Le culte

 ME 1877 page 172

 

Le principe du culte ou de l'adoration est clair et simple. «Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l'adorent, l'adorent en esprit et en vérité». Tous les croyants doivent admettre que l'on ne peut rendre culte que par l'Esprit, et que si «ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu», encore moins peuvent-ils l'adorer. Ils sont nombreux, malheureusement, ceux qui ignorent ce que c'est que rendre culte comme des adorateurs «une fois purifiés», et sans «aucune conscience de péchés;» mais quant au principe du culte, il est reconnu par tous ceux qui sont enfants de Dieu par la foi en Jésus Christ.

Toutefois, quelque entièrement que soit admis le principe, pour que le culte soit réel, et non pas une vaine forme ou un effort de l'esprit, il faut que l'adorateur connaisse véritablement deux choses: l'objet du culte, et la puissance par laquelle seule il peut être rendu. Or l'objet, c'est Dieu, et la puissance, c'est le Saint Esprit. Et je n'entends pas ici la personne du Saint Esprit habitant dans l'Eglise et dans le croyant, mais sa puissance agissant en nous pour produire l'adoration.

Nous savons que le Seigneur Jésus Christ ressuscité, étant monté au ciel, le Saint Esprit fut envoyé ici-bas pour rendre témoignage que Dieu avait reçu dans la gloire Celui qui, comme homme, l'avait parfaitement glorifié sur la terre, et que le monde n'avait pas voulu recevoir. Mais la mission du Saint Esprit n'a pas seulement pour objet de condamner le monde qui a rejeté Christ; il dirige aussi vers la personne adorable de cet homme glorifié à la droite de Dieu, les coeurs de ceux que lui-même, par grâce, a amenés à recevoir Jésus comme Sauveur; en d'autres termes, il est auprès d'eux le ministre de Christ. Aussitôt donc que le Saint Esprit vient faire sa demeure dans une âme déjà vivifiée par son pouvoir, cette âme est scellée et baptisée du Saint Esprit pour faire partie du corps de Christ; précédemment vivifiée, maintenant elle est sauvée.

C'est quand l'âme a saisi par la foi l'oeuvre parfaite d'un Christ glorifié, que le terrain est déblayé et que le Saint Esprit peut venir y faire sa demeure.

«Crois au Seigneur Jésus Christ (remarquez avec quelle plénitude sa personne est présentée) et tu seras sauvé toi et ta maison». Ce résultat sera immédiat ou non, suivant que sera acceptée, par grâce, l'oeuvre parfaite accomplie par le Seigneur, et qu'ainsi la paix et la délivrance seront connues de l'âme qui croit.

Or l'objet qu'a toujours en vue l'Esprit de Dieu, c'est la personne du Seigneur Jésus Christ. Quand donc nous nous réunissons, que nous sommes assemblés au nom du Seigneur Jésus et que le Saint Esprit est là comme puissance de culte, comment se fait-il que notre adoration et nos louanges soient, comme nous devons l'avouer, empreints d'une si grande faiblesse, et le plus souvent, l'effet évident d'un effort?

N'est-ce pas un fait malheureusement trop connu, que souvent, lorsque nous nous réunissons, le premier jour de la semaine, autour de la table du Seigneur, lui-même étant au milieu de nous, l'adoration et la louange sont l'exception, et non la règle? Combien il est fréquent d'entendre exprimer par nos hymnes et nos prières, que nous ne sommes que de pauvres êtres faibles et misérables, comme s'il ne le savait pas infiniment mieux que nous. Combien souvent nous lui rappelons nos péchés, en présence même des signes qui nous parlent, de sa mort par laquelle ces péchés ont été ôtés pour jamais. Au lieu des louanges, combien de supplications se font entendre.

Ah! si la présence de cet adorable Sauveur au milieu de nous était une réalité, pour nos coeurs, il y aurait, j'en suis sûr, une effusion de louanges et d'adoration telle, que ce serait le ciel sur la terre. Nous ne pourrions qu'adorer; il nous semblerait que si nous nous taisions, les pierres même crieraient. Contemplons pour un moment cette scène merveilleuse, qui, dans un sens, n'aura pas sa pareille, même dans le ciel. Des âmes rachetées, et à quel prix! rassemblées autour de Celui qui a payé leur rançon, se groupant près de lui, sur la scène même où pour elles, il a donné sa vie, et l'entendant, comme tout de nouveau, leur dire ces paroles d'amour: «Faites ceci en mémoire de moi».

Pourquoi donc, quand nous nous réunissons, l'adoration fait-elle ainsi défaut? N'est-ce pas parce que plusieurs parmi nous ne sont pas scellés du Saint -Esprit? N'en est-il pas aussi d'autres qui viennent, sans s'être jugés, devant Celui qui est lumière, et dont la sainte présence met à nu tout ce qui ne convient pas à sa nature? Ni les uns, ni les autres, ne peuvent rendre culte. Que chacun de nous interroge donc son coeur en la présence du Seigneur et dise: «Seigneur, est-ce moi?» Car il y a un fait que nous devons reconnaître et dont nous avons à nous humilier, c'est que la réalité de sa présence, qui, lorsqu'elle est connue et goûtée, apporte avec elle «un rassasiement de joie», est une chose que peu d'entre nous, hélas! connaissent pour en jouir. Combien en est-il d'entre nous qui peuvent dire, lorsqu'ils quittent le lieu du rassemblement: «J'ai conscience d'avoir été ce matin en la présence de mon Seigneur; en la présence de Celui qui, pour montrer la plénitude de son amour pour moi, a marché à la mort, et s'est livré lui-même pour moi?»

Ah! si c'était pour nous une réalité vivante, cela n'imprimerait-il pas sa trace sur chaque pas de notre sentier, sur chaque acte de notre vie journalière, jusqu'à ce que, de nouveau, le premier jour de la semaine nous ramène en la présence bénie du Seigneur, pour nous souvenir de sa mort? Est-ce que de nos coeurs, remplis du sentiment de l'amour de Celui qui est là, présent avec nous, ne jailliraient pas des flots d'une louange et d'une adoration qui plairaient à son coeur, et qui seraient agréables à son Père et notre Père, a son Dieu et notre Dieu? Car le culte est l'expression de la louange, découlant du coeur qui sort de lui-même, en réalisant la présence de Christ; du coeur perdu à tout autre sentiment excepté Christ visitant, pour ainsi dire, de nouveau la scène de ses souffrances et de sa mort, et invitant ceux auxquels la grâce l'a rendu cher à cause de ce qu'il est, et de ce qu'il a été, à se souvenir de lui dans cette heure de douleurs, quand tous l'avaient abandonné, quand pour nous il était seul dans la mort, seul dans son amour.

Si nous réalisions ainsi sa présence au milieu de nous, l'unique chose qui nous manquerait, ce seraient les mots suffisants pour exprimer la louange. C'est la personne du Seigneur Jésus qui remplira et satisfera parfaitement notre coeur pendant l'éternité; c'est elle seule qui, maintenant, peut le remplir et le satisfaire.

Et j'ai la conviction que ce n'est qu'autant que nous connaissons le Seigneur Jésus dans la gloire, que nous reconnaîtrons sur la terre ses droits, en tout et sur tout. Assurément sa mort m'a placé en dehors de tout ici-bas; et ce devrait être la joie de mon coeur de reconnaître les droits et d'affirmer les titres de cet homme ressuscité, chef de la nouvelle création de Dieu, sur tout ce qui m'appartient, et de le faire selon Dieu. Dieu ne veut rien avoir maintenant que par la mort de Christ, et la foi s'élève, pour ainsi dire, jusqu'au coeur de Dieu, et là, en communion avec lui, elle voit d'en haut toutes ces choses ici-bas, a travers la mort de Christ, et agit d'après ce qu'elle voit.