Le sevrage

 ME 1882 page 476

 

… Il m'est doux d'écrire à quelqu'un qui traverse la tourmente et qui, en même temps, cherche et trouve un abri dans le Seigneur. Que peut-on dire? Ne nous connaît-il pas? Ne se souvient-il pas de quoi nous sommes faits? Souvent, nous pensons qu'il n'en est pas ainsi. Le temps du sevrage est une période de grande souffrance pour l'âme, mais un temps nécessaire. Nulle âme n'apprend à être vraiment indépendante des secours qu'un enfant réclame, si elle n'a été sevrée. Il est surprenant de voir combien nous avons de nourrices. Notre âge, notre progrès dans la vie se détermine selon la mesure de notre force pour nous passer de nourrice. Je crois que chacun d'entre nous (sauf de rares exceptions) traverse une période de sevrage, et pourquoi? Simplement, pour que, par la force qui nous est donnée, nous soyons capables de dépendre de Dieu sans l'intervention de ce qui trahit notre faiblesse personnelle. La souffrance du sevrage provient de la privation de ce à quoi se liait pour nous la bénédiction de la vie, et naturellement la chose peut se présenter de bien des manières. Satan pensait que Job ne pourrait pas être sevré, car il dit: «Enlève-lui tout ce qui lui appartient, et il te blasphémera en face». Mais Job fut sevré. L'âme est sevrée, lorsqu'elle adore Dieu et prie pour d'autres. Je ne puis rendre culte si mon âme n'a pas Dieu pour objet, et je ne puis prier pour d'autres si je suis occupé de moi ou de la perte de quelqu'un de mes canaux de bénédiction. Oh! combien de jours, de nuits, passés dans les larmes et dans l'amertume de l'âme, alors que l'on est sevré de quelque grâce à la puissance de laquelle le coeur était accoutumé dès longtemps. Est-ce que Dieu voudrait ne pas répondre à nos besoins? Celui qui nous a donné son propre Fils, voudrait-il nous refuser quelque chose? Non, non! mais il faut que nous soyons sevrés; autrement nous ne saurons jamais ce que c'est que de dépendre de lui, en dehors de toute intervention humaine ou naturelle. Sans doute, Paul a souvent parlé de n'avoir aucune confiance en la chair, mais ce fut en prison, à Rome, qu'il sentit qu'il était complètement sevré. Toute âme qui s'est rendu compte du chemin qu'elle a dû faire depuis le moment où elle a perdu son aide habituelle, jusqu'au moment du sevrage complet, où s'appuyant sur Dieu elle a été indépendante de ce qu'elle avait perdu, cette âme peut raconter les apaisements momentanés, bientôt suivis des tourments de convulsions nouvelles, qui ont accompagné cette lutte sombre et désespérée, jusqu'à ce que l'âme ait atteint la lumière et la joie de la présence de Dieu. Oh! comme il a compassion de nous, dans toute cette angoisse. Il ne peut nous céder ni relâcher sa main, mais il nous fournit beaucoup de lampes pour modifier le frisson et les ténèbres de notre voyage souterrain. Si je connais la justice sur laquelle l'amour de Dieu est basé, je comprendrai mieux combien de choses il lui faut corriger et soumettre en moi, avant qu'elle puisse se complaire avec moi. Si je me juge dans la lumière de son amour, je comprendrai combien le sevrage m'est nécessaire.