Mes frères bien-aimés - Darby J.N

 Cette lettre, écrite de la main de J.N. Darby peu de jours avant son départ pour Bournemouth, a été trouvée non signée dans un tiroir de son cabinet de travail.

ME 1882 page 479  -  Appendice

 

En entreprenant de vous écrire ces quelques mots, je sens d'une part une grande responsabilité, mais de l'autre une véritable joie, quand mes pensées se portent vers les choses auxquelles je crois que l'Esprit de Dieu nous appelle.

Chacun sent — aucun d'entre nous ne le nie — que nous avons passé à travers un temps d'humiliation, de peine et d'exercice de coeur. L'état des frères avait rendu cela nécessaire, car ce n'est pas volontiers que Dieu afflige et contriste les fils des hommes, mais celui que le Seigneur aime, il le discipline, et il fouette tout fils qu'il agrée. Or donc il nous agrée, et c'est une grande grâce, une bénédiction immense. Songez à ce que c'est, pauvres et indignes que nous sommes, d'être agréés comme son témoignage sur la terre. Or je ne parle pas même de ce témoignage comme d'un privilège acquis, quelqu'immense que soit ce dernier. «Vous êtes mes témoins», dit Jéhova au peuple d'Israël: telle était leur position et leur responsabilité; ils y avaient été placés. Tout chrétien aussi est tel, afin que la vie de Jésus soit manifestée dans sa chair mortelle.

Les sept églises de l'Apocalypse ont une telle importance en rapport avec ce sujet, qu'il convient de s'enquérir un peu de leur vrai caractère. On ne peut douter, je pense, qu'elles ne présentent une esquisse rapide, mais des plus frappantes du cours de la chrétienté occidentale, après que, par l'opération de Dieu, elle eût été placée dans une position de responsabilité humaine.

Nous y trouvons d'abord (*) le caractère ecclésiastique tout entier de la chrétienté, jusqu'au moment où, le temps qui lui a été donné pour se repentir étant terminé, elle tombera sous le jugement de Dieu. Alors le royaume et l'Etoile du matin, Christ dans son caractère céleste, lui seront substitués. Là-dessus vous trouvez une peinture collatérale du protestantisme, suivant son cours après la réformation et coïncidant avec ce qui précède jusqu'à ce que lui aussi soit rejeté. Cette portion de la chrétienté avait été nettoyée de son paganisme, et, en rapport avec cette oeuvre, présentait beaucoup d'activité; mais Christ n'avait pas sa place dans le coeur de la chrétienté. Elle avait le nom de vivre, mais elle était morte. Elle est traitée comme le monde; le Seigneur vient sur elle à une heure inattendue, et c'est la part du monde. Chacun aura remarqué la condition donnée à chaque assemblée, comme base d'une bénédiction spéciale: «A celui qui vaincra». Mais notez que cela s'applique aux difficultés et aux dangers, qui tendent à faire obstacle à la fidélité dans la position où se trouve chaque assemblée particulière. Un don spécial peut alors être la récompense de la victoire. Mais il y a à remarquer d'autres choses encore qui caractérisent ces dernières églises.

(*) Dans les quatre premières églises. (Note du Traducteur)

L'épître à Philadelphie nous parle de l'amour, mais elle met en avant la sainteté et la vérité de Christ. Quelque grand que soit son amour, et il est infini et immuable, quelque grande que soit l'activité de sa bonté, ce qui caractérise notre connaissance de Christ, ce qu'il nous faut avoir de Lui, ce qui met l'empreinte sur notre témoignage, c'est sa sainteté et sa vérité. La chose est de toute importance. Puis vient un autre point, c'est que, en dépit de la puissance du mal, il est Celui qui tient la porte ouverte ou fermée comme cela lui convient. Ce n'est pas l'opération du don et de la grâce dans l'ouvrier, dont il est question ici, mais le fait qu'Il peut ouvrir la porte et l'accès aux âmes.

Mais ce n'est pas tout encore. Au milieu de tout ce qui se passait il connaissait leur oeuvre, et il avait mis devant eux une porte ouverte que personne ne pouvait fermer. Son oeil était sur eux en grâce. Le témoignage de la grâce devait être rendu; il ne pourrait être entravé. Les soutiens de la religion traditionnelle seraient forcés de les reconnaître, et sauraient alors que Christ avait aimé les saints de Philadelphie.

Encore un autre point. Leur piège n'était pas de devenir laodicéens; le danger, c'est l'apostasie. Laodicée a ses propres dangers qui lui appartiennent. Quant à eux, par grâce, ils n'avaient pas seulement saisi et retenu l'espérance du croyant, mais la patience de Christ quant à l'accomplissement de cette espérance; ils avaient gardé la Parole, l'autorité divine dans ce livre. Christ, auquel appartenaient toutes les promesses et auquel il avait été dit: «Assieds-toi à ma droite jusqu'à ce que j'aie mis tes ennemis pour marchepied de tes pieds», semblait avoir attendu bien longtemps que cette promesse fût accomplie. Mais les saints de Philadelphie attendaient, comme le Seigneur avait attendu, l'accomplissement des promesses. Il n'y avait pas de retardement du côté de Dieu, mais Dieu était patient.

Il est très remarquable que le Seigneur ne place jamais sa venue au delà de la vie de la personne dont il parle, ou à laquelle il parle. Les cinq vierges sages et les cinq folles sont les mêmes qui s'endormirent et s'éveillèrent. Il en est ainsi dans chaque cas, avec une seule exception qui augmente l'importance de la règle: Pierre reçut la communication qu'il devait mourir. Mais ici le Seigneur ne parlait pas de sa venue. Maintenant que des siècles ont passé, que des générations se sont succédé, attendons-nous des cieux avec un désir réel, le Fils de Dieu? Sa venue est-elle une actualité pour nous? Lui, attend patiemment le temps qui convient à Dieu: faisons-nous de même? sommes-nous fermes dans l'espérance et dans une foi actuelle?

Cette condition n'avait pas à être remplie; elle l'était pour les saints de Philadelphie; en conséquence, ils échapperaient à l'heure de l'épreuve qui allait venir sur toute la terre.

Mais le Seigneur ajoute encore ceci: Il allait venir bientôt; eux devaient tenir ferme ce qu'ils avaient, afin que personne ne prit leur couronne.

Ce qui évidemment caractérise surtout les saints de Philadelphie, c'est, au terme d'une dispensation, l'analogie de leur position avec celle de Christ. Pas de force apparente, mais la porte tenue ouverte pour eux comme elle l'avait été pour Lui par le portier. Ils gardent Sa parole; ils ne renient pas Son nom; ils gardent spécialement la parole de Sa patience.

Une autre chose précieuse, faite pour frapper chacun, c'est la manière dont ils sont identifiés avec lui dans la gloire. Il est de toute importance de remarquer que ce qui les caractérise, c'est la vérité et la sainteté, la vérité comme ceinture autour de leurs reins, car c'est la vérité qui sanctifie.

On ne trouve rien en Philadelphie des caractères spécifiques de Laodicée. L'une et l'autre ont chacune son propre caractère qui lui appartient. On ne trouve pas non plus en Laodicée la fidélité de Philadelphie. Les dangers, nous l'avons vu, diffèrent entièrement.

Et maintenant je voudrais supplier les frères de ne pas être occupés du mal, mais si le Seigneur a mis devant eux une porte ouverte — et il l'a fait dans sa grâce — leur part est d'en profiter; de tenir ferme dans la vérité et la sainteté, par lesquelles Christ se caractérise lui-même; d'être toujours semblables à des hommes qui attendent leur Seigneur, gardant la parole de sa patience; et, assurément, Dieu les bénira. Il ne s'agit pas là seulement de doctrine, mais d'activité dirigée par la doctrine, et d'un sentier formé sur celui de Christ.