Sur une phrase de «l'Assemblée de Dieu»

Mackintosh C.H.

Nous apprenons avec peine qu'une phrase de l'excellent article sur «l'Assemblée de Dieu», si apprécié d'ailleurs et qu'on nous demande de tous côtés, a blessé quelques-uns de nos frères. Cette phrase se trouve, page 392 [pagination de l’original] de notre No 20 et page 30 de la brochure. La voici: «Nous avons parfois eu l'idée qu'une certaine classe d'ignorants, aimant fort à s'entendre parler, considéraient l'Assemblée comme une sphère où ils pouvaient aisément figurer sans travail et sans études quelconques».

C'est surtout les mots que nous avons soulignés qui ont attiré des critiques: on a vu là comme une négation ou un abandon d'un principe qui nous est cher, parce qu'il est de Dieu: que c'est du Seigneur seul que viennent les dons et, par conséquent, les services. Nous sommes étonné qu'on ait pu se méprendre à ce point sur la pensée du pieux auteur de «l'Assemblée de Dieu». Il suffit, pour la comprendre, de lire bien, cette phrase en rapport avec ce qui la précédé et ce qui suit ou avec l'ensemble du traité.

D'abord, remarquez qu'elle ne concerne que des «ignorants qui aiment fort à s'entendre parler», et qui ne voient dans l'Assemblée qu'un terrain où chacun peut prendre la parole «sans travail et sans études quelconques»: ce qu'ils trouvent très commode pour satisfaire leur vain babil. A leurs yeux l'Assemblée n'est pas autre chose. Désapprouver la phrase, c'est approuver de telles gens.

Quant à nous, autant nous avons été souvent édifié par tel ou tel frère campagnard ou artisan, prononçant quelques paroles simples et des pensées qui lui étaient données de Dieu; autant nous avons été parfois lassé d'entendre tel autre se lever pour débiter des pauvretés, des non-sens où tout au moins:

Un déluge de mots sur un désert d'idées.

C'est un abus qu'il faut accepter tout en cherchant à le combattre. Les hommes, les chrétiens mêmes ont abusé de tout, de la grâce de Dieu, en particulier. Ne nous étonnons donc pas trop qu'il y en ait, parmi nous, qui abusent d'un principe que nous aimons à proclamer et selon lequel nous nous réunissons. Ils prennent, hélas! le droit que nous attribuons au Saint Esprit seul de faire parler qui Il veut, pour un droit donné à tous les individus. N'est-il pas vrai que nous devons protester contre une pareille erreur? Cependant nous avons de quoi nous consoler à cet égard, si nous considérons ce qui se passe ailleurs. Parmi nous, on peut abuser de l'ordre établi de Dieu, en ne le comprenant pas. Cela arrivera toujours plus rarement à proportion qu'il y aura plus de vie dans une assemblée et qu'on s'y attendra à Celui qui est un Dieu d'ordre. Et puis l'assemblée et, en particulier, ceux qui ont le don de prophétiser sont là pour juger ce mal et pour l'arrêter (1 Corinthiens 14: 29). Dans les systèmes humains règne un abus d'autant plus grave qu'il leur est inhérent et que l'ordre selon Dieu y serait considéré comme un affreux désordre. On y trouve un homme chargé de parler d'office, n'eût-il rien à donner de la part du Seigneur, fût-il même étranger au salut et à la vie de Dieu; tandis que peut-être, sur les bancs de ses auditeurs, il y a un frère ou des frères qui se sentiraient pressés d'adresser à l'assemblée quelques sérieuses et fidèles paroles et qui ne pourraient le faire sans exciter un trouble et un scandale général.

Ensuite, chers frères, si vous voulez même appliquer les mots sans études quelconques, aux vrais et fidèles ouvriers du Seigneur, à ceux que des dons de l'Esprit qualifient pour parler dans les assemblées, eh bien! nous y consentons, tout en rappelant que ce n'est pas là le sens de la phrase incriminée, et nous déclarons que nous ne connaissons aucun de ces chers ouvriers qui le soit devenu sans études quelconques. Qu'est-ce que l'étude? Le dictionnaire répond que c'est «un travail ou une application d'esprit pour apprendre ou approfondir une science».

Quant à moi, je plaindrais beaucoup le chrétien qui blâmerait ou mépriserait l'étude, surtout chez les ouvriers de Jésus Christ. Blâmer l'étude, c'est blâmer ceux que le Saint Esprit appelle nobles, les Béréens qui examinaient [étudiaient] chaque jour les Ecritures pour savoir si ce que Paul et Silas leur annonçaient y était conforme [Actes des Apôtres 17: 11]. C'est blâmer Apollos, homme éloquent, qui parlait et enseignait diligemment les choses qui concernent le Seigneur — et qui, cependant, malgré son savoir et son éloquence, ne craignit pas d'aller se remettre à l'école chez de simples faiseurs de tente, Aquilas et Priscilla «qui lui expliquèrent plus exactement la voie de Dieu» (Actes des Apôtres 18: 24-26). Ne fit-il pas là de bonnes études?

Et, de nos jours, blâmeriez-vous donc des frères qui, lorsque le Seigneur leur eut fait comprendre qu'ils devaient prendre leur place dans l'Assemblée de Dieu, ont bientôt senti le besoin de se mettre ou de se remettre à l'étude du grec et même de l'hébreu, afin de pouvoir lire les Ecritures, telles qu'elles ont été données de Dieu et d'être par là même mieux en état d'exercer le don de l'enseignement qu'ils avaient reçu? Blâmerions-nous d'autres frères qui, pendant bien des mois, faisaient chaque jour un long chemin, par tous les temps et le plus souvent de nuit, pour assister à des réunions où il pensaient recevoir des lumières et des instructions qui leur fissent mieux comprendre nos saints livres? — Et tel de ceux qui s'élèvent contre notre phrase ne devrait il pas se rappeler avec reconnaissance les heures et les journées qu'il a passées à étudier les Ecritures sous la direction d'un docteur que Dieu nous a donné et que nous révérons tous? Ne sommes-nous pas contents aussi de pouvoir, au besoin, consulter l'ouvrage intitulé: «Etudes sur la parole de Dieu, destinées à aider le chrétien dans la lecture du saint Livre», et qui est souvent pour nous un guide précieux pour l'intelligence de la Bible?

Enfin, laissons parler Dieu. N'est-il pas écrit: «Ajoutez à votre foi la vertu; et à la vertu, la connaissance»; et encore: «Croissez dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ». Et ailleurs: «Avançons vers l'état d'hommes faits» (2 Pierre 1: 5; 3: 18; Hébreux 6: 1)? Impossible d'obéir à ces commandements «sans travail et sans études». Il en est de même de ces recommandations de l'apôtre Paul à son «fils» Timothée, qui s'adressent directement aux ouvriers du Seigneur: «Attache-toi à la lecture, à l'exhortation, à l'enseignement… Ne néglige pas le don qui est en toi… Occupe-toi de ces choses, et y sois tout entier… Sois attentif à toi-même et à l'enseignement». «C'est pourquoi je te rappelle de ranimer le don de Dieu qui est en toi… Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce qui est dans le Christ Jésus, et les choses que tu as entendues de moi… commets-les à des hommes fidèles qui soient capables d'enseigner aussi les autres… Etudie-toi à te rendre approuvé de Dieu… exposant justement la parole de la vérité etc.». Voilà le travail, voilà les études que Il on ne saurait trop recommander aux chrétiens et surtout à ceux que la grâce appelle à agir dans les assemblées. Ce n'est qu'en s'y appliquant que ceux-ci seront vraiment utiles au Maître et à leurs frères. Celui qui les négligerait ne serait pas un serviteur fidèle et prudent, et serait bientôt au bout de la nourriture qu'il doit donner à ses frères dans le temps qu'il faut. Il ne serait pas un scribe bien instruit pour le royaume des cieux et pouvant toujours tirer de son trésor des choses nouvelles et des choses vieilles (Matthieu 24: 45-47; 13: 52).