La puissance

 ME 1884 page 315

 

C'est un sujet sur lequel on a beaucoup écrit; mais il a été si peu compris qu'il est à craindre que chaque fois l'on n'ait fait qu'ajouter à la faiblesse existante. Nous pourrions mieux dire ce que la puissance n'est pas, que ce qu'elle est.

S'il s'agit de bénédictions pour d'autres, le beau idéal de la puissance se montre dans l'ombre de Pierre passant en plein jour dans les rues de Jérusalem. Les impotents, les boiteux, les démoniaques, sur lesquels se projetait cette ombre, étaient rendus tout à coup à la santé et à la pleine vigueur de la vie. Nulle marche royale ne saurait être comparée à celle de l'apôtre, en ce jour-là.

Voulons-nous trouver parmi les hommes un exemple de patience triomphant dans les souffrances? Pensons à Paul et à Silas dans la prison, à l'heure de minuit, chantant joyeusement à Dieu, sous le poids de l'injustice, de la honte et de la douleur corporelle.

Plusieurs diront que c'était bon pour Pierre et Paul, et que ces exemples ne sauraient trouver leur application de nos jours. Cependant la puissance du Saint Esprit existe: nous ne pouvons nier ce fait. Nous avons été revêtus de puissance d'en haut, et bien que pour nous la parole soit: «Tu as peu de force», cependant il y a de la force, et c'est aussi réellement celle du Saint Esprit que dans les premiers jours. La question pour nous est de savoir comment nous pouvons la posséder.

Prenons pour exemple une large rivière dans laquelle se trouverait un courant rapide. Un homme gouvernant un bateau, voudrait, en descendant, rester dans ce courant; non seulement il chercherait à éviter les bancs de sable et les hauts-fonds, mais aussi les remous et les eaux mortes. Gouverner le bateau représente le soin que nous devons prendre et la responsabilité qui nous incombe, pour que rien ne nous empêche d'être dans le courant de l'Esprit Saint. Il y a des exemples de personnes marchant comme dans les faits que nous avons cités des Actes, mais si, d'un autre côté, nous voulons voir comment l'on se trouve en dehors du courant, nous n'avons qu'à jeter les yeux autour de nous et contempler l'état général de la chrétienté.

Là où est la vraie puissance, il y aura absence de tout ce qui se voit dans le monde religieux qui nous entoure. On s'empresse beaucoup trop en nos jours de se justifier soi-même; cela est en soi un signe de manque de puissance. Il n'est nullement nécessaire à celui qui marche dans la force du Saint Esprit, d'écrire deux ou trois volumes pour expliquer sa conduite. S'imagine-t-on Pierre ou Paul écrivant constamment pour justifier la manière dont ils poursuivaient l'oeuvre du Seigneur? Le même Esprit qui est la puissance, nous maintient dans une paisible communion avec le Père et le Fils, et ces deux choses vont ensemble.

On dit que les machines les plus puissantes sont celles qui font le moins de bruit, et que tout bruit extraordinaire est un signe de faiblesse et une perte de force dans la machine. Que l'on considère l'immense volant d'une grande machine, tournant sans aucun bruit, et l'on aura une idée de ce qu'est la puissance.

Le bruit et l'excitation dans ce que l'on appelle l'oeuvre chrétienne, sont à l'ordre du jour; mais combien cela fait contraste avec l'ombre de Pierre se mouvant silencieusement au milieu de la plus merveilleuse bénédiction. Nous ne voudrions pas affirmer positivement qu'il n'y a aucune bénédiction parmi tout ce bruit et ce flot de poussière qui nous enveloppe, mais rappelons-nous que Dieu n'était ni dans le tourbillon, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu. Ces signes extérieurs peuvent être les précurseurs de cette majesté et, de cette puissance, dont la présence effective se fait sentir, dans la voix douce et subtile; mais toute imitation de tourbillons, etc., est pire qu'inutile.

En parlant de Dieu et de notre marche pratique, une autre pensée se présente d'elle-même: c'est celle que nous trouvons en 2 Corinthiens 1. Le Dieu de résurrection nous fait sentir notre faiblesse, afin que nous dépendions de lui pour la délivrance, sur le principe de la résurrection, en supposant toujours que nous sommes dans le courant dont nous avons parlé, et désireux d'y être gardés. Cela, sans doute, est une autre question que celle de la puissance en nous, ou déployée par notre moyen, mais ces choses vont ensemble. Combien de saints de Dieu n'y a-t-il pas qui sortent du courant, par le fait qu'ils prient afin d'être délivrés de telle ou telle épreuve, au lieu d'aller volontiers et patiemment jusqu'au bout, ne comptant pas sur une délivrance temporelle comme des Juifs, mais sur un Dieu qui est fidèle, dont toutes les promesses sont oui et amen en Christ, et qui les accomplira à sa gloire par nous. Ce siècle de lumières rejette avec mépris la résurrection comme un rêve du moyen âge, mais les saints y croient-ils? Nous trouvons pour notre marche pratique ces précieuses vérités si étroitement liées ensemble, savoir: le Saint Esprit en nous, et le Dieu de toute puissance et de toute sagesse qui protège le vase de terre, agissant toujours par la résurrection, que nous pouvons bien nous demander jusqu'à quel point cela est réel pour nous.

Que Dieu nous donne d'être conduits par la force puissante de Celui qui est ressuscité d'entre les morts, afin que nous connaissions par le Saint Esprit la puissance de sa résurrection, avec une confiance plus simple dans le Dieu qui nous enseigne à ne pas nous confier en nous-mêmes, mais en Lui qui ressuscite les morts.