Exode, chapitre 33

Souvenir d'une méditation de J.N. Darby    ME 1869 page 361

 

Ce chapitre, mes chers amis, reporte nos pensées au moment où le peuple d'Israël avait fait le veau d'or, rompant, par cet acte d'idolâtrie, le premier anneau de la chaîne qui le liait à Dieu. Moïse descendait de la montagne avec les tables de la loi; mais voyant dans quel péché le peuple était tombé, il les brisa avant que d'entrer dans le camp. C'est là, on peut le dire, tout ce qu'il y a eu réellement de la loi même, entre Dieu et l'homme. D'ailleurs, il n'était pas possible de mettre les commandements de l'Eternel à côté du veau d'or. L'homme n'est ainsi jamais entré en relation avec Dieu sur le pied de la loi, — Dieu a pardonné et n'a pas détruit le peuple; or le pardon n'était pas le terme de la loi (voir Deutéronome 27: 26), mais la réponse de Dieu à l'intercession de Moïse, car il avait proposé au peuple de faire propitiation pour lui auprès de Dieu. Moïse dit au peuple: «Peut-être je ferai propitiation pour votre péché» (Exode 32: 30). Il n'en était donc pas sûr, il monte vers l'Eternel sur la montagne, et l'Eternel pardonna au peuple son péché.

A cette occasion, l'affection que Moïse montre pour le peuple est d'une remarquable beauté; il dit à Dieu: «Pardonne-leur leur péché ou efface-moi de ton livre que tu as écrit» (Exode 32: 32). Cela, on le comprend, ne se pouvait pas; Dieu pouvait pardonner au peuple, mais non effacer Moïse de son livre. Pour nous, grâces à Dieu, il n'y a plus de PEUT-ETRE, car Christ a fait la propitiation pour nos péchés et par la foi en son sang, ils nous sont remis pour toujours. Ce qui nous convient maintenant, c'est de marcher dans la lumière comme Dieu est dans la lumière, car il n'y a plus de voile pour nous.

Quand la gloire de Dieu s'est manifestée avec la loi, il a été impossible de supporter cette lumière, parce que la loi est la parfaite règle de ce que l'homme doit être. Or, notre responsabilité propre est de marcher, non pas comme un enfant d'Adam doit marcher, mais comme un enfant de Dieu doit marcher. Notre position en Christ est la mesure de notre responsabilité. Quand l'homme reconnaît qu'en sa chair il n'habite pas de bien, et qu'il trouve Christ, il passe de la mort à la vie, il entre dans une nouvelle position, en conséquence de la rédemption. Christ est venu sauver l'homme perdu, le chrétien reconnaît qu'il est tel, et qu'il faut qu'il passe de la mort à la vie. Tous ses pêchés sont effacés; je ne dis pas: tous ses péchés passés et à venir, parce que je ne dois pas penser à des péchés à venir, mais tous mes péchés étaient à venir; lorsque Christ est mort pour cela sur la croix. On fait souvent la méprise de confondre le moment où Christ se révèle à nous, avec celui où il a porté le péché. Le Saint Esprit peut nous faire sentir toujours davantage le péché, cela arrive et doit arriver; mais quand il s'agit d'imputation, si la chose n'est pas faite, elle ne se fera jamais, car le sacrifice de la croix ne se répétera plus; mais, grâces à Dieu, à la croix le péché est aboli et c'est pour cela qu'il ne peut être imputé au croyant. Ainsi, il n'y a plus de peut-être. Un homme est à la droite de Dieu, et c'est Christ. Au lieu de craindre, ou de demander le voile à cause de la crainte, je vois la gloire de Dieu dans la personne de Jésus; et nous sommes transformés à la même image de gloire en gloire. Ainsi le progrès chrétien vient de ce que nous contemplons le Seigneur.

Il est bon de remarquer que le chapitre que nous avons sous les yeux n'est pas l'Evangile, bien qu'il soit souvent cité comme tel, mais il ne l'est pas du tout: c'est la miséricorde de Dieu, non pas l'Evangile. Il y a bien des âmes qui regardent à la miséricorde de Dieu, sans comprendre que l'oeuvre est achevée. Au chapitre précédent, nous lisons: «Qui aura péché contre moi, je l'effacerai de mon livre». Ce passage maintient la culpabilité. Nous avons par conséquent ici les principes du gouvernement de Dieu en Israël, mais ce n'est pas le péché effacé. Plus loin, quand Dieu dit qu'il punit l'iniquité des pères sur les enfants (34: 7), ce n'est pas la question de tout homme devant Dieu; mais dans le gouvernement de Dieu, cela arrive. Il arrive souvent qu'une âme convertie s'appuie sur la miséricorde, au lieu de s'appuyer sur l'oeuvre parfaite de la croix; il ne doit pas en être ainsi. Quand je regarde l'oeuvre, je dis: Je suis dans la présence de Dieu en vertu de l'oeuvre de Christ. Quelle est la vertu de cette oeuvre? Elle me rend blanc comme la neige. Si je ne crois pas cela, je nie la vertu du sang de Christ et son oeuvre. Pour mon âme, sans doute, j'ai des progrès à faire et plus j'avance, plus je jouis du sang et de l'oeuvre de Christ, mais pour Dieu il n'y a pas de progrès, Christ a toujours la même valeur pour Lui.

Il y a deux choses à considérer dans le chapitre que nous avons lu: 1° La position d'Israël; 2° Les voies de Dieu à l'égard de ce peuple placé sous l'intercession de Moïse. Au verset 5, Dieu dit: «Vous êtes un peuple de cou roide; je monterai en un moment au milieu de toi et je te consumerai. Maintenant donc, ôte tes ornements de dessus toi, et je saurai ce que je te ferai». Au verset 1, après que les ornements avaient été ôtés, Dieu dit à Moïse: «Va, monte d'ici, toi et le peuple que tu as fait monter du pays d'Egypte…, et j'enverrai un ange devant toi…, mais je ne monterai point au milieu de toi, parce que tu es un peuple de cou roide, de peur que je ne te consume en chemin». Il dit d'abord: Je monte et je te consume; ensuite, je ne monterai pas, car je serai forcé de vous consumer. — Alors Moïse se sépare du peuple, et bâtit le pavillon d'assignation; puis viennent, selon la grâce, les communications de Dieu avec Moïse. Dieu dit alors à Moïse: «Tu as trouvé grâce devant mes yeux» (verset 12). Voilà la position chrétienne: Personne n'y est sans une pleine assurance de son salut. Si on n'y est pas parvenu on peut être en chemin pour y arriver, c'est très bon; le travail de l'Esprit dans ce but peut être profond, c'est très bon aussi; plus cela a lieu, mieux cela vaut; mais il est bon de comprendre que le premier Adam ne peut être amélioré. L'homme, enfant d'Adam, est totalement condamné. La croix est la preuve que Dieu n'a pu trouver dans le coeur de l'homme quelque chose de bon, dont Il pût tirer parti pour faire du bien à l'homme.

La première chose que l'homme a toujours faite, dans toutes les positions où Dieu l'a placé, c'est de manquer à cette position. Dans le Paradis, ayant désobéi, il a dû être chassé — sans loi, il est devenu tellement méchant, que Dieu a dû le détruire par le déluge; — sous la loi, il a fait le veau d'or; — Dieu donne la sacrificature, l'homme offre un feu étranger; aussi Aaron n'a-t-il jamais pu entrer avec ses vêtements de gloire, dans le lieu très-saint. — Après le royaume de David, Salomon tombe; — il arrive la même chose à Nebucadnetsar. Enfin, arrive le Fils, c'était la dernière chose qui pût atteindre le coeur de l'homme; — l'homme dit: «Tuons-le!» — Ainsi la croix, ce qui nous sauve, est la pleine démonstration de l'inimitié de l'homme contre Dieu. C'est donc par le péché que nous avons eu part à la croix. Voilà l'histoire de l'homme dans la Bible. — Si nous examinons le coeur de l'homme nous y trouvons la même chose. Mais Dieu a fait une oeuvre parfaite par laquelle on est réconcilié avec Lui; si je comprends cela, je suis parfaitement assuré de mon salut. Si le chrétien n'a pas une entière assurance de salut, c'est qu'il n'a pas reconnu la valeur de l'oeuvre de Christ aux yeux de Dieu. Par la croix, l'imputation du péché a cessé pour le croyant; le combat n'a pas cessé, mais il n'y a plus de péché imputé.

Moïse était dans ce cas. Pour nous, voici ce que Dieu dit: «Il n'y a plus aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus Christ» (Romains 8: 1). Ensuite: «Vous n'avez pas reçu un esprit de servitude pour être dans la crainte, mais vous avez reçu l'Esprit d'adoption par lequel nous crions: Abba Père!» — Donc, on n'a pas le droit d'appeler Dieu Père si l'on n'a pas l'assurance de son salut.

Maintenant, voyons quel est l'effet pratique de cette position. Moïse dit à l'Eternel: «Tu as dit, je te connais par ton nom, et aussi tu as trouvé grâce devant mes yeux. Or, maintenant, je te prie, si j'ai trouvé grâce devant tes yeux, fais-moi connaître ton chemin et je te connaîtrai» (versets 12, 13). Moïse dit donc: J'ai trouvé grâce — fais-moi connaître ton chemin. C'est ainsi que parle une âme affranchie. On veut le chemin de Dieu, et ce chemin, c'est Christ. Si Christ est tout pour le salut, Il est aussi tout pour le coeur; car le désir du coeur est alors: montre-moi ton chemin. Dans ce chemin il y aura sans doute des peines, des fatigues, la mort peut-être, mais n'importe! — l'âme veut le chemin de Dieu. «Je te connaîtrai», dit Moïse. Le résultat de suivre ce chemin est un progrès dans la connaissance de Dieu lui-même. Christ révélé au coeur fait connaître le Père. Jésus disait à Philippe: «Celui qui m'a vu, a vu mon Père» (Jean 14). Quelle grâce immense! Christ a été dans ce monde un homme affable, accessible à tous; au milieu des siens, comme celui qui sert; en le connaissant, on connaissait aussi le Père. Il en est de même de nos jours pour la foi. Les incrédules peuvent beaucoup discuter là-dessus, mais le chrétien connaît Dieu en Christ: il connaît le Père.

Vous pouvez raisonner et embrouiller ma pauvre tête, mais mon coeur connaît Christ et cela me suffit. La pécheresse de Samarie pouvait dire: «Il m'a dit tout ce que j'ai fait». Ce prédicateur ambulant, ce fils du charpentier, je l'ai rencontré, je lui ai parlé et en faisant cela, j'ai été avec Dieu et je connais Dieu.

Moïse ajoute: «Afin que je trouve grâce devant tes yeux» (verset 13); il se place dans la relation d'un enfant avec son père. Si l'enfant est méchant, le coeur du père saigne, il n'y a pas de communion possible. Si au contraire l'enfant est bon, sage, le coeur du père s'épanche — l'enfant trouve grâce devant son père. La même vérité est présentée dans les chapitres 14 à 16 de l'Evangile de Jean. Sa faveur y dépend toujours de la marche. «Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour, comme j'ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure en son amour (Jean 15: 10). Ainsi, pour jouir du Père, Christ suivait ce chemin-là.

Ensuite, Moïse intercède pour le peuple, il pense aux autres et dit à l'Eternel: «Cette nation est ton peuple». La réponse est immédiate: «Ma face ira et je te donnerai du repos» (verset 14). — Je donnerai du repos, non pas seulement à la fin, mais déjà en chemin; et il en a été ainsi. L'arche aurait dû être au milieu du peuple qui devait lui être comme une espèce de garnison; mais au lieu de cela, l'arche passa devant pour trouver un lieu où le peuple pût se reposer; type admirable de la bonté de Dieu qui marche devant son peuple. Mais, outre ces preuves déjà si grandes de la condescendance de Dieu, Moïse demande encore davantage: «Si ta face ne vient, ne nous fais point monter d'ici, car en quoi connaîtra-t-on que nous avons trouvé grâce devant tes yeux, moi et ton peuple? Ne sera-ce pas quand tu marcheras avec nous? Car alors moi et ton peuple serons en admiration plus que tous les peuples qui seront sur la terre» (versets 15, 16). Il faut la présence de Dieu au milieu du peuple pour que la gloire de Dieu se manifeste. Cette présence sépare le peuple pour Dieu. Pour nous aussi, la présence de Dieu nous sépare du monde et elle nous garde du mal. Dieu accorde encore cela à Moïse. Moïse, enhardi par les réponses qu'il a reçues, demande encore: «Fais-moi voir ta gloire» (verset 18). Dieu répond: «Je ferai passer toute ma bonté devant ta face». Quant à la gloire, elle s'est vue en Jésus. Nous, nous pouvons voir la gloire parce que l'expiation est une oeuvre accomplie; avant la croix, cela ne se pouvait.

Au commencement du chapitre 34, une circonstance remarquable se présente. Dieu dit à Moïse de faire deux nouvelles tables; Moïse les fait et monte sur la montagne, l'Eternel s'arrête avec lui, et crie devant lui le nom de l'Eternel. Alors Moïse se prosterne et dit: «Oh Seigneur! je te prie, si j'ai trouvé grâce devant tes yeux, que le Seigneur marche maintenant au milieu de nous, car c'est un peuple de cou roide». — Que c'est étonnant! Dieu avait dit: Je ne puis aller avec vous, parce que vous êtes un peuple de cou roide; Moïse présente exactement la même raison que Dieu avait donnée, comme motif de ne pas aller avec son peuple: c'est parce que, dit-il, nous sommes un peuple de cou roide, que nous avons besoin que tu viennes; que c'est admirable! Cela montre en Moïse, une profonde connaissance de Dieu. Le chrétien fait la même chose; il demande à Dieu d'aller avec lui, parce que le péché est en lui — que la chair est en lui. Cela fait comprendre ce que c'est que la grâce. Si j'ai compris ma position dans le Bien-aimé, je puis demander que Dieu vienne avec moi, parce que j'ai du péché en moi, Le Psalmiste disait: «Sonde-moi». — Ce serait une folie de demander cela, s'il était encore question du péché, dans le sens pénal. Dieu doit venir avec moi parce que j'ai un cou roide, Je ne peux pas fléchir ce cou, si Dieu ne le fait pas. Il n'est pas question ici, je le répète, d'imputation du péché, mais de sanctification. Et ce n'est pas en affaiblissant l'idée du péché, que la sanctification s'accomplit. Aussi longtemps qu'il s'agit d'imputation, il ne peut pas être question de sanctification, parce qu'alors, il faut faire face à la justice, et sans assurance de salut, il n'y a, au fond, aucune sanctification réelle. En dehors d'une telle assurance, quand je pense à l'état de mon âme, je trouve l'iniquité, et je redoute la présence de Dieu, parce qu'il y a là une question de justice non réglée. Quand, au contraire, j'ai compris que Dieu ne voit pas d'iniquité en moi, il ne s'agit plus de justice; Christ est ma justice, mais je demande à Dieu de sonder mon coeur. Je m'adresse à lui, comme un enfant à son père. Un orphelin ne peut avoir des affections filiales; de même, je ne puis avoir de saintes affections pour le Père, si je ne sais pas qu'il est mon père. C'est seulement quand je le sais, qu'il peut y avoir progrès en moi. C'est dans cette sainte relation avec Dieu, que les affections filiales existent. Il y a ainsi une telle confiance en la bonté de Dieu, qu'on peut lui demander de mâter notre pauvre coeur. Je puis me mettre du côté de Dieu contre le péché qui est en moi, pour en finir avec ce mal.

Pouvez-vous dire: Oh Dieu! sois avec moi, car j'ai un coeur roide? Il est beau de comprendre la grâce qui n'impute pas le péché; même elle fait davantage: c'est une grâce à laquelle je puis en appeler, pour avoir la victoire sur le péché. Ce n'est pas une assurance froide, mais je suis l'enfant de Dieu. Au jour du jugement je serai devant Dieu en vertu de ce que j'ai fait contre Lui, Dieu ayant pris occasion de cela pour me donner Christ; mais aujourd'hui, je suis en la présence de Dieu en vertu de ce qu'Il a fait pour moi.

Que Dieu nous donne de ne pas prétendre être plus sages, plus saints que Lui et d'avoir une telle conviction de péché et de misère, que nous acceptions tout ce que Dieu dit de nous; alors le désir du coeur est: Montre-moi ton chemin — Voilà l'effet pratique. — Que Dieu nous donne de croire à son amour, afin que nos coeurs soient entièrement à Lui, afin que tout ce que nous ferons, même manger et boire, nous le fassions à la gloire de Dieu. Ce qui restera de notre vie d'ici-bas, c'est ce que nous aurons fait en Christ. Quand nous regardons en arrière, à la lumière de Dieu, nous voyons que tout le reste est du temps perdu. Il faut que Christ vive en nous.