Exode 24 et 1 Pierre 1: 2

ME 1878 page 474

 

Au chapitre 24 de l'Exode, Israël promit d'obéir, mais cette obéissance était celle de la loi. Ensuite le sang des victimes fut répandu; Moïse en fit aspersion sur le livre aussi bien que sur le peuple (versets 7, 8). Le sang ne signifiait pas ici l'expiation, mais il était la sanction déclarative que Dieu punirait toute désobéissance aux exigences de sa loi. La grâce de Dieu applique le sang de Christ d'une manière tout à fait différente, comme nous pouvons le voir en 1 Pierre 1: 2. L'apôtre décrit le chrétien d'une façon qui ne peut que rappeler Exode 24: il dit que nous sommes élus, selon la préconnaissance de Dieu le Père, en sainteté de l'Esprit, pour l'obéissance et l'aspersion du sang de Jésus Christ. Les Israélites étaient élus comme nation, selon l'appel souverain de Jéhovah, le Dieu de leurs pères. Ignorants de Dieu, aussi bien que d'eux-mêmes, ils osèrent se placer devant Lui sur le terrain de sa loi. Ils furent en conséquence séparés par l'ordonnance de la circoncision et d'autres préceptes: ils furent séparés des nations par cette sanctification extérieure dans la chair, pour obéir à la loi, sous cette solennelle et terrible menace de mort, dont le sang était la figure. Le sang menaçait de mort quiconque transgressait. La position du chrétien est complètement différente: nous sommes élus comme enfants «selon la préconnaissance de Dieu le Père, en sainteté de l'Esprit», séparés ainsi pour Dieu par la puissance de l'Esprit, dès le premier moment de notre conversion. C'est cette séparation vitale pour Dieu, et non la sainteté pratique, qui est appelée ici «sainteté de l'Esprit», et qui est réellement partout le sens le plus fondamental de cette expression. Non pas qu'il n'y ait pas une sanctification pratique, sur laquelle l'Ecriture insiste amplement ailleurs, mais ici, dans Pierre, si l'on introduit dans ce verset l'idée de la sanctification pratique, on détruit l'évangile de la grâce, quels que soient les prétextes ou les intentions dont on se prévaut pour cela.

Pour faire bien comprendre ce que c'est que la sanctification, ou la sainteté, dans 1 Pierre 1: 2, supposons un homme qui jusqu'ici a été complètement indifférent à la parole de Dieu: il l'entend aujourd'hui, et il reçoit Jésus en toute simplicité, comme le don de l'amour de Dieu. Il n'a peut-être pas immédiatement la paix avec Dieu; mais il est arrêté, quoi qu'il en soit; il désire sincèrement connaître l'évangile. Si l'Esprit de Dieu, a ainsi opéré dans un homme, cet homme est séparé pour Dieu de tout ce qu'il était; c'est là ce que Pierre appelle «sainteté de l'Esprit»; car, ainsi que nous l'avons dit, nous sommes sanctifiés «pour l'obéissance», qui est le tout premier désir implanté dans l'âme, dès que Dieu a réellement opéré en elle. Un homme, comme celui dont nous parlons, peut être très ignorant, mais son coeur, quoi qu'il en soit, est déterminé à obéir au Seigneur; son désir est tourné vers Dieu. Il ne pense pas seulement à une manière légale d'échapper au jugement terrible, qu'il sait être la juste part de ceux qui méprisent Dieu. La vérité a touché sa conscience par la grâce, et la miséricorde de Dieu, quelque imparfaitement qu'il la discerne, suffit pour attirer son coeur à l'obéissance. Ainsi il est sanctifié par l'Esprit pour l'obéissance et l'aspersion du sang de Jésus Christ. Il veut maintenant obéir, parce qu'il a une nouvelle nature par la foi au nom de Jésus, et désire avoir part à la grâce de Dieu qui fait aspersion du sang de Jésus Christ sur le coupable. Il veut obéir comme Jésus; non sous la pression d'une obligation imposée, comme un Juif, et il est placé sous l'aspersion du sang de Jésus en rémission de ses péchés, au lieu d'être placé sous l'aspersion du sang qui menace de mort quiconque transgresse la loi. Le chrétien trouve son plaisir à obéir, et est déjà pardonné par la foi en Jésus et par son sang.

Telle est la sainteté dont parle Pierre: elle existe dès le début d'une oeuvre réelle intérieure dans l'homme, même avant que l'âme connaisse le pardon et la paix. Mais il y a aussi, à côté de cela, la puissance pratique du Saint Esprit opérant dans le coeur et dans la conscience, pour nous séparer ensuite de plus en plus par la vérité pour le Seigneur; et c'est là la sanctification pratique. Elle a des degrés, et est ainsi relative. Mais il y a, dans toute âme qui croit, la séparation absolue du Saint Esprit dès le moment de la conversion; Dieu nous sépare de ce monde pour être à lui, comme une pierre qui est séparée de la montagne, — quoique cette pierre ait besoin encore d'être taillée. Il y a donc deux sens bien distincts de la sanctification: l'un, absolu, selon lequel un homme est séparé une fois pour toutes du monde, pour Dieu; l'autre, relatif, parce qu'il est pratique, et qu'il diffère ensuite en mesure dans la carrière de chaque chrétien. «Mais vous avez été lavés, mais vous avez été sanctifiés, mais vous avez été justifiés, au nom de notre Seigneur Jésus, et par l'Esprit de notre Dieu» (1 Corinthiens 6: 11). La sanctification a ici, en substance, le même sens que dans 1 Pierre 1: 2; et elle a sa place, comme aussi l'apôtre la lui donne, avant la justification. «Lavés» se rapporte à l'eau de la Parole, appliquée à l'homme par la puissance de l'Esprit, et se rapporte plutôt au mal; «sanctifiés» a trait davantage au bien qui a attiré le coeur; et puis il y a «justifiés», qui se rapporte, non à ce moment où le prodigue revient vers son père, mais à ce que le père fait quand il le revêt de la plus belle robe: alors, selon 1 Corinthiens 6: 1, il est non seulement lavé et sanctifié, mais aussi justifié. L'apôtre a donc en vue, dans ce verset, l'application de la vertu tout entière de l'oeuvre de Christ. Cette application n'a pas lieu toujours immédiatement au moment de la conversion. Elle peut et elle devrait, en un sens, la suivre très vite; cependant, il est loin d'en être toujours ainsi; et, de fait, il y a, et peut-être il doit y avoir toujours, un temps plus ou moins long, avant que l'âme soit en paix et heureuse. Du plus au moins, Christ a toujours quelque chose à faire dans l'âme, entre le toucher qui a arrêté la maladie, et la parole qui dit avec non moins d'autorité que d'amour: «Aie bon courage, ma fille, ta foi t'a guérie; va t'en en paix» (Luc 8: 43-48). L'intervalle qui sépare le retour de l'âme à Dieu, d'avec le moment où cette âme a la paix, n'est pas toujours si court, comme beaucoup d'entre nous le savent à leurs propres dépens. Mais il demeure toujours vrai que cette différence dont je parle, existe. Il me parait important de la rappeler, parce qu'elle est d'une grande importance pratique et aussi doctrinale, mettant en contraste la position du chrétien avec celle du Juif. La tendance de quelques-uns à insister sur l'accomplissement de toute l'oeuvre en un seul instant, est une réaction amenée par l'incrédulité populaire, qui, si elle admet en aucune manière la paix, ne l'admet que comme une chose à laquelle il faut atteindre par un travail lent, laborieux, et d'une issue incertaine. Mais gardons-nous de tomber dans une erreur, même quand ce serait la plus petite, pour éviter une erreur plus grande; et c'est certainement une erreur, que de confondre, en un seul acte, toutes les voies de Dieu envers l'âme.