L'olivier, le figuier et la vigne

ME 1878 page 301

 

Les arbres que nous venons de nommer, très estimés des habitants de la Palestine, qui les cultivaient avec soin, se trouvent déjà mentionnés dans l'apologue que Jotham adresse aux hommes de Sichem, et, dans le Nouveau Testament, ils sont employés comme figures pour présenter des enseignements pleins d'intérêt touchant les gentils, Israël et les chrétiens. Privilèges, profession et fruits, tels sont les sujets où il est question de ces arbres, et sur lesquels je désire dire quelques mots.

 

1. — L'OLIVIER présente un enseignement spécial pour les gentils, comme tels, dans les dispensations de Dieu. C'est à ce point de vue qu'il est mentionné en Romains 11, où l'apôtre adresse un sérieux avertissement à ceux qui ne sont pas d'Israël. Les promesses appartenaient aux Israélites comme enfants d'Abraham (Romains 9: 4); les gentils étaient étrangers aux alliances de la promesse (Ephésiens 2: 12). Il y avait bien des promesses qui les concernaient, mais aucune qui leur fût faite; elles avaient été données à Abraham et à sa semence (Galates 3: 16). Les Israélites, sur le fondement de leur descendance «selon la chair», attendaient, pour eux-mêmes, l'accomplissement et la jouissance de ces promesses. Mais Jean le baptiseur les avertit qu'ils seraient grandement déçus s'ils se confiaient, sans être nés de Dieu, en cette position privilégiée que leur donnait la naissance naturelle. Dieu pouvait, des pierres mêmes qui les entouraient, susciter des enfants à Abraham. L'avertissement fut inutile, au moins pour ce qui concernait la nation. Ils rejetèrent celui à qui les promesses, faites à Abraham, étaient confirmées, c'est-à-dire le Christ, semence du patriarche. Dieu les a donc, pour un temps, retranchés comme nation, et s'est tourné vers les gentils. C'est de ce changement de dispensation que Paul parle en Romains 11, et pour rendre son enseignement plus sensible à l'intelligence de ses lecteurs, il se sert comme comparaison de l'olivier, arbre bien connu en Italie.

D'un olivier franc, quelques-unes des branches ont été retranchées. C'est toute la nation d'Israël, sauf un résidu selon l'élection de grâce. Celui-là reste, comme branche de l'olivier, où il a toujours été. Sur ce même olivier ont été entées d'autres branches, prises d'un olivier sauvage qui n'avait jamais été soumis à la culture. Ce sont les gentils dont Dieu s'occupe maintenant dans sa souveraine bonté, et qui, amenés ainsi du dehors, sont mis en relation avec Abraham, racine de la promesse, ou, pour poursuivre la figure, racine de l'olivier. Avant la croix, Dieu, dans ses voies, agissait envers Israël comme peuple choisi, mais non pas directement envers les gentils. Aux premiers appartenaient des privilèges, auxquels les autres n'avaient aucune part. C'est ce que la femme Syrophénicienne avait à apprendre: elle le sentit et le confessa. Mais, après la croix, se déploya un nouveau trait des voies de Dieu envers l'homme. Israël, persistant dans l'incrédulité, cessa de jouir des privilèges qui l'avaient distingué comme peuple appartenant spécialement à Dieu sur la terre. Le vieillard Siméon avait annoncé, que l'enfant qu'il tenait dans ses bras serait «une lumière pour la révélation des gentils», pour les tirer des ténèbres où ils avaient été jusqu'alors, afin qu'ils devinssent par excellence les objets de la bonté de Dieu. Paul nous apprend que cela a eu lieu, quand Israël a été, pour un temps, retranché comme nation.

Ainsi les gentils possèdent maintenant des avantages qu'ils n'avaient jamais eus avant la croix. La racine de la promesse n'a pas été changée. L'olivier n'a pas été coupé. Quelques branches seulement ont été retranchées, et, sur le principe de la foi, des branches d'un olivier sauvage ont été entées sur l'olivier franc. Comme tels, les gentils sont devenus participants «de la racine et de la graisse de l'olivier». Les privilèges leur appartiennent, parce qu'ils sont entrés en association directe avec la racine de la promesse, Abraham, le père des croyants. Ils ont donc part à ce qui découle de la racine; ils participent à «la racine et à la graisse de l'olivier», comme gentils entés par la foi dans la liane de la promesse sur la terre.

Or ce n'est pas le salut, car ils peuvent être retranchés; ce n'est pas la position de L'Eglise, car elle est nouvelle pour tous ceux qui en jouissent, pour les Juifs aussi bien que pour les gentils: ce sont les gentils, admis à partager, sur la terre, les privilèges de ceux qui, comme fidèles parmi les Juifs, ne les avaient jamais perdus. Je dis sur la terre, car la figure même d'un arbre, nous apprend qu'il s'agit d'une position dont on jouit sur la terre.

Les gentils devaient-ils conserver cette position privilégiée? Cela dépendait d'eux: «Si tu persévères dans cette bonté», est-il dit. L'ont-ils fait? La réponse est évidemment négative. Ils doivent donc être retranchés, et si les branches naturelles ne persistent pas dans l'incrédulité, elles seront de nouveau entées sur leur propre olivier. L'olivier franc, c'est Israël; la racine est Abraham, et les gentils peuvent perdre, par leur infidélité, les avantages que, comme gentils, ils possèdent maintenant, car ils ne subsistent en cette position que par la foi. Dieu visite actuellement les gentils (Actes des Apôtres 15: 14), et le résultat extérieur de cette action est ce que nous nommons la chrétienté. Tous ceux qui en font partie possèdent les privilèges attachés à cette position, mais ces privilèges imposent la responsabilité. Le gentil peut-il donc se glorifier sur le Juif, sur les branches retranchées? Nullement. La place naturelle du Juif est sur l'olivier; c'est seulement à cause de son péché d'incrédulité qu'il a été retranché. De même, si le gentil a été enté sur l'olivier franc, ce n'est absolument que par la bonté divine et sur le principe de la foi; et il ne peut garder cette position qu'à la condition de persévérer dans la bonté de Dieu. Tous ceux donc qui sont réellement sauvés, se trouvent sur l'olivier, mais bien d'autres qu'eux sont parmi les branches. Le résidu fidèle d'Israël s'y trouve compris, ainsi que toute la chrétienté. Les gentils une fois retranchés ne seront jamais rétablis. Les Juifs peuvent l'être et le seront, s'ils ne demeurent pas dans l'incrédulité. Avec quelle vérité cela sera bientôt senti et confessé, alors que s'accomplira ce que nous lisons en Zacharie 8: 13!

 

2. — LE FIGUIER donne des enseignements d'un ordre différent et qui s'adressent à une autre classe de personnes. Le Seigneur se sert de cet arbre comme figure pour avertir Israël et instruire ses disciples (Luc 13: 6-9; Matthieu 21: 19-21; Marc 11: 12-14, 20-23). Son fruit fait toute sa valeur. Si l'arbre est stérile, à quoi sert-il? Pourquoi occupe-t-il le sol? Il y a aussi, dans le figuier, une particularité qui le rend spécialement propre à représenter l'état d'Israël. Ses fleurs paraissent avant les feuilles. Voilà pourquoi la présence de ces dernières fait présumer qu'il y a des fruits. On voit immédiatement d'après cela que l'emblème fourni par cet arbre convient parfaitement à Israël, qui professait être le peuple de Dieu, mais qui, néanmoins, quand le Seigneur vint, prouva en le rejetant qu'il était stérile pour Dieu. L'olivier, arbre toujours vert, représente bien la continuité de la lignée à laquelle appartiennent les promesses sur la terre; lignée qui ne doit jamais être interrompue, même en apparence, durant tous les âges qui précèdent l'établissement du royaume de Dieu en puissance sur la terre. De même donc que l'olivier, par le caractère de son feuillage, fait naître l'idée d'une chose qui continue à subsister, le figuier, par son mode de porter des fruits, représente avec justesse la profession, qui doit être accompagnée de fruits comme preuve de sa réalité. Et si ces preuves manquent, il est certain que l'arbre n'est bon qu'à être coupé. La parabole du figuier en Luc 13 fait donc ressortir la patience avec laquelle Dieu a supporté la nation d'Israël jusqu'à la croix. La sentence portée par Jésus sur le figuier stérile, quoique couvert de feuilles (Matthieu 21), était l'annonce du jugement qui allait être exécuté contre Israël et dont le Seigneur avait averti le peuple. Un arbre coupé cesse d'être en vue; Israël comme nation devait cesser d'exister. La profession sans les fruits ne sera jamais suffisante devant Dieu.

 

3. — LA VIGNE présente des instructions qui s'adressent spécialement aux chrétiens.

Dieu avait une vigne qu'il avait transportée d'Egypte; cette vigne était Israël (Psaumes 80: 8-11). Une vigne sans fruit est inutile, comme Ezéchiel le rappelait à ses compatriotes (Ezéchiel 15: 2-4). Le Seigneur enseigne à ses disciples, en Jean 15, qu'il est, Lui, la VRAIE vigne, et que, par conséquent, ils ne sauraient porter de fruits qu'en demeurant en Lui. Pour ceux qui étaient de race juive, cet enseignement était important: ils devaient comprendre que leur position comme nation, leur descendance selon la chair, ne servait de rien. Afin de porter du fruit pour Dieu, il fallait demeurer en Christ: — enseignement qui est aussi, pour nous, utile, nécessaire en tout temps. «Je suis le vrai cep, et mon Père est le cultivateur… et vous serez mes disciples» (Jean 15: 1-8).

Quand nous en venons à l'enseignement du Seigneur touchant la vigne, nous laissons ce qui se rapporte aux dispensations de Dieu envers les Juifs et les gentils, et nous arrivons à ce qui est vitalement important. Mais, pour le bien comprendre, il faut nous rappeler que la similitude tirée d'un arbre emporte toujours l'idée de quelque chose qui est sur la terre, et non dans le ciel. Cette remarque nous fera mieux saisir la portée des paroles du Seigneur. Il parle de ce qui est vu sur la terre; par conséquent un sarment peut être dans le cep et cependant rester stérile. Mais nul ne peut être en Christ devant Dieu, sans être réellement un enfant de Dieu. Si, dans ce que nous lisons du cep et des sarments, nous introduisons l'idée de la position chrétienne devant Dieu, nous ne comprendrons rien comme il faut. Au contraire, si nous faisons attention que, d'après la figure employée, il s'agit d'une chose existant sur la terre, tout devient clair.

Un sarment dans le cep, est donc un chrétien professant. On peut être tel sans être un vrai croyant. Au moment où le Seigneur parlait, Judas Iscariote présentait un exemple frappant de ce cas. Il était l'un des douze, l'un des sarments du cep, et en apparence croyait réellement au Seigneur; mais ce dont il s'occupait en cet instant même, prouvait qu'il ne demeurait pas en Christ. Ainsi, une simple profession de christianisme ne saurait suffire. Mais le Seigneur ne s'arrête pas là. Il ne s'efforce pas seulement d'imprimer dans l'esprit des disciples, qu'il doit y avoir réalité et vie pour ne pas rester stériles; il leur dit aussi comment seulement ils peuvent porter du fruit; c'est en demeurant en Lui. La malédiction prononcée contre le figuier, montrait que Dieu ne pouvait être satisfait s'il n'y avait pas de fruit. L'enseignement du Seigneur touchant le cep et les sarments, éclairait la question de savoir comment les fruits seront produits. Il peut y avoir des professants: il y en a eu, et il en est encore. S'ils ne sont rien de plus sur la terre, c'est d'eux que le Seigneur parle au verset 6; mais que le lecteur remarque bien, qu'il le fait dans des termes qui, tout en montrant positivement le sort terrible réservé à ceux qui sont tels, ne donnent en rien l'idée qu'un vrai chrétien puisse périr. En parlant des vrais croyants, il dit: «vous»; s'il s'agit d'un professant stérile, le Seigneur dit: «si quelqu'un». Il n'y a rien qui soit de nature à décourager le plus faible croyant; mais, en même temps, les paroles du Seigneur renferment l'avertissement le plus solennel pour celui qui n'a que la simple profession.