Notre rassemblement

«N'abandonnant point le rassemblement de nous-mêmes» (Hébreux 10: 25).

ME 1883 page 46

 

Je voudrais, dans ces lignes, rappeler quelques unes des vérités bénies que nous présente la parole de Dieu touchant le rassemblement des saints. Nous sommes dans les «temps fâcheux» (2 Timothée 3: 1). L'effort de l'ennemi tend à renverser le témoignage que Dieu a suscité dans les «derniers jours» au milieu de la ruine, et, pour cela, il cherche à faire oublier ou négliger ces vérités, ou encore à les dénaturer dans leur application. Combien donc il est urgent pour nous de revenir sans cesse aux principes si simples et si précieux que le Seigneur, dans sa grâce, a bien voulu nous faire connaître.

Avant tout, rappelons-nous certains points d'une grande importance, pour nous diriger dans une marche à la gloire de Celui qui nous a aimés et s'est donné lui-même pour nous.

L'apôtre Jean, écrivant à «la dame élue» pour la mettre en garde contre les séducteurs, parle de la vérité, de l'amour et de l'obéissance, trois choses étroitement unies, que l'on ne peut séparer, et qui n'ont leur réalité et leur vraie expression que lorsqu'elles demeurent réunies. Aussi l'apôtre dit-il: «que j'aime dans la vérité,» et plus loin: «C'est ici l'amour que nous marchions selon ses commandements» (2 Jean).

Ce ne serait pas connaître et posséder réellement la vérité, si elle n'agissait pas sur notre conscience pour nous amener devant Dieu, qui a droit à notre obéissance, et sur nos affections pour les attacher à Celui qui est «la vérité». Christ est la vérité, parce que seul il nous révèle dans leur vraie nature morale Dieu, le monde et nous-mêmes. Or c'est seulement dans la vie divine produite en nous par le Saint Esprit qu'a lieu cette révélation. «C'est ici la vie éternelle, qu'ils te connaissent seul vrai Dieu et celui que tu as envoyé, Jésus Christ» (Jean 17: 3). L'objet de cette vie est Christ, la vérité, son caractère est l'amour, suivant ce qui est écrit: «L'amour est de Dieu et quiconque aime est né de Dieu, et connaît Dieu» (1 Jean 4: 7); ainsi, sans l'amour, la connaissance que l'on prétendrait avoir de la vérité, ne serait que le produit de l'exercice de nos facultés naturelles.

La vérité se rattache donc à une personne divine; le Saint Esprit, l'Esprit de vérité, la révèle à l'âme en la vivifiant, et produit ainsi l'amour pour cette personne bénie. Mais alors, n'est-il pas évident que l'amour — l'amour divin, j'entends — ne peut subsister sans la vérité qui est son objet? Tout ce qui portera atteinte à la vérité divine, ne peut que blesser l'amour divin. L'amour supporte l'ignorance, il a compassion de celui qui s'égare, il le reprend, il espère qu'il sera ramené et use de patience, mais le vrai amour ne saurait accepter, ni tolérer, ce qui attaque d'une manière quelconque la vérité, la personne et la gloire de Christ. «Il ne se réjouit pas de l'injustice, mais se réjouit avec la vérité» (1 Corinthiens 13). Quelqu'un a dit: «La pierre de touche du véritable amour est le maintien de la vérité».

Quel est le résultat et la preuve du véritable amour? C'est l'obéissance. «Si vous m'aimez,» a dit le Seigneur, «gardez mes commandements». Et encore: «Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole et mon Père l'aimera». «Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour». «C'est ici l'amour de Dieu, que nous gardions ses commandements» (Jean 14: 15, 23; 15: 10; 1 Jean 5: 3). Ainsi l'amour divin et l'obéissance ne peuvent se séparer. Lorsque, dans la puissance du Saint Esprit, nous avons appris à connaître la vérité dans la personne bénie de Christ, qui nous a aimés, et qui s'est livré pour nous, les affections du coeur renouvelé se portent sur lui; nous reconnaissons son autorité comme Seigneur et nous prenons notre plaisir à l'obéissance.

«Ses commandements ne sont pas pénibles», parce que le «moi» est mis de côté, et l'obéissance suit comme fruit de la vie divine. «Je ne vis plus moi, mais Christ vit en moi». Comme on l'a dit encore: «Ce à quoi un chrétien est appelé, c'est d'obéir à Christ, avec la vérité dans le coeur, et l'amour pour source de tout, et c'est là Christ». Obéir sans amour, c'est la loi; obéir par amour, c'est Christ. Lui-même a marché sur la terre dans l'amour, selon la vérité, et dans une obéissance parfaite. Puissions-nous suivre ses traces!

Or la marche dans la vérité et l'obéissance, c'est la marche selon la Parole. Le Seigneur a dit: «Ta parole est la vérité» (Jean 17: 17). «Toute écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l'homme de Dieu soit accompli». Elle seule nous révèle Dieu, ses conseils, ses pensées et ses voies; elle seule doit avoir autorité sur nous pour former nos pensées et régler notre marche en toutes choses. «L'entrée de tes paroles illumine et donne de l'intelligence aux simples» (Psaumes 119: 130). Le Saint Esprit seul peut, il est vrai, nous donner de la Parole une intelligence divine et l'appliquer à nos consciences et a nos coeurs. Mais il est donné au chrétien pour le conduire dans toute la vérité. Or cela exclut nécessairement toute intrusion des pensées, des raisonnements et de la volonté de l'homme, et demande la soumission et la dépendance absolue de l'âme, afin que l'Esprit de Dieu puisse en effet nous enseigner et nous conduire par la Parole. «Parle, Seigneur, car ton serviteur écoute», telle doit être notre attitude.

Le coeur naturel ne peut accepter cette soumission et cette dépendance; il cherche à y échapper par toutes sortes de raisonnements. Il veut ajouter, excepter, régler, expliquer, là où Dieu a parlé clairement. Combien nous avons à nous tenir en garde contre cet esprit d'indépendance! Il a commencé dans le jardin d'Eden quand Eve eut prêté l'oreille à Satan; il s'est perpétué, et se montre partout, hélas même chez les chrétiens; il aura bientôt sa pleine manifestation dans «l'homme de péché, qui s'oppose et s'élève contre tout ce qui est appelé Dieu ou qui est un objet de vénération». C'est cet esprit qui se montre si souvent dans notre marche individuelle, lorsqu'au lieu de dire à Dieu: «Fais-moi connaître ton chemin et je te connaîtrai» (Exode 33: 13), nous nous efforçons de trouver le nôtre, d'après les circonstances où nous sommes et ce qui nous convient le mieux.

Mais c'est surtout dans la marche collective, je veux dire relativement au rassemblement des saints que, négligeant les directions de la Parole, ou se croyant appelé à suppléer aux lacunes qu'il croit y voir, l'homme a cru pouvoir régler les choses à son gré, comme s'il n'y avait pas pour ce rassemblement un terrain et des principes divins indiqués clairement par la Parole, où l'obéissance devrait conduire ceux qui désirent marcher dans la vérité et dans l'amour et duquel, hélas! l'ignorance ou des préventions écartent ou tiennent éloignées bien des âmes sincères.

Examinons donc ce que la parole de Dieu nous enseigne à cet égard.

On pense que les chrétiens doivent se réunir comme ayant une même foi, comme rachetés par un seul et même Sauveur, comme enfants d'un même Dieu et Père, comme unis par les liens d'un même amour, mais on estime que d'ailleurs on est libre de s'organiser comme l'on veut et du mieux que l'on peut. On ne saurait en effet être rassemblés selon Dieu, sans posséder les caractères que nous venons de mentionner, mais ils ne constituent pas ce terrain béni que la Parole nous présente, et où tous les enfants de Dieu devraient se rencontrer, parce qu'il est le seul assez large pour les réunir tous et que, bien compris, il mettrait fin à toutes les divisions.

Quel est-il donc? Chez les enfants d'Israël, il y avait un lieu unique que l'Eternel avait choisi pour y faire habiter son nom. Là seulement il pouvait être adoré. C'était le centre du rassemblement du peuple. Tout ce qui se rapportait au service divin était selon Dieu, parce que lui-même l'avait réglé. Ainsi les Israélites, bien que n'ayant dans leur culte que les ombres de ce qui était à venir, savaient cependant ce qu'ils adoraient. Serions-nous moins favorisés que le peuple terrestre, nous qui avons l'image même des choses? Non; nous le sommes plus à tous égards. Nous n'avons pas, il est vrai, un centre matériel qui nous rassemble: «Vous n'adorerez le Père, ni sur cette montagne, ni à Jérusalem,» a dit le Seigneur. L'adoration n'est pas limitée à un lieu spécial. «Les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit, et en vérité,» tel est le caractère de l'adoration; en Esprit, en contraste avec un culte extérieur qui convenait à un peuple terrestre, et pour montrer la puissance dans laquelle le culte chrétien peut seul être rendu; mais en vérité aussi, c'est-à-dire selon la révélation de Dieu, comme Père, et notre relation avec Lui. Or selon cette vérité, nous avons aussi bien que le peuple terrestre un centre de rassemblement unique, en harmonie avec l'adoration en Esprit et avec notre position comme peuple céleste.

Dans la Parole, le Seigneur Jésus lui-même nous fait connaître le terrain sur lequel on est vraiment rassemblé selon la pensée de Dieu et où, pour nous aussi, il a mis son nom. Sa grâce et sa sagesse l'ont préparé comme ressource parfaite pour tous les temps, pour tous les lieux et dans toutes les circonstances, ainsi qu'il convenait pour des adorateurs «en esprit et en vérité». «Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom,» dit le Seigneur, «je suis là au milieu d'eux». Là où deux ou trois sont assemblés indique à la fois que le lieu n'y est pour rien et que le grand nombre ne constitue pas le rassemblement et ne le modifie en rien: il peut être aussi limité que possible. En mon nom le caractérise. Son nom, c'est tout ce qu'il est, et rappelle tout ce qu'il a fait. C'est le nom précieux à Dieu et à nos coeurs, c'est celui par lequel seul nous avons le salut, c'est le nom au-dessus de tout autre. «Assemblés en son nom,» montre que c'est lui qui nous occupe ensemble, que c'est pour lui que nous nous sommes réunis et pour aucun autre objet. «Son nom,» qu'y aurait-il d'autre pour nous attirer? «Assemblés en son nom,» n'est-ce pas là ce qui seul peut réunir tous les enfants de Dieu? Cela n'exclut que ce qui déshonore le nom de Christ. «Je suis là au milieu d'eux», c'est la promesse bénie qui devient une réalité dès que le rassemblement est vraiment en son nom, réalité précieuse qui parle à nos affections, qui soutient et encourage nos coeurs. C'est celui qui nous aime qui est là, c'est, celui à qui toute puissance a été donnée. Il est là aussi réellement qu'il était au milieu des siens le soir de la résurrection (Jean 20), présence spirituelle, c'est vrai, telle qu'il convient à des adorateurs en Esprit, mais réelle et que la foi saisit.

Nous avons donc là tout autant qu'Israël un terrain de rassemblement unique «en son nom,» autour d'un centre unique, lui présent «au milieu» de nous. La parole de Dieu ne nous en indique point d'autre. Que c'est précieux! C'est ce qui ne manque jamais, c'est d'une simplicité parfaite, d'une suffisance entière, et d'un prix infini pour le coeur, en même temps que c'est une sécurité complète pour l'âme. On ne se rassemblait pas autrement aux premiers temps (voyez 1 Corinthiens 5: 4; 14: 25). Et maintenant que tout est en ruines, que plus rien n'est debout de ce qui autrefois, pour un court moment, a été si brillant de beauté par l'action puissante du Saint Esprit (voyez Actes des Apôtres 2: 42-47); maintenant que la chrétienté est devenue semblable à une grande maison avec des vases à honneur et à déshonneur, que de tous côtés on ne voit que divisions et sectes, que reste-t-il? Où aller? A quelle dénomination religieuse me rattacher pour agir selon Dieu? Où est le terrain de Dieu pour se rassembler? Là où il a toujours été. Béni soit Dieu, il n'a pas disparu avec l'infidélité de l'homme. Il demeure inébranlable comme Christ, qui est toujours le même. On peut toujours s'assembler en son nom, et Lui est toujours «au milieu» de ceux qui, comptant sur sa promesse, se réunissent ainsi, ne fussent-ils que «deux ou trois».

Mais cela posé, il est de toute importance de se rendre bien compte de ce que signifie et comporte cette parole «assemblés au nom de Jésus». Comme nous l'avons dit, le nom de Jésus rappelle tout ce qu'il est dans sa personne et dans son caractère, comme aussi l'oeuvre qu'il a accomplie pour la gloire de son Dieu et Père, et pour le salut et le rassemblement des siens autour de lui. Jésus veut dire Jéhovah Sauveur. Celui qui porte ce nom est le Fils unique et bien-aimé de Dieu, la Parole devenue chair, pour nous donner la pleine révélation de Dieu comme Père. Il est le Fils de l'homme, venu pour souffrir et mourir pour nos péchés, pour offrir le sacrifice qui abolit le péché, mais ressuscité par la gloire du Père et exalté et fait Christ et Seigneur. Là-haut, il est notre justice devant Dieu. Il est notre grand souverain sacrificateur, paraissant pour nous devant Dieu, toujours vivant pour intercéder pour nous. Par lui peut s'élever sans cesse de nos coeurs un sacrifice de louanges à Dieu. Mais il y a plus. Dieu l'a souverainement élevé, et a assujetti toutes choses sous ses pieds; il l'a donné pour être chef sur toutes choses à l'assemblée, qui est son corps. Monté en haut, ce chef céleste a envoyé le Saint Esprit qui non seulement scelle les croyants individuellement pour le jour de la rédemption, mais qui les unit à Christ, comme membres de son corps, et qui habite en eux collectivement comme étant édifiés ensemble pour être une habitation de Dieu par l'Esprit (Ephésiens 2: 21, 22).

Telle est la personne glorieuse et bénie qui daigne, dans sa grâce, se trouver au milieu des «deux ou trois» assemblés en son nom, et quant à son caractère, il nous est présenté dans la Parole, non seulement comme Celui qui nous aime et nous a lavés de nos péchés dans son sang, mais comme le Saint, le Véritable et Celui qui est fidèle. C'est donc en le reconnaissant ainsi qu'on est assemblé en son nom. Il peut se faire sans doute que des âmes sauvées, attirées par la grâce et l'excellence de la personne de Jésus, se réunissent sur le terrain divin, «en son nom,» sans se rendre encore bien compte de tout ce qu'est Celui qui est «au milieu» de ceux qui sont ainsi assemblés. Mais nous ne pouvons amoindrir la gloire de sa personne, la perfection de son oeuvre, et pour bien saisir la pleine suffisance et le sérieux du rassemblement en son nom, il importe de connaître toujours mieux Celui autour duquel nous nous réunissons, et en qui seul est toute ressource, afin d'être bien fondés en lui. Nous avons tous à croître «dans la connaissance de notre Seigneur Jésus Christ». Il se révèle toujours plus à ceux dont le coeur lui est attaché. Marie de Magdala était encore très ignorante, mais elle ne voulait que son Seigneur, et Jésus se fait connaître à elle dans la plénitude de sa grâce, et comme Celui qui rassemble en un les enfants de Dieu (Jean 20). Il en sera ainsi de tout coeur sincère qui ne désire autre chose que la gloire de Christ.

Toutefois, et cela découle de ce qui précède, le rassemblement au nom de Jésus ne peut avoir de réalité qu'autant que Jésus est pour nous personnellement le Sauveur, et que nous jouissons du salut d'une manière consciente, c'est-à-dire que nous savons que nous sommes pardonnés et réconciliés, que nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ. Quel bonheur remplit l'âme, quand assemblés au nom du Sauveur, nous savons que Celui en qui nous avons une rédemption éternelle est présent au milieu de nous!

Le rassemblement au nom de Jésus n'est donc pas une réunion de croyants et non croyants venus simplement pour entendre une prédication, bien que l'Esprit de Dieu puisse agir là pour la bénédiction des âmes. Ceux qui ne connaissent pas Christ ne peuvent pas s'assembler en son nom. Ce sont les sauvés qui s'assemblent au nom de leur Sauveur, Mais quand ils sont ainsi réunis, il se peut que des non croyants se trouvent aussi là. Et si la présence du Seigneur est réalisée, ceux-ci pourront, par l'action de l'Esprit, la reconnaître et en ressentir des effets bénis (voyez 1 Corinthiens 14: 24, 25).

Jésus, qui a promis sa présence au milieu de ceux qui s'assemblent en son nom, est le Fils de Dieu qui est venu nous révéler le nom du Père (Jean 17: 26). Bien plus, il nous a introduits dans cette relation d'enfants avec Dieu. En croyant en lui, nous devenons enfants de Dieu; par le Saint Esprit, la vie de Dieu nous est communiquée (Jean 1: 12, 13; 3: 3, 5; 20: 17, 22), et le Saint Esprit lui-même, venant habiter en nous, nous scelle pour le jour de la rédemption. C'est l'Esprit d'adoption par lequel nous disons: «Abba, Père,» et qui rend témoignage avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu (Ephésiens 1: 13; Romains 8: 15, 16). Nous voyons donc par là que s'assembler au nom de Jésus suppose que l'on a la vie de Dieu, la vie éternelle, puisqu'elle appartient à ceux qui croient au nom du Fils de Dieu (1 Jean 5: 13); en second lieu, cela suppose que l'on jouit d'une manière consciente de sa relation d'enfant de Dieu, puisque Jésus y introduit les siens; enfin on voit que le Saint Esprit est celui qui nous rassemble autour de Jésus et qu'il est la puissance en nous pour nous faire jouir de tout ce que comporte un tel rassemblement. Ce n'est donc par aucun arrangement humain que nous nous trouvons ainsi réunis, mais c'est par l'Esprit qui, donné par Christ, nous conduit à Christ et nous donne la capacité de jouir de sa présence. N'est-ce pas là vraiment ce qui convient à des enfants de Dieu, à ceux qui ont la vie de Dieu? N'est-ce pas le vrai bonheur pour eux que de se trouver déjà rassemblés sous le regard du Père, autour de Celui qui est premier-né entre plusieurs frères?

De plus, si nous sommes assemblés au nom de Jésus, nous le reconnaissons comme Seigneur, celui qui a droit à l'obéissance de ses serviteurs, à chacun desquels il assigne le service qui convient. Ce n'est donc pas s'assembler en son nom que de le faire selon des pensées et des convenances humaines, en introduisant ce que sa Parole ne sanctionne pas, car reconnaître Jésus comme Seigneur, c'est se soumettre à son autorité pour régler et diriger tout, et il le fait par son Esprit au milieu de ceux qui se réunissent dans la dépendance de lui seul. Le reconnaître comme Seigneur, c'est demeurer soumis à sa Parole dans la vérité et la sainteté. Si cette seigneurie de Christ est reconnue, nous éprouverons que, selon sa fidélité, il est au milieu des «deux ou trois,» quelle que soit leur faiblesse et leur peu d'apparence aux yeux des hommes. Il est là, comme Seigneur, les gardant par sa puissance, et maintenant, pour sa gloire, leur témoignage. Quelle grâce, quelle sécurité, quelle bénédiction! Puissions-nous apprécier toujours plus ce rassemblement autour de Jésus seul, et le réaliser dans la puissance du Saint Esprit! Où pourrions-nous trouver dans les arrangements les plus excellents des hommes pour se rassembler afin de rendre culte, quelque chose qui réponde mieux aux besoins de la vie de Dieu dans nos âmes, que la présence de Jésus au milieu de nous? Or elle ne se trouve qu'en s'assemblant en son nom, dans la soumission à lui comme Seigneur.

Mais Christ est aussi le «chef» de «l'assemblée qui est son corps». La parole nous apprend «qu'il y a un seul corps et un seul Esprit,» comme aussi nous avons été appelés pour une seule espérance de notre appel. On ne naît pas membre de ce corps, car «nous étions de notre nature des enfants de colère;» on ne le devient pas par le baptême d'eau, ni par une profession religieuse quelconque, mais, dit l'apôtre: «Nous avons tous été baptisés d'un seul Esprit pour être un seul corps» (1 Corinthiens 12: 13); or le Saint Esprit est le sceau de Dieu mis sur le croyant (Ephésiens 1: 14), de sorte que les membres du corps sont ceux qui, «ayant cru à la parole de vérité,» l'évangile de leur salut, ont été «scellés du Saint Esprit de la promesse,» ceux qui sont enfants de Dieu et ont «reçu l'Esprit d'adoption, par lequel nous crions: Abba, Père!» Tous les membres du corps devraient donc jouir d'une manière consciente de la pleine rédemption accomplie par Christ, du pardon, de la paix, d'une conscience parfaite, en vertu de son oeuvre. Hélas! par suite d'enseignements défectueux, il n'en est pas toujours ainsi. Le trésor des immenses richesses de la grâce est là, nous appartient, et l'on néglige souvent d'en jouir, dans la pleine liberté où Christ nous place en nous affranchissant, car là où est l'Esprit du Seigneur, il y a la liberté. Toutefois la vérité demeure: les vrais croyants seuls, baptisés du Saint Esprit, sont membres du corps de Christ.

Du seul corps ainsi formé, Christ est la tête ou le chef, ce qui nous montre bien que les membres ne sont pas tels en vertu d'une profession extérieure, mais qu'ils participent en réalité à la même vie que celle de la Tête, Christ dans le ciel. En effet, ils lui sont unis par le Saint Esprit qu'il a envoyé après être monté en haut, selon ce qui est dit: «Celui qui est uni au Seigneur est un seul Esprit avec lui» (1 Corinthiens 6: 17). Membres du corps de Christ, nous sommes individuellement membres les uns des autres, participants de la même vie, unis au même Chef par le même Esprit. La parole de Dieu ne reconnaît aucun autre corps, et par là même juge les dénominations diverses qui existent au sein de la chrétienté et qui, en fait, nient cette unité. Nous ne pouvons nous réunir au nom de Jésus, sans le reconnaître virtuellement comme le chef de l'assemblée qui est son corps, le seul corps, dont nous sommes les membres, nous qui croyons en lui. Nous avons ainsi à retenir et à affirmer ce principe de l'unité du seul corps, provenant de l'unité du Seul Esprit: nous avons à l'affirmer en témoignage devant le morcellement de la chrétienté en dénominations et sectes diverses, et nous efforcer de le réaliser dans un rassemblement fondé sur la ressource unique que nous donne la Parole pour les temps fâcheux: «au nom de Jésus», le chef du seul corps.

Cela ne veut pas dire que ceux qui s'assemblent au nom de Jésus, en confessant et maintenant ce principe, et en s'efforçant, par la grâce du Seigneur, de le réaliser, soient le seul corps, à l'exclusion des autres chrétiens. Non certes. Tous les croyants, actuellement baptisés du Saint Esprit, font partie du seul corps, et l'on est heureux de reconnaître qu'il y en a dans toutes les dénominations. Beaucoup ignorent cette vérité ou n'en saisissent pas la portée et l'importance; d'autres, en l'admettant, ne cherchent pas à la réaliser, ou peut-être pensent que la réalisation n'en est pas possible; mais le fait «qu'il y a un seul corps,» n'en subsiste pas moins; ainsi que l'obligation pour ceux qui connaissent cette vérité et s'assemblent au nom de Jésus, de la maintenir avec toutes ses conséquences, en se souvenant que Celui qui est au milieu d'eux est le chef du corps. Ainsi ils rendront témoignage à la vérité. Ils ont à le faire dans l'amour, sans nul doute, dans le support envers ceux qui ignorent, mais suivant la vérité et dans l'obéissance.

L'Eglise, quant à sa manifestation extérieure, est en ruine; qui pourrait le nier? Si elle ne l'était pas, tout entière elle serait la démonstration de cette unité du corps, an lieu de ne montrer que division et confusion. Or ce n'est qu'au milieu de la ruine qu'il peut y avoir un témoignage, non seulement individuel, comme tout vrai chrétien est appelé à le rendre dans sa marche à travers le monde, mais un témoignage collectif. Quel est-il? C'est le témoignage de ceux qui, désirant garder «la parole» du Seigneur et ne pas renier «son nom,» et voulant marcher dans la vérité et l'amour, cherchent à se rassembler selon les principes de cette Parole. Dans les jours les plus sombres, Dieu a toujours eu ses témoins, souvent inconnus des hommes. Il y en avait en Israël au temps d'Elie, sept mille qui n'avaient point fléchi le genou devant Baal. Ils étaient un témoignage contre l'idolâtrie. A côté de cela, le prophète, non seulement rend aussi ce témoignage, mais encore affirme l'unité d'Israël dans la pensée de Dieu, en dressant un autel de «douze pierres, selon le nombre des tribus des enfants de Jacob, auquel la parole de l'Eternel avait été adressée, en disant: Israël sera ton nom» (1 Rois 18: 31). Et cela dans un temps de schisme et de ruine totales. De même autrefois, dans les ténèbres du papisme, quelques-uns ignorés, cachés, souvent horriblement persécutés, témoignaient contre l'idolâtrie de Jésabel. Dans le temps actuel, où le monde a envahi l'Eglise, plusieurs rendent témoignage aussi par une vie séparée du monde; mais en outre, dans la multiplicité des sectes et des dénominations existant dans cette chrétienté, n'y aurait-il pas un témoignage collectif rendu à l'unité du corps, unité qui existe en dépit de tout ce que l'ennemi a fait pour en détruire la manifestation?

Béni soit Dieu! il a suscité un tel témoignage dans ces derniers temps, en montrant à quelques-uns, souvent seulement «deux ou trois» en divers lieux, sur quel terrain ils pouvaient se rassembler en dehors de toute dénomination «au nom de Jésus». Et ce témoignage, Dieu est puissant pour le maintenir, malgré toute l'opposition de l'ennemi et la faiblesse de ceux qui le composent. Partout où les «deux on trois» s'assemblent vraiment au nom de Jésus, sur ce principe de l'unité du seul corps, là est ce témoignage. Et il est fidèle pour le garder selon sa promesse: la porte qu'a ouverte le Saint et le Véritable, personne ne peut la fermer. Elle est ouverte devant ceux qui ont peu de force, qui gardent sa Parole et n'ont pas renié son nom, et qui désirent maintenir tout ce qui se rattache à ce précieux nom. Mais ceux-là ne sont autre chose qu'un témoignage à la vérité au milieu de la ruine. Ce n'est pas une secte au milieu de tant d'autres, ce n'est pas une église plus pure ou revenue au type primitif (il n'y a qu'une seule Eglise) non, mais c'est un témoignage dans la faiblesse, rendu par ceux qui, au milieu de la confusion, ont reconnu par grâce le terrain où l'on peut se rassembler selon Dieu, et qui y sont venus pour y trouver le Seigneur.

Terrain béni où il y a place aussi pour tous les vrais chrétiens, où ils devraient être, et combien ne serait-il pas à désirer qu'ils s'y rencontrassent tous? Mais ceux qui se réunissent ainsi ont à se souvenir qu'ils ne sont qu'un témoignage; l'oublier, se croire quelque chose, serait devenir une secte. Comme Celui au nom duquel ils s'assemblent est fidèle, eux aussi ont à l'être dans leurs voies envers lui.

Sur cet unique terrain du rassemblement des saints, comme membres du seul corps, il n'y a, en principe, aucune place pour des nationalités. «Il n'y a ni Juif, ni Grec; vous tous, vous êtes un dans le Christ Jésus» (Galates 3: 28). Ce n'est pas davantage le lieu des arrangements et de l'ordre humain. Quelle que soit la ruine, les principes divins subsistent, et nous avons à nous y tenir. Ce n'est pas l'homme qui peut apporter aucun remède à ce qu'il a corrompu, mais les ressources du Seigneur sont là pour tous les temps; sa Parole demeure éternellement. Or c'est à lui de tout régler dans sa maison; et son Esprit est avec ceux qui s'assemblent en son nom, pour diriger tout «en vue de l'utilité» et «pour l'édification». Conviendrait-il que là où se trouve Jésus, la volonté propre se manifestât? Non, sur ce terrain nous sommes en dehors de tout ce que l'activité et l'indépendance naturelles de l'homme voudraient faire et arranger. Hélas! au lieu de s'assembler au nom de Jésus, seul Seigneur, dirigeant tout par son Esprit, les chrétiens se sont groupés sous différents drapeaux, en établissant suivant leurs volontés diverses, quant aux choses et aux personnes, un ordre qu'il appartient au Seigneur seul d'établir. Ils se sont ainsi dispersés dans le vaste édifice de la chrétienté pour s'y renfermer dans des compartiments divers, ayant leurs ordonnances, leurs confessions de foi et leurs constitutions, choses dont nous ne trouvons aucune trace dans la Parole. On a ainsi abandonné l'ordre divin: l'unique autorité de Christ comme Seigneur, et la direction de l'Esprit seul dans le rassemblement des saints, afin qu'il agisse en vue de l'utilité et de l'édification par ceux à qui il distribue comme il lui plaît (1 Corinthiens 12: 11). En nous assemblant au nom de Jésus, nous avons à nous souvenir que de lui seul nous dépendons et que l'unique direction dans notre rassemblement doit être celle du Saint Esprit.

Quoiqu'il en soit, le terrain divin de rassemblement est toujours là «au nom de Jésus;» et pour ceux qui s'y trouvent, Jésus est «au milieu» avec toutes ses ressources. Au sein de toute la confusion et de la ruine, l'autorité du Seigneur demeure, ainsi que la présence du Saint Esprit qui habite en nous collectivement (1 Corinthiens 3: 16). Les soins de Christ pour l'Eglise qu'il a aimée et pour laquelle il s'est livré, qu'il nourrit et chérit, ces soins ne cessent pas. Les dons «en vue de la perfection des saints, pour l'oeuvre du service, pour l'édification du corps de Christ,» demeurent aussi, peuvent se manifester et ne cesseront pas jusqu'à ce que «nous parvenions à l'unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ» (Ephésiens 4: 7-13).

Mais ici deux remarques sont importantes, Il n'y a qu'un seul terrain de rassemblement selon la Parole; tous les membres du corps de Christ devraient s'y trouver, et par conséquent aussi les dons de Christ à l'assemblée, évangélistes, pasteurs et docteurs. Toutefois tous ne s'y trouvent pas, et de même qu'il y a dans les diverses sectes de la chrétienté des âmes fidèles et dévouées au Seigneur, il s'y trouve aussi des dons de Christ pour prêcher l'évangile et paître les âmes. Ce qui toutefois ne veut nullement dire que, si j'ai connu la vérité quant au rassemblement des saints, ce soit en dehors que j'irai chercher ces dons. En second lieu, des âmes sauvées peuvent être amenées par le Seigneur sur le terrain du rassemblement en son nom, et cependant être d'abord encore bien ignorantes de tout ce que comporte la position qu'elles ont prise. Bien loin de les écarter, oh! qu'il est précieux de les accueillir! Où apprendront-elles, si ce n'est là où Jésus se trouve? Où croîtront-elles dans sa connaissance, si ce n'est là où s'exerce librement l'action de son Esprit? Peu à peu, dans la soumission à la Parole, elles apprendront tout ce qu'il y a de précieux dans le nom de Christ. Béni soit Dieu, il y a place pour tous autour de Jésus. Oh! quel chrétien affectionné à son Seigneur voudrait sciemment s'écarter du terrain duquel Jésus a dit: «Je suis au milieu d'eux».

Assemblés au nom de Jésus, l'ayant pour Sauveur, le reconnaissant comme Seigneur et dans la soumission à sa Parole; assemblés par la puissance du Saint Esprit en dehors des organisations humaines, sur le principe de l'unité du seul corps formé par le seul Esprit, Christ étant le chef du corps et aussi le centre unique autour duquel nous nous assemblons, avons-nous de cette unité une expression visible?

Oui, Dieu en soit béni! Le Seigneur Jésus qui, dans sa grâce, nous a donné une ressource pour notre rassemblement dans un jour de ruine et pour tous les temps, nous a laissé aussi, dans cette même grâce, une expression permanente et jusqu'à ce qu'il vienne (1 Corinthiens 11: 26), de l'unité, qu'affirment en témoignage ceux qui sont réunis en son nom. C'est sa table; «car,» dit l'apôtre, «nous qui sommes plusieurs sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons à un seul et même pain». On peut sans doute être assemblés au nom de Jésus, sans que, dans cette réunion, on rompe le pain, mais on ne saurait être réunis à la table pour la fraction du pain, sans que ce soit au nom de Christ, car c'est sa table. Et là où une table est dressée, dans un rassemblement formé au nom de Jésus, elle est l'expression locale de l'unité du seul corps à laquelle on rend témoignage.

«En son nom» est le caractère du rassemblement; l'unité du corps formé par le Saint Esprit en est le principe, et, par conséquent, le Saint Esprit est la puissance qui opère ce rassemblement et qui, seul, devrait y agir; et enfin la table, le seul pain, est l'expression visible de cette unité. Je ne parle pas ici de tout ce que la cène du Seigneur nous rappelle de précieux, individuellement, quant à l'amour, la personne et l'oeuvre de Celui qui s'est donné pour nous, et qui a voulu que nous nous souvinssions de lui dans sa mort, et ce qu'elle nous dit aussi collectivement quant à la communion mutuelle.

Plusieurs questions se rattachent à ce qui précède. Et d'abord un chrétien peut-il s'isoler, se renfermer dans sa piété individuelle? Non; car, si d'une part, il est dit: «Que quiconque prononce (ou invoque) le nom du Seigneur, se retire de l'iniquité,» si, dans une grande maison, il y a des vases à déshonneur desquels il faut se purifier, il est écrit aussi dans le même chapitre, pour les temps de ruine où nous sommes: «Poursuis la justice, la foi, l'amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un coeur pur» (2 Timothée 2: 19-22). Cela n'est pas l'isolement; et où se rencontrer ainsi, si ce n'est dans le chemin de l'obéissance, comme membres du seul corps? N'est-ce pas là que le Saint Esprit veut nous conduire, et là que nous avons à garder l'unité de l'Esprit par le lien de la paix? Ceux qui invoquent le Seigneur d'un coeur pur ne voudront-ils pas se réunir en son nom, pour être au bénéfice de sa promesse pleine de grâce? Pourquoi y aurait-il un seul corps, si les membres devaient rester isolés?

On entend des chrétiens, sérieux cependant et dévoués dans leur marche individuelle, dire qu'ils réalisent mieux la présence de Jésus lorsqu'ils sont seuls. Cela ne viendrait-il pas de ce qu'ils regardent beaucoup en eux-mêmes, à eux-mêmes et à leurs propres sentiments, au lieu de regarder à Jésus? Ne sont-ce pas ces mêmes personnes qui sont souvent troublées, quand les sentiments viennent à manquer ou seulement à diminuer d'intensité? Or s'occuper de Jésus conduit à être heureux avec ceux qui s'occupent de lui. Mais c'est que bien souvent on regarde aux fautes, aux manquements des autres, au lieu de regarder à Jésus, de voir les siens en lui, et de les considérer avec cette même grâce avec laquelle lui-même les voit; leur lavant les pieds comme lui-même le fait (Jean 13: 14). Oh! que l'on est heureux de s'occuper au même service que Christ. Si chacun estime l'autre supérieur à lui-même, si chacun ne regarde pas à lui, mais aussi à ce qui est aux autres, ne sera-t-on pas heureux de se trouver rassemblés dans une même pensée, un même amour, un même sentiment? Et n'est-ce pas ce qui convient aux membres d'un même corps? D'ailleurs la parole de Jésus est certaine. S'il est avec nous dans notre service particulier, dans nos combats contre l'ennemi (voyez Matthieu 27: 20; Actes des Apôtres 18: 9, 10; 2 Timothée 4: 17); si, dans le secret du coeur, son amour nous étreint et nous remplit de joie, il n'en reste pas moins vrai qu'il a promis sa présence spéciale aux deux ou trois assemblés en son nom. Et quel chrétien, s'il y pense sérieusement, voudrait laisser de côté une bénédiction aussi précieuse?

Ainsi, il y a une communion individuelle de l'âme avec le Seigneur et avec Dieu; on marche avec lui; mais cela n'exclut nullement la communion collective, suivant ce qui est dit: «Afin que vous aussi, vous ayez communion avec nous: or notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ;» et plus loin: «Nous avons communion les uns avec les autres» (1 Jean 1: 3, 7). Or ce n'est pas en s'isolant que l'on maintient et affirme cette communion. Et où la réaliser mieux et plus pleinement qu'en nous réunissant au nom de Jésus et à la table du Seigneur? Jésus ressuscité apparut à des individus, sans doute, et c'était bien précieux pour eux, mais c'est quand les siens sont rassemblés dans la faiblesse (Jean 20: 19-23), qu'il se trouve au milieu d'eux et leur communique ses dons: la paix, la joie, le Saint Esprit, et qu'il les envoie pour être ses témoins. Ainsi le chrétien qui s'isole se nuit à lui-même et fait la perte d'une précieuse bénédiction.

D'un autre côté, la communion les uns avec les autres doit être selon la vérité, car elle découle du fait que nous marchons dans la lumière (1 Jean 1: 7) comme Dieu est lui-même dans la lumière, et que nous avons communion avec lui. Nous avons donc à discerner si un rassemblement est bien en réalité «au nom du Seigneur», et si ce qu'il est y est maintenu. Nous ne pouvons, sous prétexte de communion et d'amour, nous associer à quoi que ce soit qui porte atteinte à la vérité et par conséquent à la gloire du Seigneur. Ce ne serait pas avoir communion avec Dieu dans la lumière. Avant de nous asseoir à une table, nous avons à nous demander si l'autorité du Seigneur y est pratiquement reconnue, car on ne saurait participer à une table en s'isolant des autres qui y sont; on s'identifie avec eux (1 Corinthiens 10: 18). En effet, le pain, le vin que l'on prend en commun, ne sont-ils pas le signe le plus intime de la communion?

Je ne veux pas dire que, comme chrétien, je ne puisse avoir une certaine communion avec d'autres chrétiens, bien que ne pouvant les suivre dans leur rassemblement. Les aimer d'une affection fraternelle est un précieux privilège, mais il faut que ce soit dans la vérité pour être selon le Seigneur. Ensuite si, dans l'ignorance, un chrétien se trouve associé à une table où les droits du Seigneur ne sont pas pratiquement reconnus, je ne doute pas qu'il ne puisse jouir là, individuellement, de la bénédiction attachée à la célébration de ce précieux mémorial de la mort du Seigneur. Jésus répond à sa foi. Mais rappelons-nous que le chrétien n'est pas appelé à l'ignorance; l'apôtre dit: «Croissez dans la connaissance et la grâce du Seigneur Jésus Christ;» en second lieu, nous avons à prendre bien garde de ne pas voiler notre propre volonté sous un prétexte d'ignorance (j'ai parlé plus haut de ceux à qui la lumière de la Parole sur ce sujet n'a pas été présentée); enfin, outre la jouissance personnelle que l'on peut éprouver à la table du Seigneur, il y a celle qui se rattache à la présence de Jésus dans un rassemblement formé en son nom; joie perdue pour ceux qui s'isolent.

Un mot encore relativement à la table. Il y a une seule table «du Seigneur» pour tous les siens, bien qu'il y ait une expression locale de cette table en divers lieux, dans les rassemblements formés au nom de Jésus. Il en résulte que si nous sommes à une table, dans une localité, notre place est aussi à la table dressée dans une autre localité par ceux qui sont sur le même terrain. Et il y a une seule table, parce qu'il y a un seul pain, un seul corps, un seul Esprit et un seul Seigneur, et aussi un seul vrai terrain de rassemblement.

Le fait que, dans ces jours de ruine, il reste cependant pour les saints, pour les enfants de Dieu, un terrain de rassemblement selon la parole et la pensée de Dieu, ce fait est si précieux et d'une si grande portée, que je désire m'arrêter encore un peu sur quelques conséquences qui s'y lient étroitement. Lorsque, dans une localité, des chrétiens ont été amenés par la Parole et par l'Esprit de Dieu à se séparer des divers systèmes religieux formés par l'initiative humaine, ou des vastes établissements qui en différents pays prétendent être la continuation légitime de l'Eglise primitive, et que ces chrétiens se sont assemblés «au nom de Jésus», selon ce que nous avons exposé, ils forment là une assemblée. On ne peut dire cependant qu'ils sont l'assemblée de Dieu dans cette localité. Une telle expression pouvait convenir au temps où, dans une localité, l'assemblée était l'expression locale de l'Assemblée totale dont l'unité était alors manifestée extérieurement (1 Corinthiens 1: 2; 10: 32; 2 Corinthiens 1: 1); elle ne saurait convenir dans un jour de ruine et de confusion comme maintenant, même si tous les chrétiens d'une localité se trouvaient rassemblés «au nom de Jésus». Mais un tel rassemblement, quelque petit que soit le nombre de ceux qui le composent et quelle que soit leur faiblesse, est une assemblée de Dieu, en ce sens qu'elle se trouve sur le terrain que Jésus nous a montré dans sa déclaration bénie. Remarquons de plus que les principes relatifs à la maison de Dieu ne sauraient être anéantis par le fait de la ruine amenée par l'infidélité de l'homme, et que ces principes subsistent pour nous diriger dans un rassemblement formé au nom de Jésus.

Lorsque en divers lieux, ainsi que par la grâce du Seigneur cela est arrivé en ces dernières années, de telles assemblées ont été formées en obéissance à la Parole, peuvent-elles se considérer comme indépendantes les unes des autres? L'une peut-elle se mettre à part et dire: ce qui se fait ailleurs ne me regarde pas? Evidemment non. Nous sommes solidaires dans le témoignage que nous rendons, comme dans la ruine au milieu de laquelle se trouve rendu le témoignage. Seulement remarquons bien que cette dépendance ou solidarité des assemblées n'est pas le fait d'un arrangement, d'une organisation quelconque, et n'amène aucune organisation humaine; elle découle purement et simplement des principes même de la vérité, suivant lesquels on se rassemble, et ne peut être fondée que sur ces principes. Le terrain du rassemblement est le même, on y est pour obéir au même Seigneur, et comme membres du seul et même corps, le même et seul Esprit est celui qui rassemble, et la même table réunit tous ceux qui sont ainsi rassemblés pour participer au même pain, quoiqu'en des lieux divers, de langues et nations diverses. Comment ces assemblées seraient-elles indépendantes les unes des autres? Le vouloir, ne serait-ce pas se déclarer indépendant du seul Seigneur et du seul Esprit? La communion la plus étroite ne les rattache-t-elle pas au contraire les unes aux autres? Affirmeraient-elles et maintiendraient-elles ainsi ce principe de l'unité du corps, d'après lequel «si un membre souffre, tous les autres souffrent (*) avec lui; si un membre est glorifié, tous les membres se réjouissent avec lui» (1 Corinthiens 12: 26). Ce n'était pas seulement quelqu'un de l'assemblée de Corinthe, mais un membre du corps duquel il est dit: «Ainsi aussi est le Christ» (verset 12). Vouloir cette indépendance, serait-ce garder l'unité de l'Esprit et réaliser ces paroles: «Nous avons tous été abreuvés pour l'unité d'un même Esprit» (verset 13). L'indépendance des assemblées nierait chacune des vérités que nous avons rappelées, et qui se rattachent toutes au fait que nous sommes assemblés au nom de Jésus. Or il est «la vérité» il est «le véritable». Peut-on dire en réalité que l'on est assemblé en son nom, si l'on ne retient pas la vérité?

(*) Il n'est pas dit» «doivent souffrir,» comme exhortation, mais «souffrent», comme fait et comme principe de vie découlant de la Tête, Christ.

Mais Jésus est aussi «le saint,» et nous ne pouvons être assemblés en son nom, nous trouver à la table du Seigneur, sans répondre à ce caractère. La question a sans doute d'abord un côté individuel quant à la table: «Que chacun s'éprouve soi-même et qu'ainsi il mange du pain et boive de la coupe». Ce jugement que chacun de nous doit porter sur lui-même, n'est pas pour nous exclure de la fraction du pain: au contraire. Ainsi que quelqu'un l'a dit: «On ne peut pas, comme la chair le suggérerait, se tenir loin: ce serait accepter le péché et abandonner la confession de la valeur de la mort de Christ; on s'examine et on va à la cène; on rétablit dans la conscience les droits de la mort de Christ, — car tout est pardonné et expié quant à la culpabilité, — et l'on va reconnaître ces droits comme preuve de la grâce infinie». D'un autre côté, il ne s'agit pas non plus de s'abstenir de la cène, parce que l'on estime que quelqu'un a des torts envers nous. La Parole a pourvu à ces cas (Matthieu 18: 15, etc.; Colossiens 3: 13).

Mais il n'y a pas seulement une question individuelle: la sainteté qui caractérise la personne de Christ doit être aussi maintenue à sa table par l'assemblée. S'il est dit quant à la marche de chacun: «Que celui qui invoque le nom du Seigneur se retire de l'iniquité,» cette séparation du mal ne devra-t-elle pas aussi caractériser le rassemblement de ceux qui se réunissent au nom du Seigneur? «Ne vous mettez pas sous un joug mal assorti avec les incrédules… Soyez séparés et ne touchez pas à ce qui est impur;» ce principe posé par la Parole ne s'appliquera-t-il pas aussi à l'assemblée et à la table du Seigneur? Assurément. L'assemblée a reçu du Seigneur l'autorité nécessaire pour juger le mal et pour s'en purifier. «Otez le méchant du milieu de vous-mêmes,» dit l'apôtre (1 Corinthiens 5: 13).

Ce «méchant» quel est-il? Est-ce seulement celui qui est tombé dans l'un des péchés mentionnés dans ce chapitre de l'épître aux Corinthiens? Evidemment non, car alors un meurtrier pourrait demeurer à la table du Seigneur. Le méchant est celui qui fait le mal, qui agit d'une manière contraire à la nature et à la volonté de Dieu. Or le mal le plus grand, le plus sérieux, n'est pas celui qui nous blesse comme hommes et qui serait condamné par le monde même, mais c'est ce qui porte atteinte à la vérité, à la gloire et aux droits de Christ. Il n'y a pas seulement la souillure de la chair dont il faille se nettoyer, mais aussi celle de l'esprit (2 Corinthiens 7: 1). Le méchant n'est pas seulement celui qui tombe dans des péchés grossiers, mais aussi celui qui se laisse séduire par l'erreur et qui y persiste. Ceux qui sont assemblés au nom de Jésus ont à se purifier du mal en ôtant du milieu d'eux le méchant; comment sans cela répondraient-ils au caractère de Celui qui est le saint et le véritable?

Le fait que l'Eglise est en ruine, et non plus comme aux jours de Paul, ne saurait infirmer l'obligation d'obéir à un principe qui découle de la nature même de Dieu, avec lequel nous ne pouvons être en communion si nous tolérons le mal. Assemblés au nom de Jésus, nous ne saurions laisser au milieu de nous un mal positif et reconnu. Nous ne sommes pas réunis sur un autre terrain qu'on ne l'était à Corinthe. Et l'état de ruine général au milieu duquel les «deux ou trois» sont un témoignage, s'ils sont fidèles, demande au contraire de leur part qu'ils s'attachent d'autant plus strictement à la Parole. Voyez les pauvres Juifs revenus dans leur pays sous Esdras et Néhémie. Qu'est-ce qui les caractérise dans leur ruine et leur faiblesse? C'est l'attachement à la parole de Dieu et la stricte séparation du mal, rejetant ceux qui s'étaient souillés par des mariages illicites, et excluant même de la sacrificature ceux qui ne pouvaient produire leur généalogie.

L'assemblée a donc le devoir de se purifier du mal. Elle a aussi autorité pour le faire, quelque faible que soit le nombre de ceux qui la composent. Fût-elle réduite à sa plus simple expression, elle a autorité pour lier et délier. D'où lui vient cette autorité? Du Seigneur lui-même, qui a dit: «Tout ce que vous lierez et délierez,» et du fait que lui-même est présent au milieu de ceux qui sont assemblés en son nom. Il n'est nullement question d'infaillibilité pour l'assemblée, mais il s'agit de soumission à la parole du Seigneur, qui donne compétence et autorité à l'assemblée. Il est fidèle, et quand une assemblée réunie en son nom, cherchant sa gloire, soumise à sa Parole, se trouve placée dans la nécessité de lier ou délier, de prendre une décision, elle peut et doit compter sur la fidélité du Seigneur, sur sa promesse d'être présent au milieu d'elle, et sur la présence et l'action du Saint Esprit pour la guider dans la décision à prendre. Nier cela, le mettre en doute, ne serait-ce pas mettre en doute ou nier la réalité de la promesse de Jésus?

Avant d'aller plus loin, je ferai une remarque. Non seulement nous sommes au milieu de la ruine, mais dans une grande faiblesse. Il peut donc arriver qu'une assemblée soit lente à voir le mal, lente à le juger, et que tout se fasse même au milieu de bien des manquements. Qu'a donc à faire celui qui a discerné le mal avant que l'assemblée n'ait été réveillée ou exercée à cet égard? Doit-il se séparer de l'assemblée ou de la table du Seigneur? Non; il peut s'adresser à la personne coupable, la reprendre et l'avertir individuellement, l'éviter et se séparer d'elle, si elle ne veut pas écouter (Tite 3: 10, 11; Romains 16: 17; 2 Thessaloniciens 3: 6), et quant à l'assemblée user de patience et de support, s'attendant à Dieu pour qu'il agisse sur les coeurs et les consciences pour les réveiller à l'égard du mal. Il peut y avoir et il y aura souffrance, sans doute, mais il est bon de s'attendre à Dieu, et le Seigneur est fidèle, qui ne manquera point à ceux qui regardent vers lui. Paul ne se sépare point des Corinthiens, il les exhorte; et nous voyons aussi le Seigneur plein de patience à l'égard des assemblées, même dans le plus triste état où elles puissent être (1 Corinthiens 5; Apocalypse 2; 3).

Revenons maintenant à ce qui concerne l'assemblée qui a pris une décision. Qu'auront à faire les autres assemblées réunies sur le même terrain et en communion avec elle à la même table? Accepter la décision prise. Ne peuvent-elles pas aussi compter sur le fait que le Seigneur a gardé et guidé ceux qui, assemblés en son nom, ont été amenés à prendre une décision? Ne doivent-elles pas alors, en soumission et confiance, non envers une assemblée, mais envers le Seigneur toujours fidèle, accepter la décision qui a été prise, comme l'ayant été selon lui et ayant son approbation? Il se peut qu'il y ait eu faiblesse et manquements divers. Hélas! quelle est la chose à laquelle l'homme met la main et qui n'en soit entachée? Mais mettre en avant les manquements pour infirmer la décision prise, serait rendre impossible l'exercice d'une action quelconque pour se purifier du mal, et, en fait, ce serait nier la présence du Seigneur au milieu des siens assemblés en son nom, ainsi que la présence du Saint Esprit agissant dans l'assemblée. Le Seigneur a promis sa présence au milieu des deux ou trois assemblés en son nom; il leur a donné autorité pour lier et délier, et c'est une chose bien sérieuse que de refuser d'accepter ce qui a été fait en cette présence et avec cette autorité, sous prétexte de manquements. Autant vaudrait, parce qu'un homme tombe en faute (et nous manquons tous à plusieurs égards), nier la réalité de son christianisme, son union avec Christ par le Saint Esprit habitant en lui, et sa relation d'enfant avec Dieu. Rejeter une décision d'une assemblée, c'est ne tenir point compte de l'unité de l'Esprit; l'accepter, c'est garder l'unité de l'Esprit et la confiance au Seigneur. Béni soit-il! il ne nous a pas appelés à examiner des faits en dehors de notre portée pour juger à nouveau ce qui a été déjà fait par ceux devant lesquels lui-même amène la question à décider, mais il nous donne l'assurance qu'il est au milieu d'eux.

«Soumettez-vous les uns aux autres dans la crainte de Christ,» nous est-il dit. Puissions-nous nous appliquer à suivre cette exhortation de l'Esprit, et nous garder de vouloir placer notre jugement individuel au-dessus du jugement de ceux qui sont assemblés au nom de Jésus et auxquels il a promis sa présence. Puissions-nous être préservés de tout ce qui nous écarte de la soumission au Seigneur, de la dépendance de lui et de la confiance en lui!

Ainsi, béni soit notre précieux Seigneur et Sauveur! Il a fait un chemin simple pour les simples, au milieu de la ruine, de la confusion des systèmes humains, et des efforts de l'ennemi pour briser tout témoignage à la vérité dans les temps fâcheux. Et comme il l'a déjà fait, il gardera ceux qui regardent simplement à lui comme au Saint et au Véritable, qui ouvre et nul ne ferme, qui ferme et nul n'ouvre. Ceux-là peuvent goûter en paix le bonheur de se trouver assemblés sur un terrain d'où sont bannis le moi, l'indépendance naturelle, parce que Jésus, quelque faibles qu'ils soient, y est dans toute la grâce, l'autorité, l'excellence et la suffisance de sa personne bénie. Et ils peuvent là éprouver aussi le bonheur d'une communion réelle comme membres du seul et même corps, baptisés d'un même Esprit, et assis à une même table. N'est-ce pas là vraiment le terrain de rassemblement qui convient à des pécheurs sauvés par Christ, morts et ressuscités avec lui, pour lesquels les choses vieilles sont passées et toutes choses faites nouvelles? Quand il s'agit de nous comme individus, nous reconnaissons (et sommes heureux de reconnaître), d'après la Parole, que c'en est fait du vieil homme, du «moi,» que ce n'est plus nous qui vivons, mais Christ en nous. Voudrions-nous, quand il s'agit d'être rassemblés pour le service et l'adoration de notre Dieu et Père, suivre une autre règle, et laisser le «moi» être rétabli? «Au nom de Jésus,» Jésus «au milieu,» voilà ce qui convient pour le jour de la ruine, et en même temps ce qui convient pour le nouvel homme. Prenons garde d'introduire dans «le rassemblement de nous-mêmes» les prétentions et l'indépendance du vieil homme.

Ah! puissions-nous apprécier ce rassemblement au nom de Jésus, comme le seul vrai, établi par lui-même. Puissions-nous, par la foi, et dans la puissance du Saint Esprit, réaliser sa présence au milieu de nous, quand nous sommes ainsi réunis, ayant une même pensée, un même amour, étant d'un même sentiment, pensant à une seule et même chose (Philippiens 3: 2), parce que nous avons un seul et même objet pour nos coeurs, Jésus lui-même, vers lequel le seul et même Esprit conduit nos pensées et nos affections.