Résumé d'une analyse de l'épître aux Hébreux en rapport avec la sacrificature de Christ

 ME 1873 page 132

 

Avant d'entrer dans le sujet proprement dit qui doit nous occuper, je désire faire remarquer que l'idée que la position de l'Eglise comme telle, soit tout ce que nous possédons en tant que chrétiens, ou même en soit la partie la plus excellente, est tout à fait fausse et a été la source de toute sorte d'erreurs. Sans doute notre union avec Christ répand sa valeur sur chaque partie de nos bénédictions, et la dernière chose que je serais porté à faire, serait de comparer, là où tout est grâce souveraine; mais notre union avec Christ n'est pas en elle-même une relation avec le Père. Devant le Père nous sommes des fils, individuellement; Christ nous appelle ses frères; il est le Premier-né entre plusieurs frères. Notre union avec Christ, quoique divine, est avec Lui comme Homme, fait Chef (Tête) sur toutes choses (comme nous pouvons voir, Ephésiens 1: 22, 23; 2), et toute notre relation avec Dieu et le Père est développée avant elle dans une épître où les privilèges de l'Eglise sont tout particulièrement exposés et où beaucoup des plus précieuses exhortations pratiques sont fondées sur cette union. Voyez par exemple le verset 1 du chapitre 5. Nous parlons souvent, dans le langage usuel, des choses qui appartiennent à l'Eglise, quand réellement nous voulons parler de ce qui appartient à ceux qui composent l'Eglise; et il n'y a pas grand mal à cela, tant que nous ne faisons pas de ces privilèges exclusivement notre seule bénédiction. Ainsi nous pouvons dire d'une corporation qu'elle est très honnête, quand nous voulons parler des personnes qui la composent. Mais quand une idée nouvellement acquise s'empare de l'âme, on est enclin à en être occupé de façon à exclure d'autres vérités importantes. S'il y a quelqu'un qui ait été pénétré du sentiment de l'importance de la doctrine de l'Eglise, je pense que je puis dire que c'est moi; toutefois la conscience est une chose individuelle, la justification est individuelle, l'adoption est individuelle, la communion, dans sa partie la plus importante et certainement la plus nécessaire, est individuelle. Prenez tous les écrits de l'apôtre Jean, à part une seule allusion à une assemblée locale, et dites-moi s'il y a une Eglise? Je ne perds jamais la conscience que je suis un membre de Christ ou du moins je ne devrais jamais la perdre, et comme j'ai dit, quand j'ai cette conscience, elle répand sa lumière sur tout: j'ajoute l'idée d'unité dans le corps à celle d'union dans la famille; je suis un avec tous ceux qui sont mes frères. Mais, certainement, il y a des trésors d'inexprimable bénédiction dans les écrits de Jean, dans lesquels cependant on ne rencontre jamais ni la pensée ni le nom de l'Eglise. Tout, dans l'évangile de Jean et dans ses épîtres, est individuel. Ceux qui jouissent des choses qui y sont présentées appartiennent à l'Eglise, et ne se placent pas mentalement hors de l'Eglise en en jouissant, néanmoins tout n'en est pas moins individuel.

En y regardant de plus près, on trouvera que le principe dont je parle ici, est d'une application très étendue. Ainsi l'épître aux Ephésiens ne parle pas de justification; son sujet est la nouvelle création selon les conseils de Dieu; le pécheur a besoin d'être justifié, non pas la nouvelle création de Dieu. Cependant chaque parole de l'épître confirme admirablement la doctrine de l'épître aux Romains comme de celle aux Galates, mais le sujet est traité à un point de vue différent. L'épître aux Romains s'occupe de la responsabilité de l'homme, l'épître aux Ephésiens des conseils de Dieu. Elles se rencontrent toutes deux en Christ et dans la croix, et rien ne peut être plus profondément instructif pour le coeur et pour l'âme; — ces épîtres sont distinctes l'une de l'autre cependant.

Je n'ai pas besoin de le dire, nous ne sommes jamais hors de la position de ceux qui appartiennent à l'Eglise; mais la position de l'Eglise comme telle est autre chose, c'est l'unité du corps qui est assis dans les lieux célestes en son Chef, inséparable de Lui, et ainsi parfait. Or cette position appartient à tous les vrais chrétiens; mais ils ne sont pas toujours envisagés dans cette position. S'il en était ainsi, je l'ai déjà dit, toute relation individuelle avec le Père cesserait, Christ ne nous appellerait plus ses frères, il ne pourrait pas être le Premier-né entre plusieurs frères, et il aurait cessé d'être le bon Berger; et d'un autre côté, la responsabilité individuelle aurait cessé, nous ne crierions plus «Abba, Père». Aucune de ces choses n'a à faire avec le corps, quoiqu'elles appartiennent à ceux qui sont dans le corps.

L'épître aux Romains, sauf, en passant, quelques lignes du chapitre 12, ne s'applique pas à l'Eglise envisagée comme corps; elle traite de la responsabilité individuelle, de la mort individuelle au péché, de position et de privilèges individuels. L'épître aux Colossiens, quoique faisant allusion une fois à la doctrine ne nous place pas non plus sur le terrain des privilèges de l'Eglise: elle nous présente les saints comme morts et ressuscités, non pas toutefois assis dans les lieux célestes, mais appelés à regarder vers les choses qui sont en haut. Dans l'épître aux Philippiens, il ne s'agit pas davantage de l'Eglise comme corps; l'épître n'en fait mention nulle part, bien que tout y soit expérience chrétienne, l'expérience d'un homme ici-bas, mais qui, s'accomplissant ainsi sur la terre, est de l'ordre pratique le plus élevé. Le péché n'y est pas mentionné; l'apôtre ne savait que choisir, de vivre ou de mourir; il décide lui-même de son sort (quand ainsi le moi n'a aucune place) par ce qui est utile pour l'Eglise; il ne fait jamais qu'une chose; il n'a qu'un objet, et comme Christ a toujours été glorifié par lui, il a confiance qu'il en sera de même toujours; mais, de la position de l'Eglise, il n'en est jamais question. S'il s'agit de ma position comme membre de Christ, je suis toujours parfait; dès qu'il s'agit de moi, individuellement, ma responsabilité entre en question et je suis sujet à broncher.

J'insiste encore sur ce point — un homme qui a sa place dans l'Eglise, peut être envisagé dans les exercices de son âme, sur un autre terrain, quoique non pas sur un terrain incompatible avec le premier. Si nous savons ce que c'est que d'être en Christ et unis à Christ, nous savons tous qu'il y a un autre terrain sur lequel nous nous trouvons. En Christ et uni à Christ je suis toujours parfait; — mais aussi de fait, ici-bas, je suis une créature faible, la chair convoitant contre l'Esprit et l'Esprit contre la chair. J'ai la vie éternelle, car j'ai Christ; (*) toutefois l'apôtre parle aussi d'avoir «pour fin la vie éternelle» , et il m'appelle à «saisir la vie éternelle» (**). Je suis sanctifié; toutefois j'attends d'être sanctifié, corps, âme, et esprit, et je poursuis la sainteté; Dieu me discipline pour me rendre participant de sa sainteté. Je suis sauvé et appelé d'un appel céleste; toutefois les choses par lesquelles je passe me tournent à salut, et j'opère mon salut, ou je devrais l'opérer, avec crainte et tremblement, tout en sachant que Dieu opère en moi pour le salut.

(*) Jean 3: 36; 5: 24; 1 Jean 5: 11-13, etc. (**) Romains 6: 22; 1 Timothée 6: 12.

Il est très important de bien comprendre aussi, que notre vocation céleste n'est pas du tout en elle-même notre union avec Christ. Ceux qui ont part à l'appel céleste peuvent être unis à Christ; toutefois l'union avec Christ n'est pas une vocation mais un état, une place et une position acquises. Par l'appel, nous pouvons, dans les conseils de Dieu et par sa puissance, arriver à cette union; mais je crois qu'il y a des hommes qui sont, ou tout au moins qui seront des «saints des hauts lieux» , et qui jamais ne seront unis à Christ. Quoiqu'il en soit, une vocation est ce à quoi nous sommes appelés par la foi, et vocation n'est jamais en soi-même union, quoique ceux qui sont appelés puissent être unis. Nous sommes appelés à quelque chose, et notre esprit et notre marche doivent être dignes de cette vocation. Je puis m'y trouver réellement, en un certain sens, en Christ; mais ce n'est pas là mon appel ou ma vocation. Ma vocation est ce que Dieu a placé devant mon âme comme ce qui doit la former, par l'attachement de mon coeur à ce qui est ainsi mis devant moi comme un don de la grâce, et comme ce à quoi je suis appelé par grâce; et l'Ecriture s'adresse constamment aux âmes à ce point de vue. Je ne voudrais pas, Dieu m'en garde, que qui que ce soit oubliât ou perdit un seul instant la conscience de sa position comme membre de Christ; mais nous connaissons en partie, et nous prophétisons en partie; nous avons à apprendre différentes portions de la vérité, et à les apprendre séparément; nous avons à apprendre à nous connaître nous-mêmes, et notre dépendance: ce que la chair est; ce qu'est le Seigneur. Or, je désire apprendre ces choses, comme étant uni à Lui, c'est-à-dire, quand je suis dans la grâce, ne perdant jamais de vue, mon union avec Lui. Mais l'Ecriture m'enseigne ces choses, et beaucoup d'autres, sans jamais mettre en question la plénitude de la grâce dans l'union, sans jamais être inconséquente avec elle, sans jamais m'ôter de ce terrain; je suis même persuadé que c'est sur ce terrain seulement, lorsque j'ai la conscience que je m'y trouve, que d'autres vérités peuvent être bien apprises. Mais, je le répète, l'Ecriture a d'autres vérités à m'enseigner: elle me parle de la personne bénie de Christ, de ce que Christ a été sur la terre quand je n'étais pas uni à Lui; elle m'enseigne ces vérités séparément, parce que ce n'est que de cette façon qu'une faible créature peut les apprendre; et je bénis Dieu pour sa patiente grâce, qui enseigne ainsi des êtres tels que nous. La question n'est donc pas du tout si je perds la conscience de l'union, mais si je perds la conscience de tout ce que Christ est pour moi à tous égards, alors que je lui suis uni, comme je l'ai dit plus haut. Je suis justifié individuellement de mes péchés, et il faut que ce soit individuellement. Quand je vois le prix de cette grâce, est-ce que j'abandonne le sentiment de mon union avec Christ? A Dieu ne plaise! Mais la justification de mes péchés n'est pas l'union; elle est une part de la bénédiction qui m'appartient, à moi, qui par grâce suis uni à Christ; elle est une part nécessaire de ma bénédiction, mais elle est réservée également (si ce n'est dans la même plénitude que la lumière de l'union répand sur toutes choses) pour ceux qui ne sont pas unis. D'autres que nous diront: «Jéhovah notre justice», mais la question concerne ma conscience, et la conscience est toujours individuelle, et doit l'être. La responsabilité envers Dieu est une chose distincte des conseils de Dieu, quoique lorsque nous sommes unis, nous ayons une nouvelle responsabilité selon notre nouvelle position. Les droits et la gloire de Christ comme Seigneur, comme Fils de l'homme, ne sont pas l'union: pour les apprendre, je ne sors pas de l'union, ni de la conscience de l'union; mais les vérités que j'ai, je les apprends, comme vérités, à part de l'union, comme les ayant devant mon esprit. Nous apprenons tout «en partie»; l'Ecriture m'apprend une vérité dans une épître, une autre vérité dans une autre épître. Dans l'épître aux Philippiens, comme je l'ai dit plus haut, le saint court vers un but; il est ici-bas, non pas assis dans les lieux célestes; il est envisagé différemment. Dans l'épître aux Colossiens, il est ressuscité, toutefois non pas assis dans les lieux célestes, mais ayant là son espérance. Ni l'une ni l'autre de ces épîtres ne font sortir le saint de l'union ou de la foi en elle, ou de la conscience de l'union; mais elles lui enseignent d'autres vérités, et ces vérités ne l'envisagent pas dans son union avec Christ.

Un autre point important, sur lequel l'attention du lecteur, c'est notre position personnelle devant Dieu et le Père, en rapport avec l'oeuvre de Christ. On a avancé que la présence de Christ dans le ciel nous garantissait, et que le Saint Esprit agissait en nous, mais que Christ n'avait rien du tout à faire pour nous: il n'y aurait de sa part ni soins, ni exercice d'amour, ni service d'Avocat. La présence de Christ dans le ciel serait ce qui nous garantit; mais Christ ne ferait rien là-haut, et le Saint Esprit ferait tout ici-bas, — de sorte que Christ ne fait rien, quelque part que ce soit! C'est une assertion bien grave. Ce serait la négation de toute intercession dans le sens ordinaire du mot, la négation de l'intercession de Christ chaque fois que nous avons péché. Il suffit de rappeler ce que nous lisons au second chapitre de la première épître de Jean pour montrer combien tout cela est faux. «Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez pas; et si quelqu'un a péché nous avons un Avocat auprès du Père, Jésus Christ le juste; et Lui est la propitiation pour nos péchés». La justice est là dans la personne de Christ; la propitiation est accomplie dans toute sa perfection; toutes deux sont supposées complètes et parfaites; et alors, si quelqu'un pèche, c'est-à-dire chaque fois qu'il pèche, nous avons un Avocat (Paraclet) auprès du Père. L'intercession de Christ est mise en activité quand il y a chute: «Si quelqu'un a péché, nous avons…». La présence du Juste est permanente, la propitiation une oeuvre achevée. S'il faut quelque chose de plus, c'est à Christ et à son oeuvre, non pas à l'oeuvre de l'Esprit que l'Ecriture nous renvoie quand un homme a péché; elle ne porte pas nos regards vers quelque oeuvre nouvelle, mais vers quelque chose qui est valable et efficace pour nous quand nous avons péché. A Dieu ne plaise que l'on pût supposer que je ne reconnais pas l'oeuvre du Saint Esprit, agissant à notre égard, et en nous, en grâce; ramenant notre âme, et y faisant naître de bonnes pensées. Je crois que tout ce qui est bon en nous est produit par le Saint Esprit; mais ce que je veux dire, c'est que le passage de l'épître de Jean que j'ai cité, nous renvoie (quand un homme a péché, c'est-à-dire quand il a fait le mal accidentellement), à l'intercession de Christ, comme étant ce qui restaure, et non pas à l'oeuvre du Saint Esprit. Que mon lecteur veuille ne pas perdre de vue le sujet qui occupe Jean; il en verra aussitôt la portée, et saisira la différence qu'il y a entre l'épître de Jean et l'épître aux Hébreux. Le sujet dans l'épître de Jean, c'est la communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ; c'est non pas l'accès auprès de Dieu, mais la communion quand la grâce est connue dans la pleine révélation du Père et du Fils, ces noms de la grâce et de la vie éternelle dans l'épître de Jean. Notre communion est avec le Père et avec le Fils; nous avons des pensées, des joies, des sentiments communs, quelque faibles et infirmes que nous puissions être; et il doit en être ainsi. Le Saint Esprit ne peut pas nous donner des pensées différentes de celles du Père et du Fils. Nous trouvons nos délices en Christ, et nous savons que le Père les y trouve; nous trouvons nos délices dans le Père, le Fils les y trouve également: — Sainte, heureuse, merveilleuse pensée et qui ne pourra que nous tenir dans l'humilité, si elle est réelle en nous! Mais Dieu, dans sa nature, est lumière, et si nous disons que nous avons communion avec Lui et que nous marchions dans les ténèbres, nous mentons, et nous ne pratiquons pas la vérité. Je ne puis pas dire que je n'ai point de péché; je ne puis pas dire que je n'ai pas péché; mais il n'est pas nécessaire que je continue à pécher: je puis marcher par l'Esprit. Supposons toutefois que je ne le fasse pas, — la justice et la propitiation demeurent dans toute leur valeur, sinon le lien avec Dieu serait entièrement rompu, et c'en serait fait de mon acceptation. Tel n'est pas le cas; mais ma communion avec Dieu est perdue, du moins pour le moment. Ce serait un blasphème que de parler de communion avec Dieu, quand j'ai de mauvaises pensées ou que j'ai commis quelque acte mauvais. Qu'y a-t-il à faire en un pareil cas? Christ est dans le ciel, comme Avocat, pour le péché accidentel dans lequel je suis tombé; non pas pour m'acquérir la justice, Il est là, le Juste; non pas pour faire la propitiation, la propitiation pour nos péchés est entière et complète, — non, il est là comme Avocat auprès du Père. Ce n'est donc pas à l'oeuvre du Saint Esprit que l'Ecriture me renvoie, quoique l'Esprit assurément agisse en nous, comme je le reconnais avec actions de grâces. L'intercession répétée dans chaque cas de péché, ne touche en rien à la perfection de l'oeuvre de Christ; elle est fondée sur elle. Elle n'implique pas le souvenir des péchés devant Dieu dans le sens dans lequel il en est parlé ici et dans lequel l'Ecriture en parle. Elle se rapporte à la perte de la communion lorsque quelqu'un s'est laissé aller à pécher, perte qui est bien certaine. Le relèvement et le châtiment supposent l'un et l'autre que Dieu prend garde au péché en nous, quand il y en a. Qu'il ne se souvienne plus des péchés, ne veut pas dire, grâces lui en soient rendues, qu'il pourrait tolérer le péché en nous, mais qu'il ne nous impute pas les péchés et ne les garde pas dans sa pensée contre nous. Il est faux que, comme on a voulu l'avancer, «l'unique sacrificature de Christ soit celle de Melchisédec, et que cette sacrificature soit une sacrificature de bénédiction, non pas d'intercession». Je vois dans l'épître aux Hébreux que Christ a une sacrificature qui ne se transmet pas; c'est pourquoi aussi il peut sauver entièrement ceux qui s'approchent de Dieu par lui, «étant toujours vivant pour intercéder pour eux» , ce qui veut dire que la sacrificature est liée à l'intercession et que celle-ci est l'oeuvre de la sacrificature, telle que Christ la possède maintenant. Ce que l'Ecriture entend par intercession, le lecteur rapprendra en consultant Actes 25: 24; Romains 8: 27-35; 11: 2; Hébreux 7: 25.

La différence qui existe entre l'épître aux Hébreux et celle de Jean, je le répète, n'est pas sans importance. L'épître aux Hébreux parle d'accès auprès de Dieu, de s'approcher de Dieu; l'épître de Jean parle de communion. L'épître aux Hébreux montre qu'étant rendus parfaits à perpétuité, nous avons une pleine liberté pour entrer dans les lieux saints, Jésus paraissant devant la face de Dieu pour nous. Or cela demeure toujours ainsi: nous avons toujours libre accès auprès de Dieu. Quand nous avons péché, c'est à Dieu que nous allons, pour confesser notre péché et nous humilier dans la poussière; mais nous allons là, parce que c'est là qu'est notre place avec Dieu. Là seulement le péché est pleinement jugé. Mais le péché n'est jamais en question, et c'est le sujet de l'épître aux Hébreux: le voile est déchiré, et nous sommes rendus parfaits à perpétuité. C'est pourquoi la sacrificature dans l'épître aux Hébreux s'applique aux infirmités, et pour que nous ayons le secours, la miséricorde dont nous avons besoin pendant que nous sommes en chemin, — ce qui est une grande bénédiction également. Tandis que, quand la communion est interrompue, alors le péché entre en question, et Christ est introduit comme Avocat; et c'est là ce qui fait le sujet de l'épître de Jean (*).

(*) On a dit aussi que Christ se présentait dans le ciel devant la face de Dieu, comme le Chef et le Représentant. des rachetés, — que c'était sa présence qui intercédait pour nous et qui nous profitait. Quelle présence? — celle du Chef, ou celle du Représentant? Les deux idées sont entièrement distinctes l'une de l'autre. S'il s'agit de Christ comme Chef (Tête), nous sommes un avec Lui, membres de son corps, de sa chaire, de ses os, nous sommes une partie de lui-même; — il n'est pas question de représentation, nous sommes une partie de Lui-même. Lorsque Christ nous représente, il est là à notre place, pour nous. Ainsi dans l'épître aux Hébreux, Christ parait devant la face de Dieu pour nous, car l'épître ne s'occupe pas de l'union et ne voit, pas Christ comme Chef ou Tête. — Nous sommes unis par un seul Esprit à Christ dans le ciel; c'est là le conseil éternel de Dieu. D'un autre côté, Christ me représente comme créature responsable ici-bas sur la terre, d'abord, pour la justice éternelle assurée en lui, en sorte que rien ne me soit imputé, et que j'aie une place devant Dieu selon le titre de Christ en justice; et secondement, pour me garantir le secours, et m'assurer d'une sympathie vivante dans ma responsabilité, et pour la communion; et si j'ai pêché, pour que j'aie un Avocat auprès du Père pour restaurer mon âme, le bon Berger qui connaît ses brebis et que ses brebis connaissent.

Mais je reviens un moment au Saint Esprit et à son oeuvre. J'ai dit, et je le répète, à cause de son importance, qu'il n'y a rien en nous de bon, sinon par l'oeuvre du Saint Esprit. La présence du Saint Esprit distingue caractéristiquement le christianisme, et est la grande vérité remise en lumière de nos jours parmi les «Frères». Les conseils de Dieu, du Père, sont la source de nos bénédictions et de notre état; l'oeuvre de Christ en est le sûr fondement; la venue du Seigneur, la bienheureuse et glorieuse espérance; mais la réalisation présente est tout entière par le Saint Esprit. Ainsi, lorsqu'il s'agit de restauration pour la communion, les bonnes pensées, je n'en doute pas, sont produites par le Saint Esprit.

Mais quelques-uns, à ce propos, sont tombés a l'égard de la sacrificature dans une erreur très grave. Ils ont voulu ôter à Christ, comme sacrificateur, tout le service relatif à notre faiblesse, et les soins qui s'y rattachent, ainsi que tout ce qui concerne la restauration de nos âmes, — disant que Christ dans le ciel assure notre position par son oeuvre et par le fait de sa présence là, et qu'ayant obtenu le Saint Esprit pour nous, ce serait celui-ci, qui opérerait cette restauration en nous…

Or l'oeuvre achevée de Christ, et le fait que nous sommes rendus parfaits devant Dieu, par une seule offrande, nous ont rendus parfaits quant à la conscience; et, je l'ajoute ici, le fait que nous sommes morts avec Christ, nous a affranchis. Nous sommes donc dans une position nouvelle, en Lui, en conséquence de sa propre position. Il a plu à Dieu, non seulement de nous rendre parfaits en Christ devant Lui-même, mais de nous laisser sur la terre afin de manifester la vie de Christ, afin d'avoir les sens exercés pour discerner le bien et le mal, afin d'apprendre et aussi de désapprendre: il nous a placés par la rédemption dans une vie d'exercices dans le désert et dans la lutte en Canaan. Nous avons besoin de constant secours, non pas simplement de la connaissance de notre position par le Saint Esprit, mais d'une puissance qui s'accomplit dans l'infirmité; nous avons besoin d'être restaurés dans nos âmes quand nous avons bronché, et peut-être avons-nous aussi besoin de messagers de Satan, d'échardes dans la chair pour nous souffleter. Cela n'est pas le Saint Esprit. — A qui Paul est-il allé pour être délivré de l'écharde? Qui est-ce qui lui répondit? A qui appartenait la puissance qui s'accomplissait dans son infirmité? Notre perfection en Christ est précisément le fondement et le point de départ d'une vie d'exercices ici-bas, d'une vie qui, lorsque cette perfection est connue, ne doit jamais soulever le moindre doute, ou la moindre question quant à cette perfection, mais dans laquelle, — parce que nous sommes parfaits, — nous sommes libres pour apprendre le bien et le mal, — ce que Dieu est, la plénitude de Christ, et Lui être rendus conformes par sa parole. Le Seigneur se tient près de nous et nous fortifie. La grâce de Christ nous suffit; elle est avec nous; Lui-même est avec nous, et il ne nous laisse pas sans consolation. Tout ceci et bien davantage encore, c'est Christ qui le fait. Paul avait obtenu miséricorde de la part du Seigneur afin d'être trouvé fidèle; et il n'est pas nécessaire, je pense, de citer les passages dans lesquels la grâce est attribuée à Christ ou recherchée auprès de Lui pour d'autres. Y a-t-il un seul passage qui parle du Saint Esprit sous cet aspect? N'est-ce pas le Seigneur Jésus Christ qui console nos coeurs, et nous affermit en toute bonne parole et en toute bonne oeuvre? Et n'est-ce pas une pensée affreuse que, sous prétexte que nous sommes parfaits et dans ce qui est notre place parce que nous sommes parfaits, nous serions privés de cette vivante et active sollicitude de Christ pour nous? Mais je vais plus loin, et je demande s'il y a un seul passage dans lequel (*) l'oeuvre de restauration soit attribuée au Saint Esprit, ou dans lequel l'œuvre du Saint Esprit soit mentionnée, quand il s'agit de restauration. Il est possible qu'il y en ait, mais je ne puis me souvenir d'un seul. La joie, l'amour, la paix, la puissance, la liberté, l'amour de Dieu répandu dans le coeur, les arrhes de l'héritage, la transformation en l'image de Christ de gloire en gloire, l'intercession selon Dieu dans le sentiment du mal qui nous entoure; toutes ces choses sont attribuées à l'Esprit. Il rend témoignage avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu; il produit la communion; mais je ne me souviens d'aucun passage relatif à notre restauration, dans lequel l'Esprit soit mentionné. Et la raison en est toute simple: l'Esprit est la puissance de Dieu en nous, et la puissance pour le bien. Mais la sympathie et la sollicitude, bien que divines, sont attribuées à Celui qui a été tenté en toutes choses comme nous le sommes, qui peut sympathiser à nos infirmités, qui en même temps que son amour est divin, est un homme «n'ayant pas honte de nous appeler frères». C'est pourquoi tout cela est la part de Christ. Christ a lavé les pieds de ses disciples; et ce n'était pas à ce qu'il faisait alors qu'il faisait allusion. Quand il parle de ce qu'il est Seigneur et Maître, il nous place devant l'humilité de l'amour et du service envers les autres, dans laquelle nous avons à l'imiter; — et ce n'était que plus tard que les disciples devaient connaître la signification de ce qu'il sait. Ils étaient lavés, et n'avaient besoin que d'avoir les pieds lavés, leurs pieds qui pouvaient se salir dans le chemin. L'Epître aux Hébreux ne fait jamais mention de l'opération de l'Esprit, mais de sympathie, de grâce, de secours, quand elle parle de la sacrificature de Christ, de sa sacrificature à la droite de Dieu, car c'est expressément là qu'il est sacrificateur, et seulement là, selon l'épître aux Hébreux qui nous instruit soigneusement sur ce point qui est le sujet principal de l'épître. Dans la première épître de Jean, chapitres 1 et 2, quand il est question de la purification par le sang, il n'est rien dit de nos chutes: nous pouvons être dans la lumière et y marcher, et cependant, hélas, ne pas marcher selon cette lumière; et la différence est importante à sa place; mais le passage ne dit rien du tout de cela. Ce qu'il dit est ceci. «Si nous marchons dans la lumière comme lui-même est dans la lumière… le sang de Jésus Christ son Fils nous purifie de tout péché». Quand il est question de chutes, — de quelqu'un qui a péché (1 Jean 2: 1, 2), — il n'est pas du tout question de l'Esprit, mais de Christ comme Avocat…

(*) Je ne veux pas citer ici Actes 9. On pourrait dire que c'est un fait miraculeux; mais qu'on lise le passage tout entier, et qu'on dise si Christ n'a rien à faire. Il se peut que nous ayons beaucoup perdu de cette heureuse familiarité, mais l'amour qui la produit est-il perdu?

D'un autre côté il faut nous garder de vouloir séparer, comme on l'a fait aussi, l'oeuvre de Christ et l'Esprit, ce qui serait tout à fait anti-scripturaire. «Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, celui-là n'est pas de lui», et «si Christ est en vous…, l'Esprit est vie»; mais alors, Christ aussi est notre vie. L'oeuvre de Christ et celle de l'Esprit peuvent assurément être envisagées séparément; mais nous avons vu combien l'Ecriture parle de l'oeuvre de Christ et du Seigneur par sa grâce. On ne peut pas dire que ce soit nécessairement «ou bien Christ, ou son Esprit» , car même quand il était sur la terre, Christ pouvait dire: «le Père qui demeure en moi, c'est Lui qui fait les oeuvres»; et cependant Lui travaillait et faisait des oeuvres, et en même temps aussi il chassa les démons par l'Esprit.

Ces remarques préliminaires étant faites, abordons maintenant l'examen de l'épître aux Hébreux elle-même.

L'épître aux Hébreux est adressée à des chrétiens juifs, chrétiens jaloux de la loi, fréquentant le temple, et offrant des sacrifices, et elle est adaptée à leur position particulière; mais elle est profitable pour tous les chrétiens, dans les doctrines par lesquelles elle agit sur ces chrétiens juifs, quoique non pas quant aux circonstances dans lesquelles elle trouvait ceux-ci, car nous ne sommes pas dans ces mêmes circonstances, bien que nos circonstances puissent être analogues quand l'Eglise professante a judaïsé. L'épître, je le répète, est adressée à des chrétiens, à des Juifs chrétiens, qui avaient par conséquent à quitter le système dans lequel ils avaient marché jusque ; elle est adressée à des chrétiens, comme chrétiens, quoiqu'elle ne parle pas des privilèges de l'Eglise comme tels et l'écrivain se place au milieu d'eux, comme l'un d'eux. Ils avaient reçu les enseignements des apôtres, et ils étaient en danger de s'en écarter et de les abandonner; toutefois ils les avaient entendus et reçus.

Au premier chapitre, à côté de la divinité de Jésus, l'apôtre insiste sur le fait spécifiquement caractéristique de toute l'épître: il montre Jésus «assis à la droite de la Majesté dans les hauts lieux», non pas après la destruction de ses ennemis dans une sacrificature de bénédiction sur son propre trône, mais assis à la droite de la Majesté dans les hauts lieux, après qu'il «a fait par Lui-même la purification de nos péchés». C'est cette position de Christ qui forme la base de toute l'épître, — la position actuelle de Christ, qui n'est pas sa position de Melchisédec, mais un Christ céleste assis à la droite de Dieu, dans les hauts lieux. C'est pourquoi aussi, lorsque l'auteur a exposé toute sa doctrine sur ce sujet, il en résume la substance au chapitre 8, disant: «Or la somme de ce que nous avons dit, c'est que nous avons un tel souverain sacrificateur, qui s'est assis à la droite du trône de la Majesté dans les cieux».

Au chapitre 2, où la position de Christ est envisagée au point de vue de son humanité, nous voyons que toutes choses ne sont pas assujetties sous ses pieds; mais Lui est assis à la droite de Dieu jusqu'à ce qu'elles le soient; et, dit l'écrivain, parlant pour lui-même et pour ceux auxquels il écrit: «Nous voyons Jésus… couronné de gloire et d'honneur». Il a souffert, étant tenté ici-bas, afin qu'il fût à même «de secourir ceux qui sont tentés». Ni la position qu'il occupe, ni son service, on le voit, n'ont aucune application possible à une sacrificature de Melchisédec sur la terre: Quand celle-ci sera introduite, la tentation et la lutte n'existeront pas: la sacrificature de Melchisédec, l'écrivain insiste sur ce point, s'exercera après la destruction de tous les ennemis, non pas pendant le temps de la tentation; Satan alors sera lié. La place que Christ occupe, je le répète, le service de Christ, et l'objet de Dieu, — car Dieu voulait amener plusieurs enfants à la gloire, — tout, se rapporte aux saints des temps actuels, non pas comme tel à un résidu juif qui sera béni sur la terre, ou à une sacrificature de Melchisédec, dans son exercice reconnu comme tel.

Le chapitre 3 nous enseigne les mêmes choses, fondées sur la même vérité de la gloire présente céleste de Christ: Christ est Fils sur la maison de Dieu. L'épître le présente dans cette position, et non dans celle de Melchisédec. Il est, remarquez-le ici, l'Apôtre et le Souverain Sacrificateur de notre profession, comparé à Moïse et à Aaron, c'est-à-dire selon la doctrine des chapitres 1 et 2. Nous sommes sa maison, nous avons à tenir ferme notre profession, le commencement de notre confiance et la gloire de l'espérance jusqu'au bout. En un mot, l'épître jusqu'ici nous a présenté Christ, non comme sacrificateur à la façon de Melchisédec, mais comme assis à la droite de Dieu, le souverain Sacrificateur de notre profession; et ceux à qui elle s'adresse sont participants «à l'appel céleste» et ont à retenir ferme le commencement de leur assurance. «Et nous sommes sa maison», dit l'écrivain, si nous retenons ainsi ferme jusqu'au bout la confiance et la gloire de l'espérance; «nous sommes les compagnons du Christ», c'est-à-dire nous serons associés à Lui dans la gloire.

 Au chapitre 4 nous lisons: «Car nous qui avons cru, nous entrons dans le repos»; et plus loin — «Ayant donc un grand souverain Sacrificateur qui a traversé les cieux, Jésus, le Fils de Dieu, tenons ferme notre confession». Cette sacrificature est une sacrificature actuelle «que nous avons» , et elle n'a rien à faire avec une sacrificature de Melchisédec; elle est une sacrificature pour le temps du besoin, le service d'un sacrificateur qui peut être touché par le sentiment de nos infirmités, ayant été tenté en toutes choses, comme nous, à part le péché, en sorte que nous pouvons nous approcher avec confiance du trône de la grâce pour avoir du secours au moment opportun. C'est là la sacrificature qui est présentée dans l'épître, et non une sacrificature de Melchisédec, après que les ennemis ont été détruits, mais ce qui nous donne liberté, à nous, de nous approcher avec confiance d'un trône de grâce, pour y trouver la miséricorde et le secours dont nous avons besoin.

Au chapitre 5, le «car» du premier verset, montre que la sacrificature d'Aaron était fondée précisément sur ce principe. Le passage ne parle pas de la sacrificature de Christ elle-même, comme le démontre clairement le verset 5; mais il présente la sacrificature d'Aaron comme un exemple des pensées de Dieu dans la sacrificature, — non pas, évidemment, la sacrificature de Melchisédec. Cette sacrificature Aaronique était différente de celle de Christ, en ce qu'elle avait de l'indulgence pendant et parce que les sacrificateurs étaient eux-mêmes enveloppés de la même infirmité que ceux qui s'approchaient de Dieu, tandis que la sacrificature de Christ s'exerce dans le ciel. Sa participation aux souffrances pendant qu'il était ici-bas, l'a rendu propre pour cet office, comme nous le voyons, chapitre 2: 18; 4: 15, 16; et 5: 7; mais ces souffrances s'accomplirent dans les jours de sa chair, avant qu'il devint sacrificateur. Il devint sacrificateur quand il eut été consommé dans le ciel, car «nous avons un grand Souverain Sacrificateur qui a traversé les cieux». Ce point rend le lieu et la nature de la sacrificature de Christ aussi évident que possible. Il a été tenté, et il a souffert ici-bas, comme nous souffrons, afin d'être rendu propre pour la sacrificature, étant touché par le sentiment de nos infirmités; mais il exerce cette sacrificature dans le ciel, et il est le Souverain Sacrificateur de notre confession; il est l'Auteur du salut éternel pour tous ceux qui lui obéissent.

Nous avons vu ainsi, aussi clairement que l'Ecriture pouvait nous la présenter, une sacrificature basée, d'un côté sur l'élévation de Christ à la droite de la Majesté dans les cieux, — et de l'autre sur le fait qu'il a été tenté, et qu'il a souffert, ayant appris l'obéissance ici-bas dans les jours de sa chair, — le sacrificateur de notre confession qui a l'appel céleste, un sacrificateur, comme nous le verrons, qui est entré dans les cieux comme notre précurseur, et qui, ayant souffert, est à même de secourir ceux qui sont tentés; et ce sacrificateur est le sacrificateur selon l'ordre de Melchisédec (voyez chapitre 5: 7-10). Ce passage nous présente ainsi l'oeuvre tout entière de la consommation de Christ comme sacrificateur; après quoi il est salué par Dieu souverain sacrificateur selon l'ordre de Melchisédec.

N'est-il pas bien évident que, quoique quant à la personne, la sacrificature ne soit pas selon l'ordre d'Aaron, mais une sacrificature nouvelle, l'exercice de cette sacrificature n'est pas selon l'analogie de Melchisédec. Sauf pour ce qui concerne la personne, on n'y trouve pas un seul élément de la sacrificature de Melchisédec. Le sacrificateur est dans le ciel, et est à même, par les souffrances qu'il a endurées ici-bas, de secourir un peuple tenté et exercé; en sorte que nous approchons avec confiance du trône de la grâce. J'ajoute que cela a lieu après qu'il a achevé l'oeuvre de la propitiation (chapitre 1: 3 à 2: 17); mais sa sacrificature est entièrement et expressément céleste; et il n'est assis sur aucun trône de Melchisédec, ni sur aucun trône lui appartenant en propre, mais sur le trône de son Père, à la droite du trône de Dieu, — non pas après que ses ennemis ont tous été assujettis, mais pendant qu'il attend qu'ils soient mis pour le marche-pied de ses pieds.

Telle est sa sacrificature, une sacrificature qui n'est pas une sacrificature de Melchisédec quant au lieu où elle s'exerce, ou quant à son exercice lui-même. Je ferai remarquer de plus, que quoique l'application de toute bénédiction quelle qu'elle soit, — toute l'oeuvre de Dieu, tout le bien que Dieu fait depuis le jour de la création, — soit le fruit de l'opération de l'Esprit, cette vérité cependant n'est pas enseignée ici. La personne qui sympathise avec nous, a passé par des expériences, en sorte qu'elle est à même de sympathiser avec nous. Celui dont il est dit, qu'Il est «à même de secourir ceux qui sont tentés», n'est pas le Saint Esprit ici, mais Christ, et Christ comme sacrificateur; et c'est là un point de la plus grande importance, car pour le coeur du chrétien, Christ est un objet d'affection, ce que l'Esprit, bien que ce soit à son opération que nous soyons redevables de toute bénédiction, ne peut pas être.

Au chapitre 6, nous voyons que ceux auxquels l'écrivain s'adresse auraient dû être «des docteurs, vu le temps» , et qu'il ne veut pas retourner aux éléments juifs, mais s'avancer vers la perfection avec eux, c'est-à-dire «vers l'état d'hommes faits» (c'est le même mot qu'au chapitre 5: 14), «car il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, et qui ont goûté du don céleste, et qui sont devenus participants de l'Esprit saint, et qui ont goûté la bonne parole de Dieu et les miracles du siècle à venir, et qui sont tombés, soient renouvelés encore à la repentance, crucifiant pour eux-mêmes le Fils de Dieu». La parole a ici en vue l'abandon de la jouissance des privilèges chrétiens; et le but de toute l'épître, c'est de mettre en garde contre cet abandon et d'en préserver ceux qui y étaient plus particulièrement exposés. La nation avait crucifié Christ; ce crime pouvait lui être pardonné comme un acte d'ignorance; mais ceux-ci, ceux que le passage a en vue, après avoir joui des privilèges chrétiens, crucifiaient pour eux-mêmes le Fils de Dieu, se privant ainsi de tout ce qui pouvait les «renouveler à la repentance». Toutefois, malgré cet avertissement si solennel, l'écrivain espérait de meilleures choses de ceux auxquels il s'adressait, car ils avaient produit des fruits de grâce; il ne pouvait croire qu'ils pussent abandonner leurs privilèges, car des fruits de vie avaient été manifestés; seulement il désirait que chacun d'eux montrât la même diligence, pour la pleine assurance de l'espérance, jusqu'au bout. Cette espérance entrait jusqu'au dedans du voile où Jésus était entré comme précurseur pour eux; ce n'était pas l'assurance du résidu juif, car l'attente du résidu, c'est la délivrance; mais nous, nous espérons d'être avec Jésus dans le ciel. Jésus est entré dans le ciel, et nous devons le suivre là; mais c'est Lui qui est devenu souverain sacrificateur selon l'ordre de Melchisédec.

L'épître développe maintenant au chapitre 7, cette sacrificature de Melchisédec; mais de l'exercice de cette sacrificature, elle ne dit pas un seul mot. Tout se rapporte à la personne du sacrificateur, et à l'abrogation de la loi par l'établissement d'un autre sacrificateur. Il y a de nombreuses allusions à l'histoire, ou à la personne du sacrificateur et à sa dignité personnelle; mais, je le répète, pas un seul mot relativement à son activité comme tel; mais nous avons l'introduction d'une nouvelle espérance, par laquelle nous nous approchons de Dieu. Nous avons un sacrificateur toujours vivant, par lequel nous nous approchons de Dieu, — qui peut sauver entièrement (littéralement: «jusqu'à l'achèvement»), non pas, parce qu'il nous a rendus parfaits par l'offrande de Lui-même, tout infiniment et indiciblement précieux que cela soit, non pas parce qu'il est mort pour nous, quoique sa mort soit le fondement de tout, un motif même pour l'amour du Père pour Lui, — mais parce qu'il est toujours vivant pour intercéder pour nous. Il s'agit de ce en quoi il est actif, comme étant vivant. «Paraître devant la face de Dieu pour nous», est une chose différente et autrement exprimée dans cette épître, voyez chapitre 9: 24. «Toujours vivant pour paraître», n'aurait guère de sens; mais qu'il soit toujours vivant, et qu'ainsi il puisse faire quelque chose qui exige de l'activité, cela est fort simple. La parole dit: qu'il est toujours vivant pour intercéder, et le mot grec qui est rendu ici par intercéder a très réellement ce sens, et suppose bien une activité, non pas le fait de comparaître devant un autre. L'emploi de ce mot dans le chapitre 8 de l'épître aux Romains en est une démonstration très claire et positive: le Saint Esprit en nous ne parait pas devant Dieu pour nous; il est actif en nous; il nous fait soupirer, et Dieu reconnaît ces soupirs, comme son activité en nous; il trouve la pensée de l'Esprit en nous, «car l'Esprit intercède pour les saints». C'est là de l'activité: c'est parler à un autre, à Dieu, dans un soupir; c'est, si j'ose dire ainsi, arriver jusqu'à Dieu Lui-même. Dieu connaît la pensée de l'Esprit, alors même que nous ne savons pas la saisir, et il la reconnaît comme sienne et l'agrée. L'Esprit parle à un autre, et sa pensée arrive jusqu'à la pensée et au coeur de Dieu (*) Christ donc est toujours vivant pour intercéder «pour nous dans le ciel». Je dis «pour nous», non pas en nous envisageant comme assis dans les lieux célestes, mais comme nous approchant de Dieu par Christ; je dis «nous», parce qu'un tel souverain sacrificateur nous convenait, saint, innocent, sans souillure, séparé des pécheurs, et élevé plus haut que les cieux. «Il nous convenait», parce que nous appartenons au ciel, parce que nous entrons en esprit dans le ciel en nous approchant de Dieu. Nous n'avons pas à faire avec un autre sacrificateur assis sur un trône sur la terre, ou assis sur son propre trône, n'importe où, mais avec un sacrificateur qui est maintenant élevé plus haut que les cieux.

(*) ntugcnw, ne signifie jamais autre chose, dans l'Ecriture, qu'une intervention active. Le mot y est employé cinq fois: Actes des Apôtres 25: 24; Romains 8: 27, 34; 11: 2; Hébreux 7: 25. Le lecteur s'assurera facilement si dans ces passages il s'agit d'interventions actives ou non.

Telle est toujours dans cette épître la sacrificature de Christ: une sacrificature actuelle, une sacrificature dans le ciel, une sacrificature à la droite de la Majesté dans les cieux, exercée là, — une sacrificature, non selon l'ordre d'Aaron quant à la personne et à la descendance, mais notre Seigneur, sacrificateur dans le ciel selon la puissance d'une vie impérissable. Il est personnellement semblable à Melchisédec et selon l'ordre de Melchisédec, mais n'est jamais présenté comme exerçant sa sacrificature selon l'analogie de Melchisédec ou dans le lieu où s'accomplit celle de Melchisédec. Toujours, depuis les chapitres 2 et 3, il est comparé et mis en contraste avec Aaron; et c'est afin de soustraire les chrétiens juifs (car c'est à eux spécifiquement que l'épître est adressée) à leurs habitudes juives d'association avec ce qui était sur la terre, en leur présentant une sacrificature présente, exercée au-dessus des cieux; c'est afin de les préserver par la grâce de se détourner des choses célestes vers ce à quoi ils étaient accoutumés; c'est enfin, je puis l'ajouter, afin de les faire sortir du lieu où ils avaient demeuré jusque là, c'est-à-dire du camp, de l'association extérieure avec Israël et avec un système jugé, et cela par un enseignement, basé sur cette vérité que, maintenant comme alors, Il est toujours vivant pour vaquer à son office. C'est l'exercice d'une sacrificature continuelle après qu'il s'est offert Lui-même une fois pour toutes.

Remarquez ici que, quoique le sacrifice ait été constaté (il en est question dans le premier chapitre et dans le second, comme aussi dans celui-ci), nous n'avons pas encore trouvé un seul mot relatif à notre consommation de fait ou dans la conscience. Il n'a été question que de la capacité du sacrificateur à secourir des âmes tentées et exercées ici-bas d'un sacrificateur qui peut être touché par le sentiment de nos infirmités. Il est monté plus haut que les cieux; — mais de consommation par un sacrifice (comparez chapitre 10: 14), de comparution dans la présence de Dieu pour nous (comparez chapitre 9: 24), il n'en a point été fait mention jusqu'ici. Bien que la valeur et la convenance de sa sacrificature pour ceux qui sont éprouvés soient pleinement constatées, il ne s'agit pas jusqu'ici de notre perfection devant Dieu, mais de l'aide et du secours pour les faibles et ceux qui sont éprouvés, et qui ont besoin de secours et de grâce. C'est à ceux-ci que la sacrificature est appliquée, et une sacrificature qui s'exerce à la droite de Dieu, à la droite du trône de la Majesté dans les hauts lieux, et nullement sur un trône de Melchisédec. Cette application de la sacrificature de Christ à nos infirmités et au secours dont nous avons besoin au moment opportun, est d'autant plus remarquable, que l'auteur de l'épître, quand il vient à parler de perfection par l'offrande de Christ et de l'apparition de Christ dans la présence de Dieu pour nous, ne parle nullement de Christ comme sacrificateur et laisse complètement tomber le sujet de sa sacrificature. Sans doute le contraste avec la sacrificature juive est relevé, mais c'est le secours, l'intercession, le fait qu'Il est toujours vivant pour la faire, les choses qui ont rapport aux infirmités, et ces choses seules, qui sont identifiées avec la sacrificature de Christ. Je fais exception pour la propitiation, au chapitre 2, qui est, chacun le sait, un cas exceptionnel dans lequel le souverain sacrificateur représente le peuple, non pas un acte proprement dit de sacrificature, quoique accompli par le souverain sacrificateur le jour de l'expiation; — tandis que, d'autre part, lorsqu'il est question de notre consommation par l'offrande de Lui-même, et de sa comparution dans la présence de Dieu pour nous, le sujet de la sacrificature est entièrement abandonné. Il y a un contraste positif et marqué entre les deux choses. L'offrande que Christ a faite de Lui-même et sa comparution devant la face de Dieu pour nous, ne sont pas la sacrificature, mais il n'en est pas ainsi de l'intercession, d'après l'enseignement de l'épître aux Hébreux.

Au chapitre 8, toute la doctrine de la sacrificature est résumée avant que l'écrivain s'occupe de développer la valeur du sacrifice de Christ et de son apparition devant Dieu pour nous. Nous avons un tel souverain Sacrificateur qui s'est assis à la droite de la Majesté dans les cieux, un ministre du sanctuaire, et d'un sanctuaire purement céleste. Rien de ceci n'appartient à Melchisédec. La sacrificature dont l'épître nous entretient, n'existe que pendant que Christ est dans le ciel. Elle est exercée dans le sanctuaire, — c'est-à-dire dans le ciel même, — dans ce vrai tabernacle, dont le tabernacle que l'homme avait dressé était l'ombre, étant fait selon le modèle des choses célestes; elle est une sacrificature céleste dans un sanctuaire céleste. Cela est si vrai que si Christ était sur la terre il ne serait pas sacrificateur (verset 4). De l'exercice de la sacrificature de Melchisédec sur son trône, il n'y a point de trace, et il n'y est fait aucune allusion. Il y avait des sacrificateurs qui servaient le modèle et l'ombre des choses célestes; mais nous avons à faire avec les choses célestes elles-mêmes; et Christ a obtenu un ministère plus excellent. Quand, et où Christ a-t-il obtenu ce ministère, suivant ce chapitre? Que veut dire: «Or maintenant Christ a obtenu». Avons-nous les choses célestes, un service céleste, et un sacrificateur céleste, comme chose présente, ou une sacrificature de Melchisédec, après que tous les ennemis sont soumis sur la terre? Est-ce que cette ombre et cette forme selon lesquelles le ministère de Christ est exercé, sont le tabernacle construit par Moïse, ou le service de Melchisédec? La réponse est bien simple. L'auteur de l'épître parle ensuite des alliances; — et dans quel but? Uniquement, ici, pour montrer que l'ancienne alliance avait vieilli et était près de disparaître, — afin que les chrétiens juifs ne continuassent pas à y rester attachés. La nouvelle alliance n'est pas faite avec nous. Son fondement est posé dans le sang de Christ, comme l'institution de la cène du Seigneur le montre, et nous en possédons tous les avantages, — et bien plus encore, — et Paul en a été le ministre.

Mais cette allusion au modèle des choses célestes amène l'écrivain inspiré à parler de l'ordre tout entier du sanctuaire, et à développer la valeur de l'oeuvre et du sacrifice de Christ. Ici je désire faire une observation qui n'est pas sans importance, dans l'étude de l'épître aux Hébreux; c'est que la mention du temple est soigneusement omise. Le temple se rattache à la royauté, à l'établissement sur la terre de ce qui pratiquement était le gouvernement et la sacrificature de Melchisédec, le règne du fils de David. L'épître aux Hébreux ne fait mention que du tabernacle. Celui-ci était le modèle des choses célestes; le temple, quelles que puissent être les analogies, n'est jamais donné comme tel, mais bien le tabernacle. Même quand l'auteur parle du système comme ayant encore sa place, il parle du tabernacle et non du temple. C'était le camp que les Hébreux avaient à quitter, et dont ils devaient sortir. L'analogie du service de Christ est distinctement, positivement et formellement, selon la similitude du service Aaronique dans le tabernacle, non pas selon un service de Melchisédec. Le modèle est ce que Moïse a donné; mais la réalité est dans le ciel, uniquement et spécifiquement dans le ciel. C'est une chose présente, spécifiquement présente, Christ étant dans le ciel maintenant, — non pas une chose à venir comme l'est Melchisédec. Christ est entré dans le ciel, il n'en est pas sorti (chapitre 9: 12); le voile est déchiré, le chemin des lieux saints est ouvert, et le sang de Christ purifie la conscience; et l'apôtre parle à ceux à qui l'épître est adressée, qui participent à la vocation céleste et qui peuvent dire: «Il est le souverain Sacrificateur de notre profession». Les choses célestes elles-mêmes sont en question. Christ est entré dans le ciel même, afin de paraître maintenant devant la face de Dieu pour nous; dans ceci, comme nous l'avons vu (quoique ce que Aaron faisait soit introduit comme point de comparaison), nous ne trouvons nulle mention de la sacrificature. Il s'agit d'un autre sujet. Au chapitre 4: 14, l'analogie est exposée d'une manière frappante: «Un grand souverain Sacrificateur qui a traversé les cieux» (non pas qui est entré dans les cieux), comme Aaron traversait le parvis et le lieu saint pour entrer dans le sanctuaire. Or ici au chapitre 9, nous n'avons pas de sacrificateur, mais Christ paraissant devant la face de Dieu pour nous (verset 24). Il a été manifesté une fois, non pour restaurer Israël et le monde, mais pour abolir le péché par son sacrifice (verset 26); il a été offert une fois, non pas ici pour racheter Israël, mais (en contraste avec la mort et le jugement qui sont la portion de l'homme, comme enfant d'Adam) pour porter les péchés, non pas d'Israël, mais de plusieurs (versets 17-20), non pas qu'il ne soit pas mort pour la nation, ou que le résidu ne doive pas être rétabli sur le fondement de ce même sacrifice, je n'ai pas besoin de le dire, mais le passage parle d'autre chose.

Le chapitre 10, encore par comparaison et en contraste avec la loi, aborde le sujet de l'application du sacrifice de Christ; mais il s'agit maintenant de fait et d'efficacité, non de sacrificature.

C'est d'application qu'il est question; «nous sommes sanctifiés» (verset 10). La chose est enseignée comme une vérité connue de celui qui l'enseigne, comme une chose présente. Encore ici la position de Christ est toujours l'opposé de celle de Melchisédec: Christ attend jusqu'à ce que ses ennemis soient mis pour le marchepied de ses pieds (verset 13). Ce n'est pas là un règne et une sacrificature royale après la destruction des ennemis (comparez Genèse 14); c'est une chose uniquement céleste: Christ est assis à la droite de Dieu; ceux qui sont sanctifiés. et dont on a déjà parlé, sont «rendus parfaits à perpétuité»; Christ n'est pas debout, comme les sacrificateurs Aaroniques, qui offraient toujours de nouveau des sacrifices inefficaces, mais il est assis à la droite de Dieu, parce que son sacrifice à Lui est complet, et que ceux qui y ont part sont rendus parfaits à perpétuité, c'est-à-dire non seulement pour l'éternité, mais dans une continuité ininterrompue et incessante, exactement comme Lui est assis là. Il s'agit de ceux qui ont part à l'efficacité du sacrifice, pendant que Christ est assis à la droite de Dieu; et le Saint Esprit en est le témoin pour celui qui écrit l'épître et pour ceux auxquels il écrit, comme possession présente de paix. Et remarquez la conséquence: «ayant donc, frères, une pleine liberté pour entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus» (verset 19). — Oui, nous avons pleine liberté pour entrer aujourd'hui dans le ciel, nous ne sommes pas dans la position des juifs sous le règne de Melchisédec. Et puis nous retrouvons le souverain sacrificateur; — et où cela? Dans les lieux saints dans le ciel, ou dans la maison de Dieu; et, nous l'avons lu, nous sommes sa maison, si nous tenons ferme ce que nous avons.

On remarquera qu'au verset 18 du chapitre 10, la doctrine des chapitres 9 et 10 prend fin, et l'exhortation commence. Le voile étant déchiré, l'accès dans les lieux saints nous étant ouvert, et nos consciences étant purifiées, nous sommes appelés à nous approcher en pleine assurance de foi, et à entrer dans les lieux saints, par le sang de Jésus, ayant un grand Sacrificateur établi sur la maison de Dieu, car telle est la position chrétienne. L'auteur encourage ensuite ceux auxquels il s'adresse à «retenir la confession de notre espérance sans chanceler», et il les exhorte à prendre garde l'un à l'autre pour s'exciter à l'amour et aux bonnes oeuvres et à ne pas abandonner «le rassemblement de nous-mêmes». Ils professaient le christianisme et jouissaient de ses privilèges; s'ils les abandonnaient, ils n'avaient plus à attendre que le jugement. Pour le résidu juif de la fin il y aura une délivrance, parce que le résidu n'a pas possédé ces privilèges et ne les a pas rejetés; mais ce qui caractérisait au contraire ceux à qui l'apôtre s'adresse ici, c'est qu'ils possédaient les privilèges du christianisme. S'ils abandonnaient la foi, ils se retiraient, ils foulaient aux pieds le Fils de Dieu et estimaient pour une chose profane le sang de l'alliance par lequel ils avaient été sanctifiés; ils outrageaient l'Esprit de grâce, et il n'y avait plus de remède. Ils avaient été illuminés; ils avaient reçu la connaissance de la vérité; ils avaient accepté avec joie l'enlèvement de leurs biens, sachant qu'ils avaient dans les cieux des biens meilleurs et permanents; — ils ne devaient pas rejeter leur confiance et être «de ceux qui se retirent», mais ils devaient croire pour la conservation de l'âme (verset 39). C'était de profession, des croyants; et les croyants alors étaient des chrétiens. La profession comme telle les laissait en danger de retourner au judaïsme et donnait lieu à un avertissement sous ce rapport; mais ceux auxquels l'épître est adressée, étaient des chrétiens; et ainsi les chrétiens avaient, et ont par conséquent, un grand sacrificateur établi sur la maison de Dieu, un sacrificateur qui a traversé les cieux, et qui exerce sa sacrificature dans les lieux saints où il est entré, et seulement là, comme l'épître nous le dit, — un sacrificateur qui peut sympathiser à nos infirmités et qui est toujours vivant pour intercéder pour nous, son service de sacrificateur n'ayant rien à faire avec notre consommation par l'offrande de Lui-même, et avec «Son apparition pour nous devant la face de Dieu».

Le reste de l'épître n'exige pas beaucoup d'explication. Je remarque seulement ce passage, au chapitre 11: «Dieu ayant en vue quelque chose de meilleur pour nous, afin qu'ils (les Abraham, etc.) ne parvinssent pas à la perfection sans nous», c'est la gloire de la résurrection qui est la perfection et non la bénédiction sous Melchisédec; et Dieu a en vue pour nous quelque chose de meilleur que la bénédiction céleste d'Abraham.

Toutes les exhortations du commencement du chapitre 12 nous montrent à qui l'écrivain s'adressait. Il parlait à des chrétiens: ils n'étaient pas venus à la montagne de Sion, mais à la pleine bénédiction céleste et terrestre, dans laquelle l'église des premiers-nés et les saints de l'Ancien Testament sont compris (ce n'est qu'ici que l'épître aux Hébreux fait mention de l'Eglise); ils étaient venus à Jésus, à Jésus médiateur de la nouvelle alliance, mais à Lui, à Jésus, — c'est là le point essentiel, — et à un Jésus, non pas qui revient du ciel, mais qui parle du haut du ciel pendant qu'il est là.

Les versets 8 et 9 du chapitre 13 montrent clairement avec qui ces chrétiens étaient en relation. Le Christ qu'ils avaient appris à connaître par ceux dont ils étaient appelés à imiter la foi, ce Christ était le même hier, et aujourd'hui et éternellement. Son immutabilité devait les garder des doctrines étrangères. C'était la grâce qui devait être leur portion, non pas les viandes juives.

L'écrivain inspiré déclare ensuite que, lui et ceux auxquels il était associé, avaient, et avaient alors un autel, un lieu de culte, où la viande de Dieu et la communion avec Lui se trouvaient, autel dont ceux qui retenaient le judaïsme (passé alors et près d'être jugé), n'avaient pas le droit de manger. Le judaïsme comme système est envisagé comme rejeté, comme étant une religion pour la terre, un camp de Dieu maintenant abandonné de Dieu, ici-bas. Le système judaïque était maintenant rejeté. Lorsque le sang était porté dans le sanctuaire, le corps de la victime était porté hors du camp. Le vrai sanctuaire, c'est-à-dire le ciel (comme l'enseigne expressément le chapitre 9, versets 11, 12, 24) est l'un des éléments essentiels de la position dont l'écrivain sacré parle; — l'autre élément, c'est une réjection permanente de toute religion mondaine et par toute religion mondaine appropriée à la chair, — «hors du camp», ou de la sainte cité terrestre. Le résidu de la fin attendra et aura la restauration d'un système terrestre, avec la présence et le trône du Seigneur à Jérusalem. Le système auquel les hommes sont appelés dans cette épître, et dans lequel, s'ils sont chrétiens, ils se trouvent, et qu'ils sont avertis de ne pas abandonner, est exclusivement et positivement le système chrétien et céleste, en contraste avec la bénédiction dont le résidu jouira à la fin; bénédiction qui est basée sur la même oeuvre, mais établie par un trône restauré sur la terre dans une sainte cité sur la terre, et non pas un Sauveur rejeté, et un trône céleste. La foi, la joie, les espérances, les intérêts et les exhortations, l'écrivain et ceux auxquels il écrit, sont tous également chrétiens, bien que ces chrétiens fussent en danger de retomber dans le judaïsme, dont ils sont finalement appelés à se séparer.

Le résultat de cette revue que nous venons de faire de l'épître aux Hébreux, est que notre consommation à perpétuité par l'offrande de Jésus Christ, et l'apparition de Christ devant la face de Dieu pour nous, n'ont rien à faire avec la sacrificature; mais qu'il y a une sacrificature d'intercession, efficace pour nous, parce que le sacrificateur peut sympathiser à nos infirmités, et qu'ayant souffert étant tenté, il est à même de secourir ceux qui sont tentés; que cette sacrificature, dans son caractère et sa nature tout entière, est exercée dans le ciel spécifiquement, et là seulement (ainsi que nous l'apprenons ici, car c'est là ce qui nous convenait); et que la comparaison et le contraste de cette sacrificature, dans son exercice, sont faits entièrement en rapport avec l'ordonnance et le service du tabernacle. Le sacrificateur est selon l'ordre de Melchisédec; mais de l'exercice d'une sacrificature de Melchisédec il n'y a ni mention, ni trace, ni allusion. C'est une sacrificature exercée uniquement dans le ciel, où Christ est entré, comme Aaron dans les lieux saints faits de main.

L'épître s'adresse, formellement et expressément, à des chrétiens, dans toutes ses parties. Si elle s'étend au-delà, en tant que fondement des espérances futures d'Israël, comme le fait certainement ce qui est enseigné dans l'épître, elle n'a aucune application directe à Israël, sauf en ce que la position présente de Christ et son oeuvre accomplie assurent leurs espérances; et comme l'épître ne se place pas sur le terrain proprement dit de l'église, c'est-à-dire de notre position dans les lieux célestes en Christ, elle peut, dans certaines parties, s'étendre accessoirement jusqu'aux espérances et aux bénédictions d'Israël. Toutefois les espérances dont s'occupe l'épître n'appartiennent pas à Israël; — elles sont le ciel et la gloire. De plus l'épître est écrite à des juifs chrétiens, c'est-à-dire à des chrétiens d'entre les juifs, qui demeuraient attachés de fait à leurs propres anciennes pensées, à leurs sentiments, à leur système, et qui étaient exposés, si Dieu ne les gardait, à retourner au judaïsme, qui était près d'être jugé. Ils sont exhortés à sortir du judaïsme et à abandonner leur relation avec lui; ils sont avertis que la foi en Christ qu'ils possédaient, et le judaïsme, ne pouvaient pas demeurer plus longtemps associés comme ils l'avaient été jusque là, plusieurs milliers de juifs, nous le savons, étant zélés pour leur ancienne loi (Actes des Apôtres 21: 20).