Correspondance

ME 1869 page 218  

Etats-Unis d'Amérique, 7 janvier 1869

 

Au Rédacteur du Messager Evangélique

Dans la pensée de faire plaisir à nos bien-aimés frères d'Europe, je vous envoie une poésie que vous pourrez publier à la fin de l'un de vos Messagers, si vous le jugez convenable. Elle a été composée par un pieux frère dans les circonstances suivantes: Une des assemblées de chrétiens de langue française en Amérique avait été minée par le mal et une dernière explosion l'avait séparée en deux fractions. Cependant, dans sa miséricorde Dieu a agi. Plusieurs membres de cette assemblée ont senti leur responsabilité quant au déshonneur fait à Dieu et à son témoignage et ils ont pris la chose à coeur. Des réunions d'humiliation ont eu lieu et des prédications ont été données dans lesquelles l'exhortation pour réveiller la conscience de tous a eu une place particulière et, par la bonté de notre tendre Père, le but auquel désirait arriver le plus grand nombre a été atteint. Alors heureux de voir que le Seigneur avait de nouveau tout réuni, et que l'on éprouvait d'une manière particulière sa présence et sa bénédiction, une agape a été préposée, à laquelle ont été invités les chrétiens de quatre assemblées dont la distance, en Amérique, n'a pas paru trop éloignée. Plusieurs s'y sont rendus en effet et je ne me souviens pas d'avoir éprouvé en Europe plus de bénédiction et de bonheur dans ce genre de réunion que dans celle-là, de laquelle ceux qui y ont assisté gardent un bon souvenir.

Que Dieu les encourage tous, ces chers amis, et fasse que les souhaits exprimés dans la poésie (distribuée par copie au début de l'agape) s'accomplissent pour sa gloire et le bien de cette assemblée. Voici ces quelques vers:

1

Qu'il est doux de se voir ensemble comme frères

A ce repas d'amour d'un seul coeur réunis,

Anticipant ainsi sur cette pauvre terre

Le jour où dans le ciel nous serons tous assis.

 

2

Oh Dieu! que devant toi toute pensée amère,

Toute animosité, sentiment de froideur,

De nos coeurs soient bannis, et qu'un amour sincère

Nous unisse enfin tous après tant de douleur.

 

3

Tu fus pour nous, Seigneur, plein de miséricorde;

Sans se lasser ton oeil sur nous veille toujours;

Et maintenant encor, ta grâce nous accorde,

Après tant de mauvais, un de nos plus beaux jours.

 

4

Pour le conserver tel, à ta volonté sainte,

Oh Dieu, soumets nos coeurs, augmente notre foi;

Que pour toi nous vivions, en marchant dans ta crainte,

Jusqu'à ce que, Seigneur, tu nous prennes à toi.

 

5

C'est là, dans ce séjour éclatant de lumière,

Où le mal, le péché, la douleur ne sont plus,

Que nous te servirons, ô notre tendre Père!

Avec l'heureux troupeau de tous tes chers élus.

 

6

Nous voyant près de toi, revêtus de ta gloire,

Nous pécheurs rachetés, les habitants des cieux

Célébreront en choeur l'éclatante victoire,

Par laquelle, ô Jésus! tu nous ouvris ces lieux.

 

7

Si ton amour pour nous, dans les cieux, fait la joie

De tous ces êtres saints, quels transports dans nos coeurs

Devrait-il inspirer! oh! fais qu'en nous se voie

Une étreinte d'amour pour te servir, Seigneur.

 

7

Ah! tu connais assez notre grande faiblesse;

Mais tu l'as dit, Seigneur; dans notre infirmité

Ta force s'accomplit, et quand le mal nous presse

Nous trouvons en toi seul notre sécurité.