Fragments de lettres

Fragments de lettres. 1

ME 1882 page 37. 1

ME 1882 page 56. 3

ME 1882 page 79. 5

ME 1882 page 94. 5

ME 1882 page 113. 9

ME 1882 page 155. 12

ME 1882 page 178. 14

ME 1882 page 194. 15

ME 1882 page 258. 17

ME 1882 page 316. 19

ME 1882 page 337. 21

ME 1882 page 457. 21

 

ME 1882 page 37

Juin 1881

Les délivrances réitérées que le Seigneur nous accorde en chemin, ne signifient aucunement que le combat ait cessé; car immédiatement l'activité de l'ennemi se porte sur un autre point; mais le Seigneur reste le même, voilà notre assurance.

Dès le début de nos difficultés, la question, pour moi, n'a pas été si le Seigneur était avec les «frères», mais s'il y avait quoi que ce soit sur la terre à qui je fusse plus attaché, qu'à Christ. Cette question est profondément personnelle.

Je crois que le Seigneur a été et sera avec tous ceux qui sont fidèles à sa vérité, et à la lumière qu'ils ont reçue en marchant avec lui; mais je vois de plus en plus qu'il s'agit d'une question personnelle…

Que le Seigneur nous donne à tous de cheminer bien paisiblement, ne regardant qu'à lui, et occupés du bien, non du mal. Etre occupé du mal, ruine l'âme. Nous avons vu la bonne main du Seigneur avec nous et nous la verrons encore. Il manifestera à sa manière et dans son temps ceux qui sont pour lui. Demandons-lui de produire en nous un vrai exercice de conscience. Les plans et les arrangements de l'homme peuvent réussir pour un temps, mais Dieu donnera gain de cause à la vérité. Il n'était pas facile de se débarrasser des songes de Joseph; ses frères imaginèrent de le vendre aux Ismaélites mais Dieu était derrière la scène, et ils ne firent qu'accomplir ses desseins, tout en manifestant l'état de méchanceté de leurs propres coeurs.

Je sens pour moi-même, cher frère, le besoin d'avoir davantage affaire à Dieu, de vivre dans la communion calme, profonde, sainte et paisible, de son Fils, notre Seigneur Jésus Christ, qui est assis comme homme à sa droite dans la gloire.

L…


Zurich, 7 juin 1878

… A mesure qu'on avance en âge, Christ devient tout; toujours tout en principe, il le devient davantage dans les habitudes de l'âme. L'apôtre dit, non pas: «Je crois», mais: «Je sais en qui j'ai cru», douce parole qui trahit la certitude et la réalisation de ce que Christ est dans l'âme. Il y a un calme dans les choses célestes qui ne se trouve pas ailleurs, même dans l'activité de l'amour, toute bénie qu'elle soit. Les choses se précipitent dans le monde. L'incrédulité, en Angleterre, montre une hardiesse à laquelle nous n'étions pas habitués. En Amérique, c'est la même chose, mais la Parole, la promesse et le ciel, demeurent ce qu'ils étaient et nous sommes un peu plus près. J'attends le Seigneur, mais aussi longtemps qu'il y a pour moi quelque chose à faire, je suis ici pour son oeuvre.

J'ai un sentiment plus profond que jamais de ce que nous sommes et des temps dans lesquels nous vivons. La lutte contre l'incrédulité me préoccupe, mais je continue mon chemin comme toujours, autant que mes forces me le permettent. Pour ma part, je crois que nous ne savons guère ce que c'était que Paul. Nous avons le même salut, le même Sauveur, la même grâce et, pour le fond, la même gloire, savoir d'être semblables à Christ — mais, porter toujours dans son corps la mort du Seigneur Jésus, cela montre une vie d'abnégation continuelle et de dévouement. Il a été séparé des Juifs et des gentils pour être lié avec le Christ glorifié, seule source et point de départ de toute sa vie, mais, tandis qu'il était dans le corps, il avait toujours en lui-même la sentence de mort. La mort opérait en lui, et la vie (de Christ) opérait ainsi de sa part dans les autres. C'est beaucoup dire; mais il a été un vase d'élection, et le Seigneur lui a montré combien de choses il devait souffrir pour son nom. Il y a cette vraie et profonde consolation pour vous et pour moi, et pour tous les siens, que, quoiqu'il en soit, il sera parfaitement glorifié en nous tous, selon les conseils de Dieu. Pour moi, je le sais bien, ce sera sa grâce qui sera glorifiée, et j'en suis content… Dieu sait par quel chemin il conduit les siens; une chose est certaine, c'est que Jésus jouira du travail de son âme et en sera pleinement satisfait; et il ne sera pas satisfait, son amour ne le sera pas, sans voir les siens dans le bonheur le plus parfait auprès de Lui. Si son amour est satisfait, nous pouvons bien l'être. Nous entrerons dans le repos de Dieu, où son amour, son propos arrêté, son caractère, seront pleinement glorifiés dans tout ce qui l'entoure, et «il se reposera dans son amour», comme il travaille maintenant selon cet amour. Au reste, je crois que nous jouirons davantage du fait que Christ est pleinement glorifié, que de notre propre gloire.

ME 1882 page 56

2 janvier 1840

Oh! que nous ayons plus de foi pour que nous puissions nous fier à son incomparable fidélité, à son amour qui nous fera passer sans doute par des épreuves pour notre bien, mais qui ne se lasse point. Au milieu de nombreuses infidélités je l'ai toujours trouvé fidèle, je peux en rendre témoignage, et plus que fidèle, toujours plein de miséricorde et de bonté; c'est une chose joyeuse de pouvoir rendre témoignage à son Dieu tout en s'humiliant pour toute sa propre misère. Quand la bonté et la volonté de notre Dieu nous ont poussé dans sa moisson, nous avons toujours occasion d'être bien sur nos gardes contre les ruses de l'ennemi, spécialement quand nous quittons tant soit peu la route ordinaire des chrétiens. On est si accoutumé à se fier aux hommes, l'habitude en est tellement enracinée dans les moeurs des chrétiens et dans leur manière de faire quant à l'évangile, que Satan est extrêmement jaloux de ceux qui s'en éloignent et qui se fient à notre Dieu; et il leur tend tous les pièges possibles, et même les chrétiens s'attendent toujours à leur chute, en sorte que si nous ne gardons pas soigneusement notre esprit nous sommes toujours en danger. Il y a bien des chrétiens qui se retireront de nous dès le commencement, disant que c'est l'orgueil qui nous pousse à marcher seuls, quand en effet il nous déserte malgré nous, et cela fait augmenter le danger, parce que l'isolement qui nous arrive quelquefois nous expose aux flèches de l'ennemi, soit par les tentations ordinaires de la vie, soit par la tentation de penser trop à soi-même et de pencher, ou à l'orgueil d'un côté, ou à l'abattement de l'autre. Est-ce que je désire, cher frère, vous décourager en disant ces choses? Loin de là; mais seulement vous rappeler que c'est une vie de foi, et que nous ne pouvons pas passer par ce monde de péché, quand nous sommes mis tant soit peu en avant, sans une communion constante de nos âmes avec Dieu. A mesure que vous avancerez dans votre carrière de service, vous trouverez que si vous ne marchez pas dans les voies ordinaires, un très grand nombre de chrétiens vous seront opposés — opposition beaucoup plus pénible que celle du monde à laquelle on doit s'attendre. Et cela, parce que cette question s'agite beaucoup dans ce moment, si l'on doit marcher par la foi ou non…


4 juin 1846

… Dieu se sert souvent de phrases bien imparfaites pour communiquer de la bénédiction aux âmes et même il se sert de phrases erronées. Toutefois elles apportent alors dans l'âme quelque chose d'imparfait ou d'erroné. Je peux dire à une âme travaillée que son salut est fait, parce que je ne fais que la diriger hors d'elle-même et du jugement qu'elle porte sur une oeuvre intérieure dont elle n'est pas capable de juger, vers Christ, dont l'oeuvre parfaite est le simple objet de la foi. Je ne pourrais pas le dire à toute âme quelconque; ce serait me mêler de l'élection de Dieu dont je ne sais rien. Mais je peux dire à tous que la propitiation a été présentée à Dieu; elles n'ont qu'à y regarder, et en allant à Dieu par ce sang elles seront reçues, elles n'ont rien à attendre. Elles n'iront pas à moins que le père ne les attire, mais c'est une affaire de la grâce souveraine, qui ne me regarde pas dans mes prédications; dans ma doctrine oui, mais pas dans mes appels aux âmes non converties. Dans le sang qui est mis sur le propitiatoire, il ne s'agit pas de ceux qui sont sauvés, ni de l'élection, mais de la majesté de Dieu qui exige cette satisfaction pour le péché. Je pense m'adresser à tous et leur annoncer que cette satisfaction a été faite et que Dieu le Père l'a parfaitement agréée. Mais je ne peux pas dire à tous que Christ a porté leurs péchés, parce que la Parole ne le dit nulle part. S'il avait porté leurs péchés, certes ils seraient justifiés et par conséquent sauvés par la vie de Christ et glorifiés. Ainsi en Romains 5: 18, le don est venu à tous non sur tous littéralement: «Ainsi donc, comme par une seule offense envers tous les hommes en condamnation (c'est la direction où une chose arriverait en la laissant aller, mais pas l'arrivée de la chose), de même aussi par un seul acte de justice, envers tous les hommes en justification de vie». C'est pourquoi il dit tous, mais, au verset 19: «Car de même que par la désobéissance d'un seul homme les plusieurs (beaucoup de monde) ont été constitués pécheurs, de même, par l'obéissance d'un seul, les plusieurs seront constitués justes». Ici c'est l'effet, non pas la tendance; c'est pourquoi il dit plusieurs. La chose ne se borne pas à celui qui l'accomplit, mais s'étend dans son efficacité à ceux qui y sont intéressés; ces plusieurs sont constitués pécheurs ou justes, en vertu de ces deux oeuvres. Ainsi il est dit (Romains 3: 22): «La justice de Dieu par la foi de Jésus Christ envers tous — et sur tous ceux qui croient». C'est une chose de placer le sang sur le propitiatoire (c'était le lot de Dieu), c'en est une autre de confesser les péchés du peuple sur le bouc Hazazel. A cause de l'un, Dieu peut agir en témoignage d'amour envers tous, sa justice étant satisfaite; à cause de l'autre, il doit à Christ de ne jamais retrouver ces péchés; ils sont portés dans une terre inhabitée. Or cela n'est pas vrai des péchés des méchants. C'est pourquoi l'on ne peut pas dire que ce n'est pas à cause des fruits du péché d'Adam que les hommes sont condamnés; car il est dit: «A cause de ces choses, la colère de Dieu vient sur les enfants de la désobéissance». Et: «Si vous ne croyez pas que c'est moi, vous mourrez dans vos péchés». En sorte que je crois bien que Christ est mort pour tous, mais je ne peux pas dire qu'il a porté comme substitut les péchés de tous. La Parole, me semble-t-il, est très claire sur ce point dans ses doctrines, dans les conséquences qu'elle en tire, et dans ses types. De sorte que je prends ‡nt±lutron Ãpšr p€ntwn (1 Timothée 2: 6) dans le sens le plus simple et le plus large. La satisfaction a été présentée à Dieu pour les hommes; mais ici il est évident que ces paroles se rapportent au désir de faire de Jésus, au moins du Messie, un médiateur de la nature juive. Non, dit l'apôtre, il est de tous. Dieu t™lei pas boÀletai que tous, et pas seulement les Juifs, soient sauvés. Il a donné donc un médiateur pour tous, qui a fait la propitiation nécessaire et exigée par la majesté de Dieu, de sorte que la porte est ouverte à tous par la satisfaction qu'il a faite à la majesté outragée de Dieu. Mais Dieu a prédestiné les siens, il les appelle, il les vivifie. Car si les choses en restaient là (c'est-à-dire à une porte ouverte), personne, pas même les élus ne viendraient. Mais Christ a confessé les péchés de ceux qui sont ainsi amenés, comme étant les siens…

ME 1882 page 79

Montpellier, 24 mars 1848

Bien cher frère,

J'écris une ligne à la hâte, ayant à coeur la marche des frères, au sujet des élections qui vont avoir lieu… Il me paraît si simple que le chrétien, n'étant pas du tout de ce monde, mais uni à Celui qui est mort et ressuscité, n'a rien à faire à se mêler de l'activité la plus prononcée du monde, d'un acte qui constate son existence mondaine et sa solidarité avec tout le système que le Seigneur va juger, qu'il n'y a, je le pense, qu'à présenter la vérité, pour qu'elle soit reconnue de ceux qui ont compris leur position. D'autant plus que ces événements (*) placent le monde plus évidemment (non pas plus réellement) sur un terrain à lui, mais plus réellement près du grand dénouement qui va fondre sur ceux qui s'élèvent contre Dieu. Oh! combien mon âme désire que son peuple soit séparé pour lui, et même avec intelligence, de ce qui attend le monde, et que tous soient remplis davantage de ce qu'ils doivent attendre constamment eux-mêmes. Que Dieu me fasse la grâce d'être fidèle à rendre ce témoignage, et à le rendre partout, selon la porte qu'il ouvrira, en temps et hors de temps, car les siens, qui lui sont si chers, en ont besoin. Les événements se hâtent, cher frère, et encore puissions-nous n'en attendre qu'un seul, la venue de notre bien-aimé, de notre Sauveur. Sa venue devient notre ressource, comme elle a été longtemps une joie et une réalité pour nous; mais cette réalité est encore plus précieuse et plus rapprochée. Que nous l'attendions constamment! Dieu seul sait le moment. Le chrétien prend connaissance des événements qui arrivent en témoignage à celui qui comprend, mais sa pensée, son désir et sa part sont beaucoup plus dans le sanctuaire qu'avec tout cela. Mais n'est-il pas vrai que cette votation, comme acte de solidarité avec le monde (dans les formes mêmes qu'il revêt aux derniers temps), devrait être évitée comme un piège, par tous les chrétiens qui comprennent la volonté de Dieu et leur position en Christ? Cela est toujours vrai (j'ai agi ainsi depuis vingt ans), mais doublement vrai maintenant. Paix, grâce et miséricorde vous soient, cher frère, et vous soient multipliées, et que la joie du Seigneur soit avec tous les frères qui vous entourent. Je pense que, à la fin de Philippiens 3, le sens de l'expression: «D'où nous attendons le Seigneur Jésus Christ comme Sauveur», c'est: pour nous délivrer finalement de tout le train de ce siècle, tel qu'il est…

 (*) Il s'agit de la révolution de 1848. (Ed.)

ME 1882 page 94

Pau, mai 1849

… Quel besoin nous avons de nous remettre entièrement à Lui dans l'oeuvre, et combien elle est simple, lorsque nous faisons cela! Il y a une chose qui fait la force, c'est de se tenir près de Christ. Dieu agit en même temps pour nous et nous donne des rafraîchissements, mais notre part, c'est de nous tenir près du Seigneur. Sans cela, la pression de l'oeuvre même, de cette oeuvre qui est notre devoir et notre affaire ici-bas, nous rétrécit le coeur, tend à nous faire perdre cette largeur de coeur, cette capacité de présenter, dans sa fraîcheur, l'amour de Dieu aux âmes, [capacité] qui seule peut vraiment introduire dans ce monde l'élément dont il a besoin, dont ces pauvres âmes desséchées et malheureuses par le péché ont besoin. Si l'on a un coeur large et plein d'amour hors de cette proximité du Seigneur, l'amour s'évapore dans le mysticisme, dans ce qui est terrestre, sous prétexte d'être divin. Ce n'est pas que je croie que, dans l'oeuvre, on soit toujours dans cette liberté qui voit tout dans la lumière. Il faut marcher par la foi, parfois hélas! en tremblant; du moins les meilleurs ouvriers l'ont-ils fait, témoin Paul. Un vase de terre, lui-même responsable, placé dans un combat entre l'Eternel et l'ennemi des âmes, sentira quelquefois le choc de la bataille, vu que cela se livre en lui, et par lui, avec les forces engagées. Toutefois il reste vrai que le Saint Esprit nous place d'avance dans la région pure et fraîche d'une rédemption qui ne laisse plus subsister pour nous la question du péché. La chair étant en nous, nous en serons d'autant plus confus s'il n'y a pas la diligence pratique, mais nous sommes dans cette région. Après tout, ceci n'est que pour un peu de temps et afin de nous former pour des jouissances qui dépassent tout ce que nous pouvons penser, mais dont nous avons quelquefois des aperçus quant à leur nature, et, étant fondés et enracinés en amour, nous possédons le bien à la source de tout. C'est une profonde source de joie, de savoir que le Dieu que je connais, qui est mien, est celui que je connaîtrai pour l'éternité, que je n'ai pas besoin d'un autre. Je l'ai connu en Jésus; je l'ai connu comme Père; c'est celui que mon coeur désire et que mon coeur connaît. Il n'y en a pas d'autre, il ne se pourrait qu'on en désire un autre. On le connaît seul vrai Dieu. Il y a une différence entre désir et amour. Le désir, tout saint qu'il soit, a besoin de quelque chose pour soi; l'amour possède et jouit de ce qui est son objet. Or Dieu, en nous révélant la perfection de notre salut, nous a placés dans cette dernière position; seulement, étant infini, il a toujours en lui ce qui donne cette énergie qui cherche sa connaissance plus profonde, lors même que nous le possédons. Mais c'est en Christ que s'ajustent, se rectifient, se jugent et se purifient toutes nos pensées, car l'infini de Dieu lui-même donne le vertige à la petitesse du coeur de l'homme, lorsque Christ ne lui donne pas un sûr appui, sans le priver de quoi que ce soit de la plénitude qui est en Dieu, mais, bien au contraire, c'est en Lui que nous apprenons ce qu'il est de près. C'est ce que l'on trouve en Jean: nous demeurons dans l'amour, en Dieu. Où se retrouver? En ceci nous connaissons l'amour, parce qu'il a donné sa vie pour nous. Quoi de plus vrai, de plus simple, de plus réel, de plus près du coeur; et un amour accompli, démontré, et qui certes est à nous. Je m'arrête…


Montpellier, 12 juin 1849

Bien cher frère,

C'est bien la force d'Ephésiens 4 en particulier, que vous signalez, mais il ne faut pas oublier ce à quoi l'Eglise est destinée dans le siècle à venir et pour toujours, lorsqu'il n'y aura point de puissance à contrebalancer; il ne faut pas oublier non plus (voyez 1: 11, 12; 2: 7; 5: 27) nos relations propres avec le Seigneur. Mais ce que vous dites est bien ce qui devrait être actuellement, et c'est ce qui a si cruellement manqué. Hélas! mon coeur en est toujours plus navré; mais nous attendons sa gloire. Il faut se souvenir que la sacrificature de Christ ne s'applique pas à l'Eglise vue ainsi en lui, mais aux individus, tels qu'ils sont de fait, et qu'elle maintient les relations de pareils êtres avec (ou dans) une position telle que celle de l'Eglise vue en Christ, c'est-à-dire parfaite, abstraction faite de ce qui est d'ici-bas en elle. Il peut y entrer l'idée qui s'applique à toute pensée de Dieu par rapport à ce qui est ici-bas, c'est-à-dire comme ayant des sentiments, des mouvements de coeur, etc., à la vue de ce qui se passe; et dans un certain sens l'expression en est humaine, mais elle est l'expression imparfaite d'une réalité. La sacrificature n'aborde pas la question de notre perfection, sauf que cette perfection nous a placés dans une position céleste devant Dieu en Christ, en rapport avec lequel il s'agit de maintenir de pauvres faibles créatures sur la terre. Quelquefois l'idée de notre perfection céleste en Christ trouble la pensée de la sacrificature; pour moi, elle en est la base. Est-ce votre pensée, ou entendez-vous seulement que ce qui se fait nécessairement et parfaitement dans le ciel est présenté comme une fonction qui s'exerce? La parole de Dieu parle en effet comme à des enfants, mais c'est afin que ce qui est vrai soit ainsi à la portée des enfants…

Je ne doute pas qu'il y ait une manière divine de voir qui diffère des communications faites à nous qui ne comprenons qu'en partie, mais la communication qui nous est faite est divinement propre à produire en nous, autant que cela se peut, selon notre capacité finie, l'effet et l'idée de la réalité de ce qui se voit divinement là-haut, de sorte que c'est la vérité autant que nous en sommes capables, la vérité pour nous. «Autre chose» ne serait pas exprimé; autrement, dans son élévation, nous ne comprendrions rien. «Inférieurement» n'exprimerait par la hauteur de la pensée divine. C'est comme Christ lui-même, Dieu manifesté en chair, Dieu, mais à la portée de l'homme, tel toutefois, qu'il pouvait dire: Celui qui m'a vu a vu le Père. Il en est ainsi des communications divines…


Montpellier, 29 juin 1849

Bien cher frère,

Il me semble que ce que vous présentez comme la pensée de l'épître aux Ephésiens est une pensée des plus frappantes, mais n'est-ce pas particulièrement celle du chapitre 4? Il y en a une autre, qui est bien importante, savoir que Christ, et l'Eglise par lui, et unie à lui, dominera sur toutes choses, sur toutes les oeuvres de Dieu en bénédiction, lorsque Satan sera hors de la scène. C'est là, sous ce rapport, la différence entre cette économie et celle qui est à venir. Pendant l'économie actuelle, par la puissance du Saint Esprit, on glorifie le Seigneur (au moins devrait-on le faire), en présence du mal et malgré sa puissance, tandis que, dans l'économie à venir, le Seigneur aura mis de côté la puissance du mal par l'exercice de la sienne en jugement, et on gouvernera la création en bénédiction, selon la puissance du Seigneur pour faire du bien. Seulement l'homme déchu sera encore dans sa faiblesse, et on apprendra à distinguer mieux ce qui est de lui et de l'ennemi. Aussi l'homme sera-t-il laissé sans excuse, lorsque, après tout, il tombera dès que l'ennemi sera relâché.

Mais ceci rappelle une autre partie de l'épître, c'est-à-dire la relation intime entre l'Eglise et Christ lui-même, ses rapports intérieurs, sans avoir égard à ses rapports avec ce qui est en dehors de Christ, et cette relation positive est tout ce qu'il y a de plus intime et de plus précieux. Elle nous vaut aussi ses soins continuels pour que nous soyons une épouse qui lui convienne, enfin telle qu'il se la présentera, moralement formée par sa Parole, et puis glorifiée par la main puissante de son Chef, sans tache et sans ride.

Il ne faut pas oublier non plus l'important accessoire de la demeure du Saint Esprit, non seulement comme sceau de l'individu, mais pour former le corps et en vivifier les membres. Il est aussi remarquable que, au milieu de tout cela, l'Esprit de Dieu prend occasion des exhortations, pour introduire notre position de chers enfants vis-à-vis de Dieu, afin que nous l'imitions.

Je ne sais trop ce que vous voulez dire à la fin de votre lettre, si ce n'est que la sacrificature serait une manière de s'exprimer, vu que nous sommes parfaits en Christ. Mais si telle est votre pensée, je ne la crois pas juste, cher frère, parce que, s'il est important de nous considérer comme parfaits en Christ, point de départ soit de confiance, soit de proximité avec Dieu, afin que tout soit jugé en nous et autour de nous selon cette proximité, la découverte de ce que nous sommes de fait en vue de cela, les besoins qui en découlent pour nos âmes, pour nos coeurs, donnent lieu à l'obtention des grâces nécessaires par l'intervention de Jésus. Et tout ce qui se passe à l'égard de ces besoins, met en jeu, produit même, des affections, un intérêt, une lumière et une délicatesse dans la conscience, un discernement spirituel, un accroissement de notre être moral, qui nous rapprochent toujours plus de fait de la lumière dans laquelle nous sommes de droit, en vertu de la perfection de celui qui ayant porté nos péchés, est devant Dieu selon la perfection absolue dans l'homme de ce qui répond à toutes les exigences et à toutes les affections de l'être moral, de Dieu lui-même.

Et il ne suffit pas d'être là de droit à cause de Christ; il s'agit d'être là de fait, selon l'amour de Celui qui nous y a introduits. Or les fautes et les faiblesses qui nous en éloigneraient, deviennent par l'intercession de Jésus, autant de moyens pour comprendre, autant de liens avec l'amour de celui qui y répond, et des canaux pour l'intelligence de ce qu'il est et de ce qu'il veut, en sorte, que nous sommes formés, d'une manière intelligente, d'après son image. Sans la présence de Christ dans le ciel pour nous, il ne saurait en être ainsi. C'est lui qui nous met en rapport avec Dieu et maintient les communications d'êtres imparfaits avec l'Être tout parfait; c'est lui qui fait de nos imperfections l'occasion de communiquer sa grâce, et cela, en agissant par son Esprit dans nos affections, nous mettant ainsi dans des rapports connus, sentis et justes…

ME 1882 page 113

Nîmes, 23 octobre 1849

Bien cher frère,

Vous serez presque étonné, mais non pas mécontent, j'en suis sûr, de recevoir maintenant une réponse à votre lettre. Quant à Ephésiens 5: 27, il faut se souvenir qu'il s'agit, non des ornements devant le monde, mais des soins tendres et précieux de Christ pour ce qu'il aime comme sa propre chair. Quant au résultat, l'homme ne peut pas annuler ces soins; il pourra ne savoir en profiter que dans une très faible mesure; le résultat intelligent ici-bas pourra n'être que peu de chose, mais la pensée de Dieu en bénédiction sera toujours accomplie, parce que notre folie, tout en étant coupable, donne lieu à Sa sagesse. Si Israël n'a pas eu le courage de monter à la montagne des Amorrhéens, et si, quant à la circonstance présente, il a perdu, perdu ce qu'il n'a pas retrouvé, le peuple (ou du moins Josué, Caleb et d'autres, et nous aussi) a appris beaucoup à l'égard de lui-même, et ce qu'il a appris l'a mis dans un rapport beaucoup plus réel, beaucoup plus vrai, avec Dieu, selon ce qu'il était lui, Israël, et selon ce que Dieu était. Cette expérience a fourni l'occasion à Dieu de montrer sa grâce et sa puissance pour garder le poil même de leurs vêtements et ne pas permettre que leur pied fût foulé; elle a donné lieu à une manifestation beaucoup plus remarquable de sa puissance et de ses voies, soit dans la traversée du Jourdain à sec, soit dans tous les détails de l'entrée du peuple en Canaan; enfin elle a donné lieu au témoignage de Balaam après la longue traversée du désert. Tout ce qui est arrivé à Israël était nécessaire à la pleine révélation des voies et des conseils de Dieu. Est-ce que le péché d'Israël était donc l'oeuvre de Dieu? Nullement. Cette incrédulité était déjà dans son coeur; l'arrivée à la montagne des Amorrhéens n'était que l'occasion de sa manifestation. Dieu peut permettre et ordonner des choses pour manifester le péché, jamais pour le produire; et la manifestation (lorsqu'on est sous la grâce) met tout dans la lumière, et est un moyen de progrès.

Dire que, parce que l'Eglise a failli, elle tombe nécessairement dans un plus mauvais état, cela est vrai et faux en même temps. Comme instrument public de témoignage sur la terre, à la honte, cela est vrai; mais il est impossible que Dieu, que Christ soit infidèle, et le fait de la dégradation publique et générale donne lieu à une concentration d'énergie et de lumière, qui fournit au dedans d'autant plus de clarté que l'espace qu'elle éclaire est plus petit. Israël, alors que notre précieux Sauveur était présent, allait toujours plus mal, tendait à sa ruine, mais lui brille d'une lumière toujours plus claire à mesure qu'il se concentre en ce qu'il était lui-même, au lieu de se prêter à ses relations vraies mais temporaires et de devoir, avec les Juifs. C'est pourquoi, quoique tout soit si beau, le Seigneur parait dans l'évangile de Jean avec une lumière et une perfection infiniment plus touchantes et frappantes; c'est pourquoi nous le voyons mieux que dans les autres évangiles. Nous sommes plus entièrement avec lui, avec lui seul, avec ce qu'il était en lui-même. Là les Juifs sont mis de côté. Quel homme, dans l'histoire d'Israël, brille au milieu des ténèbres comme Elie? Seul en témoignage; seul, sauf un résidu caché, que l'oeil de Dieu connaissait, et que la foi du prophète aurait dû connaître, s'il avait été assez près de Dieu pour avoir ses pensées. Je trouve dans les Psaumes, que la foi est beaucoup plus simple et plus calme, lorsque le résidu est chassé. Il en est de même, je crois, de l'Eglise; au moins peut-on s'y attendre; non pas que le vase soit réparé et raccommodé, mais que la vraie Eglise, ceux du moins qui de coeur attendent le Seigneur, seront toujours plus vrais dans leur position, comprendront mieux le coeur du Seigneur, seront plus unis entre eux, un petit troupeau, mais qui connaîtra beaucoup mieux la voix, et le coeur, et les pensées du bon berger.

Le terrain que l'ennemi gagne ne peut être que sur la chair et sur le témoignage commun. C'est triste, mais compris par le fidèle. Mais si, après Sardes, l'état public général, je trouve Laodicée qui doit être vomie, je trouve aussi Philadelphie qui a l'oreille et le coeur du Sauveur, qui a peu de force, mais qui n'a pas renié Son nom et qui a gardé sa parole. Nous travaillons le plus souvent avec ceux dont la moitié ne savent pas quels principes immenses sont en question; toutefois, s'il y a de la fidélité, un oeil net, Dieu les garde. Mais, attendre toujours le Seigneur, voilà notre force. Il y a beaucoup d'appelés mais peu d'élus. Hélas! le déclin est la tendance continuelle, mais le Sauveur ne décline jamais. Attachés à lui, peut-être n'y aura-t-il pas un témoignage public commun de la part des masses (elles sont toujours plutôt le péril d'un témoignage); mais toujours le témoignage de sa part, dans la plénitude de sa force selon le besoin de l'Eglise, car sa force et son amour ne changent pas. C'est un sujet qui va au coeur, et je sens que je peux me fier à lui, quoique j'aie été souvent abattu à la vue de la détermination de l'Eglise à repousser la grâce et la bénédiction, et de la puissance que l'ennemi exerce en la trompant.

J'ai perdu du temps à M** en manquant de suivre d'assez près les suggestions du Saint Esprit, et j'en souffre maintenant, ayant à faire, à travers plus de difficultés, ce qui, ayant été fait beaucoup plus facilement auparavant, m'aurait laissé libre de faire ce que je ne peux maintenant accomplir comme je le désirerais. Mais, quoiqu'il en soit, je me remets entre ses mains d'amour. Il faut que j'apprenne ma leçon de la montagne et du Jourdain. Nous sommes en des temps fâcheux; ne nous en étonnons pas; seulement soyons près de lui, pour faire briller clairement, sans l'obscurcir, ce qu'il nous donne.

Quant à votre seconde question, il est certain que le jour d'expiation s'appliquait à la conscience, dans le sens de l'acceptation devant Dieu, pour tous les péchés jusqu'à la fin. L'homme, tel qu'il est, tout entier, est pour ainsi dire mis de côté, et Christ, dans l'efficace de son oeuvre, mis à sa place devant Dieu. Or le chrétien devrait toujours en avoir la conscience, ne jamais avoir l'idée que Dieu soit contre lui. Il ne l'est pas. Christ a porté tous nos péchés; il est impossible qu'ils nous soient imputés, impossible que nous puissions être trop positifs sur ce sujet. Les péchés d'un chrétien sont commis dans une relation existante et qu'ils ne changent pas, mais ils sont beaucoup plus graves pour cela. Mais mes rapports avec Dieu sont des choses réelles, des choses pour lesquelles, après sa gloire, j'ai été sauvé et lavé, et ces rapports sont réellement interrompus par le péché. Le sang de la génisse rousse n'était pas mis sur le propitiatoire, mais il en était fait sept fois aspersion devant la porte du tabernacle de la congrégation, là où Dieu se rencontrait avec le peuple; cela assurait même toujours les bases de ses entretiens. La restauration était du côté de celui qui s'était souillé, et elle était une restauration réelle. La nature de Dieu est ennemie du péché, et les ténèbres ne peuvent pas avoir de communion avec la lumière, mais notre état est ténèbres si nous avons touché la mort. Il y a une différence, lorsque le Saint Esprit révèle Dieu dans mon coeur et que je respire son amour, et lorsque je cherche et m'efforce à trouver le sentiment de sa présence. Ce n'est pas une question de présenter l'homme, mais où en est-il s'il était présenté? Or l'Esprit de Dieu nous donne la conscience de cet état en grâce, mais dans la conscience et dans le coeur. Il renouvelle dans le coeur la conscience de la relation, dans la conscience le sentiment d'y avoir manqué, et cela en présence de l'amour parfait de Christ, car les cendres de la génisse sont une preuve de son amour, et que le péché est ôté (ou plutôt a été ôté), qu'il ne s'agit pas d'imputation mais d'une oeuvre en soi. C'est la Parole qui en est l'instrument, la vérité; et la Parole est cette vérité. Quant à l'imputation donc, il n'en est plus question, mais souillure n'est pas imputation. Or ce que Christ fait pour nous dans le ciel, c'est de concilier en pratique notre position actuelle, de fait, ici-bas, avec notre position acquise en lui, et de nous faire valoir, étant présent comme notre acceptation personnelle, toute la grâce de Dieu pour nous maintenir à la hauteur de la puissance de cette position, ou de nous y faire monter dans le sens pratique. C'est pourquoi il est dit: «Il nous a fallu un tel souverain sacrificateur, saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs, et élevé plus haut que les cieux», parce qu'il s'agit de cette position pour nous, et il faut qu'il y soit. Or il peut compatir avec nos infirmités, mais il a été tenté en toutes choses, semblable à nous. Aaron était dans l'infirmité lorsqu'il exerçait la sacrificature; non pas Christ, parce que nous avons une place avec lui dans le ciel; mais il a connu ce que c'est que la tentation, lorsqu'il était ici, et en vertu de sa présence dans le ciel, (dans laquelle nous sommes acceptés, rien n'étant imputé), il obtient tout ce qui est nécessaire pour nous mettre en rapport réel avec notre position en haut; ou plutôt avec Dieu selon cette position. De sorte qu'il n'y a pas d'inconséquence entre la conviction d'avoir notre position intacte et le plus profond sentiment de l'horreur du péché. Au contraire, c'est en ayant cette conviction que le sentiment est produit. Dans notre ministère, il faut mettre ces choses en rapport; c'est ce que faisaient les cendres de la génisse. En Jean 13, celui qui est lavé n'a besoin que de se laver les pieds, mais il est tout net. Je ne m'y remets pas; lorsque j'ai péché je ne le perds pas. C'est parce que la maison est propre, qu'on a horreur de la saleté qu'on y a introduit. Si l'on a perdu le sentiment de la propreté de la maison, on tient moins compte de la saleté, mais la chair peut se jeter sur cela; lorsqu'on a péché, ce n'est pas cela non plus. Y étant bien au clair, bien assuré, on porte son coeur sur le jugement de ce qui est inconséquent avec une telle position et l'amour jusqu'à la mort qui nous y a placés. La sacrificature de Christ s'exerce pour produire des bons sentiments, non pas lorsque nous en avons. Ce n'est pas notre soulagement d'y penser lorsque nous avons manqué, sauf comme vérité générale. Si quelqu'un pèche (non pas si quelqu'un se repent), nous avons un avocat auprès du Père. Ce n'est pas à proprement parler, Melchisédec, roi de justice, sauf quant à sa personne, mais au dedans du voile. Voilà quelques pensées. Je ne sais si elles répondent à votre demande. J'écris à la hâte…

Paix vous soit, cher frère. Que le Seigneur nous trouve veillant pour nous prendre à lui…

ME 1882 page 155

Lausanne, 5 juillet 1840

… Souvenez-vous, cher frère, qu'il est dangereux d'être élevé tout d'un coup dans une chaire. Ce n'est pas que je doute que vous soyez dans le chemin de la volonté de Dieu, mais vous savez que lorsque Paul eût été ravi même dans le ciel pour l'oeuvre de Dieu, cela lui était en piège à cause de sa chair; mais Dieu est fidèle pour vous garder. L'acceptation de la part de l'homme n'est pas l'approbation de Dieu, quoique Dieu puisse nous donner la première pour favoriser la propagation de la vérité; mais, si nous nous arrêtons sur l'effet, nous sommes éloignés de la source, et cela devient un piège pour dessécher notre âme, au lieu d'être un moyen de nous conduire vers ceux sur lesquels nous devrions verser ses richesses. Je crois que Dieu a permis, dans sa miséricorde, vos épreuves à X**, avant de vous introduire dans l'oeuvre, pour que vous sachiez combien petit et faible vous êtes. J'espère que votre champ de travail actuel ne perdra jamais sa valeur à vos yeux, mais si Dieu vous donne pendant quelque temps une oeuvre à faire ailleurs, et que sa volonté vous soit manifeste, vous devez confier ces chères âmes à celui qui seul peut, soit que vous soyez absent ou présent, les paître et les nourrir. Personne n'ira plus loin que lui. J'espère que leur foi les conduira, et s'ils font des progrès en votre absence, ce sera une leçon, leçon souvent bien nécessaire, que Dieu peut agir sans nous… Que Dieu vous garde en simplicité de coeur, et toujours dans le sentiment de votre petitesse devant lui. Toute notre joie est détruite du moment que nous perdons de vue ce que nous sommes devant lui, et nos forces naturelles, car nous en avons, deviennent pour nous le moyen de nous conduire vers quelque chute, comme cela est arrivé à Pierre. Il aimait vraiment le Seigneur, mais il avait confiance dans cet amour pour Jésus et dans son intégrité, qui, du reste, était sincère. Il pouvait dire: «Tu sais toutes choses; tu sais que je t'aime», et cependant il tomba d'une manière affreuse, conduit par cet amour même, du moment que, dans la tentation, il y mettait sa confiance. Je ne suppose pas de telles choses chez vous, cher frère, mais je vous les dis pour l'amour de vous, dans la confiance qu'elles n'arriveront pas. Je me fie à Dieu pour cela, assuré de sa fidélité. Veillez seulement et priez. Gardez-vous des traditions des hommes et de l'esprit du clergé; tout cela dessèche l'âme, déshonore le Seigneur, et nourrit la chair par le sentiment de respectabilité humaine: «l'orgueil de la vie». Mais honorez en même temps pleinement tous les dons, que Dieu a donnés à qui que ce soit. Que Dieu vous donne toute la sagesse, la douceur, la débonnaireté et la fermeté qui vous seront nécessaires. Vous accepterez, j'en suis persuadé, toutes ces remarques, pour l'amour de Christ, car je connais bien ma faiblesse.

Votre affectionné dans l'oeuvre et l'espérance de ce bien-aimé, notre seul Sauveur.


Londres, 2 octobre 1862

Mon cher…

Je tiens compte de la discipline publique. Quelle que soit la faiblesse des frères, je trouve qu'il est important devant Dieu de donner à la discipline tout le poids de la foi. C'est un principe pour moi, d'autant plus arrêté que l'Eglise est faible et en déroute. Je reconnais qu'on peut se tromper dans les cas particuliers, mais reconnaître l'église de deux ou trois est pour moi chose essentielle. Cela met nécessairement de la réserve dans mes rapports avec vous; cela ne change pas l'affection ou le désir de vous voir heureux et béni, mais influe sur les communications.

Il y a une autre chose. Je ne dis pas que vous n'ayez pas retrouvé la paix avec Dieu, mais il y a une autre considération; c'est la voie et le gouvernement de Dieu envers ceux qu'il aime…

Il m'est resté l'impression que votre coeur, sur quelques points, n'est pas entièrement ouvert vis-à-vis de vous-même et de Dieu; il y a, jusqu'à un certain point, un désir de voiler plus ou moins ce qui s'est passé. C'est la nature humaine; mais, lorsqu'il s'agit de savoir si une âme est restaurée, cela est tout, pour ainsi dire. Je ne désire pas connaître du mal de vous, et je préfère de beaucoup ne pas le connaître. Si l'âme est restaurée, tout le passé est nul, et je désire ignorer ce qui peut peiner le coeur. Si Dieu ne s'en souvient plus, les siens peuvent bien en faire autant. Telle n'est pas ma difficulté; la seule question, c'est si l'âme a maintenant jugé tout le mal. Le jugement du mal dans ses racines et le pouvoir sur soi-même, la délivrance de la puissance du péché, vont ensemble. Il ne faut pas confondre la paix et la communion. On peut avoir la paix, n'avoir pas la moindre pensée que quelque chose nous soit imputé, et ne pas jouir de la communion, parce qu'il y a quelque chose qui contriste le Saint Esprit, ou quelque interdit que le coeur garde, ou un état d'âme où il y a eu du mal et où, quoiqu'on en soit revenu, l'oeuvre de Dieu dans le coeur n'est pas achevée. Je ne pense pas que l'interdit soit votre cas; il se peut qu'il reste encore à faire pour que la communion coule dans la paix de l'âme…

La confiance détruite est la chose la plus pénible du monde; la conscience des frères s'indigne, leur coeur est vexé. Il se peut que l'effet s'en soit manifesté, mais ce n'est pas à vous, cher X, de vous plaindre du manque de tendresse ou de considération dans votre propre cas. Je suis sûr que, lorsque l'oeuvre dans votre âme sera complètement accomplie, vous vous rapprocherez de ceux dont vous avez détruit la confiance… Il y a l'orgueil naturel à surmonter aussi bien que le jugement du fruit que la chair a produit. L'humilité devant l'homme est souvent la meilleure preuve de la restauration devant Dieu. Je préfère rester en arrière de votre attente comme homme, que de manquer à la fidélité, à un intérêt vraiment divin pour votre âme devant Dieu. Vous pouvez être certain que, si vous étiez vraiment restauré et que les effets de la grâce fussent produits dans votre coeur, jamais le passé ne resterait dans le mien comme quelque chose contre vous. Le pardon de Dieu est pour moi la source du bonheur; il me porte à me réjouir avec ceux qui sont pardonnés, non point à leur imputer le mal ou à m'en souvenir. Vous pouvez compter sur cela; ce que je cherche, c'est un coeur fondu, adouci, se méfiant de lui-même, un coeur ou le nouvel homme l'emporte sous tous les rapports sur le vieil homme. Le mal du vieil homme est facilement pardonné quand il ne reste (d'une manière pratique) que le nouveau.

Voilà, cher X, ce qui me retient. Il y a réserve, attente, non pas manque d'intérêt ni de coeur pour vous, mais une attente de l'oeuvre de Dieu. Elle ne me paraît pas entièrement faite. Ce n'est pas un manque d'affection, que de désirer qu'elle le soit…

ME 1882 page 178

… 1862

Vous penserez sans doute, cher X., que je suis dur et sans coeur à votre égard, d'autant plus que ma dernière lettre n'a guère répondu à l'attente de votre coeur. Mais je me place — du moins j'essaie de le faire — devant le Seigneur pour vous; non pas sans tenir compte des besoins de votre coeur, mais en plaçant, même avant ces besoins, le bien de votre âme, ainsi que la gloire du Seigneur qui s'y rattache. J'écris maintenant pour que vous sachiez que je ne néglige pas les besoins de votre coeur; pour que vous sentiez que j'en tiens compte et que je désire voir la grâce de Dieu venir à votre rencontre de ce côté aussi. Je ne cesse pas de vous aimer. Vous aviez un caractère naturel où, avec beaucoup d'affection et d'énergie, il y avait peu de vénération morale. Or quand on s'éloigne du Seigneur, le mauvais côté du caractère se montre tout de suite, et les sensibilités morales s'affaissent, et c'est ce qui vous est arrivé. La restauration de votre âme aura lieu en vous amenant à juger cela, en rétablissant, et, sous certains rapports je pourrais dire: en établissant le jugement du nouvel homme, de Dieu, sur ce côté de votre nature. On peut suivre l'impulsion de l'Esprit de Dieu, comme étant né de Dieu, et se conduire bien, en abandonnant les allures du vieil homme, sans avoir jugé le caractère qui ne produit plus ses fruits. Si nous marchons avec Dieu humblement, cela se fera peu à peu, presque sans que nous nous en doutions. Sinon, s'il y a de la confiance en soi-même, de la négligence, ce caractère qui dormait se reproduit dans une chute. Alors il n'y a pas de vrai rétablissement d'âme jusqu'à ce que cela soit jugé. C'est ce qui est appelé, en Job 33) «montrer à l'homme son devoir» ou: «sa droiture», c'est-à-dire quelle est pour lui la position droite dans l'homme intérieur devant Dieu. Je ne parle pas des fruits que ce caractère a produits, — il est facile de juger cela, — mais il s'agit de soi-même. C'est alors que l'orgueil disparaît, le désir de s'excuser. On est devant Dieu. Si la marche des autres nous a brisés, nous sommes reconnaissants; nous y voyons la main de Dieu et pas celle des hommes. Mais, par-dessus tout, il y a le sobre jugement de soi-même, une perception claire de son propre caractère, mais l'humiliation devant Dieu, parce que l'on prend la part du nouvel homme et de Dieu contre soi-même. Il y a de la douceur et de la débonnaireté. Moi je suis ce que Dieu déteste, et je ne puis supporter la pensée d'être détesté de Dieu. Je ne parle pas d'imputation, je suppose qu'on est au clair là-dessus; mais je parle du fait que Christ est en nous, pour la communion… et nous avons été… quoi?

Lorsqu'on pense à ce qui nous appartient, non pas à notre position devant Dieu, mais que Christ peut demeurer dans nos coeurs par la foi, et que nos relations avec Dieu peuvent être réelles dans la pureté de l'Esprit de Dieu, et jusqu'à quel point notre caractère naturel, notre chair, nous a amenés, alors le coeur fléchit. C'est le désespoir d'y penser, mais — il faut cette droiture de Job — quand la grâce agit, c'est la restauration de l'âme; c'est le rétablissement de la communion; le coeur retrouve Dieu. Nous sommes toujours exposés, même à des rechutes, jusqu'à ce que nous en arrivions là. Mais quand on en vient là, c'est la paix; la volonté qui se montre dans l'action du caractère naturel est brisée, et l'on marche avec Dieu; on peut suivre Christ, pas avant. Que le Seigneur veuille bien agir dans votre coeur et l'exercer selon sa grâce. Je serai heureux de savoir quel est votre état…

ME 1882 page 194

1856

… Je trouve partout qu'un évangile plein, clair, positif, un vrai salut annoncé, attire les âmes; elles en ont besoin. Insistez sur la sainteté tant que vous voudrez, en nourrissant l'âme de Christ, mais que la grâce qui sauve soit grâce, qu'elle soit Dieu, une vie toute nouvelle et une justice divine accordées à l'homme déjà totalement perdu, et, en tant que chair, sans ressource, même en Dieu, — l'homme amené à reconnaître cet état dans la présence de Dieu, mais là revêtu par Dieu de la meilleure robe, robe qu'il n'avait pas même dans son innocence. Une grâce souveraine de Dieu qui, ayant effacé absolument nos péchés, nous introduit dans une position toute nouvelle, et cela par la communication de la vie de Christ ressuscité, dans laquelle tel qu'il est, tels nous sommes. Pour nous-mêmes, cher frère, cherchons ardemment, constamment et avec confiance la communion de Dieu, afin que, dépouillés de nous-mêmes, et nos pensées et nos intentions jugées, nous ayons une entière confiance en Lui. Il est fidèle, et il n'y a rien de plus doux que d'avoir la conscience intime de cette fidélité, de cet amour qui trouve sa joie à nous bénir. Veillons contre l'ennemi, dans le chemin de la volonté de Dieu…


185…

Bien-aimé frère,

… Comme vous le dites, la communion (et rien d'autre) est le régulateur qui tient l'équilibre entre la dépendance et l'activité de l'amour. Mais voici, je crois, quant au principe, ce qui l'explique. Le nouvel homme, en tant que c'est une participation à la nature divine, est, dans son activité, la charité, l'amour. Ensuite, l'amour de Dieu étant répandu dans nos coeurs par l'Esprit qui nous a été donné, devient une puissante impulsion dans ce même sens. L'Esprit nous dirige, soit envers les saints individuellement ou dans l'exercice d'un don, soit envers les pauvres pécheurs. On est père, pasteur, évangéliste, peut-être tous les trois. Mais en même temps, la qualité essentielle du nouvel homme, ainsi qu'on la voit en Christ, c'est la dépendance de Dieu et l'obéissance. Elle vit avec Dieu, et dans la conscience de ses vraies relations avec lui. Or cette relation, c'est de ne rien vouloir, de ne rien faire sans lui. Le nouvel homme ne le peut pas. Ensuite il est conduit par l'Esprit. L'homme ne vit pas de pain seulement, mais de chaque parole qui sort de la bouche de Dieu. Ainsi le Seigneur Jésus, l'amour même, ne faisait rien, où il n'avait pas la volonté de son Père pour motif. Non pas que la volonté du Père l'arrêtât dans l'activité de sa propre volonté à lui, mais que la volonté du Père seule était le mobile de la sienne. L'amour était toujours actif, mais son exercice soumis à la volonté du Père, il était dirigé et extérieurement mis en mouvement par la volonté du Père. C'est pourquoi c'était l'obéissance. En tant que le nouvel homme agit en nous, il en est de même de nous. Mais hélas! le moi, la volonté propre, l'amour propre, tendent à affaiblir l'amour et à nous détourner de l'obéissance, de l'entière dépendance de Dieu dans notre activité. Dès lors, plus ou moins d'incertitude ou d'activité propre. Maintenant l'intercession de Christ et la communion de Dieu, puis l'action de la Parole dans nos coeurs, la restauration d'un oeil net, peuvent seules rétablir l'équilibre.

Quant à 1 Jean 1: 1, dans le temps, mais il y a longtemps, j'avais pensé comme vous, et il est impossible de séparer dans la personne la préexistence de la nature divine. Cependant je crois qu'en disant: «Ce qui était dès le commencement», l'Esprit parle de ce que Jésus était sur la terre, de ce que Jean avait vu et touché. Dans l'évangile, «au commencement» se rapporte à toute existence hors de Dieu, c'est-à-dire la phrase constate l'existence éternelle du Christ comme Parole. Le grand sujet de Jean est la manifestation de Dieu et de la vie divine sur la terre. A cet effet, il parle de la Parole éternelle et de son incarnation, mais dans l'épître il passe à la reproduction de cette vie en nous, et dans ce but il reporte cette vie en nous, à son origine et à sa parfaite manifestation: ce que Christ était sur la terre. Chapitre 2: 7, semble démontrer que telle est la force du passage. Dans ces jours, où l'on veut avoir quelque chose de plus parfait que le Christ, insister sur ce qui était dès le commencement ne manque pas d'importance.

Il est de toute utilité de cultiver un esprit sain, qui ne cherche pas les questions, mais la piété. C'est ce dont Paul parle à plusieurs reprises à Timothée. On ne se nourrit jamais d'épines. Ce genre est une preuve d'un mauvais état d'âme.

J'ai été frappé dernièrement de trois caractères d'expérience ou d'action de l'Esprit de Dieu, en Philippiens, 2 Corinthiens et 1 Corinthiens Dans la première, l'âme plane au-dessus de tout, peut tout, se réjouit toujours, ne s'inquiète de rien, ne fait qu'une chose, ne sait si c'est mieux de vivre ou de mourir.

Dans la seconde, il désespérait de sa vie; quand il est arrivé en Macédoine, il n'avait pas de repos; au dehors des combats, au dedans des craintes. Mais, dans le premier cas, il se reposait sur Celui qui ressuscite les morts; dans le second, Dieu console ceux qui sont abattus. Dans le troisième, il se glorifie dans ses infirmités, afin que la puissance de Christ repose sur lui. En un mot, c'est la force et la consolation divines, lorsqu'on est pressé par les difficultés.

En 1 Corinthiens, les chrétiens étaient dans un bien mauvais état. Il les reprend sévèrement, mais il commence en disant: «Dieu est fidèle, qui vous affermira jusqu'à la fin, afin que vous soyez irréprochables dans la journée de notre Seigneur Jésus Christ». Quelle grâce en tout cela! Aussi cela m'a fait du bien et je l'ai trouvé instructif.

Le cher frère X. m'a donné de bonnes nouvelles de l'oeuvre dans vos quartiers. Dieu en soit béni. Le travail des siens ne sera pas en vain, si nous ne nous lassons pas. Que Dieu vous soutienne, cher frère, et vous bénisse vous-même dans votre âme. Il faut boire pour soi-même afin d'avoir des rivières. Saluez bien affectueusement tous les frères, bien que je ne les connaisse pas de vue. Que le Seigneur, le leur et le mien, les bénisse…


Londres 1860?

… Je sympathise avec vous, cher frère, au sujet de votre chère mère. Sans doute, jusqu'à ce que tout soit désert, et que le ciel, Christ, soient tout, ces pertes brisent les liens et nous font sentir que c'est le désert. Mais c'est bon, parce que c'est la vérité et parce que nos âmes en ont besoin. Il faut que nous soyons sevrés. Le premier Adam appartient — à quoi? appartenait au paradis terrestre. Tout cela est perdu. Les liens de la vie d'ici-bas restent, ceux-là mêmes que Dieu a formés et qu'il trouve à leur place, mais la mort est entrée, et le Saint Esprit est une puissance qui nous dégage de tout et nous lie à ce qui est invisible, à Christ dans le ciel et à l'amour du Père. Quelquefois cela se fait au commencement, d'une manière violente, quelquefois peu à peu; mais Dieu l'opère dans les siens, car il leur a préparé une cité, leur a déjà fait part d'une bourgeoisie céleste. Et il est bon; il nous élève pour le ciel et vers le ciel.

… Sans doute nous avons nos peines; je le sais bien: mais nous avons un Seigneur toujours fidèle, fidèle et plein d'amour pour nous bénir. Nous pouvons compter sur lui; puis le repos en sera plus béni, plus rempli de la connaissance de ses joies à lui, car il verra du travail de son âme et sera satisfait; et si nous avons, par grâce, une toute petite part avec lui dans ses peines, nous l'aurons dans sa joie, pour toujours en haut. La croix à présent, et nous en savons très peu. Lui-même, cher frère, et la joie et la gloire avec lui, c'est notre avenir…

ME 1882 page 258

Londres 1861

… Quant à cet article du Messager (*), je ne l'ai pas vu, mais j'ai une idée générale de la doctrine qu'il contient, et je la tiens pour complètement fausse. Quelque chose de pareil — la même doctrine, seulement poussée à ses dernières conséquences) — s'est montré (non au milieu des frères, mais à côté), de sorte qu'on a eu à faire avec elle. Je crois ces vues propres à faire beaucoup de mal… Il y a un littéralisme qui, selon moi, fourvoie beaucoup dans l'interprétation… Souvent l'intelligence s'occupe trop de la Parole, sans question des âmes et sans avoir affaire avec les âmes, et ce sont des spéculations. Enfin, je rejette tout à fait cette application des passages. Les passages en Matthieu et Marc, et en Luc aussi, dépeignent le rejet des Juifs, enfants du royaume selon la chair, et les enfants selon la grâce, reçus. Aussi prendre le sein d'Abraham littéralement est un non sens. L'idée du sein d'Abraham est la meilleure place au point de vue des Juifs. Pour le système juif, les richesses étaient preuves de bénédiction, mais le Seigneur lève le voile et montre l'autre monde, mais il le dépeint au point de vue juif. Pour un Juif, Abraham était le chef de la bénédiction, et le pauvre était le plus rapproché de lui, comme Jean penché sur le sein de Jésus au dernier souper. Si l'on prend ces passages littéralement, le mauvais riche devrait avoir un corps (Lazare aussi), puis une goutte d'eau a dû pouvoir le soulager. Ce sont de vrais non sens. Ce qu'on appelle les Pères de l'Eglise se sont amusés avec les mêmes spéculations, qui ne démontrent pour moi autre chose que ceci, c'est qu'on n'a pas saisi le sens des passages, ni, sous ce rapport, la portée de la rédemption et du péché. Matthieu 8: 11, 12, ne se rapporte pas au moment de l'établissement du royaume sur la terre; il s'agit d'être avec Abraham qui sera ressuscité, d'un côté, et les Juifs rejetés, de l'autre, ce qu'ils ne seront pas quand le royaume sera établi. Si Matthieu 13: 42, 50, s'applique au jugement du règne, je réponds: le jugement des vivants est aussi final que celui des morts. Matthieu 25: 46, le démontre. Quand on tient ferme les vérités fondamentales, on est gardé de ces méprises qui viennent de conclusions précipitamment tirées de passages qui ne disent pas la chose. Le cas du mauvais riche n'était nullement le jugement du royaume, car c'était tout de suite après sa mort. Si Matthieu 22: 13, ne parlait que d'un jugement temporaire, aucun hypocrite, n'en subirait un autre; si ce jugement n'est pas temporaire, alors tout le système tombe. Mais voyez l'effet, quand on fait usage des paraboles qui constatent des principes généraux, pour des détails qui s'accompliront: 1° Il n'y aura qu'un seul homme jugé. 2° Il faut que tous ceux qui professent l'évangile vivent jusqu'à la fin et soient jugés sur la terre. Au reste, 3° ce sont des appelés et non des élus, ils ne sont pas sauvés, puis le verset 14 contredit le 11e. Tout ceci n'est que s'égarer. En Matthieu 25, le Seigneur dit: «Je ne vous connais pas». Ce qui n'est pas si elles ne sont rejetées que pour le royaume. Si l'on veut dire que ceux qui seront exclus du royaume seront également jugés devant le grand trône blanc, Matthieu 25: 41, 46, montre qu'il n'en est pas ainsi. Luc 13: 24-30, démontre le contraire de ce qu'on dit. C'est la condamnation totale de ceux qui avaient la prétention d'être les enfants du royaume de droit et la révélation de l'admission des gentils.

 (*) Messager de 1861, p. 213.   (voir ME 1861 article 10  3ème partie)

… Je ne peux naturellement rien dire des détails, car je n'ai pas l'article, mais je comprends le principe de ce système, et je le crois absolument sans fondement…

ME 1882 page 316

Démérara, décembre 1868

… J'ai été fortement frappé de la différence d'instruction dans ce qui précède et suit le verset 12 du chapitre 5 de l'épître aux Romains. Jusqu'à la fin du verset 11, il s'agit des péchés et de notre justification, du pardon par le sang et par la résurrection de notre précieux Sauveur. Depuis le verset 12, il est question du péché, de notre commun état à tous devant Dieu, et non du pardon, mais de la délivrance; et pour cela il ne s'agit pas de Christ mort pour nos péchés, mais de notre mort avec lui et du fait que nous vivons par lui. La bénédiction de la première de ces grâces, se trouve dépeinte au chapitre 5: 1-11; celle de la seconde au chapitre 8. La première [bénédiction] est davantage ce que Dieu est lui-même, ce qu'il est pour le pécheur, la seconde notre position devant lui et ce qu'il est pour les siens. Dans l'épître aux Romains, le pécheur est envisagé comme vivant dans le péché, puis mort avec Christ (il n'est pas encore ressuscité avec lui, mais il est vivant par lui). Dans l'épître aux Colossiens, l'apôtre va plus loin: on est mort dans le péché et ressuscité avec lui. C'est un changement de position aussi bien que la communication d'une nouvelle vie. Dans l'épître aux Ephésiens, nous ne sommes vus que comme morts dans les péchés (tout en y marchant), puis vivifiés, ressuscités avec Christ, et assis en lui dans les lieux célestes. Dans l'épître aux Colossiens, le chrétien, tout en étant ressuscité, est sur la terre; sa vie est cachée avec Christ en Dieu; il doit avoir ses affections en haut; son héritage y est conservé pour lui.

Vous pouvez examiner ces choses dans la Parole. Ce que j'ai dit des Romains est très utile pour l'affranchissement des âmes. C'est l'affranchissement.

Je bénis Dieu, cher frère, de ce qu'il vous a gardé votre chère petite fille après avoir retiré votre fils. Sa bonne main est sur nous, même (et tout particulièrement) dans les choses qui sont pénibles. Il ne valait pas la peine de donner une longue histoire de la prospérité de Job, mais le Saint Esprit de Dieu nous a donné les détails de tout ce qui s'est passé dans ses difficultés. Il en valait la peine, et c'est pour le profit des siens jusqu'à la fin du siècle. C'est là que l'oeuvre de notre Dieu s'est trouvée. Qu'il nous donne d'avoir une entière confiance en lui. C'est la première chose que Satan ait détruite, avant que, et pour que la convoitise entrât en Eve. Or la vie de Jésus tout entière était la manifestation de l'amour pour regagner la confiance du coeur de l'homme. Sans doute, il fallait la grâce, mais c'est ce qu'il était, Dieu se montrant à l'homme pour qu'il se confiât en lui. Sa mort ne diminue pas les preuves de son amour.


Ottawa, 4 juin 1877

Bien cher frère,

… Nous connaissons bien le système des Adventistes dans les Etats-Unis… ils sont nombreux, mais déchus. Ils avaient annoncé la venue du Seigneur pour un jour nommé en 1844, ce qui a manqué. La plupart sont tout à fait éloignés de toutes les vérités chrétiennes; une partie d'entre eux, plus orthodoxes, séparés dans les grandes villes, mais, dans les petites localités, allant ensemble. Mais tous retiennent les plus funestes erreurs. On ne va pas dans le ciel du tout; on sommeille jusqu'à ce que Christ vienne; puis il établit son règne en résurrection sur la terre, et alors seulement on a la vie éternelle, qu'on ne possède pas maintenant du tout; on en a seulement la promesse. C'est là la doctrine de ceux qui se sont le moins écartés de la vérité. Les autres nient l'immortalité de l'âme, et un bon nombre d'entre eux presque toutes les vérités chrétiennes.

… Une petite section veut maintenir l'observation du sabbat le septième jour de la semaine, mais je ne crois pas qu'ils soient nombreux… La section à laquelle les Messieurs X. appartiennent, a ajouté à ses hérésies le baptême et le septième jour comme obligatoires. La masse des Adventistes se compose des pires hérétiques du pays, niant au fond tout ce qui est important dans le christianisme, et réellement incrédules… J'espère que les frères les éviteront… Que Dieu les garde dans sa bonté…


1879

Bien cher frère,

Notre passage ici-bas est un temps de combats et de conflits, et cela ne pourra être autrement. Or si l'ennemi nous trouve à découvert, si la chair est en activité, il peut toujours nous tourmenter. De plus il nous faut, pour nous mesurer avec lui, toutes les armes de Dieu. Il ne s'agit pas de force, mais de ruses, et Dieu permet que nous fassions la découverte de notre état par ce moyen, comme dans le cas de Haï et des Gabaonites. — Mais dans l'oeuvre il y aura toujours combat; victoire sans doute, si nous sommes fidèles. Nous tenir debout, voilà notre affaire, dans les jours mauvais. Je suis sûr, cher frère, que, quant à toutes ces paroles injurieuses, il y a une seule chose à faire: se taire et les supporter, et remettre tout à Dieu, en priant même pour ceux qui parlent ainsi. J'ai été frappé de la part que, dans le Nouveau Testament, la patience a dans la vie chrétienne. «Fortifiés en toute force, selon la puissance de sa gloire».… Quelle grande oeuvre va suivre? «pour toute patience et persévérance avec joie». «La patience doit avoir son oeuvre parfaite, afin que nous soyons parfaits et accomplis dans toute la volonté de Dieu;» parce qu'alors la volonté propre de l'homme, son esprit à lui, n'a pas de place dans notre marche. Souvent même, en cherchant à faire du bien, nous n'attendons pas assez l'action de Dieu qui seul peut faire du bien. J'espère que les frères dont on dit du mal auront une parfaite patience, et Dieu jugera leur cause. Qu'ils se placent en même temps devant Dieu, humiliés au sujet de tout ce mal, en priant Dieu lui-même d'y porter remède. Il vous forcera, cela se peut, d'exercer la patience; il l'exercera lui-même; et dans son temps (et c'est le meilleur), il paraîtra pour la bénédiction et à la joie de ceux qui se sont attendus à lui. Saluez les frères.

ME 1882 page 337

Toronto 1876

… L'homme est ici comme partout, — peut-être un peu plus, — occupé des choses terrestres, mais on travaille pour dégager les coeurs des mêmes intérêts, des mêmes passions qu'ailleurs. Je ne sens guère de différence entre l'Angleterre et le Canada. Quand on est près du ciel, quand Jésus est tout, un lieu ne diffère guère d'un autre; Dieu reste Dieu, saint et amour, et l'homme reste l'homme.


1881

Bien aimé frère,

Je suis par la bonté de Dieu beaucoup mieux. … Il y a un changement en moi, à la suite de cette proximité de la mort, non pas en doctrine, non pas dans mes vues. En tout cela rien n'est changé; tout est confirmé. C'est une douce pensée que tout ce que j'ai enseigné a été de Dieu; mais j'ai bien plus intimement la conscience d'appartenir à l'autre monde. Je l'avais bien déjà par la foi, mais j'ai le sentiment d'en être. Je ne sais quand il me prendra, et jusqu'à ce moment, je fais, comme toujours, ce que mes forces me permettent. Veiller et prier est nécessaire comme par le passé, mais c'est davantage ce que le bien-aimé Sauveur a dit: «Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde;» et d'où était-il? A cet égard le changement est sensible, et j'attends…

ME 1882 page 457

1880

Bien cher frère,

Je vous remercie de votre lettre. Tout cela m'intéresse beaucoup. X. m'écrit aussi l'issue de ce mouvement de division dont vous parlez. Il paraît bien, Dieu en soit béni, que cela s'éteint. Souvent un peu de patience pour laisser Dieu agir est le remède (tout en jugeant tout mal manifesté), spécialement quand le mal est plutôt dans l'état général; puis il faut chercher, en nourrissant les âmes de Christ, à élever leur ton spirituel. Au reste, il faut toujours regarder plus loin que ce pauvre monde d'ici-bas. Nous devrions être un témoignage de Dieu ici-bas, et il faut bien s'en souvenir. «Vous êtes mes témoins», dit Jéhovah à Israël, et à plus forte raison les chrétiens sont tels, eux, le sel de la terre, la lumière du monde. Je le cherche, je le demande à Dieu, et aussi qu'il maintienne son témoignage dans sa pureté. Je crois qu'il le fera, mais pour cela il faut que nous vivions près de lui en Esprit, comme lui vivait auprès de son Père, un avec lui, en sorte que tout ce qu'il disait et faisait n'était que l'expression de ce que le Père était. C'est ce que nous devrions être pour Christ, mais pour cela il faut que le coeur soit avec lui en haut.

La première chose, c'est la communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ, car là est la puissance directe de la vie, mais on se trompe en supposant que les choses célestes ne nous soient pas révélées. «Ce que l'oeil n'a pas vu, ce que l'oreille n'a pas entendu, ce qui n'est pas monté au coeur de l'homme, Dieu nous l'a révélé par son Esprit». «Nous avons reçu, non l'esprit du monde, mais l'Esprit qui est de Dieu, afin que nous connaissions les choses qui nous sont gratuitement données de Dieu». Or tout en nous donnant de la force ici-bas, et nous détachant des choses qui se voient, cela nous habitue à vivre dans les choses qui sont notre portion éternelle.

On se sert souvent du Sauveur dans sa grâce si adaptée à nos besoins, et qui coule si librement envers nous, qui pense à nous, à toutes nos difficultés, à toutes nos faiblesses, et l'on a bien raison, car il nous fait traverser en paix et en sûreté un monde de chagrins et de dangers; mais c'est autre chose d'avoir le coeur élevé au-dessus du monde, tout en le traversant, et attaché à Lui dans le ciel, de sorte que ce qui remplit le coeur à présent est aussi l'objet de notre espérance. C'est ce que je cherche et demande à Dieu pour les chrétiens comme pour moi-même. Mais il faut Christ pour la traversée du désert, il faut savoir compter sur sa fidélité dans toutes les circonstances, et s'attendre à lui.

… Que Dieu garde tous les frères bien près de lui. C'est là notre position éternelle, et cela tient la conscience réveillée. La crainte de Dieu est le commencement de la sagesse.