Le repos de Dieu, et le chemin qui y conduit - Hébreux 4

 ME 1879 page 301

 

C'est une chose bien précieuse, chers frères et soeurs, que d'avoir affaire à Dieu, mais en même temps, c'est terrible pour la chair; cependant il n'y a aucune vérité que nous oubliions aussi facilement que celle-ci: c'est que toujours et en toute circonstance, c'est à Dieu que nous avons affaire.

Le coeur naturel tend constamment à s'éloigner de la présence de Dieu, puis, comme un enfant désobéissant, il craint cette présence aussitôt qu'il n'y est plus.

Les personnes qui recherchent toujours les causes secondes sont, par là même, amenées à l'infidélité pratique; et c'est cette même tendance chez les chrétiens qui, en les faisant se préoccuper de leurs circonstances, leur fait perdre pratiquement le sentiment que c'est à Dieu seulement qu'ils ont affaire.

Et pourtant, si c'est le bonheur que nous cherchons, où pourrions-nous trouver ailleurs que dans nos rapports immédiats avec Dieu, cette béatitude que rien ne peut troubler et dont rien ne peut nous séparer? Dieu n'est-il pas, non seulement la source de toute bénédiction, mais la bénédiction elle-même?

Sans doute, il y a des bénédictions extérieures, des bienfaits que Dieu dispense le long du chemin à ses enfants comme à ceux qui ne sont pas ses enfants; mais «avoir affaire à Dieu», c'est la vraie bénédiction et la source de toute notre force et de toute notre joie; car, lorsqu'une fois nous en arrivons à connaître Dieu, nous le connaissons comme amour, et, le connaissant ainsi, nous acceptons toutes choses comme venant de Lui.

Peu importent les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons, pourvu que nous sachions les interpréter par son amour. Je puis être appelé à passer par les peines et les tribulations, mais toutes ces choses sont pour moi l'expression de son amour, puisqu'elles me viennent de lui, et qu'en toute circonstance je puis regarder à lui.

Dans une âme qui connaît peu Dieu, et qui, par conséquent, a peu de confiance en lui, on trouvera cette recherche des causes et des circonstances, et, en pareil cas, le sentiment d'avoir affaire à Dieu lui-même causera plus de crainte que de satisfaction.

Toutes les fois que nous nous arrêtons à nos circonstances extérieures pour les considérer à la lumière de notre propre jugement et de nos propres sentiments, nous montrons que nos âmes ne sont pas en communion avec Dieu comme elles devraient l'être. Nous devons nous préoccuper, non pas des circonstances elles-mêmes, mais de l'intention qu'a eue Dieu en nous y plaçant. Ainsi nos consciences seront exercées, car elles ont affaire à Dieu et doivent comprendre que tout ce qui est dans nos coeurs est «nu et entièrement découvert aux yeux de celui à qui nous avons affaire».

Dieu voit tout ce qui, dans nos coeurs, pourrait empêcher ou troubler notre communion avec Lui, même lorsque nous ne nous en apercevons pas nous-mêmes, et son amour nous place dans des circonstances qui nous font reconnaître cet empêchement, afin que nous puissions nous en débarrasser. Les circonstances ne créent pas le mal, qu'elles excitent peut-être; elles agissent seulement sur le mal qui est dans mon coeur et me le manifestent comme un obstacle qui, en se plaçant entre Dieu et moi, doit nécessairement (peut-être sans que j'en aie eu conscience auparavant) empêcher mon entière communion avec Lui. Il discerne les pensées et les intentions de nos coeurs, et parce qu'il nous aime, il ne pourrait être heureux en laissant dans nos coeurs quoi que ce soit qui puisse troubler notre amour pour lui et notre confiance absolue en lui, et détruire ainsi nécessairement la plénitude de notre bénédiction.

Le coeur de l'homme cherche naturellement le repos et il le cherche ici-bas, tandis qu'il n'y a pas de repos ici-bas. Il est écrit: «Il reste un repos pour le peuple de Dieu».

La certitude qu'il n'y a aucun repos ici-bas, nous remplit en même temps de joie et d'amertume: d'amertume pour la chair qui cherche le repos et ne rencontre que le désappointement — de joie et de paix pour l'esprit, parce que l'esprit étant né de Dieu, ne peut se reposer que dans le repos de Dieu seul. Il ne peut y avoir aucun lieu de repos ici-bas pour l'enfant de Dieu, puisque le péché est partout, et Dieu veut que nous ne nous reposions que dans son propre repos. Dieu ne peut se reposer qu'en lui-même, en Jésus, dans la perfection, dans la sainteté, et Celui qui se repose ainsi étant amour, veut que nous aussi nous entrions dans son repos, dans sa joie parfaite. Si notre âme comprend ce qu'est ce repos, si notre coeur y aspire, nous ne serons plus jamais tentés de chercher aucun repos ailleurs.

Sans doute, nous trouvons des joies sur notre chemin, mais aussitôt que nous voulons nous y arrêter, elles deviennent, comme les cailles, un véritable poison. Aussitôt que l'oeil n'est plus fixé sur le repos de Dieu, le coeur cherche un repos ici-bas, mais, chaque rois qu'il trouve un endroit où il croit pouvoir s'établir, il trouve aussi une nouvelle source de peine et de combats, de luttes et de lassitude de coeur, car Dieu nous aime trop bien pour nous permettre de nous reposer ici-bas où tout est mal. Si nous essayons de le faire, il nous envoie quelque chose qui nous trouble, quelque circonstance qui nous montre l'état de notre coeur, en s'attaquant à notre propre volonté. Ces mêmes circonstances ne seraient point pour nous un sujet d'inquiétudes, s'il ne se trouvait en nous quelque chose de contraire à Dieu; elles passeraient sur nous comme passe, le vent, sans laisser de traces.

Mais Dieu s'attaque justement à ce qui trouble notre communion avec Lui, à ce qui nous empêche de chercher notre repos en Lui seul; ainsi cette discipline n'est autre chose que l'exercice de son amour envers nous. S'il détruit notre repos ici-bas, c'est seulement pour nous amener à son repos à lui.

Le Saint Esprit ne peut se reposer sur rien ici-bas, pas même sur l'Eglise telle qu'elle est maintenant — il faudrait pour qu'il le pût, qu'il perdit d'abord l'amour de la sainteté. Comment donc pourrait-il nous le permettre à nous? Non, jamais Dieu ne trouvera du repos sur la terre, avant que toutes choses ne soient rendues parfaites!

«Celui qui est entré dans son repos, lui aussi s'est reposé de ses oeuvres, comme Dieu s'est reposé des siennes propres» (verset 10). Ici il n'est pas question de justification — cette question-là est parfaitement réglée, et, là-dessus, il y a repos parfait et pour toujours pour Dieu et pour nous. Par l'obéissance de Christ, plusieurs ont été rendus parfaits, et «par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés». Il est question ici de ceux qui sont déjà justifiés, que Dieu a amenés à faire partie de sa famille et qu'il veut élever et amener (comme ses enfants) à la pleine jouissance de sa joie et de son repos.

Si moi, étant père de famille, je jouis de quelque chose, il est impossible, si j'aime mon enfant, que mon premier désir ne soit de l'avoir avec moi pour partager cette jouissance; or, «si nous sommes méchants…» combien plus notre Père céleste le fera-t-il? Il trouve ses délices à nous amener à jouir de son bonheur et il nous a donné d'être participants de sa nature divine, afin que nous soyons capables de jouir de ce bonheur. — Son amour ne peut se reposer aussi longtemps qu'il y a en nous un empêchement quelconque à jouir de lui.

L'apôtre, dans ce chapitre, prouve que les Juifs n'étaient pas encore entrés dans le repos, et il n'était pas nécessaire de dire aux chrétiens hébreux, non plus qu'à nous, que, tout en étant sur le chemin du repos, comme tout croyant, ils n'y étaient pas encore entrés, puisqu'ils avaient besoin de patience à cause de leurs afflictions et de leurs persécutions, comme nous en avons besoin, nous aussi, à cause de nos luttes et de nos épreuves. Les deux exhortations qu'il fait ne sont d'ailleurs nullement appropriées à un état de repos: «Craignons» et «appliquons-nous». S'il était question de justification, ce serait: «Ne craignez pas» et «ne vous appliquez pas», car Christ a fait tout cela pour vous, — mais cette crainte et cette application commencent lorsque la question de la justification est complètement et pour toujours réglée, lorsque nous sommes retirés du pays d'Egypte et entrés dans le désert.

C'est donc parce que nous avons pleine confiance en l'amour de Dieu, que nous craignons tout mouvement de la chair qui placerait un obstacle entre Lui et nous. Le bonheur nous est assuré, mais Dieu nous garde dans le droit chemin qui y mène, par le moyen de semblables exhortations. Il nous avertit, afin que nous puissions exercer notre responsabilité envers lui pendant notre voyage vers le repos. C'est par le moyen de la foi que nous sommes gardés, et l'apôtre dit: «Si par quelque moyen je puis atteindre…» Non pas qu'il doutât d'atteindre le but, mais parce qu'il voyait toutes les difficultés du chemin et avait peur de tout ce qui pourrait, même pour un instant, l'en détourner et le faire entrer dans cet autre sentier, où la chair nous amène toutes les fois que nous la laissons faire, et dont nous connaissons la fin, tout en sachant aussi que la grâce ne permettra pas que nous, les saints, nous arrivions à cette fin. Cette sainte frayeur est, plus que toute autre chose, le cachet du fidèle qui est droit de coeur.

L'homme inconverti n'a pas réellement peur de Satan, mais il a une grande frayeur de Dieu, si du moins il n'est pas tout à fait endurci; tandis que le saint n'éprouve pas cette frayeur-là vis-à-vis de Dieu, mais a par contre très peur de Satan.

Jésus dit de ses brebis qu'elles fuient un étranger, parce qu'elles ne connaissent pas sa voix — les brebis ont peur de tout ce qui n'est pas leur Berger, et, par-dessus tout, elles ont peur du loup. Si quelqu'un leur disait: «La fin est sûre, peu importent les moyens», les brebis reconnaîtraient que ce ne peut pas être la voix de leur vrai Berger qui leur dit cela.

«Non», dit le saint, «ce n'est pas assez pour moi de savoir qu'une fois je serai avec Dieu. Je le connais maintenant et je désire jouir de sa présence maintenant; c'est pourquoi j'ai grand peur de tout ce qui pourrait se placer entre lui et moi, de tout ce qui empêcherait mon oeil d'être simple quant à Dieu».

Si l'oeil est sain, tout le corps est dans la lumière, et, par conséquent, il est facile de découvrir le mal qui nous empêche de fixer toutes nos affections sur Dieu. Ce n'est pas parce que nous doutons de l'amour de Dieu que nous devons «craindre» et «nous appliquer», c'est parce que nous savons que nous sommes dans le désert. Ce n'est pas la présence de Dieu que nous craignons, mais la présence manifeste de Satan. Le saint sait qu'il est dans un pays aride et sans eau, mais placez le dans la présence de Dieu, et son âme est désaltérée au fleuve de sa grâce.

La rédemption nous place dans le désert, où, si nous n'avons pas Dieu, nous n'avons rien. Si nous nous éloignons de l'oeil et de la main de Dieu, nous n'avons plus autour de nous que notre propre folie et les sables du désert. Tandis que, aussi longtemps que nos yeux restent fixés sur Dieu et que nos âmes demeurent en lui, nos coeurs possèdent à la fois les chemins et le but, et ces chemins deviennent des canaux de communication avec lui. Heureux est l'homme au coeur duquel sont à la fois les chemins et le but!

Tout nous prouve qu'il n'y a pas de repos ici-bas: «craindre» à cause de la chair et de Satan, n'est pas le repos; «s'appliquer» n'est pas le repos. Il y a bien l'activité et le zèle de l'âme dans sa propre sphère et nous devrions connaître cette sphère qui nous est propre: «Il y a beaucoup à manger dans les terres défrichées des pauvres» (Proverbes 13: 23). Les hommes ont leurs propres occupations et nous avons «un autel dont ceux qui servent le tabernacle n'ont pas le droit de manger». Nous avons une sphère où la vie divine qui nous a été donnée, peut déployer ses facultés et exercer ses propres ressources. L'Eglise a ses joies à elle, ses intérêts, ses propres trésors, le vrai champ de ses affections et de sa vie, son vrai monde enfin dans lequel il se trouve du fruit pour Dieu.

Possédez-vous ce lot? et vos âmes trouvent-elles leurs délices à rechercher les richesses de Christ, le bien qui est en Dieu?

Tout ce que je possède maintenant des richesses de Christ n'est que le moyen d'arriver à ces autres richesses insondables, et c'est cette sainte application à rechercher les richesses qui sont en Christ, qui nous garde dans le sentiment de ce que sont nos richesses à nous en Lui, et rendent toute autre chose sans valeur à nos yeux.

Nous ne pouvons résister à la tentation et au péché, qu'en ayant nos âmes fixées sur Christ. Ce n'est pas en fixant nos pensées sur l'objet qui nous tente, même dans un but de résistance, que nous trouverons la force de résister à la tentation; c'est en usant de notre privilège de nous occuper de Christ, et seulement ainsi, que nous obtiendrons la victoire. Notre liberté consiste en ceci, que nous ne sommes plus esclaves du péché — nous sommes libres de servir Dieu sans entraves de la chair. Je ne désire pas la liberté pour la chair, mais la liberté pour le nouvel homme, et cela pour faire la volonté de mon Père.

Cela ne semble peut-être pas être un grand privilège que d'avoir à «craindre» et à «s'appliquer», mais c'en est un en réalité; et nous manquons si souvent en cela, que c'est aussi un privilège précieux et béni, de savoir que Dieu cherche nos coeurs et agit sur nos consciences, et qu'en toute circonstance, c'est à Dieu que nous avons affaire.

N'est-ce pas une grande consolation pour celui qui aime la sainteté, de savoir que Dieu viendra et balaiera la maison, de peur qu'il n'y reste quoi que ce soit qui puisse offenser son oeil et nous empêcher de marcher dans la lumière comme Lui est dans la lumière? Il nous montre le mal par sa Parole, et c'est là l'usage que l'Esprit fait de la Parole en sa présence. Et lorsque Dieu découvre en nous quelque chose de mal, nous en parle-t-il en jugement? Non; il dit: «Voici quelque chose qui n'est pas en rapport avec mon amour, qui ne peut pas le satisfaire». Il voit en nous quelque chose qui interrompt le cours de son amour envers nous, et comme nous avons négligé de nous juger nous-mêmes par sa Parole, il doit agir envers nous en discipline. Peut-être avons-nous cherché le repos ici-bas: alors Dieu commence à travailler en nous pour nous en arracher, à moins qu'il ne juge nécessaire de nous laisser pour un peu de temps à nous-mêmes, afin que nos consciences soient éveillées par une chute.

Peut-être trouverons-nous les circonstances dans lesquelles nous serons placés très difficiles et pénibles, mais du moment où nous reconnaissons que c'est sa présence qui agit en nous au milieu d'elles, tout devient paix, quoique ce ne soit pas le repos. Dieu soit béni de ce que notre repos n'est pas ici-bas, de ce que sa sainteté ne veut pas nous laisser nous reposer là où tout est peine et douleur. Il reste un repos pour nous; et quelle joie et quelle sainteté n'y aura-t-il pas dans le repos de Dieu. Il n'y aura ni péché, ni chagrin, ni épreuves dans son repos: il y aura lui-même, et nous nous reposerons en lui et la clarté de sa présence dissipera tout nuage!

Si seulement vous connaissiez un peu mieux son amour, mes bien-aimés; si seulement vous compreniez un peu mieux les dispensations de son amour envers vous, vous diriez: «Qu'il agisse en nous, qu'il nous réprimande, qu'il nous châtie autant qu'il le trouvera bon, pourvu seulement que nous ayons la pleine communion de son amour».

Bien-aimés, ne vous contentez pas de pauvres mesures, de misérables jouissances: marchez les yeux fixés en avant, car c'est Lui, oui, Lui-même, qui est toute votre joie et tout votre repos.