Les souffrances de Christ et la colère de Dieu

ME 1874 page 221 - Darby J.N.

 

Des circonstances dans lesquelles je me suis trouvé, il y a peu de temps, m'ont conduit à considérer de nouveau, dans la bonne Parole de Dieu, le témoignage que celle-ci présente au sujet des souffrances de notre glorieux Sauveur, et en particulier de la coupe de douleurs que lui versa la main du Père.

Béni soit son nom, pour la faveur donnée au croyant de pouvoir, dans le sentiment de sa délivrance et dans la jouissance de la paix de Dieu, reporter ses pensées vers ce passé dans lequel son Sauveur portait le fardeau de souffrances qui nous a délivrés du jugement à venir! Sous le poids de ces souffrances, Jésus rencontra l'horreur que Dieu a pour le péché et Son inflexible sainteté! Jamais nous ne les connaîtrons, sauf en Celui dont l'amour accepta de les prendre sur lui pour nous les épargner. Il prit la coupe que le Père lui donnait à boire, bien qu'il eût goûté, déjà par anticipation, ce qu'elle contenait de douleurs pour lui! Troublé dans son âme à la pensée de prendre la coupe qui lui voilait la face de Dieu, il demandait que, s'il était possible, elle passât loin de lui. Mais ce ne fût point possible. Et Jésus prend la coupe, acceptant de la recevoir de la main de son Père. Cette coupe est celle de la colère de Dieu. Le moment était venu où le péché serait aboli par la mort du Juste. Dieu détournerait sa face de Lui. Jésus serait abandonné de Dieu, et tout le flot de la juste réprobation de Dieu contre le péché passerait sur son âme sainte durant ces heures d'abandon.

Le salaire du péché, c'est la mort. Après la mort vient le jugement, — un jugement à l'égard duquel il est dit, quant à ses résultats pour les pécheurs, qu'ils seront dans le lieu des tourments éternels, dans le feu inextinguible, dans la fournaise de feu, les ténèbres de dehors, où seront les pleurs et les grincements de dents. Dans ce jugement, la colère de Dieu aura son cours. Nous sommes avertis que «la colère de Dieu est révélée du ciel contre toute impiété, et toute iniquité des hommes…» (Romains 1: 18); et à ceux qui préfèrent demeurer dans leurs péchés, Dieu dit: «Selon ta dureté et selon ton coeur sans repentance, tu amasses pour toi-même la colère dans le jour de la colère et de la révélation du juste jugement de Dieu» (Romains 2: 5); et encore: «Celui qui désobéit au Fils (qui ne se range pas à la soumission de la foi), la colère de Dieu demeure sur lui» (Jean 3: 36). Ainsi, la colère de Dieu, telle qu'elle paraîtra dans son jugement, est l'effrayante portion de l'homme dans ses péchés. Il faut en excepter ceux qui échappent à ce terrible sort. Le jugement avait le même droit sur eux; ils étaient, par nature, eux aussi, des enfants de colère, comme les autres; mais ils ont été délivrés par Celui qui s'est mis à leur place sous la colère.

Lors même qu'on ne trouve pas en ces propres termes, dans le Nouveau Testament, que notre Sauveur ait enduré la colère divine, Dieu cependant ne nous laisse aucune incertitude à cet égard. Oui, Christ a enduré la colère de Dieu. La colère de Dieu, c'est la coupe du jugement mérité par nos péchés. Si Christ n'a pas bu cette coupe, la colère de Dieu reste encore sur nous; nous sommes perdus. Mais «Il a été navré pour nos forfaits, froissé pour nos iniquités; l'amende qui nous apporte la paix a été sur lui…; l'Eternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous» (Esaïe 53: 5, 6).

Lorsqu'il était parmi les hommes, le Seigneur a souffert de leur part «pour la justice», mais il a aussi, à la fin, souffert une fois «pour les péchés» (1 Pierre 3: 18), et cette souffrance, il l'a éprouvée de la part de Dieu. Il a enduré le jugement de Dieu contre le péché, un jugement qu'il rencontrait inévitablement s'il s'avançait pour nous amener à Dieu, nous qui étions des pécheurs.

Quand nous lisons que Jésus a été fait malédiction pour nous, ayant été pendu au bois (Galates 3), et que nous voyons, Deutéronome 21: 23, qu'il est dit: «Celui qui est pendu est malédiction de Dieu», pouvons-nous éviter de reconnaître à quel degré le châtiment du péché s'est appesanti sur lui? Etre fait malédiction de Dieu, qu'est-ce, si ce n'est pas essuyer sa colère? car les maudits s'en iront au feu éternel. — Et encore, ces paroles de Zacharie 13: 7, que Jésus rappelle quand le moment est venu pour lui d'en connaître l'effrayante réalité: «Epée, réveille-toi sur mon pasteur, et sur l'homme qui est mon compagnon, dit l'Eternel des armées; frappe le pasteur, et les brebis seront dispersées», paroles qui témoignent que c'est l'Eternel lui-même qui a dirigé l'épée de son jugement sur la personne de notre Sauveur.

Et ce cri de Jésus, exhalé sur la croix: «Mon Dieu! mon Dieu! pourquoi m'as-tu abandonné?» — que de choses il nous dit de la douleur de son âme subissant l'anathème de la part de Dieu. Le juste était abandonné! C'est un acte inouï dans les voies de Dieu. «Je n'ai jamais vu le juste abandonné», est-il écrit; mais Jésus a été abandonné. Du sein de sa douleur, Jésus montre la perfection de sa foi envers son Dieu: il reconnaît la gloire de Dieu et sa fidélité envers les justes: Dieu est toujours le Saint, habitant au milieu des louanges d'Israël. Les pères se sont confiés en lui, et n'ont pas été confus; et quand ils ont crié vers lui, ils ont été délivrés. Aucune détresse des justes n'a été ignorée de Dieu, et ses fidèles compassions n'en ont laissé aucune sans réponse; mais ce cri de Jésus: «Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?» est demeuré sans réponse. Assurément, notre Seigneur n'est pas resté sous l'anathème de Dieu. Le moment est venu auquel, le jugement ayant eu son cours durant ces heures de ténèbres, tout changeait pour lui; il a remis son esprit en paix dans les mains de son Père; il est mort, et il a été enseveli, et puis il est sorti vainqueur du sépulcre, — ressuscité par la gloire du Père. Mais à la croix, durant ces heures où il était fait malédiction, le Juste s'est vu abandonné de Dieu. C'est un acte de Dieu unique, sans précédent, qui jamais ne se renouvellera. Du sein de l'obscurité qui enveloppe la croix, ce cri de Jésus nous apprend quelle horrible chose est le péché et quelle est aussi l'inflexible sainteté de Dieu. Il peut y avoir dans une conscience réveillée des angoisses terribles au sujet du péché, et un sens du jugement à venir qui va jusqu'à l'extrême détresse. Nous, chrétiens, nous pouvons avoir connu cette détresse; mais jamais nous ne connaîtrons l'abandon de Dieu: le Christ l'a connu pour nous l'épargner.

Je trouve dans un passage de la seconde épître aux Corinthiens (chapitre 5: 21) une déclaration qui donne d'une manière sommaire, mais peut-être dans sa plus solennelle expression, tout ce que Christ a dû éprouver de la part de Dieu, quand il souffrait pour le péché sur la croix. «Celui qui n'a pas connu le péché», dit l'apôtre, Dieu «l'a fait péché pour nous», non pas: «Il l'a traité comme un pécheur», ainsi qu'on lit dans quelques versions; mais «Il l'a fait péché!» Christ était là à la place du péché! L'amour de Dieu envers les hommes a été manifesté quand le Fils est venu ici-bas: alors, «Dieu était en Christ réconciliant le monde avec Lui-même, ne leur imputant point leurs fautes». Hélas! l'homme n'a rien voulu entendre de ce message d'amour; à part quelques enfants de la sagesse, Jésus n'a trouvé personne pour l'écouter. Il a usé sa force en vain, comme l'exprime Esaïe. Mais l'amour de Dieu avait encore des ressources à découvrir. Il restait le dessein de sa grâce que Dieu a déployé quand tout était perdu, et qu'il ne restait aucun espoir du côté de l'homme. Ce dessein de salut, Dieu seul en a eu la pensée, et sa main seule a pu le mettre à effet. Et dans une même pensée avec le Père, le Fils s'est donné pour l'oeuvre de rédemption sur laquelle devait reposer ce salut. Le Fils s'est donné, et Dieu l'a fait «péché», et l'a frappé des coups que le péché mérite. S'il s'agit du pécheur, Dieu lui montre de la compassion; il use envers lui d'un long support et d'une grande miséricorde; mais de cela il n'est pas question quand il s'agit du péché même. Dieu a les yeux trop purs pour voir le mal. Sa nature abhorre le péché, sa sainteté le repousse, et sa justice le frappe du jugement qu'il mérite: et, c'est devant ce Dieu que notre Sauveur s'est trouvé, étant fait péché. Il s'est vu dans cette extrémité-là. Qui dira la souffrance de son âme? — Aussi, quelle sûreté dans notre délivrance! Le jugement qui devait nous atteindre a épuisé ses droits à la croix; et nous qui sommes en Christ, nous sommes devenus justice de Dieu en lui (2 Corinthiens 5: 21). La mort de Christ nous place dans la paix devant Dieu, sur le pied de la justice. D'autre part, quand on voit ce qu'est le péché devant Dieu, on ne peut éviter de penser à la redoutable condition de ces hommes endurcis à qui Jésus déclarait qu'ils mourraient dans leurs péchés. Si l'homme qui se complaît loin de Dieu, et qui s'avance insouciant au devant de l'éternité, pouvait entrevoir ce que le péché lui prépare, à l'égard de Dieu et de son jugement, il reculerait de terreur.

L'épître aux Hébreux fournit aussi son témoignage au sujet des souffrances de Christ dans sa mort. Au chapitre 9: 26-28, nous lisons que, «en la consommation des siècles», c'est-à-dire au moment auquel l'épreuve de l'homme était faite, et où par sa conduite durant les siècles de la patience de Dieu, l'homme avait montré qu'il restait méchant et sous l'empire du mal, — à ce moment auquel la question du péché mûri dans la conduite de l'homme devait recevoir une solution devant Dieu pour fonder l'oeuvre du salut, le Christ «a été manifesté une fois pour l'abolition du péché par le sacrifice de lui-même». Et remarquons que le péché a placé l'homme dans ce double malheur, qu'il a attiré sur lui la mort et le jugement, — et que le Christ a dû non seulement passer par la mort pour sauver le pécheur, mais qu'il a dû pareillement subir le jugement à sa place. «Il est réservé aux hommes de mourir une fois, et après cela le jugement» (verset 27): et c'est là ce que Christ a dû rencontrer, quand, pour abolir le péché, il s'est offert lui-même. Ce passage mérite toute notre attention. On voit d'après la teneur du chapitre, que le sacrifice de Christ est le vrai sacrifice qui a remplacé ceux qu'on offrait en attendant des jours de redressement. Le souverain sacrificateur entrait dans les lieux saints, chaque année, avec le sang de taureaux et de boucs; mais le Christ, souverain sacrificateur des biens à venir, est entré dans les cieux avec son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. Si le sang de taureaux et de boucs, et la cendre d'une génisse, purifiaient pour la pureté de la chair, combien plus le sang du Christ purifiera-t-il la conscience des oeuvres mortes! Or, qu'apprenons-nous des sacrifices pour le péché? D'une part, le sang des taureaux et des boucs, au grand jour des expiations, était bien porté dans le sanctuaire, et le sang de la génisse était, chaque fois, répandu par aspersion au-devant du tabernacle, mais les corps de ces victimes étaient brûlés hors du camp, loin de la présence de l'Eternel; et, dans le cas du bouc Hazazel, ce bouc, chargé des péchés du peuple, était conduit au désert et abandonné dans une terre inhabitable. Ainsi, ce que nous savons, par des déclarations formelles, de la réprobation de Dieu à l'égard du péché, nous l'apprenons aussi de ces types dont nous venons de parler. Quand le Christ a été manifesté pour l'abolition du péché par son sacrifice, le châtiment du péché est tombé sur lui; et sous le jugement qui a meurtri sa sainte personne, il a connu l'abîme qui sépare le Dieu saint des méchants. Oui, ce que les types nous disent dans leur langage figuré, le prophète nous le confirme: «Il était navré pour nos forfaits, froissé pour nos iniquités; l'amende qui nous apporte la paix a été sur lui… L'Eternel a fait venir sur lui l'iniquité de nous tous» (Esaïe 53: 5, 6).

Après avoir considéré ces divers témoignages touchant les souffrances de notre Sauveur sous le poids de nos péchés, il ne peut y avoir aucune incertitude sur le caractère de ces souffrances: Christ a porté la colère de Dieu, sa juste indignation contre le péché. Le Seigneur aurait-il enduré un jugement moindre que la peine du péché? Alors, il n'y aurait pas de réalité dans l'expiation, car il y a un jugement contre le péché, et ce jugement, c'est la colère de Dieu. Et encore, si Christ n'a pas enduré la colère de Dieu, qu'on veuille nous dire à quel prix il a aboli notre condamnation, dépouillé Satan, et annulé la mort.

Il est des Psaumes qui ont une application évidente au Seigneur Jésus Christ, et plusieurs nous le présentent comme le Messie qui s'est associé à son peuple sur la terre, en prenant place au milieu du résidu fidèle, l'essence de la nation. Evidemment, s'il est entré dans ce résidu pour être compté comme l'un d'eux, il en est cependant le Chef. C'est pourquoi il dit (Esaïe 8: 18): «Me voici, moi et les enfants que l'Eternel m'a donnés». Comme l'un d'eux, il a marché par la foi ici-bas. Il est aussi entré dans toutes leurs circonstances et leurs douleurs. Et quand son jour est venu, il a offert, avec de grands cris et des larmes, des prières et des supplications à Celui qui pouvait le sauver de la mort. Il a été exaucé à cause de sa piété, et après, consommé par sa résurrection, il a été institué de Dieu souverain Sacrificateur selon l'ordre de Melchisédec. Associé à son peuple, et entrant dans la réalité de ses espérances et de ses peines, le Seigneur Jésus a traversé toutes les douleurs que, par suite de ses infidélités, le peuple devra connaître sous le gouvernement de Dieu: et ce jugement, c'est la colère de l'Eternel. Comme le peuple s'y trouvera aux derniers jours, l'Auteur du salut éternel, qui les soutiendra de sa sympathie et de son intercession efficace, y a passé le premier. C'est ainsi que nous lisons: «Ta fureur s'est jetée sur moi, et tu m'as accablé de tous tes flots». «Les ardeurs de ta colère sont passées sur moi» (Psaumes 88: 7, 11). Le résidu connaîtra cette douleur, et sera délivré; mais le moyen et le fondement de sa délivrance, c'est précisément que Christ le premier, par suite de son identification avec les débonnaires de la terre, y a passé pour eux, devant eux, et comme l'un d'eux; et que Lui le Juste, il a connu la colère de l'Eternel.

Remarquons de plus que Jésus sur la terre, avant l'heure de ses souffrances pour le péché, mais rencontrant la contradiction et la méchanceté des hommes et bien d'autres souffrances, n'était point dans ce chemin sans éprouver la protection et les consolations de son Dieu. Une table était servie devant lui, à la vue de ses adversaires; et il pouvait dire à l'Eternel: «Tu as oint ma tête d'huile, et ma coupe est comble» (Psaumes 23: 5). Mais si nous nous transportons à Gethsémané, là où Jésus demandait que, s'il était possible, la coupe passât loin de lui, s'agit-il de cette même coupe comble des consolations divines? Etait-ce cette coupe que Jésus redoutait de prendre? Oh! non. Quand le moment est venu auquel le péché doit prendre fin, il y a dans la main de Dieu une coupe de colère; et c'est cette coupe que Jésus a devant lui, et qui éprouve son âme jusqu'à l'agonie. C'est elle, — non pas la coupe des consolations ou des délivrances, — qui le remplit d'angoisse à Gethsémané, et qu'il reçoit de la main de son Père; c'est la coupe de la colère de Dieu, celle aussi qui sera versée aux méchants à la fin (Psaumes 75: 5; Apocalypse 16: 19) (*).

(*) Si l'expression «la colère de Dieu» n'est pas employée pour les souffrances de Christ, dans le Nouveau Testament, cela tient à une vérité de première importance. La chose y est, mais l'expression a été évitée. La même réserve se remarque quand il est parlé de la malédiction qui est tombée sur Christ. Il «nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous». Nous ne lisons pas qu'il ait été personnellement maudit. Dieu a montré sa haine contre le péché dans le jugement dont il a frappé le Christ à la croix; mais, afin qu'on ne commette pas l'erreur de croire que le Dieu qui hait le péché, ait aussi haï Christ, quand il était fait péché pour nous, la Parole qui nous dit qu'il «est devenu malédiction», évite de dire qu'il «a été maudit»; et pour la même raison elle évite aussi de dire qu'il passait sous «la colère de Dieu» quand il souffrait pour nos péchés.

Dans la personne de Christ, dans sa vie, dans ses souffrances, dans sa mort, Dieu a été pleinement glorifié. Sa gloire a paru quand il a manifesté son amour, en donnant son Fils, afin que nous vivions par lui, — quand il était en Christ réconciliant le monde avec soi, ne leur imputant point leurs péchés. Oui, après les siècles prolongés de sa patience envers des créatures qui préféraient à sa présence leur éloignement de Lui, il est descendu jusqu'à elles avec des paroles de paix et de réconciliation. Et, quand l'épreuve a montré que le mal ne cédait point et que l'homme demeurait retenu dans les liens du péché, l'Agneau qui ôte le péché du monde était là pour porter remède à cet état. Oter le péché du monde! mais c'est premièrement en souffrir la peine, et mourir en glorifiant Dieu; et le Christ a souffert pour les péchés, et a passé par la mort. Par suite, en vertu de la mort de Christ, l'amour de Dieu envers les hommes se répand à nouveau. Dieu peut donner et donne un libre cours à son amour et à sa grâce, en annonçant, par l'Evangile, la bonne nouvelle d'un salut accompli, offert à tous. Si la mort de Christ a ouvert une voie dans laquelle l'immense amour de Dieu prend ses dimensions, elle a aussi posé le fondement sur lequel repose l'accomplissement des conseils de Dieu envers ses élus. Le jour d'éternité manifestera à la gloire de Dieu, ces multitudes de sauvés que la grâce a trouvés dans les liens du péché, mais qu'elle a réconciliés avec Dieu par le sang de Christ. L'Eglise aussi, épouse de Christ, brillera de l'éclat de la gloire de son Dieu. En tout cela se déploie l'amour de Dieu manifesté en Celui qui est mort pour nous. Le péché était là, comme un obstacle à ôter; le péché en présence de Dieu qui juge le péché. Les souffrances de la croix et la mort de Christ ont été la réponse à ce droit de Dieu; et en même temps qu'elles constatent et exaltent l'immense amour de Dieu, elles glorifient aussi tous ses caractères en majesté, en sainteté et en jugement. Si donc, fondés sur les témoignages de la Parole, nous disons que Christ, à la croix, a passé sous le coup de la colère de Dieu, nous ne disons que ce que Dieu nous enseigne expressément, et qui est d'accord avec sa gloire et l'ensemble de ses perfections ineffables; et c'en serait fait de la perfection divine de l'expiation, si le saint jugement de Dieu n'avait pas eu tous ses droits dans la mort de Celui qui a été fait péché pour nous.

Il me reste à examiner un détail et à présenter quelques remarques générales en terminant.

La part de Jésus, ici-bas, a été celle de l'abaissement et de la souffrance. Il était parmi les hommes comme une racine sortant d'une terre altérée, l'homme de douleur, sachant ce que c'est que la langueur. Ainsi se présentait le serviteur de l'amour du Père. Mais levons le voile, et nous verrons en lui Celui qui fut parfaitement agréable à Dieu.

Sous ton voile d'ignominie,

O Jésus, je vois ta beauté.

Les anges ont célébré son entrée dans le monde; et quand il se présenta pour entrer dans son ministère publie, la voix du Père reconnut ce Serviteur pour le Fils de sa dilection, Celui en qui il avait trouvé son plaisir. De même sur la sainte montagne, la voix du ciel déclarait de nouveau que l'amour du Père et son bon plaisir reposaient sur lui. Jésus savourait cet amour; il poursuivait son oeuvre, conscient de l'amour du Père. «Le Père m'a aimé;…» «j'ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure en son amour» (Jean 15: 9, 10). «Celui qui m'a envoyé est avec moi; il ne m'a pas laissé seul parce que je fais toujours les choses qui lui plaisent» (Jean 8: 29). Et la preuve publique qu'il en était ainsi, ce sont les actes de puissance que Jésus accomplissait, au nom de son Père; actes qu'il n'aurait pas pu opérer, s'il n'y avait eu la réalité de cet amour et la pleine satisfaction du Père à son égard, ainsi qu'il le déclarait.

Ce bon plaisir du Père reposait-il sur Jésus dans le moment où il était fait malédiction pour nous? Oui, sûrement. La pleine satisfaction de Dieu ne pouvait pas, il est vrai, avoir son expression à cette heure unique, où Celui qui n'a pas connu le péché, Dieu l'a fait péché pour nous; mais Jésus était parfaitement agréable au Père. Il donnait sa vie pour ses brebis, et son dévouement et la perfection de l'acte, par lequel il s'offrait, étaient un motif pour l'amour du Père: «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que je laisse ma vie afin que je la reprenne» (Jean 10: 17). Il y aurait eu une défectuosité quelque part, s'il se fût passé un seul moment durant lequel la pleine satisfaction du Père n'aurait pas reposé sur Jésus. Dans la mort de Christ Dieu était glorifié; et en conséquence le Fils de l'homme serait aussi glorifié de Dieu. A tout ce que le Père avait trouvé d'agréable en lui, durant sa vie, le Bien-aimé ajoutait quelque chose de nouveau: il fournissait à son Père, dans l'abandon qu'il lui faisait de sa personne jusqu'à la mort, un motif pour l'aimer. L'offrande de l'holocauste nous dit cela. C'était une offrande entièrement brûlée sur l'autel, en bonne odeur à l'Eternel. L'offrande du gâteau représente aussi tout ce qu'il y avait en Christ homme, d'agréable à Dieu; mais elle nous parle plutôt de l'offrande de sa personne durant sa vie: son service et le dévouement de sa vie étaient comme un parfum d'agréable odeur montant devant l'Eternel, tandis que l'holocauste nous montre Jésus dans la circonstance de sa mort. Historiquement, l'holocauste fait suite à l'offrande du gâteau; et présente Celui qui fut parfaitement agréable à Dieu durant sa vie, parfaitement agréable aussi dans sa mort: le feu du jugement, consumant la victime sur l'autel, n'y découvrait que des perfections, qui montaient comme un parfum devant Dieu. Ainsi, quand Dieu détournait sa face du Juste, et qu'il plongeait dans son âme l'épée tirée contre lui: dans ce même acte, il recevait ce qui établit sa gloire en présence du mal et de sa puissance; et l'entière satisfaction qu'il trouvait en Christ ne fut jamais si grande qu'à cette heure: le coup donné avait rencontré la perfection, et n'avait de retentissement qu'à la gloire de Dieu. On frémit en demandant quelle en aurait été la suite pour Jésus et pour nous, s'il n'avait été toujours et en tout parfaitement agréable à Dieu.

Les souffrances de Christ, c'est un vaste sujet dont nous n'avons considéré que l'un des côtés, — vérité ineffable dont la connaissance touche nos coeurs profondément, et nous porte à aimer la communion des souffrances de Christ comme un chemin par lequel se réalise une plus grande proximité de nos âmes avec lui, en même temps que cette vérité établit notre foi sur un fondement solide, puisque la mort de Christ a détruit pour toujours notre condamnation et la puissance de l'ennemi, qu'elle a ouvert la voie aux richesses infinies de l'amour de Dieu envers les hommes, et qu'elle a donné à Jésus un titre pour que nous soyons reçus avec lui dans la maison du Père. Quand nous voyons Jésus souffrant sous la colère de Dieu, nous ne pouvons parier de communion avec ses souffrances, car Jésus prenait cette coupe afin de nous l'épargner; mais il est des souffrances dans lesquelles les saints ont le privilège de suivre Christ. Sans dire ce qu'il a éprouvé dans son âme sainte, en se trouvant au milieu d'une scène de désolation comme elle existe sur cette basse terre, le chemin de la crèche à la croix n'a été pour lui qu'une suite de souffrances. Il a souffert parmi les hommes, pour la justice et pour le témoignage qu'il apportait de Dieu au milieu d'eux, Et c'est de ces souffrances qu'une part est laissée à ceux qui viennent après lui et le suivent dans le même chemin. Le Seigneur permet qu'ils portent les lèvres à sa coupe d'affliction. «Vous boirez bien la coupe que moi je bois» (Marc 10: 39). Et si nous y prenons une part, c'est en vertu du lien que la grâce a établi entre lui et nous; c'est pour connaître ce qui fait le disciple accompli, pour mieux connaître le Maître lui-même, et pour pénétrer, en quelque mesure, au delà de cette limite où s'arrête notre participation aux souffrances de Christ, la gloire de Celui qui fut parfait en toutes choses.