Sur le ministère

Notes prises aux conférences de Lausanne – Juin 1878

 ME 1879 page 161

 

Nous trouvons en Ephésiens 4 la source d'où découle le ministère, — c'est Christ monté en haut, — et le vrai caractère du ministère à un point de vue très large et très élevé.

Au verset 7, nous avons le principe; le verset 8 nous montre le ministère en rapport avec Christ. Au chapitre 12 de la première épître aux Corinthiens, nous le voyons en rapport avec l'Esprit.

Les deux bases sur lesquelles repose le ministère, telles que nous les présente le chapitre 4 des Ephésiens, sont: 1° Satan emmené captif par Christ; 2° Christ, monté en haut, recevant les dons comme homme, dans l'homme, et pour les hommes (Psaumes 68). Il se sert de ceux-là mêmes que Satan avait dans sa puissance, pour combattre Satan.

Ainsi la base, c'est la victoire de Christ sur Satan. «Il a emmené captive la captivité», expression hébraïque pour dire faire captif celui qui retenait des captifs (Juges 5: 12); puis il a reçu en homme (be adam), non dans la puissance divine, mais comme homme, des dons pour les donner. Le passage du Psaume 68 ajoute: «même entre les rebelles», ce qui se rapporte aux Juifs restaurés comme peuple; nécessairement Paul n'en dit rien ici.

Si l'on compare la liste des dons dans le chapitre 4 des Ephésiens, avec celle de 1 Corinthiens 12, on remarque une grande différence. Dans cette dernière, on voit des choses qui n'existent plus actuellement: les dons qui étaient l'ornement de l'Eglise ont disparu; il n'y avait pas de promesse indiquant qu'il dussent continuer. Mais en Ephésiens 4, il s'agit des dons qui se rapportent aux soins de Christ pour l'Eglise et qui ne peuvent manquer. Ce qui est présenté dans l'épître aux Corinthiens, ce sont les manifestations de la puissance de l'Esprit; il n'y a pas de liste formelle, mais l'ordre des différents dons desquels il est parlé, selon leur importance. Et remarquons bien que tout était soumis à la direction de la Parole. Le Dieu d'ordre est au-dessus de la puissance.

En Ephésiens, nous avons donc les soins de Christ pour l'Eglise (voir chapitre 5: 25-27). Les apôtres et prophètes sont les premiers mentionnés; ils sont le fondement une fois posé; on ne le pose pas jusqu'à la fin (bien qu'il puisse y avoir des hommes suscités pour quelque oeuvre extraordinaire, comme Luther, par exemple). Les autres dons continuent.

Le premier fait est donc que Satan ayant été vaincu, l'homme (Christ) qui a vaincu, communique à d'autres, comme Seigneur, ce qu'il faut pour combattre Satan, et c'est là le ministère. L'autorité sous laquelle il s'exerce, c'est celle du Seigneur, comme il est dit en 1 Corinthiens 12: 5. L'Esprit est la puissance qui distribue les dons (verset 11).

Remarquons en passant que, dans tout ce qui s'opère de la part de Dieu, c'est le Saint Esprit qui est l'agent immédiat. Ce n'est pas que le Père et le Fils n'agissent pas: «Le Père qui demeure en moi, c'est lui qui fait les oeuvres» (Jean 14: 10). «Si moi je chasse les démons par l'Esprit de Dieu…» (Matthieu 12: 28). Ainsi Christ reçoit toutes les choses par lesquelles Dieu opère, et l'opération se fait par la puissance du Saint Esprit.

Le second principe relatif au ministère (Ephésiens 4: 9 et suivants), c'est que Christ est monté en haut pour recevoir. Le ministère découle de ce fait: Il est monté en haut. Mais c'est qu'auparavant il était descendu dans les parties inférieures de la terre d'où il est remonté au-dessus de tous les cieux. Nous avons donc là la rédemption qui remplit tout de sa puissance, du hadès jusqu'au trône de Dieu. «Il est au-dessus de toute principauté, autorité, puissance et domination», après avoir accompli la rédemption, et c'est cette rédemption accomplie qui est la source du ministère.

Au chapitre 1: 20-23, nous lisons tout ce qui se rapporte à la gloire de Christ, ainsi monté au-dessus de toutes choses: «Il remplit tout en tous». Ce n'est pas comme Dieu qu'il remplit tout, mais comme homme, descendu dans la mort et monté dans les cieux; une fois au-dessous de la création, mais maintenant au-dessus de tout. Il remplit donc tout selon l'étendue de cette oeuvre.

Ainsi, comme homme, suivant ces deux principes, ayant vaincu Satan, étant descendu, puis monté auprès de Dieu, dans cette position il donne des dons, et c'est là le ministère. Combien nous sommes petits en présence de cette oeuvre, devant ce déploiement de gloire et de puissance. Il remplit tout, non comme Dieu, mais dans la rédemption accomplie. Un homme (il est Dieu, sans doute, mais c'est comme homme) est assis là où un ange ne pouvait atteindre; un homme est au-dessus de tout; mais, en même temps, il est plus qu'un homme, sans quoi il n'aurait pu accomplir ce qu'il a fait.

Christ étant ainsi monté, le Saint Esprit descend; par la foi, nous sommes mis en relation avec cette puissance qui ainsi agit en nous. Christ a vaincu Satan; il m'a pris, moi qui étais un captif; il m'arrache à sa puissance, il brise mes chaînes, puis il me remplit d'un don par le moyen duquel, dans la puissance du Saint Esprit, je combats maintenant Satan qui me tenait captif. Combien le christianisme est grand quand on le saisit dans son vrai caractère! Les choses ne sont pas encore, en fait, remplies de la gloire de Christ; mais le Saint Esprit vient maintenant, comme témoignage, dans le croyant individuellement, ou comme don pour développer et faire connaître ce qui se rapporte à Christ et à sa gloire.

Nous avons dans le ministère deux caractères généraux; d'abord le témoignage rendu à la grâce et à la rédemption qui délivre de la puissance des ténèbres et introduit dans le royaume du Fils bien-aimé: c'est l'oeuvre de l'évangéliste. Ensuite, il y a l'édification du corps de Christ, pour arriver jusqu'à la stature de la plénitude du Christ, la plénitude de celui qui remplit tout en tous. «Il prendra de ce qui est à moi et vous l'annoncera», dit le Seigneur du Saint Esprit qu'il allait envoyer. L'effet de l'opération du Saint Esprit par les dons, c'est de faire croître l'homme selon cette stature de Christ; c'est de former le nouvel homme, Christ étant là comme vie, de le faire croître jusqu'à la stature de Christ.

Voyez, quant à ce développement, ce qui est dit en 1 Jean 2. Plusieurs choses sont adressées aux petits enfants et aux jeunes gens, mais, arrivés aux pères, nous n'en trouvons qu'une: «Vous connaissez Celui qui est dès le commencement», c'est-à-dire Christ. Toutefois cette croissance n'est pas accomplie avant que nous soyons dans la gloire, elle se fait continuellement; mais la différence va toujours en diminuant, comme il arrive en mathématiques pour ces lignes courbes qui s'approchent indéfiniment de leurs asymptotes. Il faut être fourni de la connaissance de Christ pour aller à sa rencontre, mais la perfection ne sera réalisée que dans la gloire. Voyez ce que dit Paul: «Que vous soyez enracinés et fondés dans l'amour; afin que vous soyez capables de comprendre avec tous les saints quelle est la largeur et la longueur, et la profondeur et la hauteur» (Ephésiens 3: 17, 18); il ne dit pas de quoi; il se perd dans l'étendue de la gloire.

«Jusqu'à ce que nous parvenions tous à l'unité de la foi»; la foi est ici la communication de ce que l'on croit, c'est la même foi pour tous. Paul suppose la venue de Christ en disant: «jusqu'à». «L'unité de la foi», ce qui révèle la relation avec Dieu, «et de la connaissance du Fils de Dieu»; Paul présentait à une âme tout ce qui est en Christ pour rendre tout homme parfait en Lui (voir Colossiens 1: 28), non qu'il pensât avoir atteint le but, mais il y tendait (Philippiens 3).

Le «corps» (verset 12) indique notre relation avec Christ homme; comme «enfants», nous sommes en relation avec Dieu le Père et, dans ce cas, Christ est présenté comme premier-né entre plusieurs frères. Christ dans la gloire, et notre relation avec Lui comme membres de son corps, qui est l'assemblée, sont deux choses qui vont ensemble, comme nous le voyons au chapitre 1: 23.

Pour relier entre elles les diverses parties du passage qui nous occupe (Ephésiens 4), il faut couper au verset 13: «Il a donné etc., jusqu'à ce que». Cela dure jusqu'à ce moment. Mais, au verset 16, nous n'avons plus le ministère proprement dit, mais les jointures. D'abord c'étaient des dons particuliers, s'exerçant envers les individus du dehors pour les appeler, ou envers les saints en vue de leur perfection. Ici ce n'est pas cela; ce sont bien des dons, sans doute, mais non des ministères spéciaux. Un homme silencieux dans les assemblées, mais sage, apportant le calme, le bon conseil, est une de ces jointures. Il est l'huile dans les rouages (*).

(*) Dans ce passage, «duquel» signifie hors duquel et dépend de «produit», et indique que cela vient de Christ comme tête.

Quant aux dons spéciaux, remarquons que «prophète» va avec apôtre (chapitre 2: 20). Les deux mots forment comme une seule et même expression. Cependant les prophètes, dans le Nouveau Testament, sont aussi désignés à part. Celui qui prophétise, parle pour édifier, exhorter, consoler; c'est l'effet de ce qu'il dit. Pour prendre un exemple, on ne connaissait pas la venue du Seigneur, quelqu'un la met en lumière, cela se rattache à la prophétie. Au commencement, la révélation n'était pas complète comme maintenant; Dieu a donc donné des écrits prophétiques (Romains 16: 6). Ainsi «prophète» dit plus que «docteur». Celui-ci ne fait qu'exposer et développer la vérité révélée. Il y a chez le prophète une action plus immédiate de l'Esprit de Dieu.

Il peut aussi y avoir des apôtres dans un sens inférieur, mais alors on ne peut pas dire qu'ils sont le fondement. Tels étaient Andronique et Junias (Romains 16: 7). Dans l'apostolat de Barnabas il y a quelque chose de plus positif, l'Esprit Saint avait dit: «Mettez-moi à part Barnabas et Saul, pour l'oeuvre à laquelle je les ai appelés» (Actes des Apôtres 13: 2).

Des docteurs et des pasteurs, il est précieux d'en avoir, mais le pasteur a davantage à coeur le bien des âmes; il soigne les brebis. Quant aux docteurs, rappelons-nous l'exhortation de Jacques: «Ne soyez pas beaucoup de docteurs,… car nous faillissons tous à plusieurs égards». C'est une pauvre chose quand on enseigne les autres plus que soi-même. On se vantait beaucoup à Corinthe de ses dons; on parlait des langues et personne ne comprenait. A quoi cela servait-il pour l'édification?

Une chose importante, c'est de «marcher d'une manière digne de l'appel»; l'effet de la présence de Dieu, c'est de donner l'humilité, la patience; sans cela, on a beau se dire prophète: ce n'est pas Dieu qui agit. Ce qui n'édifie pas, n'est pas selon Dieu. Voyez à Corinthe. Les manifestations de puissance pouvaient être, et étaient l'effet de l'action immédiate du Saint Esprit, mais ce qu'il fallait de plus, c'est que tout se fit pour l'édification (1 Corinthiens 14: 26-33).

Il faut faire bien attention à ceci. On est sous l'action, non sous l'autorité du Saint Esprit. Il est nécessaire de comprendre ces deux choses: 1° ce n'est pas sous l'autorité du Saint Esprit que l'on parle; 2° ce qui n'est pas pour l'édification n'est pas selon Dieu. On parle sous l'action, dans la puissance du Saint Esprit. La puissance est de Lui; mais l'autorité réside dans le Seigneur Jésus. C'est Lui qui est le Seigneur (2 Corinthiens 3: 17, 18), et la Parole règle et dirige.

En 1 Corinthiens 12: 4-6, il ne s'agit pas de la Divinité en elle-même, de la Trinité, car alors nous trouvons Père, Fils et Saint Esprit, mais dans ce passage, c'est Dieu au-dessus de tout, — le Seigneur, Christ, un homme glorifié, — puis l'Esprit qui agit ici-bas. C'est la même chose en Ephésiens 4: 4-6. Le grand fait du christianisme est qu'un homme a été fait Seigneur. Il est dangereux de parler de l'autorité du Saint Esprit, car si je prétends parler par l'autorité du Saint Esprit, ce que je dis devient l'autorité. La puissance est dans l'Esprit, mais non l'autorité. L'autorité qui règle tout, c'est le Seigneur, et il est même dit: «Les esprits des prophètes sont soumis aux prophètes». Aussi trouvons-nous ce fait: Un homme est inspiré pour parler en langues et, cependant, il doit se taire; la parole du Seigneur, l'autorité, le dit.

Le Saint Esprit agit, distribue, mais quand cela est donné, on agit avec ce qui est donné, sous l'autorité de Christ qui règle par la Parole.

Ainsi quand on cite, pour justifier que le Saint Esprit agit comme autorité, le chapitre 15 des Actes: «Il a semblé bon au Saint Esprit et à nous», on ne doit pas voir là deux autorités distinctes, celle du Saint Esprit, et celle des apôtres. Ces mots se rapportent à ce qui avait été fait pour Corneille (Actes des Apôtres 10: 19, 44; 11: 12, 15). L'Esprit Saint, tombant sur Corneille et les gentils, avait été la manifestation du fait que les gentils ont part au même salut que les Juifs, et les apôtres constatent le fait. C'est ainsi qu'il a semblé bon au Saint Esprit et aux apôtres.

Mais, quant à l'autorité, c'est Jésus, l'homme qui a été crucifié et que Dieu a fait Seigneur et Christ. Ainsi, quand le Saint Esprit fait un apôtre, de qui est-il apôtre? De Christ. Il y a donc plusieurs administrations, mais un seul Seigneur. Quand il s'agit de l'administration des choses, l'énergie et l'activité c'est le Saint Esprit, mais l'autorité appartient au Seigneur qui est chef de l'administration.