visités afin que de sa plénitude nous recevions et grâce pour grâce: comme dans l'ancienne création, il trouve ses délices et sa gloire dans ses propres,oeuvres, car nous sommes «son ouvrage» (Ephésiens 2: 10; comparez Genèse 1: 31; Esaïe 53: 11).