L'Antichrist de la prophétie, qui est-il?

ME 1876 page 141

 

Cher frère,

Je vous envoie une série de remarques qui, dans ces trois ou quatre dernières années, ont pris graduellement plus d'importance dans mon esprit, quoique je ne les présente encore que sous la forme de recherches, et sans me dissimuler les difficultés qu'elles peuvent suggérer et dont plusieurs se sont présentées à moi-même pendant les années dont je parle.

En général, tous ceux qui attendent un Antichrist personnel ont été accoutumés à penser qu'il est le chef de l'empire romain, auquel appartiendront le pouvoir impérial et le trône de ce monde. Or je doute beaucoup de cela. Je ne mets nullement en question l'existence future de ce pouvoir blasphémateur, objet de l'admiration universelle des hommes: les Ecritures me paraissent renfermer une révélation très claire quant à ce point, et le fait, par conséquent, demeure indubitable dans mon esprit; je n'ai pas besoin de le dire. Mais la question est celle-ci: cette puissance est-elle l'Antichrist? Les traits généraux de l'état des choses, tels qu'ils ont été présentés, demeurent non-altérés par ma question et la réponse qu'elle pourra amener: je tiens à le faire remarquer, parce qu'il est important que des vérités reconnues conservent leur poids et leur autorité, bien que, à cause de notre imperfection, nous puissions avoir besoin d'être redressés. Comme un état moral de l'âme, ce point est important. J'ai souvent entendu présenter «la mise en question continuelle» de toutes choses, comme étant de la sincérité et l'amour de la vérité, tandis que cette disposition n'est que la plus orgueilleuse prétention de l'esprit humain, qui voudrait maintenir intact son despotisme pour déplacer toute chose à son gré, et faire de ses propres pensées des créatures de sa volonté. L'amour de la vérité, au contraire, se montre en ceci: qu'on retient la vérité connue dans laquelle nous avons été enseignés de Dieu et qu'on y est assujetti; puisque, y étant soumis, on ne s'en écarte pas, quoique certainement, là même où la vérité est connue, notre manière de la saisir puisse être imparfaite. Je le répète donc: en gros, je ne vois rien à changer, mais beaucoup à apprendre, au sujet de cette puissance impériale blasphématoire, par le moyen de laquelle Satan agira, ou qui occupera le trône de Satan aux derniers jours. La question qui me préoccupe, est celle de savoir si les saints n'ont pas perdu de vue une autre puissance, dont les Ecritures parlent même plus que du grand gouvernement public blasphématoire, et je crois qu'il est nécessaire de considérer soigneusement cette puissance pour compléter la scène selon l'Ecriture. Je demande en outre, si cette puissance n'est pas proprement l'Antichrist, quoiqu'il puisse y en avoir eu plusieurs moralement?

Je vais considérer maintenant les passages de l'Ecriture qui se rapportent à ce sujet et présenter les pensées qu'ils m'ont suggérées. L'Antichrist n'est pas personnellement nommé, pour autant que je sache, ailleurs que dans l'épître de Jean. Ici, je n'ai pas besoin de le dire, son caractère est entièrement religieux, — une activité hérétique et apostate contre la personne et la gloire de Christ et contre les doctrines essentielles de la vérité qui se rapportent à Lui, et qui constituent le christianisme. «Ils sont sortis du milieu de nous,… afin qu'ils fussent manifestés comme n'étant aucun d'eux des nôtres» (1 Jean 2: 19). L'Apôtre dirige l'attention des plus jeunes saints, lesquels avaient entendu qu'il y aurait un Antichrist, sur ce point, comme fournissant le caractère de cet Antichrist et celui des derniers temps. Il dit de plus, que l'Antichrist nie le Père et le Fils, c'est-à-dire la révélation qui est le propre du christianisme et qui le constitue; et qu'il ne confesse pas Jésus Christ venu en chair, — l'autre grande base cardinale de la vérité. En outre, non pas comme en contraste avec le christianisme, mais comme trait caractéristique général, nous lisons de lui: «Qui est le menteur, sinon celui qui nie que Jésus est le Christ?» Ce point, en effet, savoir que Jésus est le Christ, serait le premier auquel des Juifs pieux seraient amenés, sans parler des doctrines du christianisme. Si quelqu'un reconnaissait réellement Jésus comme étant le Christ, on pouvait dire de cet homme qu'il était né de Dieu. Lorsque le Christ formait l'objet des croyances et de l'attente religieuse, reconnaître que Jésus était le Christ, impliquait une oeuvre qui était véritablement de Dieu. L'Apôtre présente donc un caractère apostat et hérétique comme trait distinctif de l'Antichrist; et de plus, comme étant de Satan, («Qui est le menteur?») l'Antichrist ne reconnaît pas (et cela me parait être le caractère d'un mal plus spécialement juif) Jésus comme étant le Christ. La grande question était celle de savoir qui était le Christ, non pas ce qu'il était; et c'est ici une réponse à l'attente juive, et la pierre de touche de l'incrédulité juive: «Si vous ne croyez pas que c'est moi, vous mourrez dans vos péchés». Celui qui est le menteur nie cela, savoir que Jésus est le Christ. Il est évident que le fait que Christ s'est présenté comme le Fils l'a fait rejeter des Juifs comme le Christ, parce que les Juifs (l'homme lui-même) étaient moralement mis à l'épreuve. Il a fallu qu'il en fût ainsi, pour que tout fût selon la vérité, et aussi afin de ne pas présenter un objet aux passions des hommes sous une forme religieuse, mais la vérité et la gloire; le Fils de Dieu, Dieu lui-même moralement; enfin les manifestations du Père en grâce au coeur et à la conscience des hommes (Voyez Jean 8: 14-24). Les deux choses sont distinctes toutefois, quoique impossibles à séparer, étant toutes deux unies dans sa personne.

Je ferai remarquer ici, sans m'y arrêter autrement, que l'insertion du mot «esprit» dans le passage: «et ceci est [l'esprit] de l'Antichrist» (1 Jean 4: 3), n'est peut-être pas très correcte. Quoiqu'il en soit, en général, il est évident que ce que le Saint Esprit présente comme caractérisant cet Antichrist, ce sont des qualités religieuses ou des énergies de mal: l'Antichrist est occupé de sujets religieux et caractérisé par cette occupation, et cela en rapport avec le christianisme et le judaïsme. Ce n'est peut-être pas là son caractère tout entier, mais c'est un trait caractéristique, et le sens de l'expression, impossible à rendre en français, de: «le — de l'Antichrist» du verset 3. Ce point est évidemment très important: il y a un esprit de ce caractère qui est à l'oeuvre.

Nous avons ensuite, pour ce qui concerne l'histoire du dernier jour, le fait qu'il y a deux «bêtes» ou manifestations de puissance, unies dans leurs opérations, mais en même temps très distinctes (voyez Apocalypse 13), chacune extraordinairement importante à la place qu'elle occupe, quoique l'une soit bien distinctivement sur le trône du prince de ce monde, l'autre pas. Quel que soit le titre qui puisse leur appartenir, ce sont ces deux «bêtes» qui sont les deux grandes manifestations de puissance. Je fais cette remarque parce que, dans quelques passages, ainsi que dans nos esprits quand nous réfléchissons à la tendance du siècle, il se peut que le caractère général nous soit présenté. Nous serions ainsi disposés à oublier qu'il y a certainement historiquement deux vases de puissance de mal, l'un ayant l'autorité publique et un certain caractère, l'autre dans lequel se trouve l'énergie qui agit et produit l'effet sur les hommes, un instrument du trône et du pouvoir public.

Je considérerai d'abord cette seconde «bête» dans laquelle se trouve l'énergie de séduction. Personne, je pense, ne met en doute que l'Antichrist, quel que soit le système d'interprétation qu'on adopte, soit l'un ou l'autre de ces deux vases de puissance du mal. Comme le premier le second est une «bête», ce qui nous dit qu'il y a de l'analogie dans le mode d'existence de ces deux puissances. Une «bête» est une figure bien connue dans l'Ecriture, et je ne sache pas qu'il y ait un seul cas dans lequel elle ne soit pas l'image d'une puissance temporelle; en sorte que nous avons ici une puissance temporelle, subsistant conjointement avec la grande puissance générale qui avait le trône de Satan. Il n'y a rien là d'étonnant, puisque nous savons que des cornes ou des rois subsisteront ainsi, donnant leur pouvoir à «la bête» (Apocalypse 17: 12, 13). La seconde «bête» dont nous parlons est autre chose, sans doute, que celle-ci, mais elle est une puissance temporelle. «Elle avait deux cornes semblables à un agneau» (Apocalypse 13: 11 et suivants). L'Agneau n'est pas le christianisme, mais Christ. Cette «bête» donc, dans la forme de sa puissance, ressemblait à Christ; mais son langage était l'expression de tout le caractère et de toute l'arrogance de Satan: «elle parlait comme un dragon». C'est là évidemment un caractère remarquable, une forme de puissance semblable à Christ, un langage comme de Satan, non en séduction seulement, mais en prétention publique. Elle n'est pas comme un serpent, mais comme un «dragon»; c'est un pouvoir royal semblable à Christ, avec un langage semblable à Satan. Mais le pouvoir de cette «bête» est excessivement grand, quoiqu'il soit celui de Satan. «Elle exerce tout le pouvoir de la première bête devant elle»: elle ne l'ôte pas à la première; bien au contraire, elle l'exerce tout entier. L'énergie essentielle du mal est dans ce personnage, quoique l'autre pouvoir puisse en être revêtu. Il fait que la terre et ceux qui habitent sur elle rendent hommage à celui qui est publiquement assis sur le trône de Satan, dont la plaie mortelle avait été guérie; mais son énergie de mal ne s'étend pas seulement à l'exercice ou à l'administration du pouvoir d'un autre: il agit en pouvoir intrinsèque comme un prophète.

Nous verrons plus loin un autre caractère de ce pouvoir, mais dans ce moment je m'en tiens au passage qui nous occupe. Le caractère de la manifestation de ce pouvoir est effrayant: ce que les prophètes de Baal ne purent pas faire, ce qu'Elie fit comme démonstration évidente que Jéhovah seul était le vrai Dieu, cette «bête» le fait, au moins aux yeux des hommes, sans parler d'autres grands miracles: elle séduit et trompe les habitants de la terre par les miracles qu'il lui fut donné de faire devant la «bête» (Apocalypse 13: 13, 14).

Et la «bête» — la première — n'est que trop contente d'avoir une telle énergie pour aide et soutien de son trône, ainsi que pour exalter et parer son autorité aux yeux des hommes, autorité qui ne repose que sur la tromperie et la séduction des âmes, ou la persécution. Ce prophète et ce pouvoir de séduction, — la seconde «bête» — conduit aussi les hommes à l'idolâtrie; il donne la respiration à l'image de la «bête», afin que celle-ci parlât même, et que tous ceux qui ne lui rendraient pas hommage fussent mis à mort (Apocalypse 13: 15). Ainsi, en même temps qu'elle soutient le trône de Satan dans ce monde, cette seconde «bête», tout en étant satanique dans son langage, — parlant comme le dragon — a la forme de la royauté et de la prophétie établie par des miracles. Ces miracles sont tels aux yeux des hommes, que ceux qui avaient suffi autrefois pour établir le seul nom et l'autorité de Jéhovah dans l'esprit d'Israël, pour la destruction d'un impuissant Baal. Le but de tout cela, c'est de faire reconnaître l'autorité de Satan en celui qu'il a placé sur son trône, mais l'énergie qui produit l'effet sur les esprits des hommes se trouve dans la seconde «bête». Tout en exerçant le pouvoir et en en portant la forme, — une «bête» avec des cornes — cette seconde «bête» est caractérisée par la séduction religieuse qui, proprement, se rattache à l'ancien témoignage de Jéhovah; elle est mentionnée au chapitre 19: 19-21 de l'Apocalypse, comme «le faux prophète».

La première «bête» (Apocalypse 13: 1 et suivants) est évidemment le grand pouvoir impérial gentil, auquel l'empire est donné dans les termes accoutumés de l'Ecriture; mais on le voit avec sa tête guérie, dans son dernier état blasphématoire; admiré et reconnu par tous ceux qui ne sont pas gardés par la souveraine grâce de Dieu; haïssant et blasphémant ceux qui habitaient le ciel. Il surgit, comme il était arrivé aux autres «bêtes», de la grande masse générale des hommes, du monde gentil universel — «de la mer», comme l'Ecriture s'exprime. A côté de cela nous avons «ceux qui habitent dans le ciel» (verset 6). Qu'est-ce donc que «la terre», d'où surgit la seconde «bête?» (verset 11).Toute prétention à une association céleste a disparu, est blasphémée. Cette influence religieuse-prophétique aura son caractère et son origine dans les limites de cette terre, c'est-à-dire du système et de l'ordre de ce qui subsiste là où Satan est et gouverne encore; mais une position et une relation comme celles-là, quand elles revêtent un caractère religieux, quoique blasphématoire ou séditieux, sont juives. C'est la religion de la terre; et, puisqu'elle rejette Christ, elle doit être fausse. Tel est, je pense, le caractère de la séduction de la seconde «bête»: elle n'est céleste, ni en réalité, ni en prétention, mais elle est une manifestation de pouvoir présent ici-bas dans la sphère à laquelle Satan est maintenant réduit. Elle est la propre énergie présente de Satan pour amener le monde à reconnaître le trône qu'il a su établir sur la terre dans la première «bête», qui avait son origine providentiellement dans le monde comme les autres «bêtes» précédentes (Comparez Daniel 7: 3). La seconde «bête» est terrestre et juive dans son caractère; mais elle agit par un pouvoir, par des miracles présents, par une séduction présente, et non pas, cela est évident, par la loi et le témoignage.

Je voudrais rappeler maintenant un autre passage qui nous parle de la dernière forme du mal, et rechercher sous quel caractère le mal y est présenté: je veux parler de 2 Thessaloniciens 2. Si nous lisons le verset 9 de ce chapitre, nous ne pouvons guère douter qu'il y ait là une relation avec le faux prophète; mais on peut se demander si les paroles que nous y lisons ne doivent pas caractériser seulement le temps et le règne de la «bête», ou bien si le: «duquel la venue est…» veut dire qu'on le reconnaît lui-même à ces miracles. Autrement dit, s'agit-il ici, d'une manière générale, de la première «bête», ou de la seconde?

Examinons le passage de plus près. Il y a une «apostasie» ici-bas, comme il y a, autre part un rassemblement des saints auprès de Christ dans le ciel. L'Eglise céleste prend sa propre place comme réunie à son Chef dans le ciel, et la chute, ou apostasie, a lieu sur la terre. Le résultat, c'est la manifestation de l'homme de péché, du fils de perdition: l'enlèvement de l'Eglise et l'apostasie lui ont préparé la voie. On ne peut nier que, dans ce chapitre de l'épître aux Thessaloniciens, un caractère religieux ne soit aussi manifesté, quelque inique et audacieux qu'il soit. De pouvoir séculier, il n'en est pas question, mais du caractère inique et puis séducteur d'un autre pouvoir. Il est caractérisé comme «l'homme de péché», et «l'inique», qu'un mystère d'iniquité a précédé. Je ne pense pas que le verset 4 donne une autre idée, ou qu'il parle d'un pouvoir séculier: il s'agit d'opposition morale à Dieu et d'insulte contre Dieu. Il est vrai que la «bête» du chapitre 17 de l'Apocalypse va à la destruction; mais cela n'altère pas le caractère qui est donné ici: l'une et l'autre «bête» périssent ensemble (Apocalypse 19: 20). L'apostasie, évidemment, se rapporte à ce qui portait le nom de christianisme, quoiqu'elle s'étende plus loin que le simple rejet de celui-ci. Il y a un pouvoir, un personnage actif, portant l'épithète de Judas (voyez Jean 17: 12), qui résiste, s'oppose et s'élève contre tout ce qui est appelé Dieu ou qui est un objet de vénération. Il est un ardent antagoniste de l'autorité divine, et veut, comme Adam, être Dieu; en outre, il veut notre ruine.

Je crois donc que les versets 3 et 4 de 2 Thessaloniciens 2, nous montrent, plutôt que l'objet du respect et de l'honneur sur le trône, le caractère de ce pouvoir inique qui agit sur d'autres et qui montre l'énergie de sa volonté en hostilité contre Dieu et en excluant Dieu. Il est ce qui remplit la scène moralement quand l'apostasie a lieu, — l'énergie active qui agit dans l'homme. C'est l'homme de péché, — l'homme contre Dieu, prétendant être Dieu ou se présentant lui-même comme s'il l'était, sur la terre: tout juste l'opposé de Christ, qui était cela, mais qui était l'homme obéissant, juste et humble, qui se soumettait à tout quand ce n'était pas désobéir à Dieu son Père. Cet homme était quelque chose qui devait être «révélé» (verset 3). En attendant, un certain mystère d'iniquité opérait déjà: c'étaient les principes d'iniquité, les principes de l'indépendance de l'homme et de l'action de sa volonté, mais en mystère seulement. Il y avait quelqu'un qui «retenait» jusqu'à ce qu'il fût loin; et alors l'inique serait révélé (versets 7, 8). Mais si ce personnage représentait l'inique et propre exaltation de la volonté de l'homme, il y avait plus que cela: sa présence ou sa venue était selon l'opération de Satan; et si nous avons trouvé dans la seconde «bête» la terrible analogie avec le cas d'Elie, en mensonge, ici nous avons peut-être l'analogie plus effrayante encore avec Christ. Les termes par lesquels est exprimé ce qu'il fait en mensonge sont les mêmes que ceux par lesquels, dans les Actes (Actes des Apôtres 2: 22), Christ a été démontré comme un homme approuvé de Dieu. Comme Christ était en vérité de justice, lui est en «séduction d'injustice» pour «ceux qui périssent», qui étaient abandonnés pour être perdus, tandis que Christ était pour «ceux qui devaient être sauvés». Le vrai Christ viendra du ciel, un homme céleste: celui-ci est un homme terrestre, avec toutes les prétentions que peuvent avoir ceux qui sont condamnés au jugement, et les preuves qui démontreront aux hommes son titre à la gloire, mais en une manière entièrement terrestre et dans l'exaltation de soi-même. Dieu envoie une énergie d'erreur pour qu'ils croient au mensonge.

Il est évident, car l'Apôtre écrit à des chrétiens, que l'apostasie a son point de départ dans le christianisme, mais que sa manifestation n'est pas en rapport avec lui; parce que, quoique aucune date ne soit donnée sur ce point, on voit ici les saints recueillis dans le ciel, et tout le reste dans un état d'apostasie. Ce fait, quoique l'apostasie se manifeste sous le caractère de l'homme blasphémateur, la reporterait, avec ses séductions, tout particulièrement au milieu des Juifs, lors même qu'elle se présente à nous ici comme homme, et relativement à des hommes qui n'ont pas reçu l'amour de la vérité quand la vérité était là, mais ont pris plaisir à l'iniquité. Sans doute, tout ceci a pu avoir un accomplissement moral partiel dans la chrétienté, car dès les premiers jours il y avait déjà plusieurs antichrists, mais si nous envisageons l'apostasie dans son sens complet, le «temple de Dieu» dans lequel, selon le verset 4, l'homme de péché s'assiéra, acquiert un caractère très évident.

Nous pouvons passer maintenant à d'autres citations. Prenons d'abord Daniel 11: «Et le roi fera selon sa volonté» (verset 36). Nous trouvons ici un roi dans le pays, sans que nous sachions d'où il est venu, — car bien que ce verset soit une continuation de l'histoire du roi du nord comme occupant ce territoire, toutefois, les versets précédents nous avaient amenés jusqu'au temps de la fin — un roi inique «s'enorgueillissant lui-même et s'élevant par dessus tout Dieu». Ce fait quoiqu'il paraisse établir un contraste entre les caractères que nous fournit 2 Thessaloniciens 2, et la seconde «bête», n'empêche pas toutefois, après tout, que le roi établisse l'idolâtrie, — cet esprit impur qui est sorti maintenant des Juifs, mais qui doit y revenir avec sept autres esprits plus méchants que lui-même (Matthieu 12: 43, 45). «Le Dieu de ses pères», pour la nature un titre aussi puissant que quelque autre que ce soit, et reconnu dans le judaïsme; ni «le désir des femmes», cette postérité naturellement désirée, mais de laquelle Christ était le centre d'espérance pour les Juifs (car ce verset 37, se rapporte évidemment à des objets et à des influences de traditions religieuses); aucune de ces choses n'a sur lui une influence quelconque: il se sert de l'idolâtrie uniquement pour sa convenance, et partage le pays comme récompense, faisant dominer ceux qui le suivent, sur la masse du peuple juif (verset 39). Dans les versets 36 et suivants du chapitre 11 de Daniel, nous avons donc un pouvoir royal en Palestine, faisant là ce qui lui plaît, ayant, en fait d'exaltation de lui-même et de blasphème, le caractère de l'homme qui nous est présenté dans les versets 3 et 4 de 2 Thessaloniciens 2, et disposant à son gré du peuple juif, tandis qu'il rejette son dieu traditionnel et blasphème le Dieu des dieux. On trouve ainsi chez lui la parole et le caractère du «dragon» de l'Apocalypse.

Je ferai remarquer ici que le pouvoir antichrétien ne sera pas une imitation de Christ, si ce n'est en tant qu'il est roi et prophète, mais une opposition à Christ, car des blasphèmes ne pouvaient se recommander à un Juif, ayant une forme de sainteté juive. Mais les hommes dont il est ici question sont abandonnés à l'erreur, et le langage «comme du dragon» est accepté avec tout le reste, aussi bien que l'idolâtrie, qui existera certainement. Le Seigneur parle de ce personnage comme de quelqu'un qui viendra «en son propre nom» (Jean 5: 43). C'est ici la partie juive, de son histoire, en relation avec les limites territoriales de l'empire grec. Vous retrouverez «le roi» dans Esaïe 57: 9, et 30: 33, où il faut lire: «Et aussi pour le roi elle est préparée».

Je reviens maintenant à un passage où nous trouvons un pouvoir clairement distingué de la «bête»; qui cependant lui imprime son caractère, et qui est en même temps, à la fin, particulièrement en rapport avec le peuple juif, quoique haïssant ce qui est céleste: je veux parler de Daniel 7. Nous voyons dans ce chapitre une corne distincte s'élevant après toutes les autres, différant d'elles, en abattant trois, — une corne toujours comme telle distincte de la «bête», mais qui amène le jugement sur celle-ci et dont les agissements font moralement d'elle, à la fin, la chose capitale. Plusieurs traits caractéristiques des actes de la première «bête» en Apocalypse 13 lui sont attribués ici. La corne nous y est présentée comme l'agent actif, car elle est envisagée ici comme une partie de «la bête», sa totalité généralement séculière ou gentile étant le point de vue auquel elle est considérée. Toutefois «la petite corne» est évidemment un agent distinct. Si quelqu'un pensait que la corne possède en réalité, quoique localement, le territoire de trois rois, — la tête virtuelle de tout l'empire comme chef — outre son propre territoire, et qu'ainsi elle correspond plutôt à la première «bête» d'Apocalypse 13, qui donne seulement le caractère général de «la bête» elle-même, je ne vois pas qu'il y ait quelque chose à objecter. Mais tout cela ne touche pas au second point qui reste ce qu'il est. Les points moraux d'union entre les deux «bêtes» sont évidents: elles font les affaires l'une de l'autre; l'une, comme nous l'avons vu, ayant l'autorité et le trône publics, l'autre exerçant l'énergie de Satan. Il m'avait même semblé que 2 Thessaloniciens 2: 3, 4, 8, pourrait les signaler distinctivement; mais je poursuis l'étude du passage qui m'occupe. Cette corne dont parle le prophète avait de l'intelligence et des desseins ce qui est plus que la puissance et des conquêtes: il avait des plans et un propos, une place et de hautes prétentions avouées: il amène le jugement sur la «bête». Il fait trois choses: il profère de grandes paroles «contre le Souverain» (titre plus glorieux que celui d'Ancien des jours, car il indique la suprématie de Dieu comme étant haut élevé par dessus toutes choses); il détruit les saints des hauts lieux, et il pense changer les temps et les lois, autrement dit l'ordre et les ordonnances judaïques, et elles sont livrées entre ses mains. (Daniel 7: 25). Nous trouvons donc des prétentions athéistiques, une persécution de tous les saints qui sont associés au ciel, et un renversement de l'ordre civil et gouvernemental juif comme ordonnances extérieures. Cela dure trois ans et demi. Le personnage dont nous parlons est par conséquent directement en relation avec l'ordre de choses juif. S'il y a des saints qui regardent vers de plus hautes bénédictions, il les détruit; et nous savons, par Apocalypse 15 et 20, qu'il se trouvera des saints qui auront une position céleste dans le royaume. Sa domination lui est ôtée, en relation avec le jugement final sur la terre. C'est la corne qui nous occupe ici qui exerce le pouvoir en Palestine (quoique la «bête» soit détruite, comme cela est dit, au verset 11, dans l'histoire générale, avant les explications). Nous voyons donc ici un pouvoir distinct agissant dans la Palestine et renversant l'ordre juif et ses ordonnances, la bête étant distincte de lui, quoique jugée à cause des paroles que ce pouvoir profère: les prétentions de celui dont nous lisons, Esaïe 14: 12-14, ont ce même caractère. Régner en Sion est ici l'une de ses prétentions.

Occupons-nous maintenant de la première «bête». La première chose que je voudrais faire remarquer, c'est que cette «bête», est caractérisée par la royauté de ses dix cornes: elles sont couronnées. Ceci est caractéristique historiquement. Trois cornes tombent, mais, en tant que l'unité subsiste, nous avons affaire à un pouvoir fédératif. La «bête» implique l'unité d'un corps en une certaine mesure, comme était l'empire romain, quel que fût d'ailleurs son état; une certaine chose connue, quel que fût son chef ou la forme de son gouvernement; et cette existence «corporative» est le sens du mot «bête»: il y a un lien qui permet d'en parler comme d'une unité en rapport avec ceux qui sont en dehors d'elle. Il y a une tête frappée à mort et guérie, mais elle n'est nullement en évidence ici, si ce n'est que c'est après elle que toute la terre est dans l'admiration. C'est la «bête» qui occupe la première place et qui, dans son caractère général comme corps, est caractérisée par ses blasphèmes et sa guerre contre les saints. Il est bon de nous souvenir que le diable est précipité du ciel, et que les cieux, et ceux qui habitent la terre ainsi que la terre elle-même, sont la scène de son pouvoir, La guérison de la tète est la seule chose qui soit signalée: c'est la «bête» elle-même qui est sur la scène. Satan, comme le dieu de ce monde, donne à celle-ci son trône et son pouvoir, et l'homme de ce monde apparaît, tandis que Satan s'emploie, comme nous l'avons vu, à soutenir son pouvoir dans la seconde «bête». Une femme peut monter cette «bête», mais ce sont les rois qui commettent fornication avec la femme. Le chapitre 13, aussi bien que le chapitre 17, me font supposer qu'il y aura une certaine forme unissante de gouvernement, mais c'est l'existence corporative ou commune qui donne sa vie et son caractère à «la bête». Les rois combattent, les rois haïssent la prostituée et la «bête», — et non pas un chef. Si la comparaison avec Daniel 7 et la lumière jetée sur ce passage du prophète montraient que la petite corne est la même chose que le chef, ce dont je doute, je n'ai rien à objecter: ce point n'est pas ce qui m'occupe dans ce moment. Ce que je mets en question, c'est de savoir si le chef civil de l'empire est l'Antichrist, celui-ci me paraissant avoir un caractère beaucoup plus religieux, — considération qui a eu une grande importance dans l'étude des Ecritures. Plus d'une difficulté et plus d'une question se présentent en rapport avec ce sujet, comme par exemple l'établissement et le renversement de l'influence de Babylone au chapitre 17 de l'Apocalypse, et de la seconde «bête» du chapitre 13. Je me réserve d'aborder une autre fois ce point.

Quoiqu'il en soit, je ne puis douter qu'il y aura un pouvoir civil et religieux en Palestine, ayant l'énergie de Satan et exerçant le pouvoir de la «bête» auquel Satan a donné son autorité; et ce pouvoir est, à mon sens, bien plus proprement l'Antichrist, quoiqu'il y en ait beaucoup. Je présente avec intention les remarques qui précèdent, comme un sujet de recherche pour les saints et pour ceux qui sont heureux d'apprendre et de suivre toute augmentation de lumière que Dieu, dans sa grâce, peut trouver bon de donner, et bien certainement il donnera tout ce qui peut être véritablement profitable pour l'Eglise.