Christ à Gethsémané et à la croix dans Luc

ME 1871 page 461- Lisez Luc 22: 39-46 et 23: 33-49

 

Notre précieuse part, pendant que nous attendons du ciel le Fils de Dieu, c'est de nous nourrir de lui, comme étant le pain qui est descendu du ciel. Au milieu du travail, des tribulations et des opprobres qui sont la part du peuple de Dieu dans ce monde, où nous sommes appelés à séjourner un peu de temps, Jésus le Fils de Dieu se donne lui-même à nous pour être la nourriture de nos coeurs; et tout ce qu'il était comme homme ici-bas, nous devient très précieux. Il faut que nous le voyions crucifié, pour nous nourrir de lui comme du Sauveur incarné. Dans Luc, le Seigneur Jésus nous est présenté spécialement comme le Fils de l'homme. Le contraste qui existe entre l'évangile de Jean et celui de Matthieu, m'a souvent frappé. Dans Jean, Jésus est le Fils de Dieu, — une personne divine: il n'est pas fait mention de souffrances, ni à Gethsémané, ni sur la croix. C'est la même scène que nous raconte Matthieu; mais quand la troupe vient pour le prendre, le Seigneur leur dit: «C'est moi», et ils tombent par terre, à l'ouïe de ces paroles. Il eût pu s'en aller et les laisser étendus par terre, mais il se livra à eux de son bon et plein gré, et manifesta sa tendre sollicitude et l'amour qu'il porte à ses rachetés, quand il dit: «Si c'est moi que vous cherchez, laissez aller ceux-ci». Il se met lui-même à la brèche, afin que les siens échappent. — L'évangile de Jean ne rappelle pas ces paroles prononcées sur la croix: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?». Jésus remet lui-même son esprit; — il dit: «C'est accompli; et ayant baissé la tête, il remit son esprit».

Matthieu nous présente l'autre aspect de la scène de Gethsémané: «Si c'est possible que cette coupe passe loin de moi», et sur la croix nous présente Jésus disant: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?».

L'évangile de Luc fait ressortir plus qu'aucun autre les souffrances de Christ en Gethsémané, tandis qu'il ne mentionne aucune de ses souffrances sur la croix. Pourquoi cela? Pourquoi voyons-nous le Sauveur sur la croix supérieur aux souffrances? — Nous apprenons ainsi à quel point il était parfaitement homme: «Touchez-moi, et voyez, car un esprit n'a ni chair, ni os, comme vous voyez que j'ai». Il désire que nous nous en souvenions: — il veut que nous nous souvenions, pour la joie de nos âmes, qu'il était parfaitement homme.

Voyez ce que nous lisons (22: 39): «il alla selon sa coutume à la montagne des Oliviers; et quand il se fut éloigné d'eux environ d'un jet de pierre, s'étant mis à genoux, il pria». Dans Luc, nous voyons constamment Jésus en prières, comme homme, — homme parfait, obéissant et dépendant. Au chapitre 4, verset 12, il passe toute la nuit en prières. Au chapitre 9, verset 28, il monte sur une montagne pour prier: et comme il priait, il fut transfiguré. Ici, à Gethsémané, il prie disant: «Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe! etc». J'appelle votre attention sur le fait, que Luc nous offre un plus grand développement des souffrances de Christ, à Gethsémané, qu'aucun autre évangile. «Et étant dans l'angoisse du combat, il priait plus instamment». C'est encore l'homme que nous voyons: «il priait plus instamment». Plus il sentait les profondeurs de cette coupe terrible, plus il priait avec instance. Chez nous, trop souvent, l'angoisse qui remplit notre âme nous détourne de Dieu; mais pour Christ, l'amenait à Dieu et lui faisait épancher son âme, comme homme, devant Dieu, avec d'autant plus d'instance. «Sa sueur devint comme des grumeaux de sang, découlant sur la terre. Et s'étant levé de sa prière, il vint à ses disciples qu'il trouva dormant de tristesse». Les pauvres disciples dormaient de tristesse, tandis qu'il priait plus instamment, dans l'angoisse du combat. L'homme nous est présenté ici sous trois faces: chez les disciples, c'est l'homme dans sa faiblesse, — en Judas, l'homme dans sa haine et sa méchanceté, — et, en Christ, l'homme dans sa perfection!

Quand nous arrivons à la croix, nous ne voyons aucune trace d'angoisse ou de tristesse; — Jésus les avait traversées, en esprit, à Gethsémané, et il est maintenant au-dessus de tout cela. Je ne parle pas ici de son oeuvre expiatoire, car Luc n'en parle pas; il ne rapporte pas ce cri: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?». Il nous montre la perfection de Christ comme homme. «Père, entre tes mains je remettrai mon esprit». C'est le sentiment parfait, profond, sans nuage, d'un homme remettant son esprit, avec une pleine confiance, à son Père. C'est là ce qui, dans Luc, caractérise tout ce que Christ a été sur la croix.

Au chapitre 23, verset 34, on le voit élevé au-dessus de toutes les circonstances au milieu desquelles il se trouvait, à tel point que c'est des autres qu'il est occupé. La première parole qu'il prononce sur la croix, c'est: «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font». L'odieuse malice et la méchanceté de l'homme avaient amené Christ à la croix, mais les pauvres Juifs ne savaient ce qu'ils faisaient. Ce n'est pas le jugement ici; — ce n'est pas simplement une personne divine, souffrant comme un homme tout en restant élevé au-dessus de toute la souffrance; — c'est quelqu'un qui pouvait dire: «Père, pardonne-leur», etc. Ecoutez toutes les insultes dont il fut chargé par les hommes; ils partagent entre eux ses vêtements et jettent le sort sur sa robe; — ils se moquent de lui, disant: «Il a sauvé les autres, qu'il se sauve lui-même!». Les soldats aussi se moquent de lui, et les brigands eux-mêmes l'injurient. — Et que voyons-nous? C'est qu'il est au-dessus de tout cela! Il peut dire au brigand, crucifié à côté de lui: «Aujourd'hui tu seras avec moi en paradis!». Une oeuvre merveilleuse s'opérait dans l'âme du pauvre brigand, alors que se tournant vers lui, il disait: Je meurs, et toi aussi tu meurs; «Seigneur, souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton règne». Jésus pouvait lui répondre: «Aujourd'hui tu seras avec moi en paradis», quoique ce fût pour sa venue dans son royaume que le brigand lui avait demandé de se souvenir de lui. Le brigand croyait au royaume, alors que le Roi était rejeté. Bienheureuse foi! Mais le Seigneur lui montre la place actuelle qu'il va prendre comme homme, et il l'assure qu'il n'attendra pas jusqu'au jour de la manifestation de sa gloire, pour se souvenir de lui; mais que ce jour même, «aujourd'hui», il serait avec lui en paradis. Tendres compassions de l'esprit de l'homme Christ Jésus!

Chapitre 23, verset 44. «Or, il était environ la sixième heure; et il y eut des ténèbres sur tout le pays». Luc passe sous silence la vérité renfermée dans ce cri solennel: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?» rapporté par Matthieu et par Marc. Quand Jésus eut crié à haute voix, il dit ici: «Père, entre tes mains je remettrai mon esprit», montrant comme homme une foi et une confiance parfaites en son Père; mourant, sa foi s'exprime par ces paroles: «Père, entre tes mains je remettrai mon esprit». Si nous avons vu Jésus à la droite de Dieu, nous pouvons dire, comme Etienne: «Seigneur Jésus, reçois mon esprit». Mais, lui, il a pu dire: «Père, dans tes mains je remettrai mon esprit». Cette gloire lui appartient comme homme, que passant par toute l'amertume de la coupe des souffrances, et la buvant jusqu'à la lie, son agonie étant telle qu'il sue des grumeaux de sang, il traverse cependant tout avec Dieu, en sorte que quand il est sur la croix, nous ne trouvons aucune mention de souffrances. Il est au-dessus de tout. — Dans un certain sens, c'est là notre position, si nous pouvions lui être semblables. Si, dans nos petits combats et dans nos petites afflictions, nous sommes avec Dieu, pour les traverser comme Christ, tout sera réglé selon Dieu, et nous serons réellement au-dessus de l'épreuve quand elle survient. Nos épreuves sont petites, sans doute, comparées à celles du Seigneur, néanmoins elles nous éprouvent et nous font souffrir, mais le principe est le même. Il faut que nous marchions sur ses traces. Il n'avait qu'un sentier; et quelles que soient nos peines ou nos épreuves, si nous savons seulement les traverser avec Dieu, encore qu'elles nous mettent en agonie (comme il peut arriver, attendu que, présentées à Dieu, elles deviennent plus poignantes), si nous savons seulement les lui présenter, nous serons élevés par lui au-dessus des circonstances, relativement à l'homme, les ayant traversées parfaitement avec Dieu. Comme nous le voyons au chapitre 2 de l'épître aux Hébreux, Christ fut l'homme parfaitement éprouvé, — mais toujours parfait dans l'épreuve. Tout est parfait en lui, et il nous est bon de le considérer soigneusement et d'étudier ce qu'il était. «Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui». Si nous désirons être semblables à Lui ici-bas, il nous faut le voir comme le pain qui est descendu du ciel. En étudiant ce que Christ est, nous sommes enseignés par l'Esprit de Dieu. Si vous désirez être doués de la grâce et de la débonnaireté qui étaient en Christ, si vous désirez croître dans sa ressemblance, il faut vous nourrir de lui. «Etant trouvé en figure comme un homme, il s'est abaissé lui-même, étant devenu obéissant jusqu'à la mort, la mort même de la croix» (Philippiens 2: 8).

Que le Seigneur nous donne de nous nourrir de Christ et de demeurer continuellement avec lui, afin que, nos coeurs étant remplis de la connaissance de ce qu'il était, nous puissions toujours mieux comprendre la grâce et l'amour de Dieu.