L'Eglise comme maison

Notes prises aux conférences de Lausanne – Juin 1878

ME 1879 page 241

 

Nous la trouvons mentionnée en Ephésiens 2: 19-22. Deux choses sont à remarquer dans ce passage: 1° Le temple qui croit; il n'est pas fini. La maison de Dieu, dans ce sens, est en progrès «L'édifice croit, pour être un temple saint». 2° Mais en même temps, dès à présent, il y a une habitation où Dieu demeure par l'Esprit. Il faut bien faire la différence de ces deux choses.

Il faut distinguer aussi entre ce que le Seigneur bâtit, et ce que bâtit l'homme.

En Matthieu 16: 16-20, se trouve la première mention de l'assemblée que le Seigneur devait bâtir, et c'est lorsque, pour la première fois, il est reconnu non pas seulement comme Fils de Dieu, mais comme Fils du Dieu vivant, comme puissance de vie. C'est Christ qui bâtit: «Je bâtirai», dit-il, et contre cette puissance de vie qui édifie l'assemblée, contre l'assemblée édifiée par cette puissance, les portes de l'enfer ne peuvent prévaloir. Cela se lie à Christ; l'assemblée repose sur lui, Fils de Dieu, déclaré tel en résurrection; Satan ne peut rien contre. «Je bâtirai»: c'est le temple qui s'élève, qui n'est pas encore achevé.

Remarquons en passant, qu'ici nous n'avons rien à faire avec le corps. Une maison, c'est là où je demeure; le corps, c'est moi-même. La maison que bâtit Christ et le corps se composent des mêmes matériaux, mais ce n'est pas la même chose.

Nous retrouvons, dans la première épître de Pierre (2: 4, 5), la même figure. Ce qui compose la maison, ce sont des pierres vivantes. Il n'y a aucun instrument mis eu vue. Les pierres vivantes viennent s'ajouter à Christ la pierre vivante, rejetée des hommes, précieuse auprès de Dieu. C'est l'oeuvre de Dieu, indépendamment de l'instrument, c'est une chose réelle qui subsiste sans que rien y puisse porter atteinte; c'est ce que nous avons vu en Ephésiens 2.

Les trois passages que nous venons de citer, montrent donc Christ agissant pour bâtir, des pierres vivantes qui s'approchent de lui, et le temple saint qui s'élève. La puissance de l'enfer ne peut rien contre cette oeuvre.

L'Eglise comme maison, ainsi que nous venons de la considérer, est la seule idée que l'on en ait dans le monde religieux. Les pierres vivantes viennent, et à la fin, dans la gloire, le tout sera manifesté complet.

Mais en attendant que cela soit accompli, nous sommes édifiés pour être un tabernacle, une habitation de Dieu par l'Esprit (Ephésiens 2: 22).

Comme Dieu l'avait établi d'abord, il n'y avait pas de différence entre le corps et la maison; c'était une seule et même chose, bien que l'idée différât, c'est-à-dire que ces deux figures étaient destinées à présenter l'Eglise sous un aspect différent. Ceux qui composent l'un, composaient l'autre.

Dans le chapitre 3 de la première épître aux Corinthiens, c'est autre chose. Nous y avons la maison considérée au point de vue des instruments humains employés à la bâtir. La chose est donc confiée à la responsabilité de l'homme. Paul est un sage architecte qui pose le seul vrai fondement. C'est un homme sage, mais c'est un homme.

Que chacun considère, voilà la responsabilité de l'homme qui bâtit. Ce n'est pas Dieu qui édifie, mais l'homme dans sa responsabilité, ce qui, d'ailleurs, n'empêche pas l'oeuvre de Dieu de s'accomplir. Dieu ici emploie des instruments (verset 9) qui sont responsables de la manière dont ils bâtissent.

On a confondu les deux choses: la maison que Dieu bâtit et ce que l'homme édifie. L'église romaine a prétendu être ce que Christ édifie, et contre quoi les portes de l'enfer ne peuvent prévaloir; erreur trop grossière pour qu'il soit nécessaire maintenant de la réfuter.

Parmi ceux qui édifient, nous avons d'abord celui qui est à la fois bon chrétien et bon ouvrier, édifiant sur le seul fondement une fois posé, de l'or, de l'argent, des pierres précieuses; choses réelles, durables et pouvant supporter l'épreuve du feu, c'est-à-dire du jugement.

En second lieu vient celui qui, tout en étant vraiment chrétien, est un mauvais ouvrier qui emploie de mauvais matériaux, du bois, du foin et du chaume. Ce sont des doctrines erronées, qui ne valent rien, comme celles des romanistes, des perfectionnistes, etc., provenant des traditions et des spéculations humaines. Du reste, ce qui est édifié, c'est à la fois les doctrines et les personnes, selon ce que nous voyons autre part que la bonne semence représente en même temps la parole et les enfants du royaume.

En troisième lieu, Paul nous présente ceux qui détruisent le temple de Dieu, les hérétiques qui tendent à renverser le fondement. Il s'agit alors d'hérésies positives.

Celui qui, tout en étant chrétien, a mal bâti, échappe, mais comme à travers le feu, où toute son oeuvre, travail inutile, est brûlée. Quant au jour du jugement, ce n'est pas toujours le grand jour; mais déjà maintenant.

Ainsi il y a cette différence entre ce que Christ bâtit et ce qui est fait sous la responsabilité de l'homme: dans les deux cas, c'est bien le temple de Dieu, parce que Dieu y habite par son Esprit, mais, dans le premier, tous les matériaux sont bons, tandis que, dans le second, ils ne le sont pas tous.

Le commencement se trouve en Ephésiens 2: 22; c'est selon les conseils de Dieu. Juifs et gentils sont édifiés ensemble pour être un tabernacle de Dieu en Esprit. Alors tout était bon, comme lorsque Dieu eut fait Adam; mais bientôt l'homme, ayant à agir sous sa responsabilité, a de nouveau tout gâté, les uns introduisant de mauvais matériaux, tandis que d'autres s'efforçaient de détruire.

Mais c'est toujours un temple, et ce qui le constitue tel, c'est la présence de Dieu; cela subsistera jusqu'à ce que le jugement vienne sur cette maison. C'est ainsi que, dans le chapitre 2 de l'évangile de Jean, le Seigneur Jésus appelle le temple la maison de son Père, bien que ce fût en même temps une caverne de voleurs.

La maison est actuellement la chrétienté. Le Saint Esprit habite au milieu de la chrétienté; il n'est ni chez les mahométans, ni chez les Juifs, ni chez les païens. Quand une fois le Saint Esprit n'y sera plus, que les chrétiens auront été pris pour être avec Jésus, l'apostasie aura son plein développement, la maison sera vide, ce ne sera plus la maison de Dieu.

Nous trouvons en Hébreux 3: 6: «Et nous sommes sa maison»; c'est le résultat; de fait nous sommes dans cette position. L'abandonner, abandonner le christianisme, c'est abandonner Dieu. Mais tant que l'on est chrétiens, on est la maison de Dieu. Tant que nous tenons ferme, nous sommes sa maison. Les Hébreux l'étaient bien, mais ils étaient en danger d'apostasier, et s'ils le faisaient, ils n'étaient pas sa maison (voyez chapitres 6, 10, 12). L'apostasie, la ruine finale, voilà à quoi tendent les choses de nos jours, et cela d'une manière toujours plus accentuée.

On en voit de bonne heure le commencement. Quel est le caractère du mal qui s'est introduit? Il est double: En Jude, nous voyons «certains hommes qui se sont glissés furtivement parmi les fidèles… des impies, qui changent la grâce de notre Dieu en dissolution»; ce sont ceux qui corrompent. D'un autre côté, dans les épîtres de Jean, nous lisons: «Plusieurs séducteurs sont sortis dans le monde, qui ne confessent pas Jésus Christ venant en chair: celui-là est le séducteur et l'antichrist»; et: «Maintenant aussi il y a plusieurs antichrists, par quoi nous savons que c'est la dernière heure. Ils sont sortis du milieu de nous, mais ils n'étaient pas des nôtres» (2 Jean 7; 1 Jean 2: 18).

Ainsi, en Jude, on voit la corruption qui se glisse au milieu des chrétiens; en Jean, c'est l'apostasie ouverte. Ces faux prophètes abandonnent le christianisme; ils n'en étaient pas réellement. Ce sont les deux choses que Paul signalait déjà aux anciens d'Ephèse (Actes des Apôtres 20).

Quand a commencé ce qui est comparé à la grande maison? Le mal a commencé de bonne heure et s'est accru graduellement. Simon le magicien cherchait à corrompre, mais il fut découvert par l'énergie apostolique. Bientôt on tourna la grâce en dissolution. Tous en vinrent à chercher leurs propres intérêts, et non ceux de Jésus Christ. C'est ainsi que ce qui était la maison est devenu comme une grande maison: c'est la chrétienté. On naît là, quant à la profession chrétienne; on ne peut y renoncer sans apostasier. Remarquons qu'il y a une différence dans le caractère du mal signalé en 2 Pierre et en Jude, Dans le premier, il est question des anges qui ont péché, tandis que, dans l'épître de Jude, il est parlé de la destruction de ceux d'Israël qui, après la délivrance, n'ont pas cru, et des anges qui n'ont pas gardé leur origine, mais ont abandonné leur propre demeure. C'est le caractère de l'apostasie.

Que faire au milieu de l'état de choses actuel? Les directions, grâces au Seigneur, nous sont clairement données. Quand, dans les temps fâcheux où nous sommes, où le caractère des hommes dans la chrétienté est analogue à celui des païens décrit en Romains 1, je trouve la forme de la piété, mais que l'on en a renié la puissance, je me détourne de telles gens (2 Timothée 3: 5). Et quant aux vaisseaux à déshonneur qui se trouvent aussi dans une grande maison, je m'en purifie (2 Timothée 2: 21). Dans le premier cas, la forme de la piété, il s'agit plutôt d'un système; dans le second, le caractère est plus individuel. Mais se séparer d'un système, n'est pas sortir de la chrétienté.

Les principes que nous trouvons dans le second chapitre de la deuxième épître à Timothée sont importants pour la marche individuelle. «Ce sceau» présente deux faces. L'une: «Le Seigneur connaît ceux qui sont siens»; l'autre: «Qu'il se retire de l'iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur». Or «le Seigneur connaît ce à qui sont siens» n'indique pas l'état de choses normal, car au commencement, tout le monde connaissait avec évidence ceux qui étaient «siens»; ils étaient pleinement manifestés. Il n'en est pas ainsi maintenant dans la confusion où se trouvent toutes choses. Même dans le papisme, on ne peut en douter, il y a des âmes converties, et le Seigneur les connaît.

Toutefois il y a la responsabilité individuelle: se purifier, se retirer de l'iniquité; c'est l'autre face du sceau. Mais, je le répète, on ne sort pas de la chrétienté, cela ne se peut sans apostasier; on sort du papisme, du nationalisme, etc., de tout ce qui, pris ensemble, constitue ce qui est comparé à une grande maison. Se retirer de l'iniquité regarde donc la conscience individuelle. La maison de Dieu (1 Timothée 3), — ce qui était l'état normal, — étant devenue comme une grande maison (2 Timothée 2), — ce qui est l'état de chute, — on doit se purifier des vases à déshonneur.

Mais jusqu'à ce que Dieu se retire, n'oublions pas que c'est sa maison sur la terre. Ensuite il prendra les siens dans le ciel pour être la vraie maison, et quant à celle sur la terre, il y sera mis fin: le jugement viendra. Le Saint Esprit n'y sera plus, mais il reste éternellement avec ceux qui appartiennent au Seigneur. Cela ne peut cesser. Nous en voyons le plein et parfait résultat dans le chapitre 21 de l'Apocalypse, quand sont venus le nouveau ciel et la nouvelle terre. Dieu se trouve maintenant dans le tabernacle édifié pour être son habitation par l'Esprit (Ephésiens 2), et bien que le changement doive être grand, il continuera d'y habiter à jamais. «Voici l'habitation de Dieu est avec les hommes».