La table du Seigneur et la cène du Seigneur

 ME 1884 page 353

 

Je désire présenter dans ces lignes quelques remarques sur ce sujet si important, et qui devrait être si précieux pour chaque croyant. Les dons accordés par le Seigneur à l'Eglise pour l'enseignement et l'édification ont sans doute un très grand prix; on serait coupable de ne pas les reconnaître, de ne pas les estimer à leur valeur et de n'en pas profiter. Mais très souvent nous sommes portés à trop nous attacher à ces dons, à les rechercher, et nous ne donnons pas dans notre coeur une place assez grande à ce qui tient au coeur du Seigneur. Avoir place à la table du Seigneur et participer à la cène du Seigneur, est un privilège accordé à tous les croyants. Là ils se trouvent réunis pour se souvenir ensemble du Sauveur, dans l'acte où il leur a montré d'une manière parfaite son profond amour et son dévouement sans limites. Les dons disparaissent, s'effacent, pour ne laisser de place dans la pensée et les affections que pour Jésus s'abaissant jusque dans la mort pour nous. Quelle grâce! Comment pourrions-nous rester indifférents au privilège si grand de nous souvenir ainsi ensemble de Jésus? Le plus éloquent discours, l'enseignement le plus profond, les exhortations les plus touchantes, pourraient-ils nous parler plus vivement que la cène de l'amour de Jésus?

Les trois premiers évangiles rapportent l'institution de la cène; nous la trouvons ensuite dans la 1re épître aux Corinthiens. C'est de ce dernier passage que je voudrais spécialement m'occuper, mais auparavant je dirai quelques mots sur ce que nous présentent les évangiles.

Nous trouvons en Matthieu trois ou quatre détails qui lui sont particuliers. En premier lieu, ces paroles: «Prenez, mangez;» c'est l'invitation adressée par le Seigneur aux siens, c'est une sorte d'insistance gracieuse, un encouragement à prendre ce qu'il nous présente pour que nous en usions.

En second lieu, il dît de même de la coupe: «Buvez-en tous;» nul n'est exclu de la participation à cette seconde partie du repas. Le Seigneur, par ces paroles, condamne ainsi d'avance les prétentions que devait élever plus tard le clergé romain. Le Seigneur invite les siens à prendre, à manger et à boire. Ce n'est donc pas un acte à accomplir d'une manière spirituelle seulement, comme le voudraient quelques-uns; c'est un acte réel. D'un autre côté, ce sont des symboles qui sont placés sous nos yeux, et dont, chaque fois, notre esprit et notre coeur ont à saisir le sens. Sans cela, la cène dégénérerait en une simple cérémonie, une formalité; et peut-être hélas! n'est-ce que trop souvent le cas.

Troisièmement, le Seigneur, dans Matthieu, insiste sur le caractère de ce que représente la coupe, et cela est bien en rapport avec le but de son évangile. Jésus était le Messie. Par sa venue, il mettait fin à l'ancienne alliance, basée sur l'obéissance de l'homme dans la chair, et qui condamnait à mort le transgresseur. Il venait établir une nouvelle alliance, basée sur la grâce. Cette nouvelle alliance devait reposer sur le fondement de la rémission des péchés (comparez Jérémie 31: 33, 34; Hébreux 8: 6-13). Or sans effusion de sang, il n'y a point de rémission (Hébreux 9: 22). Le vin représentait donc ce sang qui allait être versé pour plusieurs en rémission de péchés. Bien que les Juifs n'aient point reçu Christ, l'effusion du sang a eu lieu, et sa valeur subsiste comme base de cette nouvelle alliance qui sera traitée avec eux, et qui comprendra le pardon de leurs péchés et la connaissance de Dieu dans leurs coeurs. Pour nous il n'y a point d'alliance, car l'évangile n'en est pas une; c'est la proclamation du salut. Mais nous jouissons des privilèges de la nouvelle alliance et, en outre, des bénédictions qui résultent de la position céleste qui nous est acquise par l'oeuvre parfaite de Christ, ressuscité et glorifié à la droite de Dieu. Ces bénédictions appartiennent exclusivement à l'Eglise (Ephésiens 1: 3-7).

Enfin, Matthieu nous montre le Seigneur bénissant avant la fraction du pain, et rendant grâces avant la distribution de la coupe. Marc n'ajoute qu'un détail, c'est qu'ils burent tous de la coupe, accomplissant ce que le Seigneur les avait engagés à faire, et confirmant ainsi ce qu'il désire à cet égard pour tous les siens.

Arrêtons-nous maintenant un instant sur ce que rapporte Luc dans son évangile. Il rapproche dans son récit — et cela est bien digne de remarque — la célébration de la dernière Pâque par le Seigneur avec ses disciples, et l'institution de la cène, en réalité la célébration de la première cène; mais avec le Seigneur présent corporellement au milieu des siens.

Or la Pâque rappelait la délivrance du peuple d'Israël. C'était le peuple mis à l'abri du jugement, en vertu de l'aspersion du sang de l'agneau pascal. Mais la délivrance d'Israël était pour la terre; elle était la figure d'une délivrance plus excellente. Le type allait prendre fin pour faire place à la chose même: Christ, notre Pâque, allait être sacrifié pour nous. Jésus l'annonce à ses disciples en disant: «Je n'en mangerai plus jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le royaume de Dieu». Mais ces paroles mêmes ne disent-elles pas que la Pâque, fête du peuple terrestre, et par conséquent souvenir permanent pour lui de ce qui le constituait un peuple à part, sera de nouveau célébrée dans le règne? Nous lisons en effet dans Ezéchiel: «Au premier mois, au quatorzième jour du mois, vous aurez la pâque, fête solennelle» (45: 21). Et il est toujours précieux de voir que Dieu n'oublie pas son peuple d'autrefois. Mais ce moment n'était pas venu. Christ devait souffrir d'abord, et il se mettait à part comme Nazaréen. Nous voyons en effet que le Seigneur, aussitôt après qu'il eut reçu une coupe et l'eut distribuée, dit, sans en boire lui-même: «Je ne boirai plus de ce fruit de la vigne, jusqu'à ce que le royaume de Dieu soit venu». Ayant ainsi renvoyé le moment de sa joie avec les disciples jusqu'au temps du royaume, il institue la cène pour les siens, pour le peuple céleste, durant le temps de son absence. Elle nous rappelle ce qui est la base de toutes nos bénédictions, l'amour de Christ descendant, dans la mort pour nous.

Si Luc, dans son récit, omet des détails que nous trouvons dans Matthieu, il en présente d'autres qui sont bien précieux pour le coeur et qui ont un cachet particulièrement intime. Ils nous font pour ainsi dire pénétrer dans les affections de Celui qui s'appelait le Fils de l'homme, caractère sous lequel l'évangile de Luc le présente tout particulièrement. Ne le voyons-nous pas dans ces paroles pénétrantes qui commencent notre récit: «J'ai fort désiré de manger cette pâque avec vous, avant que je souffre»? (22: 15). Puis nous lisons: «Ceci est mon corps qui est donné pour vous». Donné, n'est-ce pas l'expression de l'amour dévoué qui se sacrifie, qui se livre et qui fait ainsi appel à notre affection?«Pour vous», comme cela est direct et propre à aller au coeur! «Vous», vous aviez besoin que je fusse ainsi donné; que fussiez-vous devenus sans cela? Sans «vous», je n'eusse pas eu besoin de venir et de souffrir; mais je vous ai aimés, et me suis donné pour vous. C'est le mémorial de cet amour si tendre, si dévoué, que nous avons sous les yeux, et là chacun de nous peut dire: «Le Fils de Dieu qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi».

Jésus ajoute: «Faites ceci en mémoire de moi», paroles touchantes que nous ne trouvons ni dans Matthieu, ni dans Marc, et qui, rapprochées de ces mots «donné pour vous», nous disent ce que le coeur si tendre du Sauveur réclame des siens. En retour de son amour dévoué jusqu'à la mort, il demande le souvenir de notre coeur. Pouvait-il demander moins? Moi, je me suis donné pour vous; vous, souvenez-vous de moi. Quel est l'instant de notre vie qui ne devrait être rempli de lui? Combien plus dans ce moment où nous avons sous les yeux ce repas que lui-même a institué pour nous rappeler son amour! Le résidu, captif à Babylone, disait: «Si je t'oublie, Jérusalem, que ma droite s'oublie elle-même; que ma langue soit attachée à mon palais, si je ne me souviens de toi, et si je ne fais de Jérusalem le principal sujet de ma réjouissance!» C'était Jérusalem, le lieu que Dieu avait choisi pour y faire habiter son nom, qui réveillait ainsi les ardentes affections du peuple captif. Et à nous, qu'est-ce qui est présenté? Celui qui remplit tout de sa gloire et qui, pour nous, s'est abaissé jusque dans la mort. Comment pourrions-nous l'oublier? Comment nos coeurs ne brûleraient-ils pas au dedans de nous, en nous souvenant de lui?

Et de même quand il s'agit de la coupe. Luc rappelle bien aussi que la nouvelle alliance est établie sur l'effusion du sang de Christ, mais il ne dit pas: «versé pour plusieurs en rémission de péchés», il ajoute: «versé pour vous». Cela est d'une application directe, individuelle; cela va droit au coeur de chacun. Le Sauveur t'a aimé, toi; c'est pour toi que son corps a été donné, que son sang précieux a été versé. Comme ces paroles sont propres à attirer vers lui! Qu'en les écoutant nos coeurs répondent: «A Celui qui nous aime et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang,… soient la gloire et la force!»

Jésus était encore au milieu des siens, lorsqu'il institua ce repas, mémorial de sa mort. Les disciples avaient bien besoin de comprendre que c'était son amour qui le conduisait aux souffrances et à la mort. S'ils ne le saisirent pas d'abord, plus tard, quand leur cher Maître eut été glorifié, le Consolateur vint qui leur rappela toutes les choses que Jésus avait dites. Ils les enseignèrent à ceux qui crurent par leur parole, et nous voyons, au chapitre 2 des Actes, ces premiers chrétiens persévérer dans «la fraction du pain», aussi bien que dans la doctrine et la communion des apôtres, et dans les prières. Cela nous montre que, dès lors, «la fraction du pain» faisait partie intégrante de la vie d'assemblée des chrétiens. Ils avaient saisi le prix qu'attachait le Seigneur Jésus à ce mémorial de son amour pour eux.

Mais ces premiers croyants étaient des Juifs convertis. Les grandes vérités concernant l'Eglise comme corps de Christ, où il n'y a ni Juif, ni Grec, n'avaient pas encore été révélées. A Paul, l'apôtre des nations, fut donnée, par révélation, la connaissance du mystère, et alors aussi il nous est montré comment ces vérités sont en rapport avec la cène du Seigneur.

C'est dans la 1re épître aux Corinthiens que nous trouvons ce qui concerne la cène. Ces passages, ainsi que Actes 20: 7, font voir que là où, parmi les nations, une assemblée était formée, là on rompait le pain: à Corinthe, à Troas, comme à Jérusalem. On s'assemblait dans ce but. L'apôtre avait enseigné, et les croyants avaient compris, que c'était le centre du service chrétien; que dès que l'on était assemblé au nom du Seigneur Jésus (c'est là ce qui forme l'assemblée), autour de sa personne adorable, lui-même présent au milieu, selon sa promesse, l'on avait à se souvenir de lui dans sa mort, «annonçant sa mort» jusqu'à ce qu'il vienne.

Paul parle de cette ordonnance en deux endroits de la 1re épître aux Corinthiens. Dans le chapitre 10, il s'agit de la table du Seigneur; dans le chapitre 11, l'apôtre s'occupe de la cène du Seigneur; le premier présente surtout la communion, le second surtout le mémorial. Examinons-les successivement.

L'apôtre avait à mettre en garde les Corinthiens contre l'idolâtrie et les mauvaises associations. C'est ce qu'il fait en particulier dans le chapitre 10: «C'est pourquoi, mes bien-aimés, fuyez l'idolâtrie» (verset 14). Mais les principes qu'il est ainsi amené à poser sont d'une application tout à fait générale et peuvent nous guider aussi, nous qui ne vivons pas au milieu de l'idolâtrie établie comme système, mais qui nous trouvons dans la chrétienté. Cette remarque est nécessaire, pour que nous ne fassions pas de fausse application de termes qui n'ont leur raison d'être que là où il y a idolâtrie formelle, comme par exemple «la table» et «la coupe des démons».

Il y avait, au temps de Paul, trois terrains distincts qu'il nous présente en quelques endroits.

C'étaient l'Eglise, chose nouvelle; Israël, l'ancien peuple de Dieu; les nations, dans l'idolâtrie. Manger, se mettre à table, c'est entrer en communion, s'associer avec ceux qui sont à cette table et avec qui l'on mange. C'est se placer, sur le même terrain qu'eux. Ce que l'on mange et boit indique aussi avec quoi l'on a communion. Les païens sacrifiaient aux démons; manger avec eux de leurs sacrifices, boire de leurs libations, c'était avoir communion avec les démons. Sous prétexte de liberté — mais au fond, c'était licence, propre volonté et indépendance — sous prétexte de liberté, de largeur de vues, de connaissance, les Corinthiens allaient jusqu'à s'asseoir dans des temples d'idoles, mangeant des choses sacrifiées aux idoles. Prenez garde, dit l'apôtre, en faisant cela, vous avez communion avec les démons, vous êtes à leur table, vous buvez leur coupe. Cela peut-il convenir à des chrétiens qui ont communion avec Christ? (voyez 2 Corinthiens 6: 14-16). La vraie liberté, celle de l'Esprit, ne peut s'exercer que dans ce qui convient à la vie de Dieu, sans quoi c'est la licence de la chair. «Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, ou quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu». «Que tout se fasse pour l'édification». La gloire de Dieu, l'édification des autres, voilà ce qui règle la sainte liberté de l'Esprit, et le coeur se meut là avec bonheur, suivant la vérité dans l'amour.

Dans l'Israël selon la chair, ceux qui mangeaient des sacrifices avaient communion avec l'autel, l'autel du Dieu à qui l'on offrait ces sacrifices. C'était «la viande de son Dieu» (Lévitique 21: 6, 21, 22). On avait ainsi communion avec Dieu. Mais Christ étant venu, ces sacrifices établis de Dieu et types d'un plus excellent, avaient pris fin, et les chrétiens avaient «un autel dont ceux qui servent le tabernacle n'ont pas le droit de manger» (Hébreux 13: 10). Mais le principe que l'apôtre établit pour les chrétiens est confirmé par ce qui avait lieu en Israël.

Paul montre donc aux Corinthiens avec quoi et sur quel terrain est établie leur communion; ce qui les met ainsi complètement à part.

Premièrement, c'est la table du Seigneur, la coupe du Seigneur. Le nom donné ici à Jésus, celui de Seigneur, nous dit qu'il a autorité sur cette table et sur cette coupe. S'il daigne nous y admettre, nous y inviter, c'est un privilège pour nous; il ne saurait être question d'un droit. Il a institué cette commémoration de sa mort; c'est lui qui dresse la table, elle lui appartient, non point à nous. Nul que lui n'y a autorité; c'est à lui d'indiquer qui doit y être. Son autorité comme Seigneur doit y être reconnue, et nous devons prendre garde de faire de sa table la nôtre, de la dresser sur un terrain humain et, par conséquent, sectaire. L'apôtre s'adresse à nous comme à des personnes intelligentes pour que nous discernions les choses, et sachions ce que nous faisons et sur quel terrain nous nous plaçons.

C'est pourquoi il nous donne ensuite les caractères de la communion, ou du terrain sur lequel se trouve la table du Seigneur. D'abord, la coupe qui nous y est présentée, la coupe de bénédiction que nous bénissons est la communion du sang de Christ. C'est une coupe de bénédiction ou d'actions de grâces. En effet, que ne nous rappelle-t-elle pas? C'est le sang précieux de Christ, de l'Agneau sans défaut et sans tache, par lequel nous avons la rédemption, qui nous lave de nos péchés, par lequel la paix est faite, et qui nous ouvre le chemin auprès de Dieu, une libre et pleine entrée dans le sanctuaire. C'est la mort de Christ, l'expiation accomplie, la culpabilité ôtée. En la prenant, nous pouvons bien en effet la bénir et dire: Grâces à Dieu pour son don ineffable!

Mais la coupe est la communion du sang de Christ. En comprenant et en saisissant par la foi ce qu'elle signifie, nous entrons dans la pensée du Seigneur, dont le sang a été versé, qui a offert ce sacrifice pour nous sauver. Ainsi nous y avons part, nous jouissons de ce qu'il nous a acquis par sa mort. Aux rachetés seuls appartient donc le privilège de boire de cette coupe, parce qu'ils ont communion avec le Seigneur dans sa mort. Ils forment l'Eglise acquise par le sang du Fils de Dieu.

Nous avons donc ici le premier caractère de ceux qui viennent à la table du Seigneur. Ils sont rachetés par le précieux sang de Christ, ils en ont la conscience, ils en jouissent, et ils bénissent. En est-il ainsi de nous, chers amis? Réalisons-nous à la table ce fait si grand, qui place devant nous l'amour insondable de Jésus, que la coupe que nous bénissons est «la communion du sang de Christ?»

Ensuite, nous avons le pain sur la table, ce pain unique que nous rompons; partagé entre plusieurs, mais un. Le pain représente sans doute le corps personnel de Christ quand il était sur la terre; nous verrons cela au chapitre 11, de même que nous l'avons vu dans les évangiles: «Ceci est mon corps donné pour vous». Mais ici, en rapport avec la table, ce n'est pas la seule chose que le pain figure. C'est aussi le corps actuel de Christ ici-bas, formé de ses membres sur la terre; car c'est nous, nous qui sommes un seul pain, un seul corps, bien qu'étant plusieurs. «Il y a un seul corps», dit l'apôtre aux Ephésiens (4: 4). Formé de qui et comment? De tous ceux qui sont rachetés par le sang de Christ: l'assemblée est son corps (Ephésiens 1: 22). Elle est formée par le Saint Esprit descendu du ciel, car nous avons tous été baptisés d'un seul Esprit pour être un seul corps (1 Corinthiens 12: 13). Chaque croyant a le Saint Esprit: c'est son privilège (Ephésiens 1: 13; 1 Corinthiens 6: 19; Romains 8: 15, 16); cet Esprit l'unit à Christ dans le ciel (1 Corinthiens 6: 17); tous ensemble, ainsi unis à Christ, le Chef ou la Tête glorifiée, forment cet organisme réel, vivant, qui est le corps de Christ. Nous en sommes les membres.

Rompre le pain à la table du Seigneur implique donc que nous sommes unis à Christ comme membres de son corps; c'est encore la communion à un second point de vue, et c'est le second caractère de ceux qui participent à la table. Ils sont unis à Christ comme membres de son corps; ils sont en même temps membres les uns des autres (Romains 12: 5). Or, pour être membre du corps de Christ, baptisé du Saint Esprit, il faut être racheté, lavé de ses péchés par le sang de Christ; nous voyons ainsi pourquoi, dans ce passage, la coupe est placée avant le pain. Il est précieux de voir l'ordre dans les choses de Dieu. Nous pouvons encore remarquer que cet aspect, du pain sur la table du Seigneur ne pouvait être donné avant que Christ, la Tête du corps, fût dans la gloire, et que le mystère du seul corps fût révélé. Aussi ne le trouve-t-on que dans les écrits de Paul, à qui l'administration du mystère avait été confiée (Ephésiens 3: 3-9).

Pensons-nous, chers amis, quand nous venons à la table du Seigneur, à cette grande et précieuse vérité? Peut-être plusieurs, jusqu'à présent, y ont-ils participé seulement comme rachetés, heureux de se souvenir de Jésus dans sa mort, preuve de son immense amour pour nous. C'est précieux, chers amis, infiniment précieux, et c'est bien là ce qui doit remplir le coeur. Mais le Seigneur ne nous invite pas à sa table pour que nous y soyons comme des individus isolés, venus pour manger le pain et boire la coupe, et jouir chacun pour soi du souvenir de son amour. Il a encore quelque chose de plus pour nous à sa table. C'est que nous y sommes ensemble avec lui, et son coeur aime à nous grouper ainsi autour de lui dans une même pensée, un même amour. Peut-être n'avez-vous jamais pensé, à la table, que vous y êtes comme membre du corps de Christ, avec les autres membres de ce corps, unis ensemble au même Chef dans la gloire. Nous exprimons ce double fait que nous sommes rachetés et membres du corps de Christ, en buvant à la même coupe et en rompant le même pain. Nous avons ainsi communion ensemble, et ensemble nous bénissons notre précieux Sauveur. Quelle jouissance pour son coeur de nous voir assemblés autour de Lui! Quelle jouissance pour le nôtre de réaliser ensemble ce fait que nous sommes membres du même corps, ayant le même Chef! En arrêtant ensemble nos regards sur lui, l'amour dont il nous aime remplira nos coeurs, et nous le bénirons ensemble. La table du Seigneur est le lieu de la communion; de la commune participation à tout ce qu'il est et a fait pour nous; de la commune jouissance de son amour, et dans l'amour divin la communion multiplie la jouissance. Nous ne serons pas isolés dans le ciel. Rassemblés autour de l'Agneau divin, nous adorerons et louerons. Nous l'anticipons dès maintenant.

Ainsi rachetés par le sang de Christ, membres de son corps, tels sont les deux caractères de ceux qui participent à la table. Cela exclut le monde et les inconvertis. En même temps, cela établit le terrain sur lequel est dressée la table: c'est celui de l'unité du corps. Toute table qui n'est pas dressée sur ce principe, non seulement en théorie, mais pratiquement, n'est pas la table du Seigneur. Toutes les tables dressées sur ce terrain n'en forment qu'une, car il n'y a qu'un seul corps, bien qu'il y en ait diverses expressions en diverses localités, de sorte que la communion existe entre elles toutes. Ainsi nous avons à nous assurer sur quel terrain une table est dressée, avant de nous y associer, et à voir si le terrain scripturaire est gardé pratiquement et si l'autorité du Seigneur y est pleinement reconnue.

Considérons maintenant ce que nous trouvons au chapitre 11, le mémorial lui-même, plutôt que la communion.

C'est la cène (ou souper) dominicale (ou du Seigneur), le repas auquel, dans sa grâce, il nous invite. C'est le sien, non le nôtre, de même que la table est sienne aussi. Il ne s'agit donc pas de manger et boire sans savoir ce que l'on fait. Ce n'est pas un repas ordinaire; c'est dans l'assemblée, «quand vous vous réunissez ensemble». Ce n'est pas une chose que l'on puisse faire en dehors de l'assemblée, que l'on puisse dresser à son gré, comme l'on fait d'un autre repas. Il faut discerner ce que l'on fait, où l'on se trouve. Se réunir simplement ensemble pour manger, n'est pas la cène du Seigneur, et l'on n'est pas non plus à ce repas chacun pour soi, mais ensemble (versets 20-22). On ne saurait prendre la cène seul.

L'apôtre nous fait envisager la cène à un point de vue sérieux, la plaçant comme une chose à part dans le rassemblement, ou plutôt comme ce qui est le principal but du rassemblement. Le Seigneur, en nous laissant ce mémorial, veut sans doute atteindre nos affections, mais, en même temps, tout est rendu solennel par ce qui est placé devant nous. Notre responsabilité s'y trouve engagée, non pour que nous nous abstenions, mais pour qu'entrant dans la réalité de ce que nous présente la cène, nous en jouissions d'autant plus.

En s'adressant aux Corinthiens pour réprimer les désordres qui s'étaient introduits parmi eux dans la célébration de la cène, l'apôtre nous fournit des instructions précieuses, qui nous montrent la valeur de la cène aux yeux du Seigneur et ce qu'elle doit être pour nos coeurs. Bien qu'il eût pu être instruit par les autres apôtres, et que, sans doute, il eût vu la cène célébrée parmi les disciples à Damas et à Jérusalem, Paul avait reçu du Seigneur lui-même, ce qu'il enseignait à cet égard: «J'ai reçu du Seigneur ce qu'aussi je vous ai enseigné». Cela nous montre la cène comme faisant corps avec les autres vérités que Paul avait aussi reçues directement, et, en même temps, nous fait voir l'importance que le Seigneur y attache. Comment des chrétiens peuvent-ils donc traiter cette institution avec indifférence, comme une chose dont ils peuvent user à leur gré, et comme le disent quelques-uns: «si elle peut être en aide à leur foi?»

Paul n'oublie pas de rappeler dans quelles circonstances la cène fut instituée par le Seigneur, ce qui doit la rendre d'autant plus précieuse au coeur de chaque racheté: «Le Seigneur Jésus, la nuit qu'il fut livré, prit du pain». C'est cette nuit où toute la méchanceté de l'homme et de Satan conspirait contre lui; la nuit où l'un des siens le trahit, où il fut livré pour aller à la mort; livré entre les mains des iniques, livré pour nous. Quel sujet présenté à nos consciences et à nos coeurs de voir le Seigneur livré! Quelle méchanceté ce fait révèle dans le coeur de l'homme, quelle grâce dans Celui qui consentit à être livré! Nul ne pouvait porter les mains sur lui et le saisir sans qu'il y consentît (Jean 18: 5, 6), mais il s'est livré, Dieu l'a livré, et c'est pour nous!

Et cette nuit, ne nous dit-elle rien? Quand il fut livré, où était-il? Avant d'être livré, que faisait-il? Il était en Gethsémané; il avait été dans l'angoisse du combat, les grumeaux de sang avaient coulé de son front; il avait été saisi de cette tristesse profonde de son âme qui anticipait la mort et l'abandon sous le jugement de Dieu. C'est cette nuit qui est placée devant nous; nuit où le plus affreux des crimes de l'homme se préparait, nuit où le plus profond des sacrifices était accepté, où l'amour recevait la coupe des mains du Père par obéissance envers lui, par dévouement pour nous.

Et c'est dans cette nuit, avant la souffrance et la consommation du sacrifice, que Jésus pense aux siens, aux résultats glorieux de son oeuvre pour eux, à ce qui lui donnera le droit de les avoir près de lui dans la gloire; et il institue ce qui doit le rappeler, Lui, au coeur de ses bien-aimés durant son absence. «Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin)» et il a pourvu à ce que jusqu'à la fin de notre course ici-bas, nous ayons ce mémorial de son amour. Puissions-nous, quand nous sommes à sa table, avoir devant nos coeurs le souvenir de la nuit où il fut livré, et goûter la réalité de ce tendre et puissant amour dont il nous aime jusqu'à la fin!

Mais, quelles qu'aient été les douloureuses circonstances de cette nuit qui nous sont rappelées et qui parlent si puissamment à notre âme, bien que ce soit la commémoration de la mort du Seigneur, il s'agit pour nous de délivrance à la gloire de Dieu, et c'est pourquoi la cène est un service d'actions de grâces. Jésus prit du pain, et «après avoir rendu grâces, il le rompit». Il rendit grâces, comme nous voyons qu'il avait l'habitude de le faire en d'autres circonstances (Matthieu 15: 36; Jean 11: 41). Pourquoi rend-il grâces ici? Il anticipe le moment où l'oeuvre qu'il était venu accomplir sera achevée, oeuvre dont il voyait et appréciait, comme nul autre que lui ne pouvait le faire, les immenses résultats pour la gloire de Dieu et le salut des siens (Jean 17), et il loue par avance au milieu de l'assemblée, représentée alors par ce faible résidu. Il nous donne le modèle de ce que nous avons à faire, maintenant qu'elle est achevée et que nous jouissons de tout ce qu'elle nous a acquis. Quelles actions de grâces devraient en effet monter de nos coeurs, en nous souvenant de lui, de son amour, et de l'amour du Père qui a donné son Fils pour nous! Nous avons déjà remarqué que le Seigneur bénit (*) avant la fraction du pain et rend grâces aussi avant la coupe. Rien ne nous est prescrit quant à la forme que nous avons à suivre dans la cène; les paroles même que Jésus prononça alors ne nous ont pas été conservées, mais, comme toujours, l'Esprit nous enseigne en plaçant les choses devant nous selon le coeur et la pensée de Dieu, afin que nous agissions, non selon une lettre morte, une froide liturgie, mais selon la vie et l'action de l'Esprit en nous.

(*) Bénir ne veut pas dire consacrer. Il a le même sens que «rendre grâces» (comparez 1 Corinthiens 11: 24; Matthieu 26: 26, 27; Marc 14: 22, Luc 22: 19; Luc 9: 16). C'est bénir Dieu, lui rendre grâces (Marc 8: 7).

 «Il le rompit». L'action de rompre le pain montre qu'il s'agit de se souvenir d'un Christ mort. Il rompit le pain lui-même. Sa mort était nécessaire et il s'est livré lui-même. Comme nous l'avons déjà vu, nul n'avait le pouvoir de toucher à sa précieuse vie: Il la laissait de lui-même, et à cause de cela le Père l'aimait (Galates 1: 14; Jean 10: 18). Nous rompons maintenant le pain pour rappeler ce qui a eu lieu; nous pouvons le faire, parce que Lui s'est livré d'abord. Chacun de nous y participe, parce que c'est pour chacun de nous individuellement qu'il s'est donné. En rompant le pain, en en prenant un morceau et le mangeant, je me rappelle que c'est pour moi que le Fils de Dieu, devenu un homme, a souffert; que c'est moi qu'il a aimé (Galates 2: 20).

«Ceci est mon corps», dit le Seigneur. Nous savons que ces paroles veulent dire: ceci représente mon corps. Actuellement, le corps glorifié du Seigneur est dans le ciel (Luc 24: 51; Actes des Apôtres 3: 21; Hébreux 1: 3). Mais le pain placé devant nos yeux est destine à nous rappeler son corps, tel qu'il était sur la terre, ce corps formé par Dieu (Hébreux 10: 5), dans lequel il glorifia son Père en traversant ce monde, ce corps par lequel il était en relation avec nous (1 Jean 1: 1-3), dans lequel il souffrit la faim, la soif, la fatigue (Luc 4: 2; Jean 4: 6; 19: 28), dans lequel il prit nos langueurs (Matthieu 8: 17), dans lequel il porta nos péchés sur la croix, et qui fut mis dans le sépulcre.

Et le Seigneur ajoute: «Qui est pour vous». Oui, il est pour nous; il nous appartient, pour ainsi dire. Quel amour de sa part! Quel appel à nos affections! Ce corps saint et pur, temple de Dieu sur la terre, était pour nous. Tout ce qu'il a été dans sa vie, dans ses souffrances et dans sa mort, c'est pour nous. Il était devenu un homme, avait pris un corps, mais c'était pour nous, afin de pouvoir se donner pour nous, souffrir et mourir pour nous. Quelle voix ce mot «pour vous» devrait avoir pour nos coeurs! C'est l'expression du plus tendre amour. Sans nous, il n'avait pas besoin de descendre du ciel, de prendre ce corps dans lequel il souffrit toute la contradiction et la haine de l'homme, ce corps qui fut couvert d'insultes et d'outrages, couronné d'épines, déchiré par le fouet, et cloué à la croix; mais nous avions besoin de salut, et il est venu pour nous. Il y a dans son sacrifice un autre point de vue. Il s'est anéanti, prenant la forme d'esclave, obéissant jusqu'à la mort de la croix, pour glorifier Dieu son Père, ainsi qu'il le dit: «Père, je t'ai glorifié» (Jean 17: 1-5); il ne faut pas l'oublier; mais ici Jésus présente ce qui nous concerne, pour attacher nos coeurs à lui, et c'est pourquoi il ajoute:

«Faites ceci en mémoire de moi». En rompant le pain, que Jésus, que sa personne adorable se donnant pour nous, soit devant les yeux de notre coeur. Voilà ce qu'il réclame de nous. Peut-il demander moins? Faites ceci: non pas, si vous le désirez, selon votre convenance, mais «faites». «En mémoire de moi», Lui est l'objet divin présenté à notre coeur. Comme cela ferme la porte à toute autre pensée pour que nous ne jouissions que de lui seul. Cela n'exclut-il point la recherche de ses propres sentiments, les pensées vaines dont on se plaint si fréquemment, celles qui se rapportent aux autres personnes qui nous entourent? C'est lui, Jésus, dont nous nous souvenons. Comment un objet si digne de nos affections n'éclipserait-il pas toute autre chose! Tout parait petit et misérable devant ce grand amour dont il nous a aimés. Quelle pénétrante lumière de grâce, quel parfum de sainte affection, quelle atmosphère de paix, en se souvenant de lui! Occupons-nous de lui, ayons-le sous les yeux de notre âme, toute autre chose disparaîtra comme les ombres devant l'éclat du soleil. C'est ce qu'il a été, ce qu'il a fait pour nous ici-bas dans ses tendres compassions, dont il désire que nous gardions le souvenir. Nous le rappelons dans la cène, et nous sommes rendus capables de le faire et d'en jouir, parce que nous sommes unis à lui, où il est maintenant, et participants de sa vie.

Telle est la première partie de ce service d'actions de grâces: la fraction du pain.

La seconde se rapporte à la coupe. «Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang;» elle est, elle représente ce qu'est la nouvelle alliance. Comme nous l'avons vu, l'ancienne (Exode 24: 8) était établie sur le principe de l'obéissance, avec la mort pour ceux qui la transgressaient. La nouvelle alliance, fondée sur le sang de Christ, a pour base la rémission des péchés. Israël avec qui elle sera traitée n'est donc pas exclu du bénéfice de la mort de Christ. Le jour viendra où ils regarderont vers Celui qu'ils ont percé. Mais ici, c'est nous qui jouissons du privilège que comporte la nouvelle alliance, bien que nous ayons infiniment plus, des bénédictions infiniment supérieures à celles d'Israël (Ephésiens 1: 3-7). Nous avons la rédemption par son sang, la rémission des fautes selon les richesses de sa grâce; ainsi Dieu ne se souvient plus de nos péchés, ni de nos iniquités, ce qui appartiendra à la nation juive, sous la nouvelle alliance. Mis à part par l'Esprit Saint, nous avons part à l'aspersion de ce sang précieux de Christ, l'Agneau sans défaut et sans tache (1 Pierre 1: 2, 19). Sur ce sang qui a fait la propitiation, sont fondées nos bénédictions: la coupe nous le rappelle.

Nous avons donc encore ici le mémorial de la mort de Christ. La coupe, de même que le pain rompu, nous rappelle Jésus dans sa mort, car le sang est versé, le corps est à part du sang, et tous deux sont ainsi un symbole de mort. C'est donc Jésus, dans sa mort, qui nous est rappelé «toutes les fois» que nous buvons la coupe; c'est lui, nous aimant d'un amour plus fort que la mort, descendant dans la mort pour nous «Toutes les fois», ne prenons donc jamais cette coupe avec un coeur distrait, occupé au dehors: «en mémoire de moi, toutes les fois», voilà ce que Jésus nous dit. Son souvenir, dans sa mort pour nous, est lié au pain chaque fois que nous le rompons et mangeons, à la coupe, chaque fois que nous la portons à nos lèvres.

Mais ce n'est pas seulement le passé qui est devant nous dans la cène. Nous la célébrons actuellement au milieu du «présent siècle mauvais».

Et c'est là que, par la cène, nous annonçons la mort du Seigneur. Chaque fois que nous mangeons le pain et buvons la coupe, nous proclamons au milieu du monde ce fait inouï: la mort du Seigneur. Quelle association de paroles! Le Seigneur a été mort. Nous nous en souvenons avec adoration, avec actions de grâces et louanges, avec un coeur qui s'incline devant un amour si grand, car nous savons qu'il est mort pour nous, et nous connaissons la grâce qu'ainsi il nous a acquise, et la place que sa mort nous donne. Mais nous l'annonçons cette mort du Seigneur. Où et à qui? Au milieu de ce monde qui a haï, rejeté et crucifié Christ, le Seigneur. Si sa mort nous dit son amour et nous parle de paix, pour le monde c'est le jugement et la condamnation (Jean 12: 31; 15: 18; 16: 8). Et quel est l'effet pour nous de cette mort à l'égard du monde? Elle nous en sépare; elle a creusé un abîme entre nous et lui. Jésus ne s'est-il pas donné pour nous retirer de ce présent siècle mauvais? (Galates 1: 4). Nous ne sommes pas du monde, comme lui n'en était pas; nous sommes de Dieu et le monde entier gît dans le méchant (Jean 17: 14-16; 1 Jean 5: 19). La table dressée proclame à travers les siècles que le Seigneur, venu dans ce monde, y a été mis à mort. Quelle alliance, quelle communauté de vues, de pensées, d'intérêts, pourrions-nous avoir avec un tel monde? Mais il est vrai qu'au milieu de ce monde, nous annonçons aux pécheurs que c'est par cette mort du Seigneur qu'ils peuvent être réconciliés avec Dieu, et ainsi échapper au jugement qui va fondre sur le monde. Fait béni, oeuvre précieuse, message d'amour!

Mais à la pensée du passé et du présent, l'apôtre joint celle de l'avenir. «Toutes les fois… vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne». C'est donc une institution permanente. Elle dure aussi longtemps que l'Eglise est sur la terre. Mais l'Eglise attend; elle a une espérance; elle sait que Christ qui l'a aimée et s'est livré lui-même pour elle, qui la sanctifie, la purifiant par le lavage d'eau par la Parole, qui la chérit et la nourrit, veut un jour se la présenter à lui-même, glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable (Ephésiens 5: 25-29). Elle sait que les noces de l'Agneau seront une fois célébrées dans le ciel, et elle attend ce moment où il viendra. Elle sait que ce moment est proche, car il a dit: «. Je viens bientôt», et «jusqu'à ce qu'il vienne», regardant en haut vers lui, elle se souvient de lui que le monde a rejeté, et prend dans le monde la place qu'y a eue son Seigneur, celle de l'opprobre. Quelle part pourrait avoir l'Epouse avec le monde qui a crucifié Christ! Elle attend, séparée de tout, le moment de le voir, en se rappelant son amour.

Est-ce ainsi, chers amis, que nous rompons le pain et buvons la coupe? Ces saintes réalités sont-elles alors présentes à notre coeur? Avons-nous bien saisi combien il est précieux au coeur de Jésus que nous nous souvenions de lui? Comment venons-nous à la table du Seigneur? Est-ce dans cette réelle séparation du monde? Y venons-nous le premier jour de la semaine avec nos soucis, nos préoccupations, nos mesquines pensées, ou bien avec le coeur rempli de lui qui se trouve au milieu de nous, et que sa table rappelle à nos affections? Venons-nous pour recevoir, ou bien avec une âme débordant d'actions de grâces? Ah! sans doute nous ne pouvons penser à Jésus, nous souvenir de lui, sans que notre coeur brûle au dedans de nous, et ainsi nous recevons de lui, car son coeur en s'épanchant se donne à nous. Mais c'est le nôtre aussi qui s'épanche en louanges, et ainsi il y a une sainte réciprocité, et Jésus tient à cet épanchement de nos âmes:

Culte béni d'un coeur qui t'aime,

Encens dont le ciel est rempli,

Gardé pour le moment suprême

De ton sacrifice accompli.

Puissions-nous, chaque premier jour de la semaine, quand nous sommes réunis pour rompre le pain, goûter ce que son amour a mis là pour nous, en attendant qu'il vienne et qu'autour de lui, l'Agneau immolé, nous disions: «Tu es digne» et «à lui qui nous aime, et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang… à lui la gloire. Amen».

Nous trouvons dans les Actes deux passages où il est fait mention de la fraction du pain. L'un est au 2e chapitre; l'autre au 20e. Dans l'un, comme dans l'autre, nous voyons que dès que les premières assemblées eurent été formées, soit parmi les Juifs, soit parmi les gentils, la fraction du pain, la commémoration de la mort du Seigneur, a occupé, dans le rassemblement des saints, la place proéminente qu'elle doit y avoir. Ils avaient bien saisi la pensée du Seigneur, le désir de son coeur. C'était pour la fraction du pain que les disciples se réunissaient (20: 7). A Jérusalem ils persévéraient en cela, en même temps que dans la doctrine et la communion des apôtres et les prières. On pourrait peut-être même conclure du chapitre 2, verset 46, qu'ils rompaient le pain chaque jour.

Mais le second passage (20: 7) nous enseigne quelque chose de plus; c'est le jour où, dans les assemblées des chrétiens tirés des nations, on se rassemblait pour la fraction du pain, et cela, je n'en doute pas, selon les directions de l'Esprit de Dieu. Aucun commandement formel ne nous est donné; cela ne conviendrait pas à l'économie du ministère de l'Esprit. Mais nous voyons le premier jour de la semaine occuper une place à part (comparez 1 Corinthiens 16: 1, 2; Jean 20: 19, 26; Apocalypse 1: 10). Il est intéressant et instructif de remarquer la liaison qui existe entre la célébration de la cène et ce premier jour. La cène rappelle la mort du Seigneur qui eut lieu le vendredi. L'homme aurait pu croire que c'était là le jour convenable pour la commémoration de cette mort. Mais les pensées de Dieu ne sont pas celles de l'homme. Le vendredi était le jour de l'homme, du triomphe apparent de la puissance des ténèbres, qui avait fait disparaître du monde Celui qui en était la lumière. Le dimanche, le premier jour de la semaine, est le jour du Seigneur. Il rappelle sa puissance en résurrection. C'est le jour de son triomphe sur Satan et la mort; le commencement du jour éternel. C'est le jour où, ressuscité, il se trouve pour la première fois au milieu des siens assemblés après le message confié à Marie de Magdala. Ne convenait-il pas qu'en ce jour son souper, la cène du Seigneur, fût offert à ses bien-aimés? Nous nous rappelons ensemble de Christ qui a été mort, mais qui maintenant est vivant aux siècles des siècles, et qui, nous ayant rachetés par sa mort, nous a amenés avec lui sur le terrain d'une nouvelle création, de sa vie de résurrection. La cène rappelle sa mort, le jour rappelle sa vie.

Ces dernières lignes ne sont nullement écrites pour blâmer les frères qui, en certaines occasions où ils sont rassemblés, rompent le pain un autre jour que le premier de la semaine, toutefois nous pensons que c'est une chose à peser devant le Seigneur.