La manne

ME 1871 page 288

 

«Je suis le pain de vie. Vos pères ont mangé la manne au désert et sont morts» (Jean 6: 48, 49).

 

Les circonstances difficiles manifestent la faiblesse et les besoins de l'homme; mais elles deviennent de grandes bénédictions quand le Seigneur y entre, pour fournir à tout ce qui manque, dans les richesses de son grand amour.

Quand les Israélites furent entrés dans le désert, ils se trouvèrent sans nourriture. Ils apprirent ainsi à connaître leur propre misère et la pauvreté, le vide du monde; mais ce fut aussi le moment où l'abondance des richesses de Dieu leur fut rendue visible comme elle ne l'avait jamais été auparavant. Lorsqu'ils mangeaient les poireaux et les oignons d'Egypte, ou avant qu'ils fussent entrés dans le désert, ils ne connaissaient pas l'Eternel comme Celui qui fait pleuvoir des cieux du pain, «tellement que chacun mangeait du pain des puissants; il leur envoya donc de la viande pour s'en rassasier» (Exode 16: 4; Psaumes 78: 25). Maintenant aussi il y a une grande bénédiction à apprendre que le monde est un désert, que nos pauvres âmes sont affamées et que le monde n'a rien pour les nourrir; car alors nous sommes là précisément où nous trouvons pour nous le pain du ciel. «Jésus donc leur dit: En vérité, en vérité, je vous dis: Moïse ne vous a pas donné le pain qui vient du ciel, mais mon Père vous donne le véritable pain qui vient du ciel. Car le pain de Dieu est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde… Moi, je suis le pain de vie. Celui qui vient à moi, n'aura pas de faim; et celui qui croit en moi, n'aura jamais soif» (Jean 6: 32-35).

Il n'y avait pour les Israélites aucun travail par lequel ils pussent produire de la manne; l'homme n'avait aucune part à cela: la manne tombait du ciel sans le secours de l'homme, tout comme la pluie ou la rosée. L'Eternel avait dit: «Je vais vous faire pleuvoir des cieux du pain»; et l'homme maintenant n'a pas davantage à s'occuper de fournir, par ses propres efforts, de la nourriture à son âme: Dieu la donne gratuitement. «Mon Père vous donne le véritable pain du ciel». L'homme ne peut pas me faire recevoir Christ dans mon âme; il ne peut pas non plus m'en empêcher. «C'est Dieu qui opère en vous et le vouloir et le faire, selon son bon plaisir» (Philippiens 2: 13).

Le coeur insensé de l'homme ne peut apprendre à connaître aucune des riches bénédictions de Dieu par sa propre sagesse: il faut que la même main qui, en grâce, dispense le don, en enseigne aussi la valeur.

 «Or l'homme animal ne reçoit pas les choses qui sont de l'Esprit de Dieu, car elles lui sont folie, et il ne peut les connaître parce qu'elles se discernent spirituellement» (1 Corinthiens 2: 14). Quand l'Eternel fit pleuvoir la manne, les Israélites ne savaient pas ce que c'était, jusqu'à ce que Moïse les instruisit de la part du Seigneur. «Ce que les enfants d'Israël ayant vu, ils se dirent l'un à l'autre. Qu'est-ce? Car ils ne savaient pas ce que c'était. Et Moïse leur dit: C'est le pain que l'Eternel vous a donné à manger» (Exode 16: 15). Il en a été de même du Seigneur Jésus. «Il était dans le monde, et le monde fut fait par lui; et le monde ne l'a pas connu» (Jean 1: 10). «Les Juifs donc murmuraient contre lui, parce qu'il avait dit: Je suis le pain descendu du ciel. Et ils disaient: N'est-ce pas ici Jésus, le fils de Joseph, duquel nous connaissons le père et la mère? Comment donc, dit celui-ci: Je suis descendu du ciel? Jésus donc répondit et leur dit: Ne murmurez pas entre vous. Nul ne peut venir à moi, à moins que le Père qui m'a envoyé, ne le tire; et moi je le ressusciterai au dernier jour. Il est écrit dans les prophètes: Et ils seront tous enseignés de Dieu. «Quiconque a entendu le Père et a appris de lui, vient à moi» (Jean 6: 41-45). Si votre âme ne connaît pas Christ comme le véritable pain, vous ne savez pas combien il vous reste à apprendre; si au contraire vous avez trouvé que Jésus est véritablement le Christ, alors vous êtes enseigné de Dieu (lisez Matthieu 16: 16, 17; 1 Corinthiens 12: 3; 1 Jean 5: 1). C'est une grande chose que de réaliser que nous connaissons une vérité que la chair et le sang ne pouvaient jamais nous révéler, et par la connaissance de laquelle nos âmes sont bénies pour l'éternité, car nous sommes «assurés de cela même, que Celui qui a commencé en vous une bonne oeuvre, l'achèvera jusqu'à la journée de Jésus Christ» (Philippiens 1: 6). «Mais pour nous, nous avons reçu non pas l'esprit du monde, mais l'Esprit qui est de Dieu, afin que nous connaissions les choses qui nous ont été données de Dieu» (1 Corinthiens 2: 12).

Les Israélites ne méritaient pas d'avoir la manne; ce qu'ils méritaient c'était de mourir de faim, car ils murmurèrent contre Moïse et Aaron, et ils leur dirent: «Ah! que ne sommes-nous morts par la main de l'Eternel au pays d'Egypte, quand nous étions assis près des potées de chair, et que nous mangions notre soûl de pain! Car vous nous avez amenés dans ce désert, pour faire mourir de faim toute cette assemblée» (Exode 16: 3). Mais, lorsqu'ils appelaient ainsi sur eux le juste jugement de Dieu, Dieu, au lieu de faire pleuvoir sur eux du feu et du souffre, fit pleuvoir le pain des cieux! Est-ce nous qui avons fait monter vers Dieu le cri qui a fait descendre du ciel le Fils unique? Etait-ce un appel d'amour qui l'a amené ici-bas? Hélas! non. «En ceci est l'amour, non que nous ayons aimé Dieu, mais en ce que lui nous aima, et qu'il envoya son Fils pour la propitiation pour nos péchés» (1 Jean 4: 10). Dieu a constaté son amour à lui envers nous, en ce que lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous» (Romains 5: 8). Le don était le souverain et libre amour de Dieu; nous n'avons contribué en rien à procurer le Sauveur, et nous n'avons eu aucune part en son oeuvre merveilleuse. La grâce, une grâce libre et gratuite, c'est le principe de toutes les dispensations de Dieu envers nous: «non par des oeuvres, afin que personne ne se glorifie» (Ephésiens 2: 8, 9).

Quelle que fût la partie du désert que les Israélites traversaient, partout ils trouvaient la manne. Le matin il y en avait une couche à l'entour du camp, et ils pouvaient la recueillir et la manger dans le lieu même de leur pèlerinage. N'est-ce pas aussi notre bénédiction à nous? Assurément, car: «La justice qui est sur le principe de la foi, parle ainsi: Ne dis pas en ton coeur: Qui montera au ciel? — c'est à savoir pour en faire descendre Christ. Ou: Qui descendra dans l'abîme? — c'est à savoir pour faire monter Christ d'entre les morts. Mais que dit-elle? «La parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton coeur» (Romains 10: 6-8). Ceux qui habitaient l'Egypte ne pouvaient guère se douter combien le désert était riche et quelles récoltes il fournissait aux enfants de Dieu. L'Eternel ne faisait pas pleuvoir de manne sur l'Egypte, et les hommes du monde, qui s'abandonnent à «la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la vie», ne savent pas combien le Seigneur Jésus Christ vaut mieux que tout ce qui est dans le monde; mais celui qui a goûté que «le Seigneur est bon», le sait bien, lui. Et pourtant. qu'il sait peu de chose en comparaison de ce qu'il verra et possédera dans le beau pays de la promesse, découlant de lait et de miel!

La manne était la nourriture journalière des enfants d'Israël — l'Eternel leur avait ordonné d'en recueillir une certaine quantité chaque jour; et ils la ramassaient chaque matin. Il en est ainsi pour nous maintenant: le Seigneur Jésus Christ est notre nourriture de chaque jour. «Mon père vous donne le véritable pain qui vient du ciel». La communion avec lui est l'exercice journalier de l'âme de celui qui marche, comme étranger et voyageur, vers l'héritage incorruptible. Celui qui néglige la recherche de ce privilège est privé de beaucoup de consolation, a peu de force pour son pénible voyage, car notre Seigneur a dit: «Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il se renonce soi-même, qu'il prenne sa croix chaque jour, et me suive» (Luc 9: 23). Si nous ne nous nourrissons pas de notre manne, le poids de la croix sera plus lourd que nous ne pourrons le supporter, et le chemin étroit dans lequel on suit l'Agneau, sera plus étroit que nous ne pouvons l'endurer. Les difficultés sont grandes, mais le Seigneur donne de la force pour y faire face et les surmonter. «Ta force durera autant que tes jours».

Les Israélites recueillaient la manne, chacun autant qu'il lui en fallait pour sa nourriture: tous ne recueillaient pas la même quantité; «les uns recueillaient plus, les autres moins»: «Et ils la mesuraient par homer; et celui qui en avait recueilli beaucoup, n'en avait pas plus qu'il ne lui en fallait; ni celui qui en avait recueilli peu n'en avait pas moins; mais chacun en recueillait selon ce qu'il pouvait manger» (Exode 16: 17, 18). Parmi les chrétiens également, il y a une capacité différente pour recevoir les choses de Christ: il y a des pères, des jeunes gens et des jeunes enfants (1 Jean 2): il y a ceux à qui il faut du lait et non de la viande solide; puis ceux, qui pour y être habitués, ont les sens exercés à discerner le bien et le mal, et à qui convenait la viande solide (Hébreux 5: 12-14). Mais en Christ se trouve le lait pour les plus faibles; et en Lui, la viande solide pour les plus avancés: tout ce que l'on apprend à son sujet est de la nourriture pour l'âme. Celui qui a le moins de connaissance voit en Christ une plénitude suffisante pour faire de lui son seul aliment; et celui qui le connaît le plus, découvre qu'il peut se nourrir de tout ce qu'il a appris. «La croix de Jésus Christ, le Seigneur, est à la fois de la nourriture et un remède, un bouclier et une épée».

Pendant les six jours de la semaine, il n'était pas permis aux Israélites de recueillir la manne un jour pour la manger un autre jour: ils devaient la cueillir chaque jour, pour la manger chaque jour. «Moïse leur avait dit: Que personne n'en laisse rien de reste jusqu'au matin». L'Eternel leur donnait la manne toute fraîche du ciel chaque jour, c'est pourquoi ils devaient la recueillir avec actions de grâces et s'en nourrir. Le ciel était leur grenier d'abondance, et Dieu était Celui qui leur en dispensait les richesses; c'était leur privilège que de ne pas avoir de grenier à eux, mais de recevoir, jour après jour, leur pain quotidien. Il en est de même de la famille de Dieu dans le désert maintenant. Dieu ne se lasse pas de communiquer de la force chaque jour à ses pauvres faibles enfants, et il les exhorte à ne pas mettre de négligence à recevoir de ses mains ce qu'il est si disposé à donner. Christ est l'aliment quotidien de chaque croyant; mais il est notre pain, non la connaissance de tête que nous ou d'autres, pouvons avoir de lui, mais comme étant devenu précieux à l'âme, par la puissance de l'Esprit de Dieu, entretenant les communications entre nous et le ciel. C'est là qu'est notre trésor, — c'est de là que vient notre force, notre consolation, notre bénédiction, jour après jour.

Mais hélas! des enfants orgueilleux et rebelles imaginent qu'ils sont capables de prendre soin d'eux-mêmes, et d'être les sûrs gardiens de leur propre bonheur; et c'est ainsi que les Israélites n'obéirent pas à Moïse et que quelques-uns d'entre eux réservèrent de la manne jusqu'au matin; et il s'y engendra des vers et elle puait. De même pour nous maintenant, si nous nous figurons qu'une connaissance ou une expérience quelconque de Christ doive faire cesser le sentiment de dépendance journalière du Seigneur pour le renouvellement de notre force en lui, nous découvrirons avec chagrin que la confiance enfle et engendre l'orgueil et la vanité, les vers odieux qui rongent la vie même de notre âme. Christ, le Seigneur venu du ciel, est notre pain quotidien par une communion journalière avec lui par l'Esprit; là il n'y aura pas de vers, mais il sera un véritable aliment.

La récolte journalière de la manne ne durait que six jours; quand le sabbat du repos était là, ceux qui avaient recueilli la manne le jour précédent pouvaient se nourrir en paix de la provision déjà faite. Il en est de même pour nous: maintenant est le temps du travail et non du repos; mais il reste un repos (ou un sabbatisme) pour le peuple de Dieu (Hébreux 4: 9), et alors les croyants, après que tout leur labeur sera terminé, jouiront de Christ dans un repos éternel, comme ceux dont il est parlé, Apocalypse 7: 16. «Ils n'auront plus faim et ils n'auront plus soif — parce que l'Agneau qui est au milieu du trône, les paîtra».

Mais l'exemple d'Israël doit nous servir de sérieux avertissement. «Et au septième jour quelques-uns du peuple sortirent pour recueillir de la manne, mais ils n'en trouvèrent point». Les vierges folles également, après avoir attendu pour prendre de l'huile jusqu'à ce qu'il fut trop tard, n'en trouvèrent plus. «Or comme elles s'en allèrent pour en acheter, l'époux vint; et celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui aux noces, et la porte fut fermée». Si vous n'avez pas trouvé Christ, gardez-vous de tranquilliser vos consciences en pensant qu'un moment convenable pourra venir. «Cherchez l'Eternel pendant qu'il se trouve; invoquez-le tandis qu'il est près» (Esaïe 55: 6). «Aujourd'hui si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos coeurs» (Hébreux 3: 7).

Le Seigneur nous met en garde aussi contre la convoitise des Israélites (1 Corinthiens 10: 6). «Qui nous fera manger de la chair? Il nous souvient des poissons que nous mangions en Egypte, sans qu'il nous en coûtât rien; des concombres, des melons, des poireaux, des oignons et des aulx. Et maintenant nos âmes sont asséchées; nos yeux ne voient rien que manne» (Nombres 11: 4) Pouvaient-ils avoir une nourriture meilleure que «le pain qui vient du ciel», «le pain des puissants»? Et pourtant ils murmuraient de ce qu'ils n'avaient pas des poireaux et des oignons. Ils voulaient bien la manne, s'ils avaient en même temps les aulx d'Egypte, mais Dieu ne voulait pas qu'ils les mangeassent ensemble. Heureux celui qui sait faire la perte de toutes choses et les estimer comme des ordures afin qu'il gagne Christ. Les Israélites qui préféraient la viande à la manne, l'obtinrent, mais ils trouvèrent en même temps l'affliction et la mort; et ceux qui recherchent le monde et ses biens, trouveront le monde, mais il leur deviendra bientôt amer. C'est pourquoi, mon cher lecteur, prenez garde. L'Esprit de Dieu ne nous fera jamais voir de la beauté dans le monde ou en dehors de Christ; — puissions-nous donc marcher par l'Esprit et nous n'accomplirons pas les convoitises de la chair; il n'y a pas d'autre sécurité que celle-là; car la chair soupirera toujours après le monde, tandis que le Saint Esprit glorifiera Christ, car il prendra du sien et nous l'annoncera (Jean 16: 14, 15).