La lettre de Christ

 ME 1883 page 457

 

«Vous êtes manifestés comme étant la lettre de Christ,» non pas, vous devez être, mais vous êtes. Quelle est donc à cet égard votre responsabilité morale? C'est d'être une lettre sans tache, et vous le serez en fixant vos regards sur lui et en réfléchissant ainsi ce qu'il est. Si nous nous rassemblions dans cet esprit, il n'y aurait jamais aucun trouble. Il pourrait y avoir des degrés divers de réalisation des choses divines, mais l'apôtre dit: «Si en quelque chose vous avez un sentiment différent, cela aussi Dieu nous le révélera». Il s'agit seulement d'être l'un et l'autre fidèles à Christ et nous nourrissant de lui.

L'unique chose qui nous rende capables de fouler le moi sous nos pieds, c'est d'avoir Christ devant nous comme l'objet de nos coeurs, absorbant toutes nos pensées et nos affections. Tous les maux viennent de ce que le moi prend une place et non pas Christ. La plénitude de Dieu attend toujours pour le remplir que le vase soit vide. Le grand point est d'être un vase vide: si je suis rempli de moi-même, il faut que je sois, pour ainsi dire, tourné sens dessus dessous, afin d'être vidé; alors seulement je pourrai être rempli de l'huile versée par la main du Seigneur.

Mais c'est une chose de parler de vases vides, et une tout autre de l'être en effet. Or nous ne savons pas ce que nous aurons à traverser avant d'être en réalité des vases vides. On commence plein d'enthousiasme; puis en avançant on baisse dans sa propre estime.

Le mot «tribulation» vient d'une expression latine désignant une sorte de herse dont on se servait pour battre le blé. Quand vous sortez de la machine à battre, — je veux dire de la tribulation, — vous paraissez bien moindre que lorsque vous y êtes entré; mais il y a plus de réalité, car la balle est partie. Au commencement du chapitre 5 des Romains, nous trouvons notre position: ayant été justifiés par la foi, jouissant de la paix de Dieu, établis dans sa faveur, et nous glorifiant dans l'espérance de la gloire. Puis remarquez dans les versets suivants les pas que l'on fait dans la machine à battre: tribulation, patience, expérience. Or c'est là que tout vrai serviteur doit prendre ses grades. On peut y demeurer soixante ans peut-être, et quand l'on en sort être réduit à très peu de chose; or il vaut mieux être très peu, mais réel, que de prétendre être quelque chose, alors que nous ne sommes rien. Dieu veut de la réalité morale. Il y a parmi nous beaucoup de prétentions, bien plus d'apparence que de réalité. Prédications, discours, écrits, prières, chants, vont souvent bien au delà de l'expérience réelle. Rien n'est plus dangereux. Cela endurcit le coeur, amortit la conscience et nous livre aux ruses de l'ennemi.

Il peut y avoir beaucoup de rapports entre les saints, sans un atome de communion. Ce que nous avons à rechercher, c'est Jésus lui-même; ce qu'il nous faut cultiver, c'est une communion personnelle avec lui.

Si vous trouvez seulement une demi-douzaine de personnes rassemblées avec leur coeur rempli de Christ, vous serez là comme chez vous; vous aurez le secret de la force et de la chaleur qui étaient dans l'église de Philadelphie, et vous pourrez compter sur la puissance du Saint Esprit.

Ce qui se fait pour Christ a un charme particulier pour son coeur. Du moment que vous détournez de lui votre regard pour vous occuper d'oeuvres, vous baissez. «Tu as donné la stabilité et la force à ma montagne,» disait David. Nous sommes trop souvent occupés de la montagne, et nous oublions ce qui lui donne la force. Nous nous occupons peut-être des réunions elles-mêmes au lieu de penser à Celui qui les rend heureuses, et ainsi nous perdons notre bonheur. Au lieu de la forte montagne, nous avons le trouble. Gardons nos yeux attachés sur Lui, et nous goûterons la paix, la joie et une profonde communion avec lui; et ainsi nous serons des épîtres de Christ sans tache.