Méditations sur l'épître aux Romains - Darby J.N.

 Ces méditations ont été écrites par l'auteur en langue allemande. Il ne lui a pas été donné de les conduire jusqu'au dernier chapitre. Sa faiblesse croissante et enfin son délogement le 29 avril 1882, vinrent mettre un terme à son activité si richement bénie, de sorte que ces méditations s'arrêtent vers le milieu du chapitre 10. Mais l'enseignement spécial de l'épître y est pleinement et clairement exposé, et ainsi ce témoignage de la dernière période de l'activité infatigable du fidèle serviteur du Seigneur pourra être en bénédiction pour ceux qui le liront.

ME 1884 page 78

 

Méditations sur l'épître aux Romains - Darby J.N. 1

Introduction. 1

Chapitres 1 et 2. 2

Chapitre 3. 11

Chapitre 4. 14

Chapitre 5. 16

Chapitre 6. 23

Chapitre 7. 29

Chapitre 8. 33

Chapitre 9. 44

Chapitre 10. 47

 

Introduction

Dans l'épître aux Romains, les chrétiens sont envisagés comme des hommes vivant et marchant sur la terre, mais possédant la vie de Christ et le Saint Esprit, de sorte qu'ils sont en Christ. Leurs péchés sont pardonnés; ils sont justifiés par l'oeuvre de Christ. Leur devoir est de présenter à Dieu leurs corps en sacrifice vivant, agréable à Dieu, tandis qu'ils sont transformés par le renouvellement de leur entendement, pour éprouver quelle est la volonté de Dieu, bonne, agréable et parfaite (chapitre 12: 1, 2).

L'épître commence avec la responsabilité de l'homme; elle démontre que tous sont coupables, à cause de ce qu'ils ont fait, et expose ensuite le résultat de la mort de Christ pour le pardon des péchés et la justification des croyants. Après cela, l'apôtre examine la condition dans laquelle l'homme se trouve, en suite du péché d'Adam, et montre comment il est affranchi de la puissance du péché.

Il n'est pas question, dans cette épître, des conseils de Dieu, sauf en trois ou quatre versets du chapitre 8, et seulement pour démontrer que l'oeuvre de sa grâce est immuable, et que, lorsqu'une fois on se l'est appropriée par l'appel de la grâce, elle est ferme et sûre, et se poursuit jusqu'à la gloire. L'oeuvre de Christ est accomplie, et ceux qui croient en lui seront conformes à son image. Tout est ainsi parfaitement assuré. Lorsque nous avons la vie de Christ, de sorte que nous souffrons avec lui, nous serons aussi glorifiés avec lui. L'épître ne renferme rien de plus, touchant les conseils de Dieu. Si nous voulons apprendre à les connaître, nous devons recourir à l'épître aux Ephésiens, tandis que l'épître aux Colossiens nous parle de la vie de l'homme qui par la foi est ressuscité avec Christ. Dans l'épître aux Romains, nous trouvons l'oeuvre de Dieu en grâce pour la justification des impies, par la mort et la résurrection de Christ, leur acceptation en Christ, et les croyants considérés comme étant en lui.

Comme nous l'avons indiqué plus haut, la doctrine de l'épître aux Romains comprend deux parties. La première traite des péchés. L'exposition de la manière dont ils sont ôtés et de la grâce de Dieu qui s'y déploie, va jusqu'à la fin du 11e verset du chapitre 5. De là, jusqu'à la fin du chapitre 8, l'apôtre s'occupe de la seconde partie, c'est-à-dire du péché dans la chair; c'est la condition dans laquelle nous sommes à cause du péché d'Adam; Paul montre comment nous en sommes affranchis, et quelle est notre nouvelle condition en Christ. Comme appendice suivent trois chapitres, qui expliquent comment la doctrine de la condition générale de péché où se trouve l'homme, et de la réconciliation de tous avec Dieu par la foi, peut s'accorder avec les promesses spéciales faites aux Juifs. La conclusion (chapitre 12-16) renferme des exhortations et le rappel de certains principes importants.

L'exposition de la doctrine de la justification par la foi renfermée dans la première partie de l'épître, est introduite par une sorte de préface dans laquelle l'évangile est fondé sur la personne de Christ, et est présenté comme étant la révélation de la justice de Dieu.

Nous voyons donc dans cette épître, comment Dieu, dans sa parfaite grâce, est venu au-devant de nous, lorsque, selon notre responsabilité comme hommes, et devant sa justice, nous étions entièrement perdus; comment, par pure grâce, il nous a préparé le salut et la vie éternelle, lorsque nous étions éloignés de lui par le péché, et que, selon la chair, nous étions inimitié contre lui.

Chapitres 1 et 2

Avant d'entrer dans un examen plus détaillé de la doctrine de l'épître, de l'ordre et du contenu de ses diverses parties, nous dirons quelques mots sur l'apôtre lui-même. Il n'avait jamais été à Rome, mais, revêtu de l'autorité divine, il était apôtre de toutes les nations. C'est pourquoi il pouvait écrire aux Romains, bien que n'ayant pas été l'instrument de leur conversion. Il connaissait bien cependant quelques-uns d'entre eux: Rome, comme centre du monde connu, renfermait des personnes de toutes les contrées. Et c'est ce fait, que Paul n'avait pas été à Rome, qui donne à l'épître un caractère tout particulier, différent de celui de la plupart de ses autres lettres. L'épître aux Romains est plutôt un traité, caractère qui se rencontre moins dans les lettres écrites par l'apôtre aux églises qu'il avait fondées lui-même. Les circonstances personnelles y manquent, et font place à la doctrine qu'il a en vue. A la fin de l'épître, Paul salue beaucoup des saints qu'il connaissait, de même qu'au commencement il cherche à entrer avec les chrétiens de Rome dans une relation de coeur; toutefois c'est son apostolat qui est par-dessus tout la base de ses communications aux croyants de Rome. Nul apôtre n'a fondé l'assemblée de Rome. Paul n'y avait pas encore été; plus tard Pierre y alla, afin d'y donner sa vie en témoignage pour le Seigneur, mais jusqu'à ce moment, il n'avait rien eu à faire avec Rome; il était l'apôtre de la circoncision.

Paul commence par quelques mots sur son apostolat. Il était esclave de Jésus Christ, apôtre appelé, mis à part pour l'évangile de Dieu. Ce sont là ses titres. Il servait le Seigneur, et dans ce but il avait été appelé et mis à part d'une manière toute particulière. Il n'avait pas été du nombre de ceux qui avaient suivi le Seigneur sur la terre; il ne le connaissait pas ainsi. Au contraire, il avait été l'ennemi le plus acharné du nom de Jésus. Il aurait voulu extirper du milieu d'Israël cette nouvelle doctrine, savoir, la foi en Jésus, et punir tous ceux qui y étaient attachés. Le chemin lui fut fermé par le Seigneur, qui se révéla à lui dans sa gloire, et cette gloire même devint le point de départ de l'activité de Paul. Elle démontrait de la manière la plus éclatante que l'oeuvre de la réconciliation était accomplie, puisque Celui qui avait souffert pour les péchés se trouvait dans la gloire. Ce n'était pas tout: les chrétiens persécutés étaient reconnus par le Seigneur, non comme disciples simplement, mais comme unis à lui, l'homme glorifié, le Fils de Dieu dans le ciel.

C'est ainsi que l'appel de Paul eut un caractère tout spécial. Mais il fut aussi mis à part d'une manière particulière. La révélation du Seigneur en gloire le sépara d'abord du judaïsme, mais non pas cependant afin d'aller alors vers le paganisme. Tandis qu'en contemplant Christ dans la gloire divine, il le reconnaissait comme Seigneur il fut retiré «du milieu du peuple et des nations» (Actes des Apôtres 26: 17), et fut envoyé dans le monde par l'homme glorifié, le Seigneur de gloire, afin de proclamer le salut accompli, pour délivrer du péché tous ceux qui croiraient en Jésus, et affranchir les Juifs du joug de la loi. Dès lors il ne connaissait plus personne selon la chair, même Christ; c'est-à-dire qu'il ne le connaissait pas, comme les Juifs charnels auraient voulu l'avoir sur la terre, comme Fils de David. Sans doute, il reconnaissait pleinement que Christ était venu comme tel, et qu'il avait tout droit à ce titre; mais le Seigneur, comme fils de David, a été rejeté, et maintenant tout est pure grâce, tant pour les Juifs que pour les païens, puisque les premiers ont perdu tout droit aux promesses, en rejetant Celui en qui les promesses avaient leur accomplissement. Assurément Dieu accomplira ce qu'il a promis, mais actuellement tout est pure grâce par l'Homme ressuscité que Paul a vu dans la gloire. Ces points sont clairement établis dans d'autres parties de l'épître.

Mais, bien que la glorification du Seigneur Jésus ait été le point de départ et le fondement du ministère de Paul, toutefois, dans la doctrine de l'épître aux Romains, l'apôtre ne va pas plus loin que la résurrection du Seigneur. Cette remarque aidera à mieux comprendre l'épître. Il est bien vrai que la position du Seigneur dans la gloire est supposée, et que les quelques versets qui présentent la suite des conseils de Dieu, mentionnent aussi la gloire des enfants de Dieu, car c'est une partie de ses conseils que les élus soient conformes à l'image de son Fils (chapitre 8: 29, 30). Toutefois, quand l'apôtre parle du fondement du salut, qu'il expose comment on est justifié et sauvé, il ne va pas plus loin que la résurrection du Seigneur. En effet, ce que Christ a acquis pour nous, est autre chose que la réponse à la question: comment un pécheur peut-il être agréé de Dieu, et comment arrive-t-il à la condition d'héritier de Dieu.? Dans l'épître aux Romains, nous avons précisément cette condition d'héritier, comme ayant été rendus en Christ capables de subsister devant Dieu et d'hériter avec Christ homme, selon la justice, comme homme nouveau, vivant et accepté de Dieu. Mais il n'est fait qu'une courte mention de la gloire et de l'héritage mêmes. Aussitôt que Christ, comme homme, descendu dans la mort, eut été ressuscité, l'homme fut introduit dans une toute nouvelle condition: fait vivant selon la puissance de l'Esprit et de la résurrection. L'oeuvre qui abolissait le péché avait été accomplie, nos péchés avaient été portés et expiés par la mort, Dieu avait été glorifié là où était le péché; la puissance de celui qui avait la force de la mort, avait été annulée, ainsi que la mort elle-même. Un homme nouveau existait, sur lequel la mort n'avait point de pouvoir. Je ne parle pas ici de la personne de Christ, de ce qu'il était dans sa nature, mais de la nouvelle position des hommes, position dans laquelle ils sont amenés par la résurrection de l'homme Christ Jésus; je parle de l'homme dans sa nouvelle condition selon les conseils de Dieu. Nous avons là la preuve que l'oeuvre accomplie de Christ est acceptée selon la justice de Dieu, et nous avons aussi là le modèle, non pas encore de la gloire, mais de la condition fondamentale de tous les croyants en Christ. Ils se trouvent, pour ainsi dire, au delà de la mort, de la puissance de Satan, du péché et du jugement de Dieu, parce que Dieu a été pleinement glorifié en Christ; ils sont, selon la justice, dans la faveur de Dieu. Telle est la portée de la résurrection de Christ, comme doctrine fondamentale de cette épître, en même temps que sa mort est présentée comme base de sa résurrection et de la valeur de celle-ci: «Christ qui est mort, mais plutôt qui est aussi ressuscité».

Ainsi Paul fut appelé et mis à part de tous les hommes, pour annoncer la bonne nouvelle de Dieu, la bonne nouvelle de cette oeuvre de son amour. Cet évangile avait déjà auparavant été promis par les prophètes dans de saintes écritures. Mais maintenant la proclamation de l'évangile n'était plus une promesse. Nous avons bien, il est vrai, de précieuses promesses pour le chemin que nous avons à parcourir dans ce monde; mais l'évangile lui-même n'est pas une promesse. Au contraire, il est l'accomplissement des promesses de Dieu, en tant du moins que celles-ci se rapportent à l'incarnation du Seigneur, à l'accomplissement de son oeuvre, à sa résurrection (1 Pierre 1: 11, 12), et à sa glorification, bien que ce dernier point ne soit pas traité dans l'épître aux Romains. Il faut remarquer ici que les «saintes écritures» sont les promesses de Dieu, et que les prophètes, par qui elles furent données, sont les prophètes de Dieu.

En quoi consiste donc cette bonne nouvelle? Elle est «touchant son Fils (le Fils de Dieu), Jésus Christ, notre Seigneur». La personne de Christ est l'objet principal de l'évangile, qui annonce sa venue dans le monde. Mais ici, nous avons deux choses: premièrement, les promesses sont accomplies en ce que Christ est fils de David selon la chair; en second lieu, il est «déterminé Fils de Dieu en puissance, selon l'Esprit de sainteté, par la résurrection des morts». Ce sont là les deux grands faits accomplis, qui constituent pour l'homme la valeur de la venue du Seigneur dans ce monde. Les promesses étaient accomplies: le Fils de David était là. Les Juifs n'ont pas voulu le recevoir et ont ainsi perdu le bénéfice des promesses; celles-ci, toutefois, ont été accomplies, en tant que le Seigneur est venu. Mais alors a été révélée la puissance de Dieu, en ce que le Seigneur, après s'être soumis à la mort, a été déclaré Fils de Dieu par la résurrection. Bien que la plus forte preuve de la puissance de Dieu ait été donnée dans sa résurrection, nous voyons cependant déjà, dans la résurrection de Lazare, une manifestation de cette puissance divine, comme on le verra aussi plus tard dans la résurrection de tous les saints: «Cette maladie n'est pas à la mort, mais pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle» (Jean 11: 4). Il était, et il est, la résurrection et la vie. La puissance de résurrection est la preuve qu'il est le Fils de Dieu. Cela n'est point un accomplissement des promesses, mais la puissance de Dieu se manifestant là où la mort était intervenue comme conséquence du péché.

Relativement à l'expression «l'Esprit de sainteté», je remarque que le Saint Esprit est, pour ainsi dire, la force agissante dans la résurrection, comme en tout ce que Dieu a créé ou a fait. C'est ainsi que Pierre dit par rapport à la résurrection du Seigneur: «Mis à mort en chair, mais vivifié par l'Esprit» (1 Pierre 3: 18), et des croyants, il est écrit: «Et si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts, habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ d'entre les morts, vivifiera vos corps mortels aussi à cause de son Esprit qui habite en vous» (Romains 8: 11).

Mais pourquoi est-il dit: «Selon l'Esprit de sainteté?» Parce que le Saint Esprit est aussi la force agissante de Dieu pour manifester dans l'humanité tout ce qui lui est agréable. Cette force est naturellement toujours en Dieu; par elle, il a créé le monde; par elle, il a opéré dans tous les instruments de l'Ancien Testament et dans les prophètes. Mais maintenant il avait agi selon cette force divine dans l'humanité, (je veux dire la vie) de Christ, et dans la manifestation de la nouvelle condition de l'humanité. Les prophètes annonçaient ce qui leur avait été donné, et après cela prenait fin l'inspiration divine; et aussi, ce qu'ils annonçaient n'était pas pour eux. Jean le Baptiseur fut rempli du Saint Esprit dès le sein de sa mère. Mais Christ, comme homme, naquit du Saint Esprit; sa vie, bien qu'humaine sous tous les rapports, était l'expression de la puissance du Saint Esprit. Il chassait les démons par le Saint Esprit; ses paroles étaient Esprit et vie. La plénitude de la Déité habitait en lui corporellement. Son humanité était l'expression de la nature divine par le Saint Esprit, en amour, en puissance, et particulièrement en sainteté. Il était le Saint de Dieu. Par l'Esprit éternel, il s'est offert à Dieu sans tache. En toutes choses il servait son Père, mais son service était la parfaite représentation de ce qui est divin — du Père lui-même — au milieu des hommes, en ce que, comme homme, il manifestait à chaque instant, par l'Esprit, la divinité, et en était l'expression et la splendeur, sans tache et sans défaut. Toutes les offrandes de l'Ancien Testament sont des types de Christ, mais au point de vue que nous considérons, le type proéminent et frappant est l'offrande de gâteau: des gâteaux de fleur de farine, sans levain, pétris à l'huile, oints d'huile, brisés en morceaux et encore arrosés d'huile. Quel type frappant de l'humanité de Christ, qui selon sa nature était de l'Esprit et avait été oint de l'Esprit, duquel chaque action était caractérisée par l'Esprit qui y était répandu, et dans lequel tout le parfum de sa grâce était offert à Dieu comme une odeur d'agréable senteur. C'est ainsi qu'il devait être éprouvé par le feu, — la mort, — afin qu'il fût démontré que tout en lui était parfum de bonne odeur et rien d'autre. En dernier lieu, se montra la plus grande et la plus parfaite puissance du Saint Esprit dans la résurrection du Seigneur. Mis à mort en chair, il a été ressuscité par l'Esprit. L'Esprit, qui en puissance divine avait agi dans sa naissance et dans sa vie tout entière, par lequel enfin il s'était lui-même offert à Dieu, manifesta toute sa puissance en vivifiant d'entre les morts le Seigneur Jésus. Il est bien vrai qu'il a été ressuscité par la gloire du Père; il est bien vrai aussi qu'il a lui-même relevé son corps, le temple de Dieu (Jean 2: 19); mais c'est le Saint Esprit qui a été l'agent immédiat dans sa résurrection (1 Pierre 3: 18). Aussi le corps, du ressuscité est-il un corps spirituel.

C'est ainsi que l'homme a été introduit dans une toute nouvelle condition, par la résurrection, dans la personne de Christ, condition au delà de la mort, du péché, du jugement et de la puissance de Satan; et c'est ainsi que Christ a été déterminé Fils de Dieu, selon l'Esprit de sainteté, par la résurrection. Cet Esprit fut la puissance de la sainteté durant toute sa vie, car «par l'Esprit éternel, il s'est offert à Dieu sans tache;» et, selon cet Esprit, il est déterminé Fils de Dieu, et par lui, il a été justifié même sur la terre. Comme tout ce qui glorifiait Dieu a été accompli par un homme qui était Fils de Dieu, et que celui-ci, comme homme, a manifesté sa parfaite obéissance et son amour envers son Père, l'homme, selon la valeur de cette oeuvre accomplie et la puissance vivifiante du Saint Esprit, est entré dans une toute nouvelle position, dans la personne du Fils de Dieu, de sorte que, par la foi, nous sommes agréés de Dieu et devenons ses fils. Christ qui, comme Fils de David, était l'accomplissement des anciennes promesses, mais qui fut rejeté sur la terre, Christ, après avoir achevé l'oeuvre que le Père lui avait donnée à faire et enduré la mort, fruit du péché, est entré en résurrection de l'autre côté de la mort, dans la position du second homme, le dernier Adam.

Nous voyons donc ici, dans la personne de Christ, les deux points essentiels des voies de Dieu: l'accomplissement des promesses (bien que les Juifs, en rejetant le Seigneur, y aient perdu tout droit), et la révélation du Fils de Dieu, déterminé tel selon la puissance vivifiante du Saint Esprit dans un homme ressuscité. La puissance de Dieu est ainsi démontrée, non dans l'accomplissement d'une promesse, mais dans la vie actuelle et la position du second homme, en relation avec une délivrance accomplie. Mais ici, la puissance divine de la vie et la nouvelle position introduite par la résurrection, sont montrées surtout en relation avec la situation de l'homme amené dans cette position devant Dieu, toutefois dans la personne même du Seigneur, en puissance.

Qu'elle est précieuse, la pensée que le Fils éternel de Dieu, devenu homme, a pris cette nouvelle position dont nous avons parlé, et cela comme modèle et premier-né entre plusieurs frères qui lui seront parfaitement semblables, selon la puissance de vie du Saint Esprit et dans la gloire même! «Car, et celui qui sanctifie, et ceux qui sont sanctifiés, sont tous d'un; c'est pourquoi il n'a pas honte de les appeler frères» (Hébreux 2: 11). A la vérité, il n'est pas question ici de la gloire, mais le Seigneur, après sa résurrection, quand tout était accompli, a pu dire (avant il ne le pouvait pas). «Dis à mes frères: Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20: 17).

Le sujet de l'évangile, pour lequel Paul avait été mis à part, est donc Jésus Christ, notre Seigneur, comme Fils de David, pour l'accomplissement des promesses, et déterminé Fils de Dieu en puissance, selon l'Esprit de sainteté par la résurrection des morts. L'apôtre, sans doute, parle dans cette épître de la justice et expose tout clairement et complètement; mais l'objet principal devant ses yeux est la personne même de Christ, et ce qu'il est comme accomplissement des promesses, et comme Fils de Dieu en puissance et en résurrection. C'est ce que le Saint Esprit présente comme l'objet de Dieu lui-même dans l'évangile. C'est de lui déjà glorifié, que Paul a «reçu grâce et apostolat pour l'obéissance de la foi parmi toutes les nations, pour son nom». Parmi ces nations se trouvaient aussi les Romains. Il ne s'adresse point à eux comme assemblée, ainsi qu'il le faisait habituellement en écrivant aux assemblées qu'il avait fondées, mais il adresse sa lettre à tous les bien-aimés, saints appelés, qui sont à, Rome. Comme apôtre des nations, il pouvait écrire à tous avec l'autorité de Christ.

Dans ses épîtres, il souhaite toujours grâce et paix de la part de Dieu le Père et du Seigneur Jésus Christ. Nous faisons souvent trop peu attention à ces noms. Le premier nous montre Dieu lui-même comme Père, connu ainsi en grâce; l'autre nous rappelle l'homme glorifié, le Fils de Dieu, qui est établi officiellement sur la maison et le peuple de Dieu. Avec Dieu notre Père, nous sommes dans la relation d'enfants, avec Jésus Christ le Seigneur, nous sommes dans la relation de serviteurs.

L'apôtre aurait volontiers vu plus tôt les chrétiens de Rome, mais il en avait été empêché par Satan; car l'oeuvre du Seigneur se poursuit toujours en présence de l'Ennemi qui cherche à en entraver les progrès, tantôt par la persécution, tantôt par le mal qu'il cherche à provoquer dans les assemblées, et dont les serviteurs ont à s'occuper, que ce soient des hérésies qui prennent le temps des serviteurs, ou toutes sortes d'autres ruses. Il est important pour le serviteur de faire attention à cela; il apprend par là à connaître sa dépendance, et à comprendre que la force et l'efficacité de la puissance du Seigneur lui sont absolument nécessaires. C'est pourquoi Paul, tout en rendant grâces à Dieu pour la foi des Romains, publiée dans le monde entier, demandait toujours dans ses prières que Dieu lui ouvrît un chemin pour aller vers eux. Il désirait les voir, afin de leur faire part de quelque don de grâce spirituel, pour leur affermissement, mais immédiatement, en disant cela, il prend sa place en amour parmi eux, par ces paroles: «C'est-à-dire pour que nous soyons consolés ensemble, vous et moi, chacun par la foi qui est dans l'autre». Il était apôtre et devait agir en amour, il s'abaissait donc comme apôtre jusqu'aux plus faibles, afin de les élever jusqu'à la confiance divine. Souvent il s'était proposé d'aller vers eux, afin de recueillir quelque fruit parmi eux. Il était débiteur envers toutes les nations, pour leur porter la grâce de Dieu; et ainsi, pour autant que cela dépendait de lui, il était tout prêt à leur annoncer aussi l'évangile, à ceux qui étaient à Rome. Combien il est préoccupé de s'exprimer comme il convenait à leur égard. Il ne pouvait pas les nommer des Grecs, non plus des barbares, ce qui eût été une offense pour les habitants de la Rome impériale. Il pense à tout, afin d'être utile à tous.

Cela amène l'apôtre à la doctrine de l'épître. Il était prêt à annoncer l'évangile à ceux qui étaient à Rome, parce qu'il n'avait pas honte de l'évangile; car, dit-il, «il est la puissance de Dieu, en salut à quiconque croit». Il n'est pas la puissance de l'homme, même pour l'acquisition de la justice selon l'homme; l'apôtre éclaircit plus loin ce point d'une manière encore plus nette et plus détaillée. C'est un salut apporté à l'homme, un salut saint et juste; mais c'est un salut qui vient de Dieu, par la puissance de Dieu. et par cela même que la justice de Dieu y est révélée, en contraste avec la justice de l'homme. C'est la justice de Dieu même, de laquelle nous devenons participants par la foi: c'est sa justice sur le fondement de la foi. Tout est déjà parfait et accompli, avant que nous n'y croyions; par la foi nous y obtenons part. Cette justice n'est point par des oeuvres d'homme, ni par la loi, car sans cela elle serait uniquement pour les Juifs qui seuls avaient la loi. Au contraire, elle est pour tous les hommes, parce qu'elle est sur le principe de la foi, et c'est pourquoi les gentils, s'ils croient, y ont aussi part.

Il sera peut-être utile de dire quelques mots sur l'expression: «la justice de Dieu». Bien que très simple, on la comprend souvent très peu. Dans la version allemande de Luther, elle est remplacée par celle-ci: «la justice qui compte devant Dieu». Or la justice de l'homme selon la loi, compte devant Dieu. Peut-être ne se trouvera-t-elle nulle part, mais toutefois, elle compte devant Dieu. Seulement elle n'est pas la justice de Dieu, si parfaite soit-elle d'ailleurs. En Jean 16: 10, nous voyons en quoi s'est montrée la justice de Dieu, savoir en ce que Dieu a fait asseoir Christ à sa droite, dans sa propre gloire, parce que Christ l'a parfaitement glorifié. En ceci consiste la justice, que le Père a élevé l'homme Christ dans sa propre gloire, — la gloire qu'il avait auprès de lui, avant que le monde fût. Et Dieu, comme Dieu juste, l'a glorifié, parce que Lui avait été glorifié par Christ sur la croix (Jean 17: 5; 13: 31, 32). Dans le passage cité plus haut (Jean 16: 10), le Seigneur dit: L'Esprit «convaincra le monde de justice, parce que je m'en vais à mon Père et que vous ne me voyez plus». Le monde a pour jamais perdu Christ comme venu en grâce, parce qu'il l'a rejeté; mais Dieu l'a élevé et glorifié. Quand le Seigneur, en Jean 17: 25, parle du monde, il dit: «Père juste», mais dans ses demandes pour les siens, il dit au contraire: «Père saint» (verset 11). Ainsi la preuve de la justice de Dieu consiste en ceci qu'il a glorifié Christ. Comme Dieu était en Christ dans le monde, le monde devait l'accepter ou le rejeter. Il l'a rejeté et, à cause de cela, il est jugé; le monde ne verra plus Christ jusqu'à ce qu'Il vienne pour le jugement. Mais Christ, comme homme, a parfaitement glorifié Dieu en tout ce que Dieu est, et Dieu, selon sa justice, a glorifié Christ. L'évangile donc proclame cette justice de Dieu, savoir que Christ, en ce qu'il a fait pour nous, ayant glorifié Dieu, a été glorifié comme homme, et est assis à la droite de Dieu, revêtu de la gloire divine; de plus, l'évangile annonce que notre position devant Dieu est la conséquence de ce que Christ a accompli. Notre justification et notre glorification sont une partie de la justice de Dieu, car ce que Christ a accompli pour glorifier Dieu, a été accompli pour nous. Nous sommes «justice de Dieu» en lui (2 Corinthiens 5: 21). Christ perdrait le fruit de son oeuvre, si, tout indignes que nous en soyons par nous-mêmes, nous n'étions pas avec lui dans la gloire comme fruit du travail de son âme, après qu'il a glorifié tout ce qui est en Dieu.

Ensuite l'apôtre montre pourquoi une telle justice, la justice de Dieu même, était nécessaire, pour que l'homme pût être sauvé. De justice humaine, il ne s'en pouvait trouver sur la terre, et cependant la justice était nécessaire. Mais comme c'est la justice de Dieu, et certes point par nos oeuvres, il faut qu'elle nous soit comptée par la foi, sur le principe de la foi; car si les oeuvres de l'homme y ajoutaient quelque chose, ce ne serait plus la justice de Dieu. Mais si c'est par la foi que l'homme devient participant de cette justice, alors les croyants d'entre les nations y ont part tout aussi bien que les Juifs.

Nous voyons donc que si le premier sujet principal de l'épître est la personne de Christ, placée ainsi au premier plan, le second est la justice de Dieu, présentée sur le principe de la foi, de sorte qu'elle est pour tous; l'âme la saisit par la foi et ainsi se l'approprie.

Ce qui rend cette justice nécessaire, c'est l'état général de péché où se trouve l'homme, tandis que la colère de Dieu est révélée du ciel contre toute impiété et toute iniquité des hommes qui possèdent la vérité tout en vivant dans l'iniquité. Relativement aux païens, l'apôtre donne deux raisons de cette colère: 1° Le témoignage de la création (verset 19, 20), et: 2° Ils n'ont pas voulu retenir la connaissance de Dieu, lorsqu'ils le connaissaient, mais ont préféré l'idolâtrie (verset 21-24). «Depuis la fondation du monde, ce qui ne se peut voir de lui, savoir et sa puissance éternelle et sa divinité, se discerne par le moyen de l'intelligence, par les choses qui sont faites, de manière à les rendre inexcusables». Cela ne veut pas dire qu'ils pussent connaître Dieu dans sa nature, mais qu'ils auraient dû le connaître comme Créateur. A moins que l'on ne soit aveugle, le Créateur se voit dans la création.

Mais Dieu ne s'est pas révélé seulement comme Créateur. Noé ne le connaissait pas uniquement comme tel, mais aussi comme un Dieu à qui l'homme a affaire comme être responsable, — comme un Dieu qui avait jugé le monde pour sa méchanceté, qui faisait attention à la manière d'agir des hommes, et qui ne voulait point de l'injustice et de la violence. Les hommes avaient appris à le connaître, lors de l'érection de la tour de Babel, comme un Dieu qui les avait dispersés, parce qu'ils voulaient être indépendants dans leur propre sagesse, et puissants dans leur propre force. Les païens n'avaient pas voulu avoir la connaissance d'un tel Dieu ou le reconnaître; ils se firent à eux-mêmes des dieux, tels que l'homme pouvait les faire, des dieux qui favorisaient leurs passions. Ainsi, au lieu de glorifier le vrai Dieu et de lui rendre grâces, ils tombèrent dans les ténèbres de leurs propres coeurs; «se disant sages, ils sont devenus fous; et ils ont changé la gloire du Dieu incorruptible en la ressemblance de l'image d'un homme corruptible et d'oiseaux et de quadrupèdes et de reptiles». Et parce qu'ils n'ont pas voulu maintenir la gloire de Dieu, mais l'ont abandonnée pour leurs convoitises, Dieu les a livrés à ces convoitises. Il les a abandonnés à des passions infâmes, dans lesquelles ils se sont laissés aller à des choses déshonnêtes pour l'homme. Et non seulement, remplis de toute impiété et conduits par leurs passions, ils ont fait de telles choses, mais, avec une froide méchanceté, ils ont trouvé leur plaisir en ceux qui les commettaient.

Il est vrai qu'il se trouvait quelques hommes qui jugeaient ces voies (chapitre 2: 1); mais ils commettaient les mêmes choses, et ainsi se condamnaient eux-mêmes et tombaient sous le juste jugement de Dieu, tandis qu'ils méprisaient les richesses de sa bonté et de sa patience, ne comprenant pas que cette bonté les poussait à la repentance. Au lieu d'écouter cette bonté, ils s'amassaient la colère pour le jour de la colère par leur dureté et leur coeur sans repentance.

L'apôtre en vient maintenant à un principe important, simple à la vérité, mais jetant une vive lumière sur tout le sujet. C'est celui-ci: selon que Dieu s'est révélé, il agit envers l'homme dans ce que celui-ci a fait. Au jour du jugement, il rendra à chacun selon ses oeuvres, qu'il soit Juif ou Grec, car il n'y a pas d'acception de personnes auprès de Dieu. Il est vrai qu'il s'est choisi un peuple qu'il a approché de Lui, afin d'éprouver l'homme et de maintenir la vérité de l'unité de Dieu; mais, au fond, il n'y avait aucune différence entre les hommes. Tous sont pécheurs de nature, et tous ont péché. Nous voyons aussi que, bien que Dieu eût donné une loi à son peuple, il restait cependant toujours caché derrière le voile, sans se révéler. Mais maintenant le voile a été déchiré, et l'homme, le Juif d'abord, puis aussi le Grec, doivent être manifestés devant lui, chacun suivant ce qu'il est dans sa marche et dans la réalité de sa condition morale; et là, il n'est pas question de savoir si, quant à sa position, il est Juif ou Grec. Dieu, selon sa justice, n'a égard qu'au degré de lumière que chacun possède. Quand l'apôtre parle de ceux qui cherchent la gloire, l'honneur et l'incorruptibilité, il suppose par là le christianisme, car la connaissance de ces choses dépend d'une révélation. A ceux qui, en persévérant dans les bonnes oeuvres, cherchent ces choses, Dieu leur donnera la vie éternelle, sans faire de distinction entre Juif et Grec. Dieu veut la réalité de la vie divine, et non une forme extérieure. Ceux qui désobéissent à la vérité et obéissent à l'iniquité, ont à attendre la colère et l'indignation. «Tribulation et angoisse sur toute âme d'homme qui fait le mal, et du Juif premièrement, et du Grec; mais gloire, et honneur, et paix, à tout homme qui fait le bien, et au Juif premièrement, et au Grec». Tous seront jugés, chacun d'après ses oeuvres, sans acception de personnes, selon la lumière qu'il aura possédée. «Tous ceux qui ont péché sans loi, périront aussi sans loi; et tous ceux qui ont péché sous la loi, seront jugés par la loi,… au jour où Dieu jugera par Jésus Christ les secrets des hommes». Car ce ne sont pas les auditeurs de la loi, mais ceux qui accomplissent la loi, qui seront justifiés. Et si quelqu'un d'entre les nations accomplit ce que la loi demande, il est accepté, et a l'avantage sur celui qui, possédant la loi, ne l'observe pas. Comme nous l'avons dit, il ne s'agit plus, après que Dieu est révélé, de relations extérieures, selon lesquelles les uns sont «près» et les autres «loin», mais de ce qui est juste devant les yeux de Dieu. En réalité, si quelqu'un d'entre les nations, par l'Esprit, marchait dans l'amour, celui-là faisait ce qu'exigeait la loi, tandis que le Juif, qui avait la loi et marchait dans le péché, ne pouvait être accepté de Dieu. Il n'est plus question de relations extérieures avec Dieu, de la manière dont il agit avec le monde ou avec son peuple; en un mot, de son gouvernement sur la terre, mais de la condition de l'âme devant Dieu et du jour du jugement, où les secrets du coeur seront amenés en lumière et où l'homme sera jugé selon ses oeuvres.

Après que l'apôtre a clairement posé ces grands et importants principes, il continue en décrivant la réelle condition des Juifs, ainsi qu'il l'avait fait pour les nations, dans le premier chapitre. Les Juifs se glorifiaient de la loi et des privilèges qu'ils possédaient; ils connaissaient la volonté de Dieu et étaient capables d'instruire les ignorants; oui, ils se glorifiaient même en Dieu. Mais s'enseignaient-ils aussi eux-mêmes? Au contraire, ils faisaient tout ce qu'avec sagesse ils enseignaient les autres à ne point faire. Ils déshonoraient Dieu, tout en portant son nom. Par eux, ainsi qu'il est écrit, le seul vrai Dieu était blasphémé parmi les païens. Ils avaient des prérogatives; mais si la loi, à laquelle se rattachaient ces prérogatives, était transgressée, leur circoncision devenait incirconcision. Et les nations, en observant la loi, condamnaient ceux qui, possédant la lettre et la circoncision, violaient la loi. Car celui-là n'était pas un vrai Juif, qui l'était extérieurement, mais c'était celui dont le coeur était circoncis, qui était un Juif de coeur et en esprit, non dans la lettre; et celui-là tirait sa louange, non des hommes, mais de Dieu.

Chapitre 3

Maintenant l'apôtre prend les Juifs sur leur propre terrain. Leur prérogative était grande; le profit de la circoncision était «grand, de toute manière», et surtout, en ce que les oracles de Dieu leur avaient été confiés. L'apôtre croyait cela réellement et avec raison. A ce point de vue, il ne s'agissait point de savoir si tous étaient personnellement convertis; ils jouissaient des privilèges du peuple de Dieu, lesquels ne se trouvaient nulle part ailleurs, et, s'ils étaient infidèles, leur infidélité ne pouvait annuler la fidélité de Dieu. Il en est de même actuellement avec la chrétienté professante. Les promesses de Dieu s'accompliront, à cause de sa fidélité, envers le peuple d'Israël, bien qu'ils y aient perdu tout droit. Mais l'apôtre traite ce sujet plus loin (chapitre 11).

Mais, pourrait-on dire, dans ce cas l'infidélité de l'homme fait ressortir d'autant plus l'immuable fidélité de Dieu! Et ce fait, que l'infidélité de l'homme fait éclater ainsi la fidélité de Dieu, n'annule-t-il pas le droit qu'a Dieu de juger les hommes? Aucunement, car d'après ce principe, il ne pourrait juger personne, puisque sa fidélité est mise aussi en lumière par la méchanceté des nations. Les Juifs sont tout aussi bien responsables que les autres pour leur infidélité; et que ceux-ci doivent être jugés, c'est ce dont ne doute point le Juif. En dépit de leurs privilèges, les Juifs sont donc aussi passibles du jugement de Dieu.

L'apôtre ne s'abaisse pas à répondre à la méchante accusation de quelques-uns: «Faisons du mal, afin qu'arrive le bien!» et dit simplement: «Desquels le jugement est juste». Le monde, en effet, accusait les chrétiens de parler ainsi. La grâce est toujours une occasion d'accusation, aussi longtemps que l'âme n'a pas été convaincue de péché; mais dès que la conscience arrive à la conviction de péché, la grâce devient une occasion de reconnaissance pour le coeur.

Puisque le Juif avait de tels privilèges, n'était-il donc pas meilleur que les gentils? Point du tout. L'apôtre avait déjà démontré que tous deux, le Juif, comme le gentil, étaient convaincus de péché. Et il produit une quantité de passages qui font voir que les Juifs, dans leurs propres écritures, sont envisagés comme étant sous la culpabilité et la puissance du péché. Par rapport aux païens, il ne pouvait y avoir aucun doute à cet égard, ils étaient tout à fait éloignés de Dieu, étant tombés dans l'idolâtrie, adorant de faux dieux et vivant dans l'iniquité. Mais le Juif pensait tout autrement de lui-même. Il avait été approché et rendu participant de tous les privilèges.

L'apôtre lui-même avait reconnu comme le plus grand de ces privilèges, le fait que la parole de Dieu, les oracles de Dieu, leur avaient été confiés. Mais que disaient ces oracles, qui se rapportaient aux Juifs, et dont ils se glorifiaient comme n'appartenant qu'à eux seuls? Ils disaient: «Il n'y a point de juste, non pas même un seul». L'apôtre présente toute une suite de citations tirées des Psaumes et d'Esaïe, démontrant, sous tous les rapports, l'entière condition de péché de ceux dont il est question. Or qu'il fût parlé des Juifs, ceux-ci devaient en convenir d'après leur principe universel même, car: «Nous savons que tout ce que la loi dit, elle le dit à ceux qui sont sous la loi». Ainsi toute bouche est fermée, et tout le monde coupable devant Dieu. Les nations sont tout à fait sans Dieu; mais les Juifs sont jugés par cette parole de Dieu même dont ils se glorifient. De sorte que nulle chair ne sera justifiée devant Dieu par des oeuvres de loi, «car par la loi est la connaissance du péché». La loi que l'on prenait pour règle de la justice, démontrait que l'homme était un pécheur; elle le convainquait et le condamnait, et cela expressément dans sa conscience, et produisait en même temps le sentiment que le péché est en lui.

Après que l'apôtre a ainsi démontré que tous les hommes sont pécheurs, il revient à ce qu'il avait déjà posé comme vérité fondamentale de l'évangile, dans le verset 17 du chapitre premier, savoir la révélation de la justice de Dieu. Tout ce qui est dit, du verset 18 du chapitre 1, jusqu'au verset 21 du chapitre 3, est une parenthèse destinée à montrer qu'une justice de Dieu est nécessaire, puisqu'il n'y a aucune justice dans l'homme. Après cela, l'apôtre entre plus avant dans la question de la justice de Dieu et de son application à l'homme. Cette justice n'est point en rapport avec la loi, qui n'était autre chose que la parfaite règle de conduite pour l'homme. Or Dieu ne peut mesurer sa justice, d'après la mesure de la justice de l'homme ou de sa responsabilité. C'est d'après cette mesure qu'il juge les hommes qui ont eu la loi. Sa justice doit être mesurée d'après sa propre nature, et sa nature se révèle dans ce qu'il fait. Il doit se glorifier lui-même en ce qui de lui est révélé, car pour Dieu la révélation de lui-même est aussi sa glorification. Lorsqu'il juge les hommes, c'est d'après la responsabilité de l'homme; lorsqu'il agit, c'est d'après sa propre nature. La loi ne connaît rien de la nature de Dieu. Elle dit que nous devons aimer Dieu; mais qu'est-il? La loi est appropriée à l'homme et à sa relation avec Dieu. La justice de Dieu est tout entière et tout à fait en dehors de toute question de la loi, et même de quelque loi que ce soit, à moins que la nature de Dieu ne soit considérée comme telle. Il est loi pour lui-même, loi parfaite dans Sa nature. Sa justice est maintenant démontrée dans ce qu'il a fait à l'égard de la personne de Christ, lequel il a placé à sa droite en conséquence de son oeuvre accomplie. La loi et les prophètes ont rendu témoignage à cette justice. La justice de Dieu même s'est montrée dans l'acceptation et la glorification de Christ en vertu de son oeuvre; et nous avons aussi part à cette acceptation par la foi, parce qu'il a accompli cette oeuvre pour nous. Précisément parce que c'est la justice de Dieu, fondée sur l'oeuvre de Christ, en ce qu'il est mort pour tous, elle s'étend à tout le monde et sur tous les hommes. Tous ceux qui croient en Christ, Juifs ou païens, y ont part, et ont aussi part à tous les privilèges qui en découlent. S'il s'était agi d'une justice de l'homme, elle aurait dû être selon la loi, et alors les Juifs seuls y auraient eu part, puisque seuls ils avaient la loi. Mais comme c'est la justice de Dieu, elle est manifestée pour tous, et elle est imputée à tous ceux qui croient. Ainsi la justice de Dieu par la foi en Jésus Christ est manifestée pour tous les pécheurs; elle repose sur tous ceux qui croient en lui: «Car il n'y a pas de différence, car tous ont péché et n'atteignent pas à la gloire de Dieu, — étant justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus».

Tous les hommes se trouvent donc par nature dans la même condition; ils sont tous dans le péché; mais alors la grâce est la même pour tous, parce que la justice de Dieu est la même justice pour tous les croyants; et, à cause de cela, tous les croyants acceptés selon cette justice, se trouvent sur le même terrain devant Dieu. Dieu a publiquement présenté Jésus Christ comme propitiatoire par la foi en son sang, et par là a montré sa justice, à l'égard des péchés des saints de l'Ancien Testament, qu'il avait supportés dans sa patience. Mais maintenant sa justice est démontrée quant à ce support, en ce que Christ est mort pour eux; sur le fondement de cette mort expiatoire que Dieu avait sous les yeux, il pouvait supporter ces péchés. De plus, cette justice a été aussi manifestée dans le temps présent. Non seulement elle éclaircit les voies passées de Dieu, mais elle est aussi pour le temps actuel la manifestation du fondement de la justification du croyant par une oeuvre accomplie. Elle est donc actuelle et se réalise dans la justification de tous les croyants selon la justice du Dieu juste. Dieu est juste et justifie à cause de l'oeuvre de Christ; et même, il démontre sa justice en le faisant. Ce n'est pas comme si nous en étions dignes; mais en nous justifiant, Dieu reconnaît la valeur de l'oeuvre de Christ. Ainsi la justification est une chose manifestée, reconnue, parce que l'oeuvre est accomplie.

L'homme n'a donc aucun sujet de se glorifier, non, pas même le Juif, en dépit de tous ses privilèges. Toute vanterie est exclue. Sur quel principe? Par quelle loi? Est-ce celle des oeuvres? Non, mais par la loi de la foi. L'homme, quel qu'il puisse être, prend la place de pécheur. La grâce, et elle seule, vaut pour tous de la même manière. En effet, nous concluons que l'homme est justifié par la foi, sans oeuvres de loi. «Dieu est-il seulement le Dieu des Juifs? ne l'est-il pas aussi des nations? Certes, aussi des nations».

Il doit être tel, et tel il était, même dans l'Ancien Testament, bien que, pour conserver la connaissance d'un seul Dieu sur la terre alors que tous les peuples étaient tombés dans l'idolâtrie, il eût choisi d'entre eux Israël, dans la personne d'Abraham. Mais maintenant, selon la grâce, il a pris sa place comme Dieu sur tous les hommes, selon la vérité de ses droits immuables, en ce qu'il y a un seul et même Dieu qui justifie, par la foi et la circoncision et l'incirconcision. La différence des expressions employées ici «par la foi» et «sur le principe de la foi», s'éclaircit par ce fait que les Juifs cherchaient bien la justice, mais sur un principe faux, c'est-à-dire celui des oeuvres; ils devaient avoir la justice, et sans doute une justice divine, mais sur un autre principe, sur celui de la foi. Et puisque cette justice repose sur le principe de la foi, le païen croyant devient aussi participant de cette justice divine par la foi, qui est produite en lui par la grâce. Ce principe annule-t-il donc la toi? Point du tout. L'autorité de la loi est pleinement établie et sanctionnée, mais pour la condamnation de ceux qui se trouvaient sous son autorité. Rien ne pouvait plus fortement établir son autorité que le fait que le Seigneur lui-même a pris sur lui la malédiction de la loi.

Chapitre 4

Mais il y avait encore une autre preuve comme quoi la justice ne vient pas des oeuvres de la loi. C'est l'exemple d'Abraham, qui reçut les promesses avant que la loi n'eût été donnée et proclamée. L'apôtre se sert de cette partie de l'histoire et des privilèges d'Israël, pour établir son principe fondamental: «Que dirons-nous donc d'Abraham?» demande-t-il. «S'il a été justifié sur le principe des oeuvres, il a de quoi se glorifier, mais non pas devant Dieu. Car que dit l'Ecriture? Abraham crut Dieu, et cela lui fut compté à justice». Ainsi le principe de la justification par la foi est pleinement établi par l'exemple d'Abraham. Ce n'est point par les oeuvres, sans quoi le salaire ne serait pas compté à titre de grâce, mais à titre de chose due. Mais quand on ne fait pas des oeuvres, mais que l'on croit à Celui qui justifie l'impie, alors la foi est comptée à justice. Et il en est de David comme d'Abraham. L'apôtre introduit ici l'exemple de ces deux hommes, parce qu'ils représentent les deux sources principales de la bénédiction d'Israël. Or David décrit en ces termes le bonheur de l'homme que Dieu tient pour juste sans les oeuvres: «Bienheureux ceux dont les iniquités sont pardonnées et dont les péchés ont été couverts! Bienheureux l'homme à qui le Seigneur ne compte pas le péché!» Sans doute, l'acceptation en Christ va plus loin, mais ici, en vue de la responsabilité de l'homme, nous trouvons énoncée cette vérité que tout est accompli pour ceux qui croient en Christ. Le péché ne leur est plus du tout imputé; ils sont déchargés de toute culpabilité; il n'y a plus d'accusation contre eux à jamais. L'apôtre parle plus loin de notre position en Christ. Etre acceptés en Christ, dans une nouvelle position, selon la valeur et l'acceptation de Christ devant les yeux de Dieu, est plus que la justification. Mais cette justification est parfaite pour nous, en tant qu'hommes responsables.

Maintenant se pose la question: cette bénédiction est-elle seulement pour Israël? L'exemple d'Abraham aussi est décisif. La foi lui fut comptée à justice, mais quand? Est-ce lorsqu'il eut été circoncis ou bien avant? C'est avant. Nous voyons donc dans cet ancien et décisif exemple d'Abraham, que, selon la volonté et la déclaration de Dieu, la foi d'un homme incirconcis lui est comptée à justice. La circoncision fut donnée ensuite à Abraham comme sceau de la justice qu'il possédait étant incirconcis, afin qu'il fût le père de tous les croyants, aussi bien des incirconcis — afin qu'à eux aussi la justice fût comptée, selon son exemple — que des circoncis, de sorte qu'il est le père d'une vraie circoncision, non pas seulement de ceux qui sont de la circoncision, mais de tous les croyants qui, dans une vraie séparation pour Dieu, marchent sur les traces de la foi d'Abraham, foi qu'il avait étant incirconcis.

De plus, la promesse d'être héritier du monde ne fut donnée ni à Abraham, ni à sa semence, par la loi, mais par la justice de la foi; en effet, la loi ne vint que beaucoup plus tard. Ainsi, toute l'histoire d'Israël démontre que ce n'est point par la loi, mais uniquement par la foi, que l'on a part à la bénédiction. Car si ceux qui sont héritiers, le sont par la loi, alors la promesse est annulée, et la foi, par laquelle Abraham a reçu la promesse, devient vaine et inutile. Bien plus, une loi produit la colère, car là où il n'y a point de loi, il n'y a point de transgression. Le péché est bien là, mais on ne peut point transgresser ce qui n'est ni ordonné, ni défendu.

L'apôtre développe encore plus, d'après l'Ecriture, ce principe fondamental de la bénédiction des croyants d'entre les nations. Il dit: «Pour cette raison, c'est sur le principe de la foi, afin que ce soit selon la grâce, pour que la promesse soit assurée à toute la semence, non seulement à celle qui est de la loi, mais aussi à celle qui est de la foi d'Abraham, lequel est père de nous tous (aussi bien des croyants d'entre les nations, que de ceux d'entre les Juifs), devant Dieu, qu'il a cru, qui fait vivre les morts, et appelle les choses qui ne sont point comme si elles étaient» (versets 16, 17). Ces paroles présentent une autre vérité. Elles montrent la puissance de la résurrection; la puissance de donner la vie, là où tout gît dans la mort; la puissance créatrice. Cette puissance donna aussi entrée aux nations. Abraham comptait sur elle, quand son corps était déjà amorti et que le sein de Sara était aussi devenu comme mort. Pour la foi, tout dépend de l'activité de cette puissance qui produit ce que Dieu veut. Ce n'est pas seulement un propitiatoire établi pour tous ceux qui, par la foi au sang de Christ, viennent là comme au lieu où Dieu se rencontre avec le pécheur, mais c'est une puissance qui, là où il n'y a rien, engendre pour soi des enfants par ceux qui sont morts. Il y a cependant une différence entre la foi d'Abraham et la nôtre. Il crut que Dieu pouvait ressusciter les morts, et il avait raison; nous, nous croyons que Dieu l'a fait. Cette différence est très importante. Abraham avait raison de croire à la parole même de Dieu; nous avons la même foi, mais elle se base sur une oeuvre accomplie, et là se trouve le repos pour l'âme. Christ est ressuscité; lui, qui a été livré pour nos fautes, a été ressuscité, afin que nous croyions à cela et que nous soyons justifiés.

Chapitre 5

Nous sommes donc justifiés sur le principe de la foi. La doctrine de l'oeuvre de Christ trouve là, pour ainsi dire, sa conclusion, en tant du moins qu'il s'agit de son sang répandu pour ôter nos péchés. La résurrection de Christ est la preuve que Dieu a accepté cette oeuvre comme satisfaction pour nos péchés, et assurément pour sa propre gloire. Quelle précieuse pensée! La justice de Dieu repose sur l'oeuvre de Christ! Cette justice s'est révélée en ce qu'il a ressuscité son Fils d'entre les morts, et à cause de lui nous a justifiés. Nos péchés sont pardonnés; nous sommes lavés par son sang. Nous n'avons contribué en rien à notre justification; nous ne pouvions en rien y contribuer; nous sommes justifiés uniquement par l'oeuvre de Christ. Nos péchés sont la seule part que nous ayons aux souffrances de Christ, par lesquelles nous sommes purifiés devant la face de Dieu. Nous sommes rendus participants de la valeur de cette oeuvre par la foi, qui cependant ne peut rien y ajouter. Cette oeuvre est pour nous le motif le plus puissant de servir Dieu, et de le louer sans cesse. Mais par là non plus, nous n'ajoutons rien à l'oeuvre de Christ devant Dieu: elle est achevée, et non seulement cela, mais aussi acceptée et reconnue pleinement suffisante devant Dieu. Qu'il est précieux de savoir que tous nos péchés sont ôtés par Dieu lui-même, selon sa propre justice. Nous en sommes assurés, parce qu'il a ressuscité Christ à cause de l'oeuvre qu'il a accomplie pour nous, — preuve à jamais subsistante que Dieu a accepté cette oeuvre comme le glorifiant parfaitement. Cela serait suffisant pour notre justification; mais Dieu a fait plus. Il a élevé Christ à sa droite; et Christ est maintenant là comme homme, attendant jusqu'à ce que ses ennemis soient mis pour le marchepied de ses pieds. Par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité (quant à la conscience) ceux qu'il a sanctifiés. Si, par cette offrande, ils ne sont pas amenés à la perfection, ils ne peuvent jamais l'être, et tout aussi peu leurs péchés peuvent-ils être ôtés. Car, sans effusion de sang, il n'y a point de rémission, et Christ ne peut pas verser encore une fois son sang pour nous. L'oeuvre est faite, sinon elle ne peut absolument plus être faite.

La première partie du chapitre 5 (verset 1-11) réunit tous les traits de cette infinie grâce de Dieu. Examinons brièvement le contenu de ces précieux versets. L'oeuvre est accomplie; la foi sait que Dieu l'a acceptée, puisqu'il a ressuscité Christ et l'a placé à sa droite. Il ne reste rien entre Dieu et l'homme, né de nouveau et sanctifié, que la valeur de l'oeuvre, de Christ et l'acceptation de sa personne. Le sang de Christ est toujours devant les yeux de Dieu, et lui-même paraît pour nous en la présence de Dieu. Cela nous donne pour le présent les privilèges les plus précieux, et pour l'avenir l'espérance de la gloire, dont nous jouirons près de lui. Mais nous ne voulons pas aller au delà de ce que notre chapitre dit; nous nous bornerons à considérer la perfection de la grâce de Dieu qui s'y trouve si merveilleusement développée. Nous y voyons ce que Dieu est pour nous, tandis que notre position devant lui en Christ est traitée plus loin.

Les 11 premiers versets présentent donc le développement de la grâce et des voies de Dieu en grâce; ils parlent d'abord de ce que la grâce donne, et ensuite des expériences de ceux qui ont reçu la grâce. Christ ayant été livré pour nos offenses et ressuscité pour notre justification, nous avons été justifiés par la foi. C'est une justification accomplie; nos péchés sont effacés, notre conscience est purifiée, et comme la valeur de cette oeuvre est toujours la même aux yeux de Dieu, ainsi notre justification est valable à jamais. En conséquence, nous possédons une paix constante avec Dieu. Aucun péché ne peut nous être imputé, car ils ont déjà tous été portés, de sorte que nous ne pouvons plus avoir aucune conscience de péchés. Nous avons bien conscience de la présence du péché dans la chair; mais quant aux péchés que Christ a déjà portés pour nous, il n'en saurait plus être question. Nous avons certes à nous humilier, lorsque quelque occasion vient nous rappeler que nous étions coupables de ces fruits odieux du péché et que nous en avons amassé le fardeau sur notre précieux Sauveur; mais, en la présence de Dieu, où se trouve pour toujours Christ et son sang, nous ne pouvons mettre en question que tout ne soit pardonné. Il est très important de ne pas confondre l'état de mon âme avec la valeur d'une oeuvre accomplie en dehors de moi, oeuvre à l'accomplissement de laquelle je n'ai contribué en rien, si ce n'est par mes péchés. Or si mes péchés ont été mis alors sur Christ, ils ne peuvent maintenant plus se trouver devant Dieu; Christ ne les a plus sur lui dans le ciel. Si je suis devant Dieu, d'une part je ne trouve là qu'un amour infini et immuable, parce que Christ y est; et d'autre part, aussi parce qu'il est là, je trouve en lui une justice parfaite et divine. Amour infini, justice parfaite et divine, et grâce immuable, sont devenus en Christ la part du croyant devant Dieu.

Cela nous fait faire un pas de plus dans la contemplation des fruits de la grâce. Non seulement tous nos péchés sont ôtés par la grâce, de sorte que nous avons la paix avec Dieu, mais nous pouvons aussi jouir de la grâce de Dieu qui a fait la paix, d'une grâce qui maintenant est constamment pour nous dans le coeur de Dieu. La grâce n'a pas seulement mis de côté tous les obstacles par l'oeuvre de Christ, mais elle demeure toujours la même dans le coeur de Dieu. Son regard repose sur nous avec le même amour que sur Christ. Par Christ nous avons la paix, par lui aussi nous avons accès par la foi à la grâce et à la faveur dans laquelle nous nous tenons devant Dieu. Nous jouissons de cette faveur en la présence de Dieu. Non seulement le Juge céleste nous justifie, mais un Père céleste nous reçoit; sa face lumineuse, pleine de grâce et d'amour paternel, réjouit notre âme et rafraîchit notre coeur, de sorte que, dans un repos parfait, nous nous trouvons en sa présence et marchons dans son sentier. Nous avons le sentiment précieux d'être dans la faveur de Dieu. Quant à nos péchés, ils sont tous ôtés; quant à notre condition actuelle devant Dieu, tout est amour et grâce dans la pure clarté de sa face; et quant à l'avenir, nous attendons la gloire: elle est notre portion quand bien même nous n'en jouissons pas encore. La paix, la faveur de Dieu, l'espérance de la gloire, telle est la part du croyant, le fruit béni de l'amour de Dieu.

On pourrait dire: il y a donc là tout pour le passé, le présent et l'avenir. L'apôtre a cependant quelque chose à ajouter. Puisque la gloire est encore à venir, nous avons un chemin à parcourir avant de l'atteindre, et Dieu ne nous oublie pas durant ce chemin. L'apôtre dit: «Non seulement cela, mais aussi nous nous glorifions dans les tribulations». Le désert est le lieu où se font les expériences des rachetés relativement à leurs circonstances et aux voies gouvernementales de Dieu. La rédemption est accomplie: nous avons été amenés à Dieu, comme il est écrit: «Je vous ai portés sur des ailes d'aigle et vous ai amenés à moi». C'est un fait déterminé à l'avance dans les desseins de Dieu et maintenant accompli. La gloire est une partie des desseins de Dieu qui doit aussi avoir sa réalisation pour celui qui est justifié. Le désert n'entre point dans ces desseins, mais c'est le lieu où nous apprenons à connaître ses voies envers nous. Assurément le brigand crucifié alla le jour même en paradis avec Christ, pour rester là avec lui. Il était dans une condition propre à une telle place. S'il souffrait de la part des hommes la conséquence de ses forfaits, du côté de Dieu, Christ subissait pour lui la peine de tout ce dont il était coupable, et le pécheur justifié suivit le même jour son Sauveur dans les demeures de la félicité. Par conséquent, il n'avait point à faire un long chemin d'expériences. Mais, en général, il faut que le croyant traverse en pèlerin, un monde où le rencontrent et l'entourent de tous côtés les difficultés et les tentations. Christ a passé avant nous dans ce monde, et nous sommes appelés à marcher sur ses traces. C'est ainsi que notre état est mis à l'épreuve. La rédemption n'est pas mise en question, car c'est elle qui nous a amenés dans le désert. Mais nous sommes responsables de marcher selon notre appel et la position où la rédemption nous a introduits, d'une manière digne de Dieu qui nous a appelés à son propre royaume et à sa propre gloire. Les tribulations sont une pierre de touche pour l'âme; elles nous montrent jusqu'à quel point la propre volonté agit, et rendent manifeste en nous l'activité du péché, afin que nous puissions le découvrir. Dieu nous sonde. D'un côté, nous apprenons par là à connaître ce que nous sommes; mais nous apprenons aussi ce que Dieu est pour nous dans sa fidélité et ses soins de chaque jour. Nous sommes sevrés du monde et nos yeux deviennent plus capables de réaliser et d'apprécier ce qui est céleste. Ainsi l'espérance, qui est déjà dans le coeur, devient beaucoup plus claire et vivante. C'est de cette manière que nous pouvons envisager les tribulations, parce que nous avons la clef de toutes: «L'amour de Dieu est versé dans nos coeurs par le Saint Esprit qui nous a été donné». La sollicitude de Dieu à ce point de vue est merveilleuse. «Il ne retire point ses yeux de dessus le juste». Il pense à tout ce qui regarde ses enfants; à leur caractère, à leurs circonstances, à leurs tentations; il fait tout ce qui est nécessaire afin de les amener à l'heureuse fin de leur pèlerinage. Après quarante ans de voyage dans le désert, les pieds des Israélites ne s'étaient point enflés et leurs vêtements ne s'étaient point usés. Il fait travailler toutes choses ensemble pour le bien de ceux qui l'aiment.

Quelques points très importants nous restent encore à considérer. Le Saint Esprit est mentionné ici pour la première fois. L'Esprit Saint versé dans le coeur est une tout autre chose que la nouvelle naissance. Il faut nécessairement être né de nouveau pour recevoir le Saint Esprit, mais le pécheur a besoin de plus que de la nouvelle naissance. Dans ce passage, le Saint Esprit est considéré comme le sceau donné aux croyants de la valeur du sang de Christ et de la parfaite purification dont ils sont devenus participants par l'application de ce sang. Ayant été lavés de leurs péchés, ils deviennent l'habitation du Saint Esprit. Il est l'onction, le sceau des croyants et les arrhes de la gloire. Par lui ils crient: «Abba, Père!» (Galates 4: 6); par lui ils savent qu'ils sont en Christ et Christ en eux (Jean 14: 16-20); et, dans le passage qui nous occupe, nous apprenons que par lui l'amour de Dieu est versé dans nos coeurs. L'ordre que Dieu avait établi pour la purification du lépreux (Lévitique 14), présente une image frappante de ce qui a lieu dans le temps actuel pour le croyant. Le lépreux était d'abord lavé avec de l'eau, puis aspergé de sang et enfin oint d'huile. Ainsi on est d'abord converti, puis on est rendu participant de la parfaite purification opérée par le sang de Christ, et enfin on est scellé du Saint Esprit. C'est par le Saint Esprit que nous avons la pleine assurance de notre part à la rédemption accomplie, en vertu de notre relation bénie avec Dieu et avec Christ, et il est les arrhes de la gloire à venir. Mais tout est la conséquence de l'aspersion du sang de Christ.

Ainsi nous connaissons Dieu, nous sommes participants de la nature divine, nous avons compris notre rédemption et notre justification, et nous faisons l'expérience de sa fidélité. Il se révèle à notre âme et nous révèle aussi la gloire qui est devant nous. Nous savons que nous sommes en lui et que Dieu demeure en nous. C'est pourquoi, nous ne nous glorifions pas seulement de ce qu'il nous a donné, de notre salut; mais nous nous glorifions en Dieu lui-même. Un enfant reconnaissant n'est pas heureux seulement de ce qu'il a beaucoup reçu de son père, mais son coeur se réjouit aussi de ce que son père lui a fait connaître ses voies d'amour; il est heureux, parce que son père est pour son coeur tout ce qu'il aime; il se réjouit dans l'expérience personnelle qu'il fait de tout ce qu'est son père, et il se glorifie de lui. Quel privilège de pouvoir nous glorifier en Dieu lui-même! Cela rend grandes la joie et la jouissance de la grâce. Le caractère le plus élevé de notre joie éternelle se trouve ainsi réalisé déjà ici-bas, et cette joie est accompagnée d'une paix profonde. Ce que Dieu est en lui-même, est l'objet infini mais actuel pour une nature capable de jouir de lui, tandis que le Saint Esprit le révèle dans l'âme.

Ici (verset 11), se termine la première partie et, pour ainsi dire, la doctrine de l'épître. Ce qui suit, présente notre position en Christ et les expériences que fait l'âme pour être introduite dans cette position. Puis suivent des exhortations pour ceux qui sont affranchis. Notre position n'est pas dans la chair, mais dans l'Esprit, ou en Christ. Mais afin d'être réellement affranchi, nous avons à apprendre par expérience ce qu'est la chair, alors, et seulement alors, l'âme sort de son état légal pour passer dans l'état spirituel en Christ, en vertu de la mort et de la vie de Jésus Christ. Mais nous reviendrons sur ce point. Il nous faut d'abord considérer la position elle-même, ou plutôt les deux positions et les enseignements qui s'y rapportent. Il est important de remarquer que, pour l'affranchissement, il s'agit d'expérience; c'est par là seulement qu'il peut être connu. Il en est tout autrement du pardon des péchés. Il est bien vrai que Dieu seul doit nous instruire en tout; mais croire que quelque chose a été accompli, ou est arrivé en dehors de moi, est tout à fait différent, que croire de moi une chose que je ne trouve point pratiquement réalisée en moi. L'oeuvre de Christ sur la croix, par laquelle j'obtiens le pardon et la paix, en tant qu'elle se lie au pardon, est une chose accomplie en dehors de moi, et je suis appelé à croire que Dieu l'a acceptée comme satisfaction pour mes péchés. Croire cela est bien l'oeuvre de Dieu dans mon coeur, mais la chose en elle-même est simple. Un enfant qui doit être puni, comprend très bien ce que c'est d'être pardonné. Mais lorsqu'on me dit: Si tu crois, tu es mort au péché; je réponds, d'autant plus que je suis sérieux et droit: Non, car je sens l'effet du péché dans mon coeur. La question donc de notre condition, est traitée dans la seconde partie de l'épître aux Romains. Sommes-nous dans la chair ou dans l'Esprit? Sommes-nous en Christ et Christ est-il en nous, et ainsi sommes-nous morts au péché, ou bien sommes-nous simplement des enfants d'Adam, de sorte que le péché exerce sa puissance en nous, lors même que nous ne le voulons pas?

Cette question est traitée à partir du verset 12 du chapitre 5. L'apôtre ne parle plus de ce que nous avons fait, comme dans la première partie de l'épître, mais de ce que nous sommes, en conséquence du péché d'Adam. Par la désobéissance d'un seul, plusieurs ont été constitués pécheurs; — plusieurs — c'est-à-dire tous ceux qui, par leur naissance, sont en relation avec ce seul comme leur premier père. «C'est pourquoi comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a passé à tous les hommes, en ce que tous ont péché…» (verset 12). La suite de cette proposition se trouve au verset 18. Les versets 13 à 17 forment une parenthèse ayant pour objet de montrer dans quel rapport se trouve la loi avec cette question, et de prouver que l'homme, sans avoir reçu de loi de la part de Dieu, est sous le joug du péché et sujet au jugement. La preuve que le péché règne sur tous les hommes, c'est la mort. Adam était sous une loi; il lui avait été défendu de manger du fruit d'un certain arbre. Les Juifs comme peuple étaient sous la loi de Moïse. Quand donc Adam eut transgressé le commandement qui lui avait été donné, et que les Juifs eurent enfreint la loi, ils étaient positivement coupables à l'égard de ce en quoi ils avaient désobéi. Ils avaient fait ce que la loi défendait. Le verset 14 fait allusion à ce que dit Osée d'Israël: «Ils ont transgressé l'alliance comme Adam» (Osée 6: 7). Adam ainsi qu'Israël se trouvait en relation avec Dieu par une loi positive. Il en était tout autrement des païens. Ils n'avaient point de loi. Ils avaient bien la conscience et étaient tenus d'obéir à Dieu. Mais on ne pouvait pas dire qu'ils eussent transgressé en ceci ou en cela un commandement connu, puisqu'il n'y en avait point. Il n'y avait pour eux aucune loi existante, de sorte qu'on ne pouvait leur compter comme transgression, ce qu'ils avaient fait. Mais le péché était là. La conscience signalait ce qui était fait contre sa voix, et la mort régnait sur eux. La domination de la mort démontrait ainsi la présence du péché, dont elle était la conséquence. Chacun, même sans être sous la loi, avait souillé sa conscience, et la mort était le constant témoignage de la présence du péché. Les gentils, qui n'avaient point de loi, mouraient aussi bien que les Juifs.

L'opération de la grâce devait-elle donc se borner au cercle étroit du judaïsme, parce que les Juifs possédaient seuls les promesses et tous les privilèges d'une révélation? Au contraire. Le christianisme était la révélation de Dieu lui-même, et pas seulement de la volonté de Dieu relativement à l'homme. C'est pourquoi cette révélation s'étendait nécessairement bien au delà des bornes du judaïsme. Dans le christianisme, il n'y a pas de loi donnée à un peuple unique. Au peuple d'Israël avait été donnée une loi qui enseignait ce que l'homme devait être, mais elle ne révélait pas Dieu. Elle était accompagnée de promesses, c'est vrai; mais ces promesses n'étaient pas encore accomplies. La loi en même temps interdisait à l'homme l'accès auprès de Dieu. Le christianisme, au contraire, donnait une révélation de Dieu, selon l'amour, dans la personne du Fils; il annonçait une délivrance parfaite par sa mort, et, en vertu de cette mort, une justification parfaite, actuelle par la foi. Il témoignait que le voile qui interdisait l'accès auprès de Dieu, était déchiré, et que l'accès était parfaitement libre; de sorte que le croyant pouvait approcher avec confiance par ce chemin nouveau et vivant. Ainsi l'éternelle bénédiction ne se trouve ni dans le premier homme pécheur, ni non plus par le moyen de la loi. En effet, celle-ci, étant appliquée à tout homme, ne pouvait que le condamner, parce qu'elle est la parfaite et divine règle de conduite pour l'homme, et puisque l'homme est pécheur, elle place sous la malédiction tous ceux qui sont sous la loi. La bénédiction de Dieu est dans le dernier Adam, le second homme, l'homme glorifié après avoir été fait péché pour nous; elle est en Lui qui a rencontré la puissance de Satan et qui s'est assujetti à la mort, bien qu'il ne pût être retenu par elle, en lui qui s'est placé sous la malédiction et l'abandon de Dieu dans son âme, et que Dieu, glorifié parfaitement par son oeuvre, a ressuscité d'entre les morts, et a fait asseoir comme homme à sa droite. Un Dieu, qui s'est révélé de cette manière, ne pouvait être le Dieu des Juifs seulement.

L'apôtre montre dans les versets 15 à 17, que la grâce surpasse de beaucoup le péché. Si les conséquences du péché d'Adam ne sont pas restées sur lui seul, mais se sont étendues à ses descendants, beaucoup plus les conséquences de l'oeuvre de Christ s'étendent-elles sur ceux qui sont de Lui. Selon le verset 16, tous les descendants d'Adam sont perdus par suite de son péché; mais la grâce, la pure grâce, ne compte pas seulement pour la condition de ruine, mais aussi pour beaucoup de transgressions. La surabondance de la grâce brille surtout dans son éclat au verset 17: «Car si, par la faute d'un seul, la mort a régné par un seul, beaucoup plutôt ceux» — on aurait pu penser que la suite serait: beaucoup plutôt la vie régnera; mais non, l'apôtre dit: «beaucoup plutôt ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et du don de la justice, régneront-ils en vie par un seul, Jésus Christ».

Avec le verset 17, se ferme la parenthèse, et l'apôtre reprend la suite de la pensée interrompue au verset 12. Les, conséquences de la chute d'Adam s'étendent à tous les hommes, de même aussi, par l'oeuvre de Christ, le libre don s'étend à tous les hommes. L'évangile peut ainsi être appliqué à tous; il s'adresse au monde entier, à tous les pécheurs. Au verset 19, nous avons l'application positive. Par la désobéissance d'un seul homme, plusieurs, tous ceux qui sont en relation avec lui, c'est-à-dire tous les hommes, se trouvent dans la même condition que ce seul, dans une condition de péché. Par l'obéissance d'un seul homme, tous ceux qui sont en relation avec lui, c'est-à-dire tous les chrétiens, se trouvent dans la position de ce seul, position de justice devant Dieu. Adam était la figure de l'homme qui devait venir. Dans le premier, nous sommes tous perdus; dans le second, tous ceux qui lui sont unis, sont sauvés, justes devant Dieu. La culpabilité d'un homme dépend de ce que lui a fait; mais sa réelle condition dépend de ce que Adam a fait. Adam et Christ sont les chefs, de deux races, l'un est le chef d'une race pécheresse, l'autre le chef d'une race juste devant Dieu, et ici la vie et la position sont inséparables. La loi est intervenue comme une chose secondaire entre le premier et le second Adam. La souche de la race humaine déchue est Adam, le premier homme. Le chef et la racine de vie de la race bénie et sauvée, est Christ. «La loi est intervenue», comme la mesure de ce qui aurait dû être réalisé par l'humanité déchue, mais qui ne l'a pas été véritablement. La loi n'était le moyen ni d'arriver à la vie, ni d'être sauvé, mais seulement la règle de ce que l'homme aurait dû être ici-bas, liée à une promesse de vie. «Celui qui aura fait ces choses vivra par elles» (Galates 3: 12). Mais la loi commandait à un homme pécheur de ne pas pécher! Son but était, comme l'apôtre le dit, de faire abonder la faute, — non le péché, car Dieu ne peut rien faire pour augmenter le péché; mais il pouvait donner une règle, quand le péché était déjà là, afin de mettre en évidence les fruits du péché. Ainsi, bien que la loi fût la parfaite règle de conduite pour un enfant d'Adam, elle n'était cependant en réalité qu'une chose accessoire. L'homme était déjà un pécheur perdu, et la loi manifestait le fruit de l'arbre mauvais et pourri. Plus loin, nous verrons qu'elle fait plus encore. Il nous est dit seulement ici qu'elle fait abonder la faute. En vérité, nous voyons les voies de Dieu dans le premier, comme dans le second Adam. L'homme était un pécheur, un pécheur perdu — Christ était un Sauveur. Comme preuve de ce que l'homme était, la loi était nécessaire, parce qu'elle exigeait de l'homme la justice, selon la mesure de sa responsabilité. Le but de la loi, dans le gouvernement de Dieu, était de manifester par la désobéissance et dans les transgressions, la propre volonté de l'homme, car, sans la loi, il n'y a point de transgression. Or cela suppose le péché, comme d'ailleurs on peut le voir dans la loi même. Le jugement de Dieu s'exerce selon la responsabilité de l'homme, d'après ce qu'il a fait, sans la loi ou sous la loi. Mais son état de ruine, sa condition de perdu, est une autre chose. En Adam, il est perdu; le monde en donne la preuve d'une manière effrayante, ainsi que nos propres coeurs, si d'ailleurs nous les connaissons. La désobéissance d'un seul a introduit la condition. Cette condition n'est pas un jugement à venir, mais un fait actuel: nous sommes constitués pécheurs. La famille entière est, par son premier père, dans la même condition que lui: séparés de Dieu, oui, chassés loin de lui, en inimitié contre lui, bannis de sa présence et sans désir d'y être introduits. L'homme préfère à Dieu les plaisirs, l'argent, la vanité, la puissance du monde, les beaux vêtements, tout en un mot, même lorsqu'il se pose comme quelqu'un qui croit que le Fils de Dieu, par amour, est mort pour lui. Il n'y a qu'un objet que le monde ne veuille pas admettre, c'est Christ et la révélation de Dieu en lui, bien que cette révélation soit l'amour. Par la désobéissance d'un seul, plusieurs ont été constitués pécheurs.

Ainsi, l'importante vérité placée ici sous nos yeux, n'est pas la culpabilité attirée sur l'homme par de mauvaises oeuvres et la grâce par laquelle cette culpabilité est enlevée; mais, comme principe général, c'est la condition des enfants d'Adam déchus. (C'est pourquoi la loi, comme chose accessoire, est mise de côté, bien qu'elle fût valable pour la conscience des Juifs, qu'elle demeurât toujours la règle parfaite de la justice de l'homme, et qu'elle le fût là, où, appuyée sur l'autorité de Dieu, elle était appliquée). En relation avec cela, on trouve l'introduction d'une nouvelle ou seconde souche, celle des hommes sauvés; cette souche est l'homme ressuscité, de même qu'Adam est la souche des hommes déchus. Adam ne devint chef de race qu'après sa chute, et Christ n'est devenu en fait le chef d'une nouvelle création (bien que, dès le commencement, Dieu ait agi par son Esprit) que lorsque la justice divine eut été démontrée par sa glorification. Après que la justice de Dieu eut été révélée, et nous eut été rendue applicable, en vertu de la glorification de Christ qui avait porté nos péchés et parfaitement glorifié Dieu lorsqu'il fut fait péché; alors seulement Christ est devenu le chef vivifiant d'une race nouvelle, agréée de Dieu; et tout, du commencement à la fin, est le fruit de l'incommensurable, infinie et ineffable grâce de Dieu. La grâce règne, mais c'est parce qu'elle est fondée sur l'oeuvre de Christ, et ainsi elle règne par la justice. Le but est la vie éternelle, et cela dans son plein et réel caractère selon les conseils de Dieu, dans la gloire où Christ, selon la justice, est déjà entré comme homme. La justice ne règne pas encore; elle régnera au jour du jugement. Car alors la mesure du jugement sera la justice de l'homme, c'est-à-dire ce que l'homme était tenu d'accomplir; l'homme sera alors jugé d'après les devoirs qui lui étaient prescrits envers Dieu et envers son prochain, selon les droits de Dieu. Mais l'origine, la source du salut pour l'homme, est la grâce, parce que Dieu est amour, et que nous sommes pécheurs. La grâce, en effet, est l'exercice de l'amour envers ceux qui ne possèdent aucun mérite, rien qui les en rende dignes. Et en cela s'est révélé l'amour, de sorte que les anges apprennent à le connaître dans les voies de Dieu envers nous. Mais Dieu est juste aussi, et il doit maintenir sa justice, et sa sainteté ne peut à toujours souffrir le péché dans sa présence. Il a démontré l'état de péché et la culpabilité de tous les hommes, et il a agi selon son amour infini, non pas seulement pour pardonner les péchés (sujet dont nous avons déjà parlé), mais pour préparer à l'homme une position toute nouvelle, d'après ses desseins éternels, et pour sa gloire dans l'éternité, et cela selon ce qu'il est en lui-même. L'accomplissement de ces desseins, en vertu de l'oeuvre de Christ, selon sa parfaite justice, est l'expression et la révélation de son amour infini. En ceci l'amour s'est révélé, qu'il a envoyé son Fils et l'a livré pour nous à la mort et à la malédiction. En ceci la justice est révélée, qu'il a placé Christ, ayant été parfaitement glorifié par lui, à sa droite comme homme, dans la gloire divine, dans cette gloire, que Christ, comme Fils de Dieu, avait auprès du Père avant que le monde fût, mais qu'il a méritée comme fils de l'homme, en sorte que la justice divine devait nécessairement lui donner cette place. Et nous avons part à cette gloire de Dieu, parce que l'oeuvre par laquelle Dieu a été parfaitement glorifié, a été aussi accomplie pour nous. Nous faisons partie de la gloire de Christ dans l'éternité. Il ne verrait pas le fruit du travail de son âme, s'il n'avait pas ses rachetés auprès de lui dans la gloire.

Chapitre 6

Mais la chair, qui veut avoir sa justice à elle, et le monde, qui se pose en gardien de la moralité, présentent ici une objection, afin de faire opposition à la vérité et à la grâce, qui montrent l'homme comme étant perdu à cause du péché. Ils disent: Si, par l'obéissance d'un seul, nous sommes constitués justes, il est donc indifférent que nous soyons obéissants ou non. Cette objection montre seulement que celui qui la fait ne connaît rien de la vérité, qu'il ne comprend rien, ni à l'état de perdition dans lequel il se trouve, ni à la nouvelle vie que le croyant a reçue et qui ne peut supporter le péché, parce qu'elle est de Dieu.

Remarquons ici quelles importantes vérités sont renfermées dans le changement de la base sur laquelle repose la relation de l'homme avec Dieu. Le point de séparation, c'est la croix, la mort de Christ. Le vieil homme, la race d'Adam, a été mis à l'épreuve sans loi, sous la loi, et ensuite sous la révélation de la grâce et de la vérité, lorsque le Fils de Dieu se trouvait comme homme dans ce monde. Dieu lui-même était venu, manifesté en chair, non point pour imputer les péchés, mais «réconciliant le monde avec lui-même», et si la bénédiction de la race du premier Adam avait été possible, c'est alors qu'elle aurait dû avoir lieu. Mais elle était impossible. On parle beaucoup d'un point d'attache que Dieu trouverait en l'homme; mais même Dieu manifesté en grâce et en vérité n'en trouva aucun. Au contraire, la mort de Christ est la rupture positive, décidée et définitive entre l'homme et Dieu. Non seulement l'homme sans loi était sous le péché; non seulement, lorsqu'il était sous la loi, se trouvait-il en flagrante désobéissance à la loi, mais en rejetant Christ il repoussa la grâce de Dieu apparue dans ce divin Sauveur. En parlant de sa mort, le Seigneur dit: «Maintenant est le jugement de ce monde» (Jean 12: 31), et plus loin: «Ils m'ont vu, et ils ont haï et moi et mon Père» (Jean 14: 24). C'est pourquoi il est dit: «En la consommation des siècles, il a été manifesté une fois» (Hébreux 9: 26). La croix était moralement la fin de l'humanité. Mais en même temps, et par le même fait, dans la mort de Christ, était posé le fondement de la nouvelle création, selon la justice de Dieu. Ce fait même, qui devant Dieu mettait fin au premier Adam, alors que sa race rejetait le Fils de Dieu, a aussi posé le fondement d'une nouvelle position de l'humanité dans le second Adam. Christ fut fait péché sur la croix, — là le péché a été jugé et le vieil homme mis de côté pour toujours. Maintenant l'accès auprès de Dieu, par la foi, a été rendu possible; dans la résurrection, la nouvelle vie, même pour le corps, a été réellement mise en lumière, et le second homme a pris place dans la gloire. De même que le premier homme a été chassé du jardin d'Eden, afin de devenir la souche d'une postérité pécheresse et perdue, ainsi le second homme est entré dans le paradis céleste comme la racine et le chef de la race sauvée, comme la justice de Dieu qui est imputée à l'homme, et ainsi la vie et la justice sont devenues inséparables. Le pardon par le sang de Christ est le plus puissant mobile pour une marche sainte; la résurrection de Christ réunit en elle la justice et la vie. C'est la «justification de vie» (Romains 5: 18).

Dans l'épître aux Romains, la vérité que nous sommes ressuscités avec Christ, n'est pas développée. Quant à la part que nous avons à sa mort et à sa résurrection, il est seulement dit que par la foi nous nous tenons pour morts au péché, que Christ glorifié est notre vie et que le Saint Esprit nous est donné.

Si donc, par l'obéissance d'un seul, nous sommes constitués justes, et si, là où le péché abondait, la grâce a surabondé, demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde? «Qu'ainsi n'advienne», dit l'apôtre. Cependant, dans sa réponse, il ne nous replace point sous la loi. Cela aurait été reconnaître le vieil homme, la chair, et introduire de nouveau ce par quoi nous sommes déjà perdus, savoir la responsabilité et la condamnation, car la chair ne se soumet pas à la loi de Dieu, et aussi ne le peut-elle point. La réponse de l'Esprit, au contraire, nous reporte à la mort de Christ; tout ce que Lui a fait, nous est appliqué. Le vieil homme s'est montré irrémédiablement mauvais, et il l'a manifesté dans la mort de Christ. Moi, qui suis crucifié avec Lui, je ne puis absolument pas reconnaître cet homme qui a mis Christ à mort. Je suis venu à Christ, parce que l'homme (moi-même dans mon ancienne condition) était tel, et parce que j'ai reçu maintenant une nouvelle vie, savoir Christ, qui est ressuscité d'entre les morts. Mais il nous faut considérer cela d'un peu plus près.

En ayant été baptisés pour Christ Jésus (ce qui est notre vraie profession de foi), nous n'avons point été baptisés pour un Christ que le monde a reconnu, ou qui a trouvé un point d'attache dans le premier Adam. Au contraire, le monde, l'homme, l'a absolument et entièrement rejeté et repoussé de la terre, et ainsi, comme nous l'avons déjà dit, il a été rendu évident qu'une union entre Dieu et l'homme, comme enfant d'Adam, était complètement impossible. Alors Dieu a commencé à nouveau, nous sommes nés de nouveau.

Christ, Dieu en soit béni, ayant été rejeté, a accompli l'oeuvre de la réconciliation; il a acquis la justification, le pardon et la gloire pour ceux qui croient en lui. Mais il est le second homme, et en lui l'homme se trouve dans une position entièrement nouvelle devant Dieu, de même que dans une nouvelle condition. Un Christ ressuscité est notre vie, un Christ ressuscité est notre justice; le vieil homme est pour jamais condamné. Celui qui possède Christ pour sa vie, a part à tout cela, parce qu'il a part à sa mort et à sa résurrection. La première partie seule est développée dans l'épître aux Romains; nous sommes morts, nous mourûmes avec lui. Il est bien présenté comme notre vie, mais l'apôtre ne traite pas ici de notre résurrection avec lui, parce que le Saint Esprit envisage ici les chrétiens comme des hommes vivants sur la terre. Christ est mort et ressuscité; nous sommes baptisés pour sa mort. Nous avons part à sa mort, puisqu'il est notre vie. Celui qui est ma vie est mort, et il est mort au péché. Je le reconnais Lui seul comme étant mon «moi», et, comme étant ce nouveau «moi», je me tiens pour mort au vieux «moi». Selon cette nouvelle vie, je suis vivant à Dieu, mais, pour ce qui regarde mon vieil homme, je suis mort avec Christ; comment donc vivrais-je encore la vie du vieil homme, puisque comme tel je suis mort? C'est pourquoi, ensevelis avec Christ par le baptême pour la mort, il nous convient de marcher en nouveauté de vie. Puisque nous avons part à sa position, comme morts au péché, nous aurons aussi part à sa résurrection. L'apôtre ne dit pas que nous y avons part, mais que nous y aurons part. Cette vie de résurrection trouvera sa consommation dans la gloire, mais elle se manifeste déjà dans une nouvelle marche, de même que la puissance de la vie de Christ, mise en évidence d'une manière positive dans sa résurrection, s'était aussi manifestée réellement dans sa marche sur la terre. «Sachant ceci», dit l'apôtre, «que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit annulé» (c'est-à-dire, afin que le péché en nous, considéré comme un tout, soit annulé), «pour que nous ne servions plus le péché. Car celui qui est mort, est justifié (ou quitte) du péché». Mais cela demande à être considéré de plus près.

Premièrement, il faut bien saisir que le chrétien n'a pas à mourir au péché, mais qu'il est mort, puisqu'il est crucifié avec Christ. Ayant maintenant Christ pour sa vie, il tient le vieil homme pour mort. Ce n'est point seulement de péchés ou de convoitises particulières qu'il est délivré, mais tout le vieil homme est mis de côté; il est mort, et il doit être tenu pour mort, par la foi qui agit selon le nouvel homme. Il est vrai que la nature du vieil homme est encore présente en nous; le fait de notre mort avec Christ n'a pas pour conséquence que cette nature n'a plus d'existence en nous; mais elle ne domine plus «pour que nous ne servions plus le péché». Il n'est pas du tout nécessaire d'avoir même une seule mauvaise pensée, bien que la nature qui produit les mauvaises pensées soit encore présente; mais nous ne servons cette nature en aucune manière, pas même en pensée, lorsque la nouvelle vie et la puissance du Saint Esprit agissent en nous. Le chrétien est affranchi, non parce que ses péchés sont pardonnés pour toujours, mais parce qu'il est mort au péché, crucifié avec Christ. Comme mort avec Christ, il est justifié du péché, précisément parce qu'il est mort, mais il est aussi vivant en Christ. Il n'est pas seulement vrai que le péché ne domine plus, mais le chrétien est aussi libre de se livrer: il possède une nouvelle nature, une nouvelle et sainte vie. Mais à qui se livrera-t-il maintenant? A la justice et à Dieu. Se livrer ainsi, n'est pas le fait du pécheur, comme on l'affirme souvent très faussement, mais celui de l'âme affranchie. Le chrétien, parce qu'il est purifié, justifié, assuré de l'amour et de la faveur de Dieu, et qu'il possède par le sang de Christ une conscience rendue parfaite, puisque aucun péché ne lui est plus imputé, — le chrétien est libre, de franche volonté devant Dieu. Le même coup qui déchira le voile, a aussi ôté tous ses péchés. A travers ce voile déchiré brille maintenant sur lui sans obstacle la lumière de Dieu, et elle montre que ses vêtements sont plus blancs que la neige. Il est affranchi de la puissance du péché, puisque Christ est sa vie, et maintenant, crucifié avec Christ et vivant par lui seulement, il se tient pour mort à l'égard de la chair. Il est libre devant Dieu et aussi affranchi du péché. Et dans cette liberté qu'il possède, il se livre à Dieu.

Ainsi la nouvelle vie qui marche aussi avec Dieu, gagne déjà quelque chose en chemin: nous avons des fruits, même avant d'arriver à la gloire, et ce fruit c'est la sainteté. Fruit précieux! Dès que nous sommes participants de la nature divine, nous croissons aussi dans la communion pratique avec Dieu, en ce que la sainteté croît en nous. Cette croissance ne va pas à l'encontre de cette vérité que la nouvelle nature que nous avons reçue est parfaite en elle-même. Nous appartenons entièrement et absolument à Dieu; nous avons été achetés à prix; nous sommes séparés du péché et du monde. Nous appartenons à Dieu selon la valeur de l'oeuvre de Christ, selon la nouvelle nature et selon la puissance du Saint Esprit. Selon l'homme intérieur, nous appartenons déjà à la nouvelle création, bien que nous ayons «ce trésor dans des vases de terre». Nous sommes en Christ, et en lui nous sommes pleinement acceptés. Il est notre justice, une justice valable pour la gloire, car il est dans la gloire selon cette justice. Mais il est aussi en nous, comme notre vie et selon la puissance de l'Esprit. Cette vie est parfaite en elle-même et ne peut pécher; mais nous devons avoir en dehors de nous un objet de la sainteté. C'est pourquoi le Saint Esprit prend ce qui est en Christ et nous le révèle; oui, il nous révèle tout ce qui est là-haut, où est Christ et aussi le Père. Par là nous croissons, d'une manière objective en ce qui est céleste, nous sommes dégagés du monde, nous demeurons en esprit dans les lieux célestes, nous jouissons de l'amour du Père, et ainsi nous devenons saints d'une manière pratique.

Nous sommes sanctifiés selon les conseils de Dieu par l'offrande de Christ, par son sang; nous le sommes en ce que nous possédons une nouvelle nature, une nouvelle vie; nous le sommes par la présence et l'opération du Saint Esprit, et, pouvons-nous ajouter, par la parole de Dieu. La sanctification de l'Esprit est opérée en ceci, que nous sommes nés de Dieu. Mais, comme nous l'avons déjà dit, il nous faut avoir un objet, et la nature spirituelle, la vie que nous avons reçue, est capable de jouir de cet objet, de Dieu lui-même. Par la Parole, le Saint Esprit nous communique les choses qui sont saintes et divines. Nous sommes d'abord régénérés par la Parole, moyennant la foi, ensuite cette même Parole nous nourrit, et le coeur est purifié également par la foi, et l'un et l'autre s'opèrent par la révélation de Christ dans le coeur. «Sanctifie-les par la vérité; ta Parole est la vérité. Et moi, je me sanctifie moi-même pour eux, afin qu'eux aussi soient sanctifiés par la vérité» (Jean 17: 17, 19).

Si nous voulons être exacts, nous ne pouvons pas dire que le nouvel homme, la vie que nous avons reçue de Dieu, est sanctifié; car la nouvelle vie elle-même est sainte, et en ce que nous l'avons reçue, nous sommes sanctifiés pour Dieu, et c'est pour cela que, dans les lettres apostoliques, les croyants sont appelés saints. La sainteté en nous est une chose relative, c'est-à-dire qu'elle se rapporte à Dieu, parce que nous ne pouvons pas être indépendants. Sans doute que par là se trouve produit en nous un état réel; mais nous ne sommes pas saints d'une manière indépendante, car, pour une créature, être indépendant est péché, et aussi ne peut-elle être vraiment indépendante. Ainsi la sainteté en nous est objective; c'est là un principe important.

Tout ce que le Saint Esprit nous a révélé, — l'amour du Père et de Christ, la sainteté de Dieu, la perfection de Christ, sa personne qui nous a été donnée et a été livrée pour nous, sa glorification actuelle dans le ciel, — tout cela opère en nous et forme le coeur, les pensées, l'homme intérieur, et par là aussi l'homme extérieur, selon l'objet que nous contemplons. Tout ce qu'est Christ et tout ce qu'il a souffert y à sa part, non seulement parce que sa marche et toutes ses voies sont un modèle pour nous, mais parce qu'elles attirent le coeur vers lui. Les affections du coeur sont occupées de Christ et de sa perfection; il remplit notre coeur. C'est là la sanctification, car c'est aussi ce qui remplit le coeur du Père: «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne» (Jean 10: 17). Le Père apprécie ce que Christ a accompli et ce qu'il était en l'accomplissant. Et cela a été accompli pour nous! Nous avons de saintes pensées, en aimant et en appréciant ce qu'il a fait et ce qu'il a été. C'est ainsi que nous avons en nous la pensée qui était en Christ (Philippiens 2: 5).

C'est un côté du caractère chrétien. Mais la puissance de la sanctification est surtout opérée par la contemplation de la gloire de Christ. Sans doute le coeur est nourri par tout ce qu'il a été ici-bas. Nous mangeons sa chair et nous buvons son sang, nous savourons aussi le pain qui est descendu du ciel; mais ce qui nous transforme à son image est la gloire dans laquelle il se trouve actuellement (2 Corinthiens 3: 13; 1 Jean 3: 2, 3). En contemplant cette gloire, nous sommes transformés en la même image. La gloire de Christ opère en nous l'énergie de la vie, tandis que nous ne considérons plus toutes les autres choses que comme une perte. La vie et les souffrances de Christ attirent le coeur vers lui (voyez Philippiens 3 et 2).

Il s'est sanctifié lui-même pour nous, afin que nous fussions sanctifiés par la Parole. Merveilleuse grâce! Merveilleuse union! Cela nous sépare du monde, nous unit à ce qui est céleste, et nous conduit à la ressemblance avec le céleste. La fin est la vie éternelle dans cette gloire même, après que notre vase terrestre aussi aura été transformé à l'image de cette gloire.

Nous apprenons de plus en Hébreux 12: 10, relativement à la sainteté, que la discipline de Dieu a pour but de nous rendre participants de sa sainteté. Ce passage non seulement nous découvre les soins incessants de Dieu pour nous, mais nous fait aussi comprendre le précieux caractère de cette sainteté.

Nous avons mérité la mort comme le triste salaire d'un triste travail; la vie éternelle, le don de Dieu, devient notre partage par Jésus Christ, notre Seigneur: c'est pure grâce. Qui d'autre que Dieu seul pouvait nous donner la vie, la vie éternelle, la vie divine? Christ lui-même est cette vie, envoyée du Père dans le monde, et manifestée ici-bas dans l'homme Christ. Maintenant, «celui qui a le Fils a la vie;» «celui qui croit en lui, a la vie éternelle» (1 Jean 1: 1, 2; 5: 12; Jean 3: 36). Bien que dans le dernier passage de notre chapitre, il s'agisse plutôt du résultat dans la gloire, puisque, dans les conseils de Dieu, la vie éternelle signifie une parfaite conformité avec Christ dans la gloire, elle ne nous est pas moins donnée maintenant comme vie, quoique nous ne soyons pas encore dans la gloire. Il est important pour nous de remarquer que c'est le don de Dieu. Par le péché, la mort s'était acquis l'homme; la vie, la vie éternelle, dans laquelle nous sommes capables d'avoir communion avec Dieu, doit être donnée de Dieu. Cette vie est Christ lui-même (1 Jean 1). Il est la vie qui était auprès du Père, et qui est descendue ici-bas. En lui était la vie; celui qui a le Fils, a la vie, et cette vie sera bientôt pleinement manifestée dans la gloire. C'est là le principe de la nouvelle position. Nous sommes morts avec Christ à l'ancienne, et Christ est devenu notre vie.

Chapitre 7

Dans ce chapitre, l'apôtre traite une nouvelle question: Quelle est l'opération de la loi par rapport à notre nouvelle position? Le principe est simple. Nous sommes morts avec Christ: or une loi ne domine sur un homme qu'autant qu'il vit. Quand un meurtrier a été condamné à mort et qu'il a subi sa peine, l'autorité judiciaire ne peut rien lui faire de plus. Nous sommes morts, toutefois si nous n'avions été mis à mort que par la loi, non seulement nous serions morts, mais aussi condamnés. Mais nous sommes morts avec Christ, et il a subi pour nous la condamnation due au péché Ainsi nous sommes morts, et la loi n'a plus aucune autorité sur nous. Christ est entré à la place de la loi. Au lieu d'une loi qui défendait les péchés et les convoitises, et qui devait nécessairement nous condamner, — parce que la chair à laquelle la loi adresse ses exigences n'était point soumise à la loi de Dieu et ne pouvait l'être, — au lieu de la loi, nous possédons en Christ une nouvelle vie, tandis que, par la foi, nous tenons pour morte la chair qui est sujette au péché. L'apôtre prend pour exemple le mariage. La mort brise le lien qui unissait les époux. Ainsi nous sommes morts par rapport à la loi et nous sommes liés à un autre mari, savoir le Christ ressuscité. La figure est appliquée ici en sens inverse. Ce n'est pas la loi qui est morte, mais nous sommes morts, nous qui avions notre vie dans la chair (verset 4).

Telle est la doctrine. Dans ce qui suit, l'apôtre parle de l'expérience. Celle-ci ne renverse nullement le principe important qui a été posé, mais plutôt confirme l'affranchissement de l'âme à l'égard de la loi, par le fait de sa mort avec Christ, qui maintenant est devenu notre nouvelle vie. Selon la figure du mariage employée par l'apôtre, nous sommes unis à Christ comme par mariage, et par là nous sommes introduits dans une toute nouvelle relation avec Dieu, dans celle de la parenté. C'est pourquoi il est dit: «Quand nous étions dans la chair». Etre «dans la chair», veut dire se trouver devant Dieu sur le terrain ou dans la position du premier homme, et selon cette position être responsable envers Dieu Il ne s'agit pas ici de la culpabilité, mais de la délivrance de l'âme du joug du péché. Lorsqu'un homme est sans loi et ne cherche autre chose que la satisfaction de ses penchants, la conscience peut bien une fois s'éveiller; mais la puissance du péché n'est pas sentie. On nage avec le courant et l'on ne sent pas que l'on est sous la domination du péché. Lorsqu'on est converti, on est d'abord occupé de sa culpabilité, du fardeau des péchés. Même après avoir appris à connaître le pardon des péchés et avec la certitude que l'on est un enfant de Dieu, la forme de l'expérience peut bien changer, parce qu'il ne s'agit plus de justification, mais l'âme n'en est pas moins angoissée, aussi longtemps que, dans le chemin de l'expérience, elle n'est pas affranchie de la puissance du péché qui habite en nous. Toujours de nouveau se pose la question: comment Dieu peut-il m'agréer, ou comment peut-il prendre son bon plaisir en moi, lorsque le péché est encore là et que je ne puis le vaincre? Aussi longtemps que l'on ne connaît pas le pardon, on demande: «comment puis-je trouver le pardon?» L'a-t-on trouvé, reste la question: «que suis-je devant Dieu; comment un être tel que moi peut-il être agréé de Dieu? Ne me serais-je pas fait illusion?» En un mot, le regard s'arrête seulement sur ce que nous sommes en nous-mêmes devant Dieu; l'on voit que le péché est encore là, et cependant un chrétien doit remporter la victoire sur le péché. Une telle personne est, de fait, encore dans la chair, au moins quant à l'état de son esprit et de ses sentiments.

Nous avons déjà remarqué que la position se trouve dans les quatre premiers versets de notre chapitre. Le cinquième et le sixième nous conduisent à l'expérience. Dans la chair, nous étions comme par mariage unis avec la loi. Mais, celle-ci ne donnait ni vie, ni force, ni confiance en Dieu. Elle défendait de commettre les péchés et me les imputait. Non seulement cela: elle donnait encore au péché dans la chair, une occasion d'agir et de porter du fruit pour la mort. Tout en les défendant, elle plaçait devant le coeur les péchés et les convoitises. Si une somme d'argent est placée sur la table et que l'on me dise: «Tu n'y toucheras pas;» immédiatement le désir de le faire s'empare de moi. Ou bien encore, si je dis: «Il y a quelque chose dans ce tiroir, mais personne ne doit savoir ce que c'est;» aussitôt petits et grands ont envie d'ouvrir le tiroir. Les passions des péchés ne sont point du tout de la loi, mais par la loi. Elle suppose que la chair est présente, et que nous ne possédons pas la force de Christ. Mais maintenant (en Christ) nous sommes déliés de la loi, parce que nous sommes morts dans ce en quoi nous étions tenus. Nous étions dans la chair sous le joug de la loi; la chair était la source des péchés, et maintenant pour la foi elle est morte, afin que nous servions en nouveauté d'esprit. La mort de la chair, du vieil homme, forme la base de la transition de la servitude dans la chair à la liberté dans l'Esprit; en même temps, cette mort est en relation avec la délivrance.

Mais comment ce but peut-il être atteint? Cela est tout autre chose que de le désirer. La doctrine est présentée dans la parole de Dieu d'une manière très claire et très simple. Mais il y a beaucoup de personnes qui connaissent passablement cette doctrine, savoir que le chrétien est mort avec Christ et même ressuscité avec lui; elles croient aussi qu'elles sont mortes avec lui, puisque la parole de Dieu le déclare si clairement; elles ne doutent pas qu'elles ne soient des enfants de Dieu, et qu'une telle position n'appartienne aux enfants de Dieu, et avec tout cela elles ne sont pas affranchies. Il y a même de ces âmes droites qui, voyant qu'elles ne marchent pas comme elles le voudraient, commencent à douter et à se demander si elles ne sont pas des hypocrites, si elles ne se sont pas trompées. Elles croient, et avec raison, que Dieu pourrait voir en elles quelque chose d'autre que ce qu'il voit. Elles font tout dépendre de ce qu'elles sont en elles-mêmes devant Dieu. Or cela est la loi et non point la grâce. Nous trouvons, depuis le septième verset, le développement de la réponse à la question, comment on peut obtenir la liberté. Afin d'être réellement affranchi, on doit apprendre, et cela par l'expérience, que l'on est captif sous la puissance du péché, et que l'on n'a aucune force pour s'affranchir soi-même, même quand on désirerait ardemment être délivré. Pour cela, Dieu se sert de la loi et du désir du nouvel homme d'être affranchi du joug du péché qu'il liait. Ainsi le chrétien apprend, non pas qu'il a péché, — ce n'est pas l'objet que l'on a en vue ici, — mais, qu'en lui agit le principe du péché dans la chair; alors qu'il désirerait volontiers atteindre la sainteté. La loi lui apprend que Dieu ne peut pas permettre cela; son entendement renouvelé reconnaît que Dieu ne doit pas le permettre, et lui-même aussi ne le veut pas. Et cependant, ce principe du péché est présent, agissant avec force, trop fort pour qu'il puisse s'en affranchir. C'est pour cela que la loi n'a pas seulement établi, avec une autorité divine, les devoirs qui se rapportent à toutes les circonstances de l'homme, mais elle a aussi ajouté: «Tu ne convoiteras pas». C'est une pierre de touche pour l'homme, mettant clairement en évidence son état, même lorsqu'il n'a pas péché extérieurement, même quand, étant converti, sa volonté est dirigée vers la sainteté. Cette sainteté, à laquelle il aspire, il ne peut l'atteindre. Lorsqu'il était sans loi, et qu'il n'avait rien fait contre la voix de sa conscience, celle-ci ne lui faisait pas sentir l'arrêt de mort du juge. Auparavant il vivait tranquille, sans porter partout avec lui le sentiment de la condamnation. Mais la loi vint et prononça la condamnation sur «la convoitise;» l'expérience lui apprend que cette convoitise est présente dans le coeur, et alors la conscience sent le jugement de condamnation; la convoitise elle-même est réveillée et tout vient en lumière. La conscience sent l'arrêt du juge; on voudrait faire le bien, mais l'on trouve toujours que le mal est là.

La loi dit: «Fais cela et tu vivras». L'homme converti, sur la conscience duquel la loi exerce sa puissance, regarde cette loi comme étant de Dieu: la crainte de Dieu est dans son coeur, et il voudrait faire ce que la loi prescrit. Nous parlons ici de l'état d'un homme converti et non de celui d'un homme affranchi. Puisque la loi promettait la vie à celui qui la garderait, elle était aussi donnée pour la vie; mais comme la chair ne se soumet pas à la loi, elle se trouve être en réalité, à l'égard de l'homme, pour la mort. C'est ce dont l'âme sérieusement convertie fait l'expérience. Il est bon de remarquer ici la différence entre un homme naturel qui n'a que la conscience, et l'état de l'homme tel qu'il nous est présenté ici. La conscience distingue entre le bien et le mal. Dieu a pourvu à ce que l'homme, devenu pécheur, apportât la conscience avec lui dans ce monde. Elle juge d'après sa nature ce qui est mal, néanmoins l'homme fait le mal. Un païen, dont la volonté n'est pas changée, peut dire: «J'approuve, il est vrai, ce qui est meilleur, mais je ne veux pas ce qui est bon, et je fais le mal». Mais il n'en est pas ainsi de l'homme dont parle ici l'apôtre. Sa volonté est renouvelée; il prend plaisir à la loi de Dieu. C'est là le sentiment de Christ lui-même, et c'est la preuve que l'homme en qui se trouve ce sentiment, est converti et a reçu une nouvelle vie au fond du coeur. La conscience dans l'homme inconverti lui fait reconnaître ce qui est bon, mais la volonté de la chair reste toujours la même. Il vit dans la chair, a une conscience, mais pas une nouvelle volonté. Au contraire, la volonté ne manque pas à l'homme décrit dans le chapitre 7 aux Romains, mais bien la force de faire ce qu'il veut! Il s'agit donc ici de l'état d'une âme qui veut le bien.

Au verset 13, l'apôtre passe à la description de l'effet de la loi sur l'expérience de l'âme qui veut aussi le bien. Le verset précédent reconnaît que la loi est sainte, et que le commandement est saint, juste et bon. La question qui se présente maintenant naturellement est celle-ci: «Ce qui est bon est-il donc devenu pour moi la mort?» Aucunement. Mais le péché a produit la mort par ce qui est bon, — la loi, — afin que le péché fût pleinement manifesté, prît son vrai caractère et devint excessivement pécheur, en ce qu'il s'est servi du bien pour causer la mort. Le mal ne se manifeste pas seulement comme mal en soi et pour soi, mais aussi comme désobéissance, parce qu'il est défendu et que, par la défense, il devient excessivement pécheur. Le péché a une forte volonté dans l'homme, puisqu'il veut faire ce qui est mal, même quand Dieu l'a défendu. Si mon enfant va s'amuser dehors au lieu de faire ses tâches, c'est une mauvaise habitude; mais si je lui défends de sortir, et que cependant il suive sa mauvaise habitude, alors cela devient de plus de la désobéissance. Par le commandement, le péché est devenu excessivement pécheur. Il montre qu'il y a en moi non seulement de mauvais désirs, mais qu'il y a aussi une propre volonté qui fait le mal, malgré la défense de Dieu: on méprise Dieu et sa Parole.

Mais la loi nous apprend davantage; elle nous fait connaître notre faiblesse, même quand nous voulons faire le bien. L'homme converti, mais non affranchi, ne réussit pas à accomplir ce qu'il aimerait à faire; la force lui manque. Il trouve qu'il est charnel, vendu au péché, c'est-à-dire un esclave de celui-ci. Il sait que la loi est spirituelle, mais lui est dans la chair, charnel, sous le joug du péché, auquel il est vendu comme esclave. La conscience est active dans la mesure où il connaît la volonté de Dieu par la loi, et il aperçoit dans la loi, non seulement des préceptes extérieurs, mais aussi quelque chose qui juge les sources du mal dans le coeur. On peut être irrépréhensible au dehors: Saul et bien d'autres l'étaient, mais par là même ils étaient remplis de propre justice. Mais quand la loi défend la convoitise, elle pourrait tout aussi bien nous défendre d'être des hommes. Et c'est pourquoi Dieu a ajouté ce commandement: «Tu ne convoiteras pas».

Il ne s'agit donc point ici de ce que j'ai fait, mais de ce que je suis, et je découvre ainsi qu'en moi il n'y a rien de bon. Je veux faire le bien, mais je ne le fais pas. Je suis sous le joug du péché, dans la chair. Je reconnais que la loi est bonne; je hais le péché, et cependant je le pratique. Mais ce que je hais, cela je ne le suis pas moi-même; moi je le hais. Ainsi, étant enseigné de Dieu, j'apprends à faire une différence entre moi et ce que je fais, comme l'apôtre le dit: «Or, si ce que je ne veux pas, moi, je le pratique, ce n'est plus moi qui l'accomplis, mais c'est le péché qui habite en moi». Toutefois ce n'est point là la liberté; celle-ci demande de la force. Mais c'est cependant un rafraîchissement très réel et important que d'avoir appris, non seulement qu'en moi il n'habite aucun bien, mais aussi à faire la différence entre moi et le péché qui habite en moi. Je prends plaisir à la loi de Dieu selon l'homme intérieur; la conscience est en activité et la volonté mise en ordre. Ce qui manque encore, c'est la puissance, et on ne la possède pas, parce que l'on ne connaît pas clairement la rédemption. Par l'expérience, on n'apprend pas seulement que l'on ne fait pas le bien, mais que l'on ne peut pas le faire: le joug du péché est toujours là. Et c'est justement ce que l'on a à apprendre, savoir que l'on n'a «aucune force» pour faire la volonté de Dieu.

Il y a donc trois vérités dont nous avons parlé jusqu'ici, et qui doivent être apprises par l'expérience:

  1. Dans la chair n'habite aucun bien.
  2. Nous avons à distinguer entre nous-mêmes, qui voulons le bien, et le péché qui habite en nous.
  3. Aussi longtemps que nous ne sommes pas affranchis, il n'y a en nous aucune puissance pour vaincre le péché dans la chair; au contraire, nous sommes vaincus par lui.

Nous ne pouvons donc nous affranchir nous-mêmes; il faut, au contraire, qu'un autre nous affranchisse, et c'est à reconnaître cela, que l'âme doit être amenée. «Qui m'affranchira?» est le cri, provenant de la conscience que nous ne le pouvons pas nous-mêmes. Nous cherchons autour de nous quelqu'un qui le fasse. Voilà ce que nous avions à apprendre, — non pas notre culpabilité, mais notre faiblesse, notre entière impuissance, notre dépendance de Dieu. Toutefois nous avons encore plusieurs choses à considérer.

Celui-là seul peut décrire cette condition, qui s'y est trouvé, mais qui n'y est plus. Un homme qui est tombé dans un bourbier, ne peut pas tranquillement décrire sa situation, aussi longtemps qu'il s'y trouve. Il sent seulement qu'il enfonce et qu'il va périr, de sorte qu'il ne peut faire autre chose que de crier au secours. C'est quand il est sauvé, qu'il peut tout décrire avec calme. Quelqu'un qui ne s'est pas trouvé dans une pareille situation, lui dira peut-être: «Pourquoi n'es-tu pas allé en avant, jusqu'à ce que tu aies trouvé un terrain solide?» «C'est facile à dire», répondra l'autre, «mais quand je soulevais un pied hors du bourbier, l'autre s'enfonçait d'autant plus». Telle est la condition d'âme décrite dans Romains 7, et décrite par un chrétien qui s'y était trouvé lui-même, mais qui en était délivré. Je dis «par un chrétien», car lorsque l'apôtre dit: «nous savons» (verset 14), c'est ce que savent les chrétiens. Mais l'expérience est ce dont a conscience une personne unique. Quand donc il dit: «Je suis», c'est expérience et non doctrine. Tout dans ces expériences décrites est encore absolument légal. La personne dont il est question reconnaît que la loi est juste, et même elle prend plaisir à la loi. La conscience et la volonté sont droites quant aux choses de Dieu, mais toutes deux ont la loi pour objet et pour mesure. Il n'y a pas un mot de Christ, ni de l'Esprit; la loi est l'unique objet de l'âme, Mais au verset 25, nous voyons que la vraie délivrance est atteinte, et le chrétien affranchi rend grâces à Dieu. Il est vrai que le combat continue toujours; nous trouvons cela en Galates 5: 16-18. Mais, dans ce dernier passage, il est dit que la chair convoite contre l'Esprit et l'Esprit contre la chair, Mais si nous sommes conduits par l'Esprit, nous ne sommes pas sous la loi, c'est-à-dire dans l'état décrit au chapitre 7 des Romains.

Chapitre 8

La délivrance dont nous avons parlé est dans le rapport le plus étroit avec la rédemption, non point tant à l'égard du pardon qu'à l'égard de notre mort avec Christ. Nous avons déjà vu qu'il y a dans la rédemption deux points principaux: premièrement, le pardon des péchés ou la justification, et ensuite la délivrance, c'est-à-dire liberté devant Dieu et affranchissement du joug du péché dans la chair. Or, si nous sommes morts avec Christ, nous sommes morts au péché, et nous ne sommes plus dans la chair devant Dieu. La vie dans la chair n'est plus notre condition, puisque Christ, après avoir été mort, est devenu notre vie. Le péché dans la chair est jugé, condamné, — non pardonné, — et cela dans la mort de Christ sur la croix. La puissance de la vie de Christ est en moi, elle est ma vie. Mais ce n'est pas cela seulement. Le péché dans la chair qui faisait mon tourment, a déjà été condamné, mais dans un autre, de sorte qu'il n'y a plus pour moi de condamnation à cause de la chair. La mort est intervenue là où cette condamnation — le jugement de la chair — a été exercée, et ceux qui sont dans le Christ Jésus, sont morts avec lui, de sorte que pour eux il n'y a plus de condamnation. Ce qu'il a subi, nous l'avons subi; il est mort au péché, et la condamnation est passée. Telle est notre condition relativement au péché dans la chair. Si la première partie de l'épître nous montre avec la plus grande clarté comment les péchés sont ôtés, nous trouvons ici non moins clairement comment sont mis de côté le péché dans la chair et la condamnation; oui, pour la foi, la chair elle-même est mise de côté, puisque nous sommes morts.

Cette condition est décrite dans les trois premiers versets du chapitre 8. Le chrétien se trouve dans une position toute nouvelle: il est en Christ. La grâce de Dieu ne s'est pas seulement révélée en ce que les péchés du vieil homme sont pardonnés, mais sa position aussi est toute nouvelle: nous sommes délivrés. L'apôtre ne dit pas: «Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux dont les péchés sont pardonnés;» mais: «pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Cette position est le résultat de l'oeuvre de Christ, de la rédemption. Le chrétien est affranchi avec Christ de la position dans la chair, parce qu'il est mort avec lui et qu'il participe à la vie de Christ ressuscité et glorifié. Ainsi il n'est plus devant Dieu comme un enfant d'Adam responsable dans la chair, mais il est comme quelqu'un qui a réellement quitté cette position par la mort, et qui est vivant en Christ. La chair est envisagée comme morte, comme condamnée, comme n'étant plus présente, mais comme engloutie dans la mort de Christ. Le chrétien est vivant en Christ: il n'est plus dans la chair (comparez Galates 2: 19, 20).

L'expression: «la loi de l'Esprit de vie dans le Christ Jésus, etc.», qui se trouve dans le second verset, peut paraître étrange à plus d'un lecteur. Je pense qu'il faut entendre par là que l'Esprit de vie dans le Christ Jésus opère constamment et sans interruption d'après un seul et même principe, afin que la chair soit morte dans le croyant, puisqu'elle a été condamnée dans un autre. Le croyant est en Christ par la vie de Christ et par le Saint Esprit; comment pourrai-t-il y avoir encore condamnation? Dieu s'est déjà occupé à la croix du péché dans la chair et en a, pour ainsi dire, fini avec lui. La nouvelle vie et le Saint Esprit donnent au croyant, rendu vivant, sa place en Christ; il est délivré et, devant Dieu, il est vivant en Christ. Il ne s'agit pas ici, comme on l'a déjà dit, du pardon des péchés du vieil homme, mais d'une nouvelle et vivante position en Christ. C'est là ce qui est exposé dans les trois premiers versets du 8e chapitre.

Après que le 7e a décrit, comme des faits réels, l'expérience de l'homme dans la première position, aussi bien que l'affranchissement par la rédemption en Christ, et la persistance des deux natures, les trois premiers versets du chapitre suivant présentent la nouvelle position en Christ, en contraste avec la position dans la chair, ou dans le premier Adam. Au premier verset, point de condamnation; au second, la puissance de la vie; au troisième, le jugement du péché dans la chair exécuté sur Christ à la croix. Ce qui caractérise le second verset, c'est la vie en Christ selon la puissance du Saint Esprit, et cela comme un principe agissant sans interruption. Le troisième verset est caractérisé par le jugement du péché dans la chair en Christ, offert comme sacrifice pour le péché. Le péché, il est vrai, est encore là, et si nous ne sommes pas fidèles, si, pratiquement, nous ne portons pas avec nous la mort du Seigneur Jésus, alors il agit en nous; nous perdons la communion avec Dieu et déshonorons le Seigneur par notre marche, en ne nous conduisant pas selon l'Esprit de vie, d'une manière digne du Seigneur. Mais nous ne sommes plus sous la loi du péché, mais, étant morts avec Christ et rendus participants d'une nouvelle vie en lui et du Saint Esprit, nous sommes affranchis de cette loi. Nous nous trouvons dans une nouvelle position, nous sommes devant Dieu dans le second Adam, et la marche conforme à notre nature est selon l'Esprit, non selon la chair. Ainsi la loi de Dieu et sa juste exigence sont accomplies en nous. Il ne suit pas de là que l'on veuille la loi. La loi n'est pas la mesure de la marche chrétienne; il est seulement dit qu'elle est accomplie par celui qui marche selon l'Esprit. Je ne pouvais pas l'accomplir, lorsque j'étais dans la chair, parce que la chair ne se soumet pas à la loi de Dieu et qu'aussi elle ne le peut, mais qu'elle ne suit que sa propre volonté. Mais l'Esprit assurément ne nous conduira pas dans ce qui est contraire à la loi de Dieu. La loi est accomplie pratiquement, tandis que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la direction de l'Esprit. Nous sommes sous l'influence de l'Esprit, et il ne s'agit pas d'une loi en dehors de nous, mais d'une nature en nous, nature qui possède l'objet qui lui convient. Ceux qui vivent selon l'Esprit, conformément au nouvel homme, désirent les choses qui sont de l'Esprit; mais ceux qui sont selon la chair, ont leurs pensées aux objets de leurs convoitises charnelles. Il ne s'agit pas d'une loi imposée, mais de nouveaux sentiments, sentiments d'une nature née de l'Esprit et qui cherche ce qui est spirituel; — c'est une sainte liberté, tandis que l'homme, comme mort avec Christ, est affranchi du joug du péché, possède une nouvelle nature née de Dieu, a de saints objets sous les yeux, et est la demeure du Saint Esprit, qui produit dans le coeur de saintes pensées et révèle les choses qui sont en haut. La pensée de la chair est la mort de l'âme, ne produit aucun fruit, et sépare l'âme de Dieu, maintenant et pour l'éternité. Mais la pensée de l'Esprit est vie; c'est en nous une fontaine qui jaillit en vie éternelle et remplit l'âme de paix. La pensée de la chair se révolte contre l'autorité de Dieu. En manifestant l'activité de l'homme naturel, elle a affaire avec la loi qui est l'expression de cette autorité de Dieu sur l'homme et la règle de la responsabilité de celui-ci comme créature de Dieu. Mais elle ne se soumet pas à la loi et aussi elle ne le peut, parce que la propre volonté veut suivre son propre chemin; aussi n'aime-t-elle absolument pas ce qui plaît à Dieu. Et c'est pourquoi ceux qui sont dans la chair, qui se trouvent devant Dieu dans la position du premier Adam et marchent selon sa vie, ne peuvent plaire à Dieu.

Nous trouvons, au verset 9, un principe très important. Quand est-ce qu'un homme peut dire: Je ne suis pas dans la chair? Réponse: Quand le Saint Esprit habite en lui. Quelqu'un peut être converti et se trouver encore dans la condition décrite dans le 7e chapitre. Nous en avons un exemple dans le fils prodigue, avant qu'il eût rencontré son père. Il était converti et dans le bon chemin, et cependant il ne voulait être qu'un mercenaire de son père. Mais aussitôt qu'il se fut rencontré avec son père, nous n'entendons plus rien de cela; nous avons seulement ce que son père était et ce qu'il fit pour lui. L'affranchissement a lieu par la connaissance personnelle de ce qu'est le Père révélé en Jésus Christ, par la connaissance de la rédemption. Or cela ne se trouve que dans une âme en qui le Saint Esprit habite. Un homme converti n'est dans la position chrétienne que lorsqu'il a été oint. Le fils perdu avait de la conscience et du coeur quand, atteint par la grâce et bien dirigé, il était en chemin vers la maison paternelle, mais il n'était pas revêtu de la plus belle robe et ne connaissait pas encore le coeur de son père. Il n'entra dans la position chrétienne qu'après avoir rencontré son père, et dès cet instant nous n'entendons plus rien de lui, mais de ce que dit et fait le père. Avant cela, il n'était pas dans une condition qui convînt à la maison.

Nous avons, au verset 10, une autre face des relations chrétiennes. Au commencement du chapitre, on lit: «qui sont dans le Christ Jésus;» ici: «si Christ est en vous». Ainsi, d'un côté, le chrétien est «en Christ», et, d'un autre, «Christ est en lui». En Christ, nous nous trouvons devant Dieu selon toute la perfection de ce qu'il est; Christ en nous est le fondement et la mesure de notre responsabilité, en même temps qu'il est la source de notre force, d'après ce qui a été dit au commencement de ce chapitre. Un chrétien est un homme qui n'est pas seulement né de nouveau, — ce qui est absolument nécessaire, — mais en qui aussi le Saint Esprit demeure. Celui-ci dirige le regard du croyant sur l'oeuvre de Christ et lui en fait apprécier la valeur. Il lui donne la conscience que lui, le croyant, est en Christ et que Christ est en lui (Jean 14: 20), et il remplit son coeur de l'espérance de la gloire, avec l'assurance qu'il sera semblable à Christ et près de lui pour jamais. Quand l'homme converti sait que ses péchés sont pardonnés, quand il peut crier: «Abba, Père!» quand il a la conscience que, pour lui, il n'y a plus de condamnation, il est affranchi; il est en liberté devant Dieu, et est affranchi de la loi du péché et de la mort. Mais il n'est un chrétien accompli, parfait, que lorsqu'il comprend, par le Saint Esprit, qu'il est entré dans la position de Christ, que Dieu est son Père et son Dieu, comme il est le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, — quand il comprend qu'il a passé de la position d'Adam dans la position de Christ, qu'il est mort avec Christ, et ainsi que ce n'est plus lui qui vit, mais Christ en lui (Galates 2: 20).

Cette liberté est présentée et développée très clairement dans l'épître aux Romains, mais seulement en tant que le croyant y est envisagé comme étant mort avec Christ et possédant Christ pour sa vie; par là il est affranchi de la loi du péché et de la mort, aussi bien que de la loi mosaïque, parce que celle-ci n'a de pouvoir sur quelqu'un qu'aussi longtemps qu'il vit et qu'elle ne peut aller plus loin. L'épître ne traite donc pas des conseils de Dieu et de la gloire de notre nouvelle position. Il est vrai que les versets 29 et 30 de notre chapitre présentent un point d'attache pour cette doctrine, mais en général l'épître s'occupe de la responsabilité de l'homme, de ce que Dieu a fait pour nous purifier de notre culpabilité et nous justifier, et en même temps elle nous apprend comment, par notre mort avec Christ, nous sommes affranchis de la loi du péché et de la mort. Les deux versets indiqués nous ouvrent un horizon plus étendu, toutefois la nouvelle position n'est pas développée avec plus de détails. L'épître ne va pas au delà de la vérité que nous sommes faits vivants par Christ: elle ne parle pas de notre résurrection avec lui. Ceci — point de départ de notre nouvelle position — doit être cherché dans l'épître aux Colossiens.

Celle aux Ephésiens développe encore plus cette doctrine, toutefois c'est à un autre point de vue. Là nous n'apprenons pas qu'un enfant d'Adam doit mourir et ressusciter, que le croyant est mort, bien qu'il soit représenté comme ressuscité avec Christ. L'homme inconverti est envisagé, dans les Ephésiens, comme mort dans les péchés, et tout est une nouvelle création. Nous trouvons là tous les conseils de Dieu, aussi bien par rapport aux croyants ressuscités avec Christ, qu'à Christ lui-même, aux enfants de Dieu et à notre unité avec Christ comme étant son corps.

Il sera bon de remarquer que, tandis que les trois premiers versets du 8e chapitre posent les principes de l'affranchissement, les huit suivants en décrivent le caractère pratique et le résultat. Le Saint Esprit agit dans la nouvelle vie, au lieu de présenter à l'homme une loi en dehors de lui, et à laquelle la chair oppose une résistance invincible. L'Esprit fournit à la nouvelle vie des objets célestes dans lesquels elle trouve sa joie et sa nourriture. «La pensée de l'Esprit est vie et paix». Tout cela dépend de l'habitation du Saint Esprit en nous. «Si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, celui-là n'est pas de lui». Nous avons déjà vu que la condition d'une telle personne est semblable à celle du fils prodigue, avant d'avoir rencontré son père. Mais si, au contraire, l'Esprit de Christ habite dans celui qui est converti, alors pour lui le corps est mort à cause du péché, mais l'Esprit est vie à cause de la justice. Quand le corps vit en vertu de sa propre vie, il ne produit rien que péché; mais, d'après le chapitre 6, l'homme spirituel le tient pour mort.

L'Esprit ne peut pas être séparé de la nouvelle vie. Il est la source de la vie et la caractérise. Puis donc que l'Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus, habite en nous, celui qui a ressuscité le Christ d'entre les morts, vivifiera aussi nos corps mortels, à cause de son Esprit qui habite en nous. Telle est la fin bénie de la vie de l'Esprit dans le Christ Jésus, ou plutôt c'en est le commencement dans sa vraie plénitude. L'Esprit est l'Esprit de Dieu. Dieu a ressuscité Jésus, la personne humaine; Jésus est son nom personnel. Mais ce n'est pas pour lui-même qu'il gisait parmi les morts; Christ est son nom, comme étant venu pour d'autres. Si donc l'Esprit de Dieu habite en nous, Celui qui l'a ressuscité, lui le premier-né, ressuscitera aussi les brebis rachetées.

Trois noms sont ici attribués au Saint Esprit; l'Esprit de Dieu (verset 9), en contraste avec la chair; l'Esprit de Christ, comme la puissance qui produit le nouvel homme; et l'Esprit de Celui qui a ressuscité Christ d'entre les morts, parce qu'il est en nous le gage de notre résurrection.

Le but glorieux de la grâce qui affranchit, est atteint. Les circonstances qui nous entourent, demeurent sans doute les mêmes; et c'est notre position devant Dieu en relation avec ces circonstances qui est présentée dans les versets suivants.

(Verset 12). «Ainsi donc, frères, nous sommes débiteurs, non pas à la chair, pour vivre selon la chair». La chair nous a amenés dans une fâcheuse condition et dans une mauvaise position; aussi ne sommes-nous plus dans la chair, mais nous en sommes affranchis par la rédemption. Par la mort du Rédempteur, nous avons été amenés dans une nouvelle position, de laquelle nous avons aussi la conscience par la puissance de l'Esprit Saint qui habite en nous. Les deux vies, les deux principes, sont en complète opposition l'un avec l'autre, et il est important de remarquer (ce qui a déjà été posé comme principe dans le chapitre 2) que là où ces deux natures agissent, elles produisent leurs conséquences naturelles. Je puis vaincre la chair par l'Esprit. J'ai le droit et le devoir de la tenir pour morte. Mais quand la chair vit, elle produit la mort; si je vis selon la chair, la mort est mon lot. La nature et l'action de cette nature — ses conséquences — sont toujours les mêmes: Dieu peut me donner une nouvelle nature, et — béni soit son nom! — il me la donne en Christ, de manière que par elle j'ai part au salut, et que, par la puissance du Saint Esprit, je puis vaincre la vieille nature et marcher selon l'Esprit. Mais la nature de la chair n'est pas changée, non plus que les conséquences de son action en elles-mêmes; si je vis selon la chair, je dois mourir. La grâce me sauve, me donne une nouvelle vie, dans laquelle je marche selon l'Esprit et tiens la chair pour morte; la grâce me donne enfin la gloire. Mais cette nouvelle vie ne vit pas selon la chair, et elle ne le peut pas. Si je vis selon la chair, je meurs, éloigné de Dieu; car le fruit et le salaire de la vie de la chair, c'est la mort. Mais si, par l'Esprit, je fais mourir les actions du corps, je vis et je vivrai pour toujours avec Dieu, duquel cette vie découle dans mon âme, vie dont l'Esprit est la force et le guide.

Cela donne occasion à l'apôtre de parler de la position de ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu, et d'abord de leur relation avec Dieu. L'Esprit qu'ils ont reçu, est l'Esprit d'adoption; ils le possèdent, parce qu'ils sont enfants. De cette relation résultent des bénédictions étendues. Etant enfants, ils sont aussi héritiers — héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ. Cependant la condition des créatures qui nous entourent ici-bas, et en particulier celle de notre corps, n'est pas encore restaurée. La pensée de la chair est inimitié contre Dieu, et de la même manière l'amitié du monde est aussi inimitié contre lui. Les principes de la chair, comme ceux du monde, nous font opposition; tous deux sont sous la servitude de la corruption. Le monde, que nous avons à traverser, étant éloigné de Dieu et sous la domination de Satan, nous fournit de nombreuses sources de peine et de douleurs. Le Seigneur Jésus, dans ce monde, était «un homme de douleurs et sachant ce que c'est que la langueur». Un monde de péché, en face de sa sainteté, un monde de peine et de douleurs, en face de son amour, ne pouvait être pour son coeur autre chose qu'une source de peine et de douleurs. Il se trouvait isolé, seul dans un tel monde, et n'était pas même compris par ses disciples, Tandis que lui était rempli de sympathie envers tous, il n'en trouvait nulle part pour lui-même. Si, par extraordinaire, une fois, quelque sympathie perçait l'obscurité du coeur de l'homme, c'était quelque chose de si étonnant que le Seigneur disait: «En quelque lieu que cet évangile soit prêché dans le monde entier, ce que cette femme a fait sera aussi publié en mémoire d'elle» (Marc 14: 9). Pouvons-nous, lorsque nous avons l'Esprit de Christ, traverser le même monde, sans sentir sa condition? Nos coeurs ne seraient-ils pas attristés, quand partout nous voyons la domination du péché, et que journellement nous avons sous les yeux les souffrances des hommes pécheurs? quand nous voyons que tout est sous la servitude de la corruption? Le temps viendra où nos yeux contempleront la bénédiction universelle du monde et où nous nous en réjouirons avec Dieu lui-même. Mais maintenant, renouvelés dans notre coeur et affranchis, nous ne pouvons que souffrir au milieu d'une création qui est sous la servitude.

Mais remarquons que c'est souffrir avec Christ et non pour lui. Souffrir pour Christ est un privilège, un don spécial de Dieu (Philippiens 1: 29). On ne peut pas être chrétien, sans souffrir avec Christ. En effet, comment l'Esprit de Christ pourrait-il produire en nous une pensée différente de celle qui était en Christ, lorsqu'il traversait ce pauvre monde? La gloire des enfants de Dieu est un objet d'espérance; maintenant les souffrances de Christ, en infirmité, se produisent de nouveau dans un coeur dans lequel Christ habite. Nous souffrons là où Christ a souffert, comme cohéritiers du royaume de l'amour, où tout sera joie et délices. Bien que déjà maintenant nous soyons enfants, ou plutôt fils et, par conséquent, héritiers, nous ne possédons pas encore l'héritage, nous ne pouvons pas même encore le posséder, puisqu'il n'est pas encore affranchi de la corruption et de la souillure, et que, dans cette condition, il ne saurait nous convenir. Christ est assis à la droite de Dieu, jusqu'à ce que ses ennemis soient mis pour marchepied de ses pieds. Alors nous régnerons avec lui et nous lui serons semblables.

A cause de cela l'apôtre, qui savait bien ce que sont les souffrances, pouvait dire: «J'estime que les souffrances du temps présent ne sont pas dignes d'être comparées avec la gloire à venir qui doit nous être révélée». Nous sommes dans la relation d'adoption, nous en avons aussi la conscience et, par conséquent, nous n'avons plus aucune crainte. Là où se trouve la crainte, n'existe point dans le coeur la connaissance de cette position. L'Esprit, crie en nous: «Abba, Père!» et ne peut crier autre chose, car il est venu seulement après qu'eut été accompli tout ce qui nous a placé dans cette relation. Christ nous a donné sa propre position devant Dieu. Après avoir accompli tout ce qui était exigible, aussi bien pour la gloire de Dieu que pour notre salut, et l'avoir fait là où c'était nécessaire dans les deux cas, c'est-à-dire dans la place même du péché, — «il a été fait péché», — après cela, dis-je, comme homme, il est monté au ciel. En lui, un homme est entré dans la gloire de Dieu, au delà du péché, de la mort, de la puissance de Satan et du jugement de Dieu sur le péché, de sorte qu'il a pu envoyer à ses disciples, par Marie de Magdala, ce message: «Va vers mes frères et leur dis: Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu». Ensuite il envoya le Saint Esprit comme conséquence bénie de l'ascension de l'homme dans le ciel, après avoir tout accompli pour notre rédemption. Cet Esprit habite dans les croyants qui se fondent sur la valeur de son sang, de sorte que leur corps est un temple de Dieu (1 Corinthiens 6). Ils sont scellés du Saint Esprit et ont les arrhes de l'héritage, la conscience qu'ils sont enfants de Dieu L'Esprit Saint présente Christ qui est dans le ciel et nous fait jouir des choses invisibles. Il ne peut donc absolument pas être un esprit de crainte ou de servitude.

Mais l'Esprit opère en nous de deux manières: il nous fait apprécier la gloire qui est devant nous, et nous donne le sentiment que les souffrances à travers lesquelles nous passons, en nous efforçant d'atteindre cette gloire et en étant fidèles à Christ, ne sont pas dignes d'être comparées à la gloire qui nous sera révélée, de sorte que nous pouvons poursuivre le chemin de Dieu avec persévérance et courage. De même, il nous vient aussi en aide dans notre faiblesse, afin que nous prenions part selon Dieu à ces souffrances, et que par l'Esprit notre coeur soit le vase de la sympathie répondant au coeur de Christ, tandis que par nos soupirs nous donnons expression aux soupirs que fait monter vers Dieu la création souffrante. Quelle précieuse position de pouvoir ainsi réaliser la gloire et l'amour de Celui qui vint ici-bas au milieu de la création souffrante, de sorte que, tandis que, par notre corps, nous participons encore à la création déchue, nos coeurs, par l'Esprit, sont l'organe de toute la création et peuvent exprimer selon Dieu les soupirs qu'elle fait monter à Dieu! C'est de ce sentiment qu'était rempli en amour parfait et accompli le coeur de Christ. Tout en étant vrai homme, il était dans sa personne absolument libre du péché qui avait amené ces souffrances dans la création, et c'est pour cela que sa sympathie pour nous à cause des suites du péché était d'autant plus parfaite. «Il a porté nos langueurs, et s'est chargé de nos douleurs» (comparez Matthieu 8: 17). Au tombeau de Lazare, en voyant pleurer Marie et tous les Juifs, il frémit en son esprit et se troubla (*). Ainsi, bien que, comme hommes déchus, nous soyons dans la faiblesse et l'imperfection, il nous est aussi donné, par l'Esprit qui habite en nous, de prendre part aux souffrances de la création, non pas avec l'impatience de l'égoïsme, parce que nous-mêmes nous souffrons, mais selon Dieu. L'exposition que fait l'apôtre de la condition où se trouve la création qui nous entoure, rendra cette expérience plus claire. Bien que nous en ayons considéré quelques points dans ce qui précède, nous pouvons cependant recommencer encore une fois au verset 19.

(*) Les deux mots grecs du texte, employés ici, sont des expressions très fortes pour indiquer un mouvement intérieur.

Nous avons dit que nous avions à souffrir dans le monde, parce que tout y est dans le péché et dans le désordre, tandis que nous avons été ramenés à Dieu; et de plus que nous avons aussi à souffrir dans le coeur, parce que nous demeurons au milieu d'une création qui n'est pas affranchie. Mais le regard de la foi est tourné vers la gloire qui est placée devant nous, et cette perspective réjouissante, ainsi que notre communion avec Dieu, de laquelle nous jouissons déjà ici-bas, nous fait sentir que tout, autour de nous, est irréconcilié.

Cette création attend sa délivrance, mais elle ne peut pas être affranchie et restaurée, avant que les enfants de Dieu, dans la gloire du règne, soient prêts à la posséder comme cohéritiers de Christ. Christ reste assis à la droite de Dieu, jusqu'à ce que ces cohéritiers soient rassemblés. Quelle précieuse pensée que celle-ci: de même que nous avons amené la création terrestre sous la servitude de la corruption, ainsi maintenant elle doit attendre notre glorification, afin d'être restaurée et affranchie de cette servitude (verset 19).

Ce n'est pas de sa volonté que la création a été assujettie à la servitude; c'est nous qui l'avons fait. Mais il y a l'espérance; car cette condition ne durera pas toujours; la création sera restaurée. Toutefois Dieu, dans les conseils de sa grâce, commence avec les coupables, avec ceux qui sont les plus éloignés, avec ceux envers lesquels il veut, dans les siècles à venir, montrer les immenses richesses de sa grâce dans le Christ Jésus (Ephésiens 2: 7; comparez avec Colossiens 1: 20, 21). La création, chose physique, ne pouvait pas entrer dans la liberté de la grâce; elle doit attendre la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Lorsque ceux-ci auront été délivrés, et que leurs corps, qui appartiennent à la création, auront été changés et glorifiés, et quand Satan sera lié, alors la création aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, dans laquelle elle se trouve captive.

Car nous savons — nous qui sommes instruits dans la doctrine chrétienne — que toute la création ensemble soupire et est en travail jusqu'à maintenant. Nous le savons encore bien plus, parce que nous avons les prémices de l'Esprit, et «nous soupirons en nous-mêmes, attendant l'adoption, la délivrance de notre corps». Nous attendons donc avec patience de posséder ce qui est sauvé en espérance; non seulement de posséder la vie éternelle, comme vie, — cela nous l'avons déjà, — mais d'être glorifiés, lorsque notre corps, qui appartient à la création (*), sera changé, et que nous serons transformés à la ressemblance de Christ le Seigneur, selon la puissance qu'il a de s'assujettir toutes choses (Philippiens 3: 21).

(*) Il s'agit toujours ici de la création physique. (Note du Traducteur)

Ainsi la paix est faite, nos péchés sont ôtés, nous avons une nouvelle vie, nous possédons les arrhes de l'Esprit, la gloire est devant nous en espérance, et nous serons semblables au Seigneur. Mais aussi longtemps que nous n'avons pas atteint cette gloire, nous soupirons avec la création. Car, tout en réalisant notre glorieuse espérance, nous sentons la triste condition de toute la création déchue avec laquelle nous sommes liés par notre corps. Libres devant Dieu, affranchis de la loi du péché et de la mort, remplis de l'espérance de la gloire, nous sommes amenés, par la connaissance de cette gloire et du parfait affranchissement de la création, à pousser des soupirs, qui sont la voix des soupirs de la création vers Dieu. Mais nos soupirs ne sont pas une plainte, fruit du mécontentement, mais l'opération du Saint Esprit dans le coeur. Cet Esprit dirige nos regards vers la gloire où nous n'aurons plus occasion de soupirer, et, selon l'amour de Dieu, il nous fait sentir la douleur d'une création asservie; nous sentons avec elle, parce que, par notre corps, nous y appartenons encore. L'Esprit de Dieu qui habite en nous, forme ces sentiments selon Dieu. Dieu sonde le coeur de l'homme, et dans le coeur du chrétien affranchi, il trouve cette opération de l'Esprit. L'Esprit lui-même est là, source de la sympathie divine avec une création qui soupire (verset 27). Les regards du chrétien sont dirigés, par le Saint Esprit qui demeure en lui, en haut, vers la gloire et le repos de Dieu, où tout est bénédiction. Il réalise avec joie ce qui est devant lui. Mais comme il est encore dans le corps, il sent d'autant plus la condition de la création déchue, il prend part à ses soupirs, et par là devient devant Dieu la voix de la création qui soupire. Cependant il soupire dans l'esprit d'amour, selon Dieu, puisque, quant à lui, il est parfaitement libre dans ses rapports avec Dieu. Par rapport à sa condition, il est sauvé en espérance, mais devant Dieu, dans la conscience de son amour, son coeur est libre. Il peut se réjouir dans l'espérance, l'espérance de la gloire; il a une conscience parfaite; l'amour de Dieu est versé dans son coeur par le Saint Esprit. Et ainsi, selon cet amour, il peut sympathiser avec la misère universelle qui l'entoure. Il ignore, il est vrai, quel remède il doit demander dans ses prières, peut-être n'y en a-t-il aucun? Mais l'amour peut exprimer les besoins, et il le fait selon l'opération de l'Esprit, et bien que le chrétien ne sache pas ce qu'il doit demander, Celui qui sonde les coeurs trouve dans ses soupirs la pensée de l'Esprit, car c'est l'Esprit qui, dans le fond du coeur, donne expression au sentiment des besoins. Il y a d'autant plus de sympathie, que nous-mêmes sommes encore dans le corps, et qu'ainsi dans notre propre condition nous faisons partie de la création qui soupire, et que nous attendons la rédemption de nos corps.

Mais, bien que souvent nous ne sachions pas ce qu'il nous faut demander, il y a une chose que nous savons parfaitement, c'est que Dieu fait travailler toutes choses ensemble pour le bien de ceux qui l'aiment, de ceux qu'il a appelés selon son propos arrêté.

De quel privilège nous sommes devenus participants par la grâce, privilège dont nous jouissons par le Saint Esprit! Nous sommes enfants de Dieu, nous connaissons notre relation avec Dieu, et nous pouvons la réaliser par le Saint Esprit; nous crions: «Abba, Père!» nous sommes enfants et par conséquent héritiers, «héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ». L'Esprit nous révèle notre héritage, et nous fait comprendre ce qu'il est: nous serons semblables à Christ dans le repos de Dieu et dans son propre repos, rendus parfaits, à la gloire de Christ, et nous régnerons avec lui sur toutes choses. Comme hommes sur la terre, nous élevons nos regards vers la gloire de Dieu qui est notre espérance, et à laquelle nous aurons part avec Christ, là où tout est pur, selon la pureté de Dieu. Par rapport au monde d'ici-bas, nos coeurs sont remplis de l'amour de Dieu, dans lequel nous prenons part aux souffrances d'une création non affranchie, et cela, selon Dieu, de sorte que Celui qui sonde les coeurs, y trouve la pensée de l'Esprit qui produit en nous cette sympathie pour les souffrances d'une création déchue, afin que, par nos soupirs, nous devenions la bouche de la création devant Dieu. Et comme, par manque de connaissance, nous ne savons pas toujours ce que nous avons à demander, la parole de Dieu nous console en nous assurant que Dieu, selon sa propre volonté et son amour, fait travailler ensemble toutes choses pour notre bien.

Cela conduit l'apôtre à dire quelques mots des conseils de Dieu, bien que ce ne soit pas le sujet de l'épître. Il n'en parle que pour indiquer le fondement de toutes les bénédictions. A part cela, l'épître, ainsi que nous l'avons déjà fait observer, traite de la responsabilité de l'homme, en même temps que de la grâce et de l'oeuvre de Dieu pour nous sauver des conséquences de cette responsabilité.

Dieu agit toujours en faveur de ceux qui sont appelés, car il les a préconnus; et ceux qu'il a préconnus, il les a prédestinés à être conformes à l'image de son Fils. «Et ceux qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés; et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés; et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés». Tout est grâce, et par conséquent, tout est sûr. C'est pourquoi aussi Dieu ne termine pas la série des manifestations de sa grâce avant que le but ne soit atteint; l'activité de la grâce de Dieu ne cesse pas avant que ceux qui sont appelés soient glorifiés. Toute la doctrine de l'évangile nous ramène à Dieu et à ses pensées, qui ne peuvent ni manquer ni être entravées.

Et ainsi nous trouvons que Dieu est pour nous. Que son Nom en soit loué. C'est dans les versets 31 à 39, que l'apôtre développe cette doctrine. Nous voyons la preuve que Dieu est pour nous, premièrement en ce qu'il donne, ensuite en ce qu'il nous justifie, et enfin en ce que rien ne peut nous séparer de son amour. «Dieu est pour nous», telle est la précieuse conclusion de la doctrine de toute l'épître; c'est la source de la bénédiction; c'est la conclusion que tire le coeur de tout ce qui nous est ici révélé de Lui. Non seulement la justice de Dieu a été glorifiée et satisfaite par l'oeuvre de Christ, mais nous voyons aussi que l'amour de Dieu est la source de tout, et cela change toutes nos pensées quant à Dieu. C'est juste sur ce point qu'était en défaut la doctrine des réformateurs du XVIe siècle. Loin de moi la pensée de déprécier la valeur de ces hommes! Personne ne saurait être plus reconnaissant que moi pour l'affranchissement de la superstition que nous devons à la Réformation; personne plus que moi ne peut apprécier la foi de ceux qui ont sacrifié même leur vie pour l'amour de la vérité. Je ne pourrais pas à cette heure écrire tranquillement sur ce qui a manqué à leur enseignement, s'ils n'avaient pas joyeusement laissé leur vie pour le maintien de la vérité. Mais la vérité demeure toujours la même dans la parole de Dieu. Les réformateurs enseignaient, il est vrai, que Christ avait fait tout ce qu'il fallait pour satisfaire la justice de Dieu, mais non pas que l'amour de Dieu avait donné l'Agneau, son propre Fils, pour accomplir l'oeuvre. Selon eux, Dieu était toujours le juge, réconcilié, à la vérité, avec nous par l'oeuvre de Christ, mais non pas connu comme Celui qui nous a aimés, alors que nous étions encore pécheurs. En Jean 3: 14, le Seigneur dit: «Il faut que le Fils de l'homme soit élevé», car Dieu est saint et juste. Puis vient, au verset 16, la cause de tout: «Car Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique». La conséquence pratique de la doctrine des réformateurs était, sans que peut-être ils s'en rendissent compte, que l'amour était en Christ, et que Dieu était assis sur son tribunal comme un Juge austère. Mais «la grâce règne par la justice» (Romains 5: 21). Au jour du jugement, la justice régnera. L'amour a fermement établi en Christ la justice de Dieu en notre faveur. La justice était nécessaire — l'amour y a pourvu.

Ainsi, nous savons que Dieu est pour nous selon son amour infini et selon sa justice éternelle et immuable. La première preuve en est qu'il n'a pas épargné son propre Fils, mais qu'il l'a livré pour nous: «Comment ne nous fera-t-il pas don aussi, librement, de toutes choses avec lui?» Oui, nous pouvons compter sur lui; il nous donnera tout ce qui est bon. Mais comment Lui, le Saint, peut-il être pour nous, à la vue de tous nos péchés? C'est en cela justement que nous voyons combien il est entièrement pour nous; car il a donné son Fils même pour nos péchés. Qui intentera accusation contre des élus de Dieu? Dieu lui-même nous justifie — qui nous condamnera? Remarquons que tout ici est attribué à Dieu. Il n'est pas dit: Nous sommes justifiés devant Dieu; mais bien: «Dieu justifie», de sorte que l'apôtre peut bien s'écrier: «Qui est celui qui condamne?» quel qu'il puisse être.

Il change ensuite quelque peu la forme de la phrase. Il faut qu'il pense à Christ, et par lui il voit aussi disparaître toutes les difficultés du chemin. Non pas comme si elles n'étaient point présentes; elles sont là, mais elles s'évanouissent parce que Christ lui-même les a toutes traversées. Devenu homme dans son amour, il a enduré toutes les épreuves du chemin, toutes les douleurs humaines, tout ce par quoi l'ennemi s'oppose au fidèle serviteur de Dieu dans le sentier de la sainteté, oui, tout jusqu'à la mort. Ainsi non seulement nous sommes vainqueurs par sa force toute puissante, mais nous faisons d'une manière particulière l'expérience de son amour. Les souffrances sont les gages d'une gloire meilleure. Et puisque comme homme il a tout enduré, il nous a montré par là son amour infini comme Dieu, et nous savons que rien ne peut nous séparer de l'amour de Dieu, qui est dans le Christ Jésus, notre Seigneur.

Sous tous les rapports, Dieu est pour nous. Précieuse vérité! Il a donné son propre Fils — il donnera toutes choses. Lui-même nous justifie, qui est celui qui condamne? Et de cet amour ainsi manifesté, rien ne peut nous séparer. Tout ce qui est contre nous, dans le chemin de la gloire, ne peut, comme étant des créatures, être plus grand que lui qui est le Seigneur de tout. Dieu est pour nous en Christ, en Celui qui a tout vaincu. Le chemin qu'il a parcouru comme homme pour pouvoir souffrir, et comme Dieu afin de pouvoir révéler l'amour dans les souffrances, est non seulement la preuve de son amour, mais tandis que nous le suivons dans ce chemin, nous faisons aussi l'expérience de son amour. Rien ne peut nous en séparer.

Chapitre 9

La doctrine de l'épître se termine avec le chapitre 8. Les deux questions principales qui se rapportent à l'homme pécheur, savoir: sa culpabilité et son état, ou bien, ce qu'il a fait et ce qu'il est, — ont été traitées complètement. Christ est mort pour nos péchés, de sorte que nous (les croyants) sommes justifiés, et nous sommes morts avec Christ, afin d'être affranchis de la puissance du péché et de la chair. Toutes les actions de la chair nous sont pardonnées, et nous ne sommes plus dans la chair mais en Christ. C'est pourquoi il n'y a plus pour nous de condamnation, ni de séparation d'avec Dieu.

Mais cette doctrine, complète en elle-même, laissait encore sans réponse une question difficile, celle qui se rapporte à la condition des Juifs. L'apôtre avait pleinement démontré que le Juif est coupable, parce qu'il a transgressé la loi, et qu'ainsi il n'y a aucune différence entre les Juifs et les nations; tous ont péché, sont coupables devant Dieu et sous son jugement. Que les Juifs eussent transgressé la loi, ils ne pouvaient le nier; mais ils pouvaient en appeler aux promesses inconditionnelles faites à Abraham et à leurs autres ancêtres. C'est à ces difficultés que répondent les chapitres 9 à 11.

Il existe, sans doute, des promesses inconditionnelles faites au peuple d'Israël. Mais en même temps, tous ceux qui sont issus d'Israël ne sont pas pour cela Israël, et, ce qui est encore plus important, ils ont rejeté Celui en qui ces promesses devaient être accomplies et en qui cet accomplissement leur était offert par là, ils ont perdu tout droit à ces promesses «ils ont heurté contre la pierre d'achoppement». Mais ensuite, après que toute bénédiction, non moindre pour eux que pour les nations, est devenue une affaire de pure grâce, l'apôtre montre que Dieu, dont la fidélité est immuable, accomplira aussi, par grâce, ce qu'il a promis. Nous trouvons dans les chapitres indiqués plus haut, la démonstration de ces principes.

En premier lieu, l'apôtre exprime l'affection immuable qu'il a pour son peuple. Son coeur était rempli de tristesse en voyant Israël mis de côté; il était si éloigné d'être indifférent à cet égard, qu'il aurait voulu être comme anathème, séparé du Christ, à la place du peuple qu'il aimait. Comme Christ lui-même pleura sur Jérusalem à cause de la dureté de coeur du peuple, lorsque du sommet du Mont des Oliviers il voyait devant lui la ville coupable, ou comme Moïse, autrefois, intercéda pour le peuple idolâtre, ainsi nous trouvons chez l'apôtre l'expression du même sentiment d'amour et de douleur. Son désir n'était pas l'expression d'un sentiment calme et réfléchi; il ne pouvait se réaliser, mais il sortait d'un coeur profondément accablé par la pensée du rejet du peuple bien-aimé de Dieu, ses parents selon la chair. C'était le cri d'un coeur qui ne pouvait comprimer le sentiment dont il débordait. Son coeur était rempli de tout ce qui appartenait à la relation des Israélites avec Dieu, et il énumère tous leurs privilèges jusqu'au Messie issu d'eux selon la chair. Aussi ne parle-t-il pas comme si la parole de Dieu avait manqué son but, car tous ceux qui sont issus d'Israël, ne sont pas pour cela Israël; et ils ne sont pas tous enfants, parce qu'ils sont de la semence d'Abraham. C'est en Isaac seul que la semence avait sa relation d'enfants devant Dieu. Les enfants selon la chair ne sont pas à cause de cela des enfants de Dieu; il n'y a que les enfants selon la promesse qui soient comptés comme semence. Ismaël n'appartient pas à cette semence de Dieu, car la parole: «En cette saison-ci, je viendrai, et Sara aura un fils», est une parole de promesse et ne s'applique point à Ismaël. Si l'on objectait: «C'est vrai, mais Agar n'était qu'une esclave, une concubine», ce n'était pas le cas de Rebecca, et il lui fut dit, par rapport aux enfants qui devaient naître d'elle seule en une fois, et cela avant qu'ils fussent nés et eussent fait ni bien ni mal (afin que le propos de Dieu selon l'élection de grâce demeurât ferme): «Le plus grand sera asservi au plus petit», ainsi qu'il est écrit: «J'ai aimé Jacob, et j'ai haï Esaü». Si donc les Juifs ne voulaient pas reconnaître la souveraineté de Dieu, mais se réclamaient de leur descendance d'Abraham selon la chair, alors ils devaient aussi laisser les Ismaélites et les Edomites avoir part aux promesses. Or c'est ce dont ils ne voulaient pas entendre parler.

Tout important que cela soit, ce n'est pas tout ce que l'apôtre pouvait avancer comme preuve de son assertion. Il demande: «Y a-t-il donc de l'injustice en Dieu? — Qu'ainsi n'advienne!» Selon son droit divin, il peut assurément montrer de la miséricorde à qui il veut, comme il le dit à Moïse: «Je ferai miséricorde à celui à qui je fais miséricorde». Ce n'est donc pas de celui qui veut, ni de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde. Et dans quelle occasion Dieu dit-il cela à Moïse? Après qu'Israël eut fait le veau d'or; dans un moment où Dieu, s'il ne se fût retiré dans sa souveraineté suivant laquelle il était libre de faire grâce, aurait dû anéantir le peuple entier, sauf Moïse et Josué. Et ainsi, selon le principe charnel des Juifs, les Ismaélites et les Edomites eussent dû devenir héritiers des promesses, à l'exclusion d'Israël. Nous avons le même principe dans la délivrance d'Israël de la servitude d'Egypte. Dieu n'avait pas rendu mauvais le coeur de Pharaon — il l'était déjà — mais il l'endurcit, afin de montrer sa puissance, et afin que son nom fût glorifié dans toute la terre. Ainsi il fait miséricorde à qui il veut, et il endurcit qui il veut. Ses voies envers Israël en étaient une démonstration claire et irréfutable, car sans cela leurs ennemis seraient devenus les héritiers des promesses; eux-mêmes auraient été exclus et le glorieux commencement de leur histoire aurait été altéré.

Ensuite l'apôtre considère la doctrine qui se trouve en relation avec ce qu'il a exposé, et applique le tout aux voies de Dieu envers Israël et envers les païens à toutes les époques. En même temps, il va au-devant des objections de la chair, telles que «Que devient la responsabilité de l'homme? Pourquoi Dieu impute-t-il encore le péché à l'homme? Qui peut résister à sa volonté?» L'apôtre répond de trois manières à ces questions. En premier lieu, nous n'avons pas le droit, comme créatures de Dieu, de juger ses actes; la chose formée ne peut pas dire à celui qui l'a formée: Pourquoi m'as-tu faite ainsi? Ce droit absolu de Dieu forme le fondement de l'argumentation de l'apôtre. Si les droits de la créature doivent être maintenus, combien plus ceux du Dieu Tout-puissant. Lui juge les hommes, mais les hommes ne sont pas capables de le juger. Là-dessus l'apôtre en vient aux faits, et montre comment Dieu a supporté avec une grande patience les méchants, afin de faire connaître sa puissance qu'ils avaient méprisée, et a manifesté en eux sa colère contre la méchanceté endurcie; comment, au contraire, il fait connaître les richesses de sa gloire dans les vaisseaux de miséricorde qu'il a préparés d'avance pour la gloire. Dieu ne s'assujettit point aux appréciations des hommes. L'ordre de ses voies révélées est qu'il supporte les méchants que le jugement attend, et qu'il prépare pour la gloire les vaisseaux de miséricorde, c'est-à-dire les chrétiens d'entre les Juifs et d'entre les païens.

La force et la portée de l'argumentation de l'apôtre est donc celle-ci: si Dieu n'est pas entièrement libre d'agir selon son élection de grâce et son propos arrêté, et si les Juifs veulent s'appuyer sur leur descendance naturelle (ce qu'en réalité ils faisaient), alors ils doivent admettre les Ismaélites aux promesses; s'y refusent-ils sous le prétexte qu'Ismaël était fils d'une esclave, ils ne peuvent sous aucun prétexte repousser les Edomites. Non seulement cela, mais à l'exception de la famille de Moïse et peut-être celle de Josué, les Juifs eux-mêmes auraient dû être exclus, puisqu'à Sinaï, ils n'avaient été épargnés que par la volonté de Dieu. Mais puisque Dieu fait ce qu'il veut, il sauve aussi des âmes du milieu des nations, ainsi qu'il est écrit en Osée. L'apôtre dit au verset 24: «Lesquels aussi il a appelés, savoir nous, non seulement d'entre les Juifs, mais aussi d'entre les nations». D'après cela, le verset 25 trouve son application au peuple d'Israël, et le verset 26 aux nations qui ne sont pas appelées son peuple, mais les fils du Dieu vivant. Pierre, qui écrivait aux Juifs, ne cite que la première partie du passage. Pour démontrer que Dieu avait prévu et prédit le rejet d'Israël, Paul avance encore un passage du prophète Esaïe. Un résidu seul devait être épargné, sans quoi, ils (les Juifs) seraient «devenus comme Sodome et semblables à Gomorrhe».

Les païens, qui ne poursuivaient pas la justice, avaient trouvé la justice, mais cette justice qui est sur le principe de la foi, tandis qu'Israël poursuivant une loi de justice, a manqué le but. Et pourquoi? Parce qu'ils cherchaient la justice qui est sur le principe des oeuvres de loi, et non celle qui est sur le principe de la foi. Car ils ont heurté contre la pierre d'achoppement, selon qu'il est écrit: «Voici, je mets en Sion une pierre d'achoppement et un rocher de chute, et quiconque croit en lui ne sera pas confus».

Chapitre 10

L'apôtre entre ensuite dans plus de détails sur ce sujet, savoir la différence entre la justice légale et la justice de la foi, la justice de Dieu. Cette différence est de la plus haute importance. La justice qui vient de la loi est une justice humaine. Il est vrai qu'une telle justice n'existe pas, mais la conscience sent que l'homme doit avoir une justice, et elle a raison. Lorsqu'on a de la confiance en soi-même, on s'efforce d'accomplir cette justice, afin de pouvoir la présenter à Dieu pour être accepté de lui. Que l'homme soit responsable, c'est parfaitement vrai; mais, non seulement il n'a pas accompli pleinement ce que sa responsabilité exige, mais il ne l'a pas même commencé, parce que la chair ne se soumet pas à la loi de Dieu et qu'aussi elle ne le peut. L'homme dans la chair est contre Dieu. La justice de Dieu est en Dieu même, dans son être; elle s'exerce selon la grâce envers l'homme et lui est imputée par Christ. La propre justice n'est rien qu'orgueil et manque de conscience; elle ne se trouve que là ou le coeur n'est pas illuminé par la lumière de Dieu. Car la lumière de Dieu nous montre clairement que nous sommes des pécheurs, et nous en donne la conscience devant Dieu. Dans cette lumière aussi, la loi, appliquée par le Saint Esprit, peut nous convaincre de péché, mais elle ne peut nous procurer aucune justice, car le ministère de la loi est le ministère de la mort et de la condamnation (2 Corinthiens 3).

La justice de Dieu est révélée dans l'évangile, et nous sommes devenus cette justice en Christ (Romains 1: 17; 2 Corinthiens 5: 21). Examinons de quelle manière cela a eu lieu. Sur la croix, Christ a été fait péché pour nous, et là, il a porté les péchés du croyant. Dans cette position, il a parfaitement glorifié Dieu en tout ce que Dieu est: sa majesté, sa vérité, sa justice contre le péché, son amour pour les pécheurs, et il l'a fait en montrant son obéissance jusqu'à la mort, et son amour envers son Père dans l'entière offrande de lui-même. La démonstration de la justice de Dieu, et cela en rapport avec ce qu'il est lui-même, avec ce qu'est le péché pour lui et la relation du péché avec lui, cette démonstration est donnée en ce que Christ, ayant parfaitement glorifié Dieu en tout ce qu'il est dans cette place du péché, — là où tout avait été déshonoré par le péché de l'homme, — Dieu a glorifié Christ, a placé à sa droite l'homme descendu dans la mort, son propre Fils, et l'a couronné, de gloire divine. C'est ce que disait le Seigneur en vue de sa mort, après que Judas fut sorti: «Maintenant le Fils de l'homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même; et incontinent il le glorifiera» (Jean 13: 31, 32). Le Fils de l'homme a glorifié Dieu sur la croix, et Dieu l'a glorifié près de lui; un homme est entré dans la gloire de Dieu (voyez Jean 17: 4, 5; Philippiens 2: 5-11). La justice de Dieu a été révélée en ceci, qu'il a donné à Christ qui l'a glorifié, une place auprès de lui dans la gloire divine. C'est ce que Jésus déclare distinctement en Jean 16: 10. La descente du Saint Esprit et sa présence sur la terre, est la preuve de la justice, tandis qu'il n'y en avait aucune dans le monde, puisqu'ils ne croyaient pas au Fils, mais l'avaient rejeté. De même, la présence du Sauveur dans le ciel, à la droite de Dieu, est la preuve de la justice de Dieu; cette même personne qui a été rejetée par le monde, a été acceptée par Dieu, et maintenant, comme venue en grâce, elle est pour toujours séparée du monde.

Maintenant se pose la question: comment pouvons-nous avoir part à cela? C'est parce que l'oeuvre, en vertu de laquelle il est dans la gloire, a été accomplie pour nous. Par elle, il a glorifié Dieu. Si nous qui croyons en lui, n'étions pas justifiés, et ne lui étions pas faits semblables, il ne verrait pas «le fruit du travail de son âme». C'est une partie de la justice de Dieu que de lui donner ce fruit. Personnellement, il est glorifié sans doute; mais un rédempteur sans rachetés perdrait le salaire de son oeuvre et de ses souffrances. Nous faisons partie de la gloire de Christ, et c'est une profonde source de joie pour nos âmes que, dans notre conformité avec lui pour l'éternité, nous serons la preuve de la valeur de son oeuvre. Dieu ne fait que manifester sa justice à l'égard de Christ, lorsqu'il nous donne la gloire avec lui. Combien notre espérance est certaine! En lui, nous serons la justice de Dieu durant l'éternité.

Les Juifs voulaient établir leur propre justice selon la loi, une justice humaine, s'il eût pu y en avoir une, ce qui n'était pas le cas, et c'est pourquoi ils heurtaient contre Christ, la pierre d'achoppement, parce que, dans ce but, il devait être abaissé. Sa mort était nécessaire pour nous sauver et nous acquérir la justice et même la gloire, selon les desseins de Dieu. Christ était ainsi la fin de la loi en justice à tout croyant. Il était impossible que, la loi fût encore tenue pour règle et mesure de la justice pour l'homme, après que la justice divine eut été révélée en Christ et donnée au croyant. La justice selon la loi était une justice humaine, et, en réalité, elle n'existait pas du tout; la justice imputée par la grâce au croyant, était divine et parfaite. La loi n'avait nullement perdu sa validité pour ceux qui étaient sous la loi, car ceux qui ont péché sous la loi, seront jugés d'après la loi. Mais nous sommes morts avec Christ et en lui; or la loi n'a d'autorité sur l'homme que durant sa vie. Quiconque veut avoir la justice humaine, doit accomplir la loi pour lui-même, car celui qui aura pratiqué les choses qu'exige la loi, vivra par elles.

L'apôtre cite ensuite un passage du Deutéronome sur lequel je désire dire quelques mots (Deutéronome 30: 12-14). Moïse avait donné dans ce livre les commandements de Dieu, à l'observation desquels était attachée la possession du pays dans lequel Israël devait être introduit. Il avait présenté les bénédictions comme conséquences de l'obéissance, et la malédiction comme suite de la désobéissance. Ensuite, dans le chapitre cité, nous voyons qu'Israël, par suite de sa désobéissance, devait perdre le pays, et une promesse est donnée, en rapport avec ce que la miséricorde du Seigneur ferait, après que le peuple, souffrant en captivité, aurait été amené par la grâce à se repentir. Comme cette promesse est accomplie en Christ, l'apôtre applique à Christ les versets 12-14 du 30e chapitre. Accomplir la loi dans un pays étranger est impossible, pour Israël, mais quand le peuple sera retourné de coeur vers l'Eternel et à l'obéissance, alors Dieu le bénira, bien que la loi n'ait pas pu être observée. Et puisque le «faire» exigé par la loi aura été impossible, la bénédiction aura lieu sur le fondement d'une justice par la foi, comme Paul le montre dans le verset 6. C'est pourquoi, Christ étant pour un Juif l'objet de l'espérance, est introduit ici comme celui qui rétablit la nation. L'apôtre dit: il n'est pas nécessaire d'aller loin, de monter ou de descendre, afin de trouver Christ. Quand la Parole, qui révèle Christ comme ressuscité d'entre les morts selon la puissance du Saint Esprit, est dans le coeur, quand on le confesse avec un coeur droit, on est sauvé. Car du coeur on croit à justice, et, de la bouche, c'est-à-dire ouvertement, on fait confession à salut. Et cela compte aussi bien pour les nations que pour les Juifs, car «quiconque croit en lui ne sera pas confus». Il n'y a aucune différence entre le Juif et le Grec, car le même Seigneur, le Seigneur de tous, est riche en grâce envers tous ceux qui l'invoquent. Quelle beauté dans ce verset, quand on le compare avec les versets 22 et 23 du chapitre 3! Là il n'y a point de différence, car tous ont péché; ici il n'y a point de différence, car le même Seigneur de tous est riche en grâce envers tous ceux qui l'invoquent: «Car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé» (verset 13). Mais pour pouvoir l'invoquer, il faut croire en lui, et afin de pouvoir croire en lui, il faut avoir entendu parler de lui, et pour en entendre parler, il doit être annoncé, et par conséquent il faut un prédicateur. Ainsi qu'il est écrit: «Combien sont beaux les pieds de ceux qui annoncent la paix, de ceux qui annoncent de bonnes choses», c'est-à-dire des bénédictions divines! Mais tous n'ont pas obéi à l'évangile, comme le dit Esaïe: «Seigneur, qui est-ce qui a cru à ce qu'il a entendu de nous?» Ainsi la foi est opérée par ce que l'on entend, et ce que l'on entend est par la parole de Dieu.

Ensuite, l'apôtre montre la position relative des Juifs et des nations à l'égard de cette proclamation de l'évangile. Esaïe dit des Juifs: «Qui est-ce qui a cru à ce qu'il a entendu de nous?»

C'était le dessein de Dieu, que le témoignage retentît jusqu'aux extrémités de la terre et fût entendu des nations. Ensuite, Moïse déclare que Dieu exciterait Israël à la jalousie par ce qui n'était pas une nation, et l'exciterait à la colère par une nation sans intelligence…

Ici se terminent ces méditations sur l'épître aux Romains. Il n'a pas été donné à l'écrivain de conduire jusqu'à la fin son précieux travail. Son état de souffrance dans les dernières semaines de sa présence ici-bas, lui avait rendu impossible la continuation de cet ouvrage.