Notes prises dans une méditation - Job 42: 1-6

 ME 1878 page 435

 

Ces versets nous présentent le résultat produit dans l'âme de Job après la discipline par laquelle Dieu l'a fait passer.

Il y a pour l'âme des voies de Dieu après comme avant l'affranchissement. Ses soins continuels envers nous produisent ces exercices d'âme qui y conduisent, comme aussi d'autres qui le suivent quand il n'est plus question de justification. C'est le cas ici; il s'agit des voies de Dieu envers un juste.

Il existe en nous un principe qui doit être brisé, complètement détruit; c'est ce misérable moi, toujours prêt à se manifester. Dans ce livre, nous apprenons ce que Dieu a fait pour briser le «moi» chez Job. Il est amené à dire, lui qui, sans hypocrisie, s'était vanté de sa justice: «J'ai horreur de moi».

Ce n'était donc pas que Job ne fût intègre: il l'était, Dieu le reconnaît (1: 8); mais il ne se connaissait pas, il avait besoin d'apprendre devant Dieu ce qu'il était; il n'était pas soumis et devait être brisé. Il fallait qu'il fût amené dans l'état où Dieu pouvait le bénir, et où il serait, capable de jouir de la bénédiction. Ainsi l'on voit dans ce livre les voies de Dieu envers un juste, pour que celui-ci apprenne à se connaître et puisse jouir de la pleine bénédiction. C'est ce qui a lieu aussi avec le chrétien, comme nous le voyons, par exemple, pour Paul, qui dut apprendre son absolue incapacité et sentir son néant.

En fait, Job était un homme excellent, non seulement par caractère naturel, mais par grâce, — un juste, craignant Dieu et se détournant du mal; mais il ne se connaissait pas et devait faire l'expérience de ce qu'il était en lui-même.

Quant aux amis de Job, c'est une autre catégorie d'hommes; il y a peu de chose à dire d'eux. Ils jugeaient que ce qui se passe dans le monde est une preuve suffisante des voies de Dieu, que la bénédiction terrestre et temporelle se lie nécessairement à la bonne conduite et qu'elle est une preuve de l'approbation de Dieu. C'est pourquoi ils disaient à Job: «Tu fais profession de piété et tu es frappé; tu n'es donc qu'un hypocrite». Et ils avaient tort; leurs raisonnements tombaient à faux. Chez les Juifs, dans le gouvernement de Dieu, la bénédiction temporelle était attachée en effet à l'observation des commandements; Dieu l'avait déclaré: mais cela, nous le savons, n'avait abouti à rien qu'à manifester l'impuissance et la méchanceté de l'homme. Mais ici, ce n'est pas ce dont il s'agit: Job était réellement pieux; Dieu le reconnaît et le déclare: «N'as-tu pas considéré mon serviteur Job, homme intègre et droit?»

Au commencement, nous le voyons comblé de richesses et de biens dans ce monde. Satan vient et l'accuse; il est l'accusateur des serviteurs de Dieu (Apocalypse 12). Dieu veut faire ressortir la justice de Job et confondre Satan. Il lui permet d'éprouver Job, et la question de justice, c'est-à-dire celle de savoir si Job est réellement juste, cette question est d'abord réglée. Mais si Dieu permet à Satan d'éprouver Job pour faire ressortir ainsi la réalité de son intégrité, remarquons en premier lieu que ce n'est pas Satan, mais Dieu qui commence: «N'as-tu pas considéré?» et ensuite que Dieu avait à l'égard de Job une autre pensée que celle de faire ressortir son intégrité en confondant Satan. De fait celui-ci ne parait plus sur la scène dès que Job est justifié. Dieu avait en vue ses voies à l'égard de Job pour le bénir complètement.

Le chapitre 29 nous donne la clef de ces voies de Dieu envers son serviteur. Dieu avait dit à Satan: «N'as-tu pas considéré mon serviteur Job… qui n'a pas son égal sur la terre?» C'est un peu ce que Job pensait de lui-même. Il était sincère, sans doute, mais il se complaisait dans ce qu'il était et faisait, dans l'opinion que l'on avait de lui, dans les honneurs qu'on lui rendait; en un mot, il était occupé de lui-même. Bien différent était Paul qui, lui aussi, énumère (Philippiens 3) tout ce en quoi il pouvait se glorifier. Il avait estimé autrefois ces choses comme ayant de la valeur, mais maintenant il les estime comme des ordures et dit: «J'ai assez de tout cela». Il avait aussi eu besoin d'apprendre à connaître et lui-même et son néant devant Dieu. Dieu l'avait pour ainsi dire, mis en danger en le ravissant jusqu'au troisième ciel, dans le paradis, car la chair était en Paul, et il aurait pu s'enorgueillir à cause de ses révélations extraordinaires. Mais, dans sa bonté, Dieu le garde, au moyen de l'écharde pour la chair, un ange de Satan pour le souffleter. Paul supplie à cet effet trois fois le Seigneur afin que l'écharde fût ôtée. «Non», dit le Seigneur, «c'est pour ton bien, afin que tu voies que, quand tu es faible, ma puissance s'accomplit dans ton infirmité». Et Paul est satisfait; la grâce du Seigneur lui suffit; quand il est faible, c'est alors qu'il est fort. Dieu l'a délivré du danger où il se trouvait à cause de l'excellence de ses révélations.

D'après la Parole, son épreuve consistait en ceci: il avait une abondance de révélations, mais lui, Paul, le canal pour communiquer ces révélations, était méprisable. Il y avait en lui quelque chose qui rendait sa prédication méprisable aux yeux des hommes. Il pouvait donc craindre que cela ne nuisit à son ministère; mais Dieu dit: «Pas du tout, c'est ainsi que ce doit être, afin qu'il soit évident que la puissance est de Dieu, non de Paul». Et Paul est satisfait; il ne veut pas être estimé au-dessus de ce que l'on voit ou entend en lui. C'était certes une épreuve pénible; il en parle aux Galates en disant: «Je vous ai évangélisé dans l'infirmité de la chair, et vous n'avez point méprisé, ni rejeté avec dégoût ma tentation qui était en ma chair»; mais n'importe pour lui: il n'en devient que plus manifeste que tout doit venir de Dieu, et qu'en effet, Dieu seul agit en lui et par lui. (Voyez 1 Corinthiens 2: 3-5; 2 Corinthiens 12: 1-10).

Autrefois Paul, dans sa propre force, avait voulu écraser Christ, mais c'est Christ qui l'a brisé. Il a alors appris à connaître sa faiblesse, et, en même temps la puissance de Dieu. Ainsi, quand nous nous sentons faibles, alors nous sommes forts, mais il faut le sentir. Le résultat pour Paul est qu'il peut dire: Je suis content d'être misérable et humilié, et je veux l'être, afin que Dieu seul soit glorifié. Il a appris cette leçon, que le «moi» en tout doit disparaître: malgré l'excellence, à cause même de l'excellence de ses révélations, cela était nécessaire et Paul est pleinement satisfait.

Job avait tout cela à apprendre. La question de justice est d'abord vidée. Elle se traite entre Dieu et Satan. Satan a la permission de ravir ses biens, de faire périr ses enfants, et après cette espèce de razzia, quand tout est perdu,Job bénit Dieu et dit: «L'Eternel l'avait donné, l'Eternel l'a ôté, que le nom de l'Eternel soit béni». Il justifie Dieu. Mais Satan continue à l'accuser d'hypocrisie, et il reçoit la permission de le frapper dans sa personne, sans toucher à sa vie. La femme même de Job est contre lui, et lui dit «Maudis Dieu, et meurs». Mais Job répond «Quoi! nous recevrions de Dieu les biens, et nous n'en recevrions pas les maux!» Dieu avait dit: «Mon serviteur Job, qui n'a point son égal sur la terre», et le pauvre Job commençait à le penser. Ah! chers amis, il n'y a qu'une seule position dans laquelle le «moi» n'agit plus, où il est arrêté et annulé, c'est dans la conscience de la présence de Dieu. C'est ce qui n'a pas encore eu lieu pour Job, bien que la question de justice soit vidée et que Satan ait été réduit au silence. Aussi ce dernier ne paraît-il plus, et maintenant Job doit avoir affaire avec Dieu.

La piété de Job a été mise à l'épreuve; elle a été reconnue réelle et profonde, et Satan a dû s'arrêter. Mais qu'aurait pensé Job de lui-même si Dieu aussi s'était arrêté? «Ah!» aurait-il dit, «j'ai été intègre dans la prospérité et patient dans l'adversité»; et il aurait été rempli de lui-même et de propre justice encore plus qu'auparavant. Devant l'adversaire, Job est parfaitement justifié. C'est ce que nous voyons aussi quant à Israël. Au chapitre 2 du Deutéronome, Moïse leur rappelle ce qu'ils sont, leurs rébellions durant toute la traversée du désert jusqu'au moment d'entrer en Canaan. «Vous êtes un peuple de col raide», leur dit-il; «vous avez été rebelles à l'Eternel dès le jour que je vous connus». Et quand, à ce même instant, l'ennemi suscite Balaam pour les maudire, celui-ci est forcé de dire: «Dieu n'a point vu d'iniquité en Israël» (Nombres 23).

Cela est vrai de nous aussi. Si je regarde à moi-même, que de manquements, de choses mauvaises! Il ne peut y avoir que de l'humiliation. Mais si je regarde du côté de Dieu, à ma position devant Lui, à mon acceptation en Christ, elle est parfaite, selon ce qui est dit: «Afin que nous ayons toute assurance au jour du jugement, c'est que, comme il est, lui, nous sommes, nous aussi, dans ce monde» (1 Jean 4), et il n'y a aucune crainte, bien que cela me conduise à me juger moi-même. Mon acceptation est une question de justice de la part de Dieu et non de sainteté de ma part, et il faut bien se garder de confondre ces deux choses, car si on le fait, il n'y a pas de vraie paix possible. En effet, dans ce cas, je fonde mon acceptation sur le jugement que je porte de moi-même, de mon état spirituel, chose éminemment variable. Le Seigneur dit: «En ce jour-là, vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en moi et moi en vous». Et ailleurs nous lisons: «Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Mon acceptation, c'est Christ: je suis en Lui, la question du péché est vidée, et il n'y a pas de condamnation. Mais si je suis en Christ devant Dieu, Christ est en moi, et je dois le manifester; c'est alors une question de sainteté.

Ainsi, s'il est question de ma justice devant Dieu, elle consiste en ce que je suis en Christ: position parfaite. Mais s'agit-il de sainteté, c'est que Christ est en moi; je dois le manifester, et là je manque souvent, bien que ce ne soit pas nécessaire. Et pour réaliser cela, il faut porter toujours, partout, dans notre corps, la mort de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre corps. Mais si je confonds ces deux choses, la sainteté et la justice, si je me dis: «Il me faut encore ceci ou cela pour être tranquille», alors je me place sous la loi qui demande que je sois quelque chose pour être accepté. La sainteté, dans la Parole, n'est jamais confondue avec la justification.

Il est très vrai que le coeur du chrétien insiste sur la sainteté, il soupire après toujours plus de sainteté; mais si je fais de mon état intérieur, de mon degré de sainteté, la mesure de mon acceptation, c'est du légalisme. Aussi longtemps que l'on fait cela, on n'a plus la pleine certitude de l'acceptation, et en même temps on abaisse le niveau de la sainteté. La seule mesure de la sainteté, c'est Christ dans la gloire, ainsi qu'il est dit: «Celui qui a cette espérance en lui, se purifie comme Il est pur». Et plus on s'approche de Dieu, plus, à chaque pas, on est capable de voir ce qui convient à cette pureté. Mais l'acceptation doit précéder, et il faut en avoir bien clairement la conscience. Voyez en Zacharie 3: Satan est là qui accuse Jéhosuah devant Dieu. Il voudrait que le tison que Dieu a arraché au feu du jugement y fût rejeté. Mais Dieu justifie, et alors les vêtements sales sont ôtés et Jéhosuah est revêtu de vêtements propres.

Dieu a donc permis à Satan de faire ce qu'il veut à l'égard de Job, pour montrer que celui-ci n'était pas du tout un hypocrite. Mais si Satan en a fini avec Job, Dieu n'en avait pas fini avec son serviteur. Il s'agit maintenant de l'état de Job, et cet état, ce qu'il y a en lui, est manifesté par la compassion que lui témoignent ses amis. Il y avait en Job quelque chose qu'il ne connaissait pas et que Dieu veut lui faire sonder. Il suffit d'une circonstance pour faire sortir ce qu'il y a en effet dans le coeur. Souvent le coeur manque, quand l'affliction que l'on a supportée seul, vient à être connue des autres; la sympathie affaiblit le courage, ou bien on est humilié d'être vu dans cet état d'abaissement. Sans cette dernière épreuve, Job se serait cru parfait. Mais le fait est qu'il maudit son jour et qu'il éclate en plaintes. Ce qu'il y avait dans son coeur est maintenant manifesté, et l'on voit bien que si Dieu l'eût laissé après ses premières épreuves, le mal aurait été encore plus grand. Il aurait doublement bien pensé de lui-même. Mais Dieu permet que le mal qui est en lui sorte, la chair qu'il ne connaissait pas et qui aurait arrêté la bénédiction. Dieu l'aime et veut l'amener à se voir tel qu'il est, afin que la pleine bénédiction puisse découler sur lui. Ses amis peuvent s'efforcer de démontrer qu'il est frappé avec justice et qu'il a agi en hypocrite; il repousse cette accusation avec raison, car sa piété est réelle, bien que la chair fût là. Il se tourne donc vers Dieu sur lequel il compte, quoique son coeur ne soit pas soumis. Il est évident que son coeur connaissait Dieu. «Oh! si je savais comment le trouver», dit-il, «j'irais jusqu'à son trône». Mais il fallait que la chair, dont il ne soupçonnait pas l'existence, sortit et se manifestât.

Ah! chers amis, si nous étions toujours en la présence de Dieu d'une manière consciente, nous n'aurions pas besoin pour connaître le mal qu'il se montrât au dehors. La lumière manifeste tout, et nous trouvant dans la lumière, nous verrions immédiatement ce qui ne convient pas à la présence de Dieu. Ainsi, supposons que je sois orgueilleux, si c'est dans la communion avec Dieu que je l'ai appris, je me tiendrai sur mes gardes, et je serai d'autant plus humble. On reste alors dans l'humilité, dans la dépendance de Dieu; on demande son secours pour éviter le mal que l'on connaît, et l'on marche bien.

On découvre, en effet, le mal en la chair de deux manières: en communion avec Dieu, ou, pour ainsi dire, en communion avec le diable. Dans le premier cas, on reste devant Dieu, et là, on apprend à connaître le mal pour le vaincre. Mais si, par négligence, je ne suis pas devant Dieu, je tombe: l'orgueil ou toute autre chose se manifeste. Cependant nous n'avons jamais besoin de pécher; si je pèche, c'est que j'ai été négligent; mais si nous nous tenons toujours devant Dieu, la vie de Christ se manifeste en nous, et cela aussi longtemps que nous restons ainsi en la présence de Dieu:

Job n'était pas devant Dieu. En maudissant son jour, le mal qui était en lui et que la satisfaction de lui-même cachait à ses yeux, ce mal se manifeste. Ainsi, si nous ne nous tenons pas en la présence de Dieu, la moindre tentation fera sortir le mal. Si Job s'était tenu humblement devant Dieu, il n'y aurait pas eu lieu pour lui à ce qu'il fût humilié. Si je suis humble devant Dieu, je ne serai pas humilié, et il n'y a rien de plus humiliant pour le chrétien que de déshonorer le Seigneur en laissant agir la chair. Or, là où il n'y a pas une vie intime de communion avec Dieu, dans sa dépendance, dans la prière, la chair se montre.

La source de toute la discipline de Dieu envers Job se trouve au chapitre 29. Job pensait beaucoup de lui-même; il fallait que Dieu lui fit voir ce qu'il était. Si nous veillons et prions, dans l'humilité, il n'est pas besoin de faire sortir au dehors ce que nous sommes au dedans, parce que cela est continuellement jugé en la présence de Dieu.

Voyez Pierre. Le Seigneur a prié pour lui, non pour qu'il ne soit pas criblé, mais pour que sa foi ne défaille pas. Le crible lui était nécessaire. La chair était là disant: «Je te suivrai». Il faut que Pierre apprenne à la connaître, à se connaître lui-même. Il avait confiance en lui-même; il avance dans cette confiance et il renie Celui que cependant il aime. Mais le Seigneur avait prié pour lui, et le résultat de cette prière, c'est qu'après sa chute, sous le regard du Seigneur, Pierre pleure amèrement. Il était sincère dans sa résolution de suivre Jésus, mais il lui fallait apprendre quelle était sa faiblesse. Et ce que je dis ici, ne se rapporte pas à l'expérience que nous avons à faire de notre impuissance pour arriver à l'affranchissement; il s'agit de notre marche. Si ce n'est pas dans la communion de Dieu que je découvre ce que je suis, je l'apprendrai certainement devant le monde par une chute.

Maintenant, voici ce qu'Elihu nous apprend au sujet de ces voies de Dieu envers les justes: «Il ne retire point ses yeux de dessus le juste» (Job 36: 7). Voilà la clef de toutes ses voies. Il n'y a pas un moment où Dieu ne pense à nous, à notre état, à nos circonstances. La main de Dieu agit constamment à notre égard: quelle bénédiction! Il pense toujours à nous en amour. Le croyons-nous? Aimons-nous qu'il s'occupe ainsi continuellement de nous? C'est autre chose encore que de se connaître. On n'aime peut-être pas à être ainsi connu de Lui; on veut conserver à part soi quelque chose de soi-même, de sa propre volonté: mais Lui prend connaissance de tout, et c'est pour notre bien; pour nous châtier, s'il le faut; mais de toutes manières c'est une joie pour celui qui le sert.

Elihu parle selon Dieu; il montre que le monde n'est pas la preuve du gouvernement de Dieu, mais du péché de l'homme. Il fait voir que le monde n'est pas une démonstration de justice pour ceux qui appartiennent à Dieu, mais que, quoiqu'il arrive, ses yeux ne se retirent pas de dessus les justes. Est-ce que nos coeurs aiment à être ainsi toujours sondés par le regard de Dieu? La grande affaire est de pouvoir jouir de Lui. L'âme doit être dans un état où la chair soit jugée. Nous ne sommes rien en présence de Dieu, et cependant qu'il est facile, même quand on a été devant Lui, de se croire quelque chose; je dois juger la chair jusque dans cette recherche de soi-même, chose si subtile, mais réelle. Parce que l'on a joui de Lui, on a une tendance à s'élever; mais alors on est sorti de devant Lui. Quand l'âme est réellement en sa présence, la chair est muette et l'on est heureux; mais si l'on sort de cette présence, la chair tend de nouveau à être quelque chose. Ce n'est pas tout que Christ soit notre justice, bien que ce soit sans doute la première chose; il faut que nos âmes, nos coeurs, soient en relation avec Dieu, selon ce qu'il est Lui-même.

Ne pas penser à nous-mêmes, mais aux autres, c'est notre droit en Christ, et voilà le bonheur. Par droit nous sommes morts; un mort ne pense pas à lui-même». Qu'il n'y ait donc rien en nous qui ne soit de Christ; rien, ni en pensées, ni en paroles, ni en actes, qui ne soit le fruit de Christ. Ne pensant plus à nous-mêmes, nous pouvons penser à Dieu avec un bonheur ineffable. Mais, quant à Dieu, il pense toujours à nous, et, s'il s'agit de son gouvernement, cela peut aller jusqu'à la mort, comme nous le voyons chez les Corinthiens. Il faut que les prétentions de la chair soient découvertes et jugées, puis l'âme est restaurée.

C'est ce que nous voyons chez Pierre. Il a cru avoir plus de dévouement que les autres pour le Seigneur, et seul il l'a renié; alors est venu l'amertume du repentir, et l'extrême humiliation, la découverte qu'il n'était rien. Voilà ce qui a fait de Pierre un apôtre; c'est l'académie où il a étudié. Aussi, plus tard, quand Jésus le rencontre au bord de la mer de Galilée, après sa résurrection, il ne lui fait pas un seul reproche, il ne lui dit pas un mot de son reniement; il va droit à la racine du mal, la confiance en lui-même, et lui demande: «M'aimes-tu plus que ne font ceux-ci?» Pierre ne se vante pas, ne se compare pas aux autres; il en appelle au Seigneur lui-même, et Pierre humilié peut paître Ses brebis. L'oeuvre a été si complète que, quelques jours plus tard, Pierre peut dire aux Juifs: «Vous avez renié le saint et le juste». Il peut leur dire que leur ruine vient justement de ce que lui-même a fait. Tel est le résultat d'une conscience parfaitement purifiée, telle est l'âme qui jouit de sa pleine acceptation devant Dieu en Christ. Mais Pierre avait pleuré abondamment sur son péché, et le Seigneur qui, dans l'intervalle, était mort pour lui, lui confie ses brebis. Il peut avoir confiance en Pierre, quand Pierre a perdu toute confiance en soi-même.

Revenons à Job. Quand ses amis l'accusent d'hypocrisie, il est révolté; la chair se montre; il revendique sa justice et dit: Non, «l'oeil qui me voyait déposait en ma faveur». Il pensait de grandes choses de lui-même. Mais quand il a été amené, en la présence de Dieu, tout change; il dit: «Maintenant que mon oeil t'a vu, j'ai horreur de moi». Voilà où il a été amené, où il faut que nous soyons amenés, mes chers amis.

Nous sommes pardonnés et justifiés, mais quand il s'agit de notre état, de communion avec Dieu, il faut que ce qui est au fond de notre coeur soit mis à nu, même ce dont nous ne nous doutions pas; il faut en venir à la ruine de nous-mêmes. Le mal a été manifesté; Job voit ce qu'il est en la présence de Dieu; c'est là seulement qu'il est complètement jugé. Si nous en sommes là, que pouvons-nous penser de nous-mêmes? Quand je vois ce que Christ a souffert, ce que le péché est aux yeux de Dieu, et que je jouis de la présence et de la sainteté de Dieu, le péché pour moi est une horreur. Le coeur a besoin d'en finir avec tout ce qui empêche de penser à Lui. Quand je marche ainsi dans cette communion avec Dieu, sa présence est pour mon coeur joie et bonheur; mais si j'ai contristé le Saint Esprit, la présence de Dieu me montre ce que j'ai fait, et il y a de la peine.

On voit souvent des personnes qui marchent paisiblement, mais sans se juger en la présence de Dieu. Si la maladie vient, si elles se trouvent sur le lit de mort, elles sont troublées, elles craignent même pour leur position, parce qu'elles ne se jugeaient pas, et que maintenant la présence de Dieu leur révèle leur état. Mais si l'on se juge continuellement en la présence de Dieu, Dieu est pour le coeur une source constante de joie. Restant toujours devant Lui, on ne pense plus à soi; on prend plaisir à ce qui est selon Lui; on est heureux. Hélas! notre vie est souvent si superficielle; on marche comme si Dieu n'était pas là. Ce n'était pas le cas de Paul: «Je suis», disait le bienheureux apôtre, noir «je serai», mais «je suis manifesté à Dieu», c'est-à-dire, je marche en sa présence dans l'intégrité d'un coeur à découvert devant lui; d'un coeur qui ne pense plus à soi, mais à Celui qui est la source de tout bonheur; maintenant encore en faiblesse, bientôt en gloire.

Telle est l'histoire des voies de Dieu envers Job. Elles ont eu leur source en ce que «Dieu ne retire pas ses yeux de dessus le juste»; qu'il nous donne de ne pas retirer nos yeux de dessus Lui!