Quels sont les caractères d'un service fidèle?

ME 1885 page 348 -  Marc 14: 9

 

«En quelque lieu que cet évangile soit prêché, dans le monde entier, ce que cette femme a fait sera aussi publié en mémoire d'elle».

Quelqu'un d'entre vous, bien-aimés, sera peut-être tenté de demander la raison de cette parole du Seigneur, et aura de la peine à saisir le rapport qu'il y a entre l'acte de cette femme et la prédication de l'évangile dans le monde. C'est ce que nous comprendrons, je le pense, si nous nous rappelons quel est le but final de Dieu, en faisant parvenir jusqu'à nous le témoignage de sa grâce. Nous connaissons le résultat immédiat pour la conscience réveillée par le sentiment de ses besoins. La croix de Christ lui est présentée pour faire face au jugement de Dieu sur le péché, et nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ (Romains 5: 1). Que de choses il y aurait à dire sur la manière dont on arrive à posséder comme une chose actuelle la faveur de Dieu et à y demeurer, sur la joie de l'espérance qui, par anticipation, jouit de la gloire de Dieu, et se fortifie ainsi pour les épreuves du chemin; et aussi, sur la joie que nous avons même dans les épreuves, parce que nous faisons la précieuse expérience que Dieu s'y trouve, lui le couronnement de notre joie (Romains 5: 1, 2, 11). Nous voyons dans l'évangile non seulement de quel état nous avons été tirés, mais aussi dans quelle position nous sommes introduits, nos coeurs trouvant leur repos dans la maison du Père, où nous sommes «rendus agréables dans le Bien-aimé». C'est là que nous attendons encore la révélation d'un mystère d'amour divin. Il y a des conseils de Dieu relatifs à la gloire et à la joie de Christ, conseils cachés de toute éternité à d'autres générations, mais qui nous ont été révélés maintenant, et qui nous concernent, nous qui avons été donnés à Christ pour être son Eglise, son corps, son épouse.

Quelles précieuses révélations de l'amour de Dieu, bien-aimés! Et cependant, le but de Dieu en nous les communiquant, va bien au delà. Il voulait nous faire connaître Christ, comme étant Celui en qui il trouvait son bon plaisir. Quelle grâce que celle qui, non seulement nous a sauvés de l'enfer, mais qui nous a rendus participants des joies mêmes de Dieu! Car le Seigneur Jésus est l'objet éternel de sa joie. Jamais, avant que le salut fut pleinement connu, nos coeurs n'auraient pu comprendre ces choses. Mais maintenant que ce salut nous appartient en Christ (et bien plus encore que nous ne pourrons jamais le comprendre), Dieu veut que nous appréciions Christ comme il le fait lui-même; il veut nous amener à comprendre sa valeur et son excellence, afin que, en faisant complètement abstraction de nous-mêmes et de tout le reste, nous puissions adorer et servir Christ en le contemplant. Alors, l'évangile aura accompli parfaitement le but pour lequel il a été donné.

C'est ce que nous avons dans le livre de la Révélation de Jésus Christ. Quand nous voyons les rachetés de toute tribu, et langue, et peuple, et nation, autour du trône (Apocalypse 5), quel est l'objet qui attire les regards de tous? «C'est un agneau immolé». Tous les coeurs sont occupés de lui, les couronnes sont jetées à ses pieds, et toutes les voix entonnent ses louanges. Jésus seul absorbe leurs pensées pendant toute l'éternité.

Qu'étaient-ils autrefois? Qu'étions-nous? Morts dans nos offenses et dans nos péchés (Ephésiens 2: 1); étrangers à la vie de Dieu (Ephésiens 4: 18); sans Christ, sans espérance (Ephésiens 2: 12). Mais maintenant, «nous avons été approchés» par le sang de Celui qui a été immolé (Ephésiens 2: 13), initiés aux profondeurs des secrets de Dieu et à ses pensées sur les perfections de son Fils. Ainsi, le but de Dieu est atteint — d'autres que lui ont connu, aimé et apprécié son Bien-aimé, trouvant en lui la joie par excellence, le ciel même de leurs cieux, Des pécheurs ici-bas ont été amenés en communion de pensées avec Dieu dans le ciel. Qui, dans le ciel, pourrait entonner comme eux le: «Tu es digne», repris pour ainsi dire par les anges et par tout l'univers dans un cantique éternel? Il y aura dans le ciel une riche, glorieuse monotonie, un nom répété à toujours: Jésus, Jésus, Jésus!

Voilà donc, bien-aimés, quel est le but et le désir de Dieu dans l'évangile. Sommes-nous en sympathie avec le Seigneur quand nous le prêchons? Est-ce notre but de faire connaître le Seigneur Jésus avec tout ce qui charme et attire dans sa personne adorable? Est-ce de le présenter de telle sorte qu'il puisse être reconnu comme «le porte-bannière entre dix mille» (Cantique de Salomon 5: 10); comme Celui dont «toute la personne est désirable?» (Cantique de Salomon 5: 16). Est-ce là le but de notre service? Sa gloire, sa beauté, et ce qui attire en lui, tout cela est-il constamment devant nos yeux?

Voilà quelle semble être la liaison des pensées dans l'esprit du Seigneur, au moment où a lieu ce souper dans la maison du lépreux.

Jésus s'y trouve, lui, le Fils que le Père aimait de toute éternité. «Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui, ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle» (Jean 3: 16). Nous le voyons là, au milieu des hommes, assis à table dans la maison de Simon le lépreux, à Béthanie. Ah! il est méprisé et délaissé des hommes (Esaïe 53: 3), qui ne voient point d'apparence en lui pour le faire désirer (Esaïe 53: 2). Les principaux sacrificateurs et les scribes cherchaient, en ce moment même, le moyen de se saisir de lui par ruse, pour le mettre à mort. Voilà le cas que l'homme faisait de Christ! Quel coup pour le coeur de Dieu! Dieu avait dit: «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai trouvé mon plaisir». Mais nous, oui nous avons tous été de ce nombre, nous avons caché nos faces de lui; il était méprisé, et nous n'avons eu pour lui aucune estime (Esaïe 53: 3). Le péché et l'incrédulité aveuglaient nos yeux et nous empêchaient de le reconnaître.

Pendant que les hommes conspiraient ainsi contre lui, il y avait quelqu'un au moins, dans cette maison, qui entrait en quelque mesure dans la pensée de Dieu au sujet de Christ. Tous se réjouissaient d'être assis à table avec lui, heureux d'être près de lui (et avec raison), mais il y avait une personne qui était au-dessus de toutes les autres par ses pensées. Marie — car c'était elle, comme nous le dit Jean — était occupée de Jésus, et, en le faisant, n'avait d'autre but que lui-même. L'enseignement qu'elle avait reçu auparavant l'avait conduite à cela. Marie, nous est-il dit, se tenait assise aux pieds de Jésus, écoutant sa Parole, pendant que d'autres étaient tout occupés de leur service (Luc 10: 39). Elle avait choisi «la bonne part qui ne lui serait point ôtée» — elle était occupée de Lui. Déjà ici-bas elle avait bu à la source de la joie céleste. Jésus, déjà maintenant, était pour elle son tout. C'était aux pieds de Jésus que Marie avait été à l'école, c'est là qu'elle avait appris à connaître plus intimement ce qu'il était. La seule leçon qu'elle avait apprise, c'était Jésus, dans sa valeur intrinsèque. Ses yeux commençaient à s'ouvrir à sa beauté incomparable; tellement qu'à la fin nous la voyons devenue comme morte à tout le reste. Au milieu de la scène qui est devant elle, Jésus seul l'intéresse, lui seul absorbe ses pensées. Elle oublie les hôtes, le souper, tout en un mot, elle ne voit que Celui qu'elle adore. Elle semble dire en le regardant: «Je n'aime que lui». Ses paroles ne sauraient exprimer le sentiment de la valeur du Seigneur; aussi la voit-on, avec une intelligence donnée de Dieu, briser le précieux vase d'albâtre, plein de parfum, et le répandre sur sa tête. Et ainsi, dans le silencieux langage d'un coeur trop plein pour rien exprimer, elle donne à Celui qui seul en est digne, tout ce qu'elle a de plus précieux sur la terre. Elle entrait dans les pensées de Dieu. — Quelle valeur cela avait pour le coeur de Christ, quoique les autres ne comprissent pas cet acte!

Il est dans la nature de l'homme d'aimer à être connu et compris. Ce désir se trouve aussi en Christ, selon la perfection de son humanité. Pendant son ministère sur la terre, comme les villes où il avait accompli la plupart de ses miracles ne voulaient pas se repentir, il dit: «Personne ne connaît le Fils, sinon le Père» (Matthieu 11: 27). Non compris, inconnu aux hommes, il se repose avec joie dans cette pensée: Mon Père me connaît.

Mais nous trouvons ici quelqu'un qui, enseigné de Dieu, semblait avoir saisi quelque chose de ces perfection, dans lesquelles le Père trouvait ses délices. Marie commençait à entrer dans Ses pensées au sujet de son Fils bien-aimé. C'est ce qu'elle avait appris dans le secret, en marchant dans la communion avec le Seigneur. Elle avait été ainsi rendue capable d'entrer dans ces pensées, et maintenant aucune parole humaine ne suffisait à Marie pour exprimer la valeur de Sa personne bénie.

C'est pour donner essor aux sentiments qui remplissent son coeur, qu'elle répand ce parfum sur sa tête. C'est ainsi qu'elle l'adore et le sert. Dieu, mes bien-aimés, ne jouissait-il pas de voir le Seigneur Jésus apprécié ainsi par cette faible femme? Certainement il en jouissait. C'est sa volonté que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père (Jean 5: 23). C'est là le résultat qu'il attend de la prédication de l'évangile. Il est dit: «C'est pour vous qui croyez, qu'elle (la maîtresse pierre du coin) a ce prix» (1 Pierre 2: 7). Marie était de ceux-là.

Ah! n'arrive-t-il pas souvent qu'un grand déploiement de zèle, d'ardeur et d'activité, découle d'une tout autre source que d'un coeur qui apprécie Christ? C'était ce qui manquait à Marthe. Elle paraissait s'occuper de Jésus et s'employer à le servir. Mais que dit-il? Faisons-y attention. A ses yeux, le service n'a de valeur que dans la mesure où le coeur l'a en vue, lui, comme son premier objet. Marthe était «distraite par beaucoup de soins» (Luc 10: 40). Elle mettait le service à la place de Jésus. Il l'aime trop pour consentir à ce que son coeur soit ainsi absorbé, il veut qu'elle jouisse de lui. Marie entrait dans sa pensée; elle sentait que ce que le Seigneur voulait avant tout, c'était son coeur, et elle le lui donna. Marthe cherche à distraire aussi Marie, mais celle-ci veut rester aux pieds de Jésus, l'écouter, lui qui trouve son bonheur à se révéler à elle; et Jésus met le sceau de son approbation sur le choix de Marie: «Marthe, Marthe, tu es en souci et tu te tourmentes de beaucoup de choses, mais il n'est besoin que d'une seule; et Marie a choisi la bonne part qui ne lui sera pas ôtée» (Luc 10: 42).

Bien-aimés, dans ces jours d'activité générale, n'avons-nous pas à nous demander, en la présence de Dieu, jusqu'à quel point nos coeurs sont avec lui dans cette activité? Ne sommes-nous pas souvent (et par notre service même) entraînés loin de la position où nous devons être, — c'est-à-dire aux pieds de Jésus? N'est-ce pas le secret de notre manque de force et de nos constantes défaillances?

Le Seigneur Jésus n'a pas été le premier but de la chose que nous avons entreprise, ou de la parole que nous avons prononcée; et ainsi, elle a perdu toute valeur à ses yeux. Demandons-nous donc si c'est de lui-même que nous sommes occupés. On peut se donner beaucoup de mouvement, s'agiter dans tous les sens pour le service, sans que — loin de là! — le coeur se soit complètement donné à lui. Ce qu'il aime, c'est un coeur qui lui soit entièrement dévoué. Il ne se contente pas d'une partie de nos coeurs. Il veut le tout. S'il a consenti à répandre son sang pour nous racheter et nous rendre siens, tout indignes que nous soyons, refuserons-nous de lui donner nos coeurs? Marie s'est donnée pour être à lui seul. S'il remplit le coeur de Dieu, n'est-il pas digne de remplir le nôtre? Christ est l'objet central des pensées de Dieu. Quand il est notre centre à nous, tout va bien. C'était le cas pour Paul. Christ était l'objet de son coeur: «Pour moi, vivre c'est Christ», et il estimait toute autre chose comme des ordures (Philippiens 1: 21; 3: 8).

Mais, bien-aimés, en tout cela, ai-je exprimé un blâme contre le service? Non, mais je cherche seulement à le mettre à sa place, de manière à ce qu'il soit agréable au Seigneur. Un coeur qui, comme Dieu, a Christ pour objet, possède la source et la puissance du service; il sera vraiment en communion avec les pensées de Dieu, quand les paroles du Maître résonneront à nos oreilles. «Allez par tout le monde, et prêchez l'évangile à toute la création» (Marc 16: 15). Est-il possible que quelqu'un de nous soit assez peu en communion avec Dieu pour ne pas chercher à gagner des âmes pour Christ? Travaillons, bien-aimés, pendant qu'il est jour; la nuit vient pendant laquelle personne ne peut travailler. Mais tout service a ses pièges. Prenons garde qu'en parlant de lui aux autres, nos propres coeurs ne soient froids et insensibles à son amour. Christ n'a pas la première place dans nos affections, et au lieu de se juger en confessant qu'il en est ainsi, afin que la communion puisse être rétablie, le coeur qui a la conscience de cet état, se jette avec une ardeur sans trêve ni repos, dans l'activité du service, mais cela ne fait que maintenir la distance en voilant la condition réelle de l'âme. C'était un piège pour Marthe que le zèle même qu'elle déployait pour bien recevoir le Seigneur. Marie, occupée de lui seul, à l'exclusion de tout autre intérêt, put, quand le temps fut venu, lui rendre le service le plus exquis qui lui ait jamais été rendu sur la terre.

Et qu'est-ce qui le rendait si agréable au Seigneur? C'est qu'il lui était offert par un coeur qui lui était entièrement dévoué; et la moindre chose que l'on fait en l'ayant lui pour objet, est agréable à ses yeux, ne fût-ce qu'un verre d'eau donné en son nom à l'un de ses disciples. Bien-aimés, il s'avance, le jour solennel où sera éprouvé tout ce que nous avons paru faire pour Christ. Et alors tout service sera mesuré à la place qu'Il aura occupée dans les affections et les pensées du serviteur.

Voilà en quoi Marthe manquait, voilà ce qui procura à Marie l'approbation du Seigneur. Son coeur était plein de Christ, son service en était l'expression, et prit ainsi le caractère de culte.

C'est là toujours ce qui caractérise le vrai service. Marie savait comment faire la chose convenable en temps convenable, aussi le Seigneur prononça-t-il sur elle ces paroles d'approbation: «Ce qui était en son pouvoir, elle l'a fait; elle a anticipé d'oindre mon corps pour ma sépulture» (Marc 14: 8).

Il ne veut pas qu'on inquiète cette femme: «Laissez-la, dit-il; pourquoi lui donnez-vous du déplaisir? Elle a fait une bonne oeuvre envers moi» (Marc 14: 6). En vérité, il n'y avait personne là qui pût apprécier ce service, que Celui en faveur duquel il s'accomplissait. Judas l'appelle une perte; les autres disciples en font autant; mais Marie était en communion avec la pensée du Seigneur. Ce qu'elle a fait lui plaît: cela suffit! Hélas! bien-aimés, cette fausse appréciation des disciples est humiliante aussi pour nous. Ils n'auraient pas regardé ce sacrifice comme une perte, s'il avait été fait pour les pauvres; mais ils appellent une perte ce qui avait sa source dans un entier dévouement à Christ. Voilà la nature de l'homme! Et il en est encore ainsi. Qui est-ce que le monde exalte? Ceux qui se consacrent à des oeuvres de charité ou de philanthropie; tandis qu'il taxe de folie celui qui renonce à quelque chose pour Christ. Ce qui aux yeux du monde est du gaspillage, est précieux aux yeux de Dieu, parce que cela a été fait pour Christ. L'acte de Marie est précisément ce qu'il attend de tous ceux qui ont été amenés à le connaître.

Mais pour que le coeur soit ainsi libre de s'occuper uniquement de Christ, il faut qu'il y ait d'abord un repos absolu et complet quant à toute question du péché. C'est la croix de Christ qui y pourvoit, car le croyant y voit non seulement ses péchés ôtés pour toujours, mais il s'y voit lui-même. Là est la fin de tout ce que je suis, — jugé, condamné, crucifié avec Christ, et enseveli: «Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus» (Romains 8: 1). Aussi longtemps que l'oeuvre de Christ n'est pas pleinement saisie, le moi occupe encore nos pensées. On veut le perfectionner, l'améliorer, ou s'en débarrasser. Dès lors, rien d'étonnant que le coeur soit impuissant à s'élever aux pensées de Dieu au sujet de Christ.

Ceux qui sont allés plus loin que le simple repos de la conscience au sujet du péché, ont vu la fin du moi à la croix; ils se réjouissent à la pensée que la vie, la justice et l'acceptation leur appartiennent dans le Christ ressuscité. Oh! quelle précieuse découverte quand, pour la première fois, nous comprîmes qu'il était ainsi à nous! Nous pûmes alors chanter, comme nous le faisons souvent encore:

Jésus est notre ami suprême,

O quel amour!

Lazare a dû éprouver quelque chose de ce bonheur, quand il était à table avec Jésus. Il en est ainsi de l'épouse, dans le Cantique des Cantiques, quand elle dit: «Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui», et ainsi elle se console aussi bien qu'elle peut, «jusqu'à ce que l'aube se lève et que les ombres fuient» (Cantique de Salomon 2: 16, 17). Remarquez cette première pensée: «Il est à moi». Ses plus précieux intérêts sont en Christ; cependant, c'est elle qui vient en premier lieu. Arrive-t-il à beaucoup d'entre nous, bien-aimés, d'aller jusque-là et pas plus loin? Nous sommes contents et heureux de ce que nous avons en Christ, et ainsi nous ne faisons pas de progrès, selon la pensée de Dieu, dans la connaissance de ce que Christ est en lui-même.

Mais poursuivons, et nous verrons ce progrès se réaliser. Plus loin, en effet, celle qui parlait ainsi peut mettre en premier lieu les intérêts de son Bien-aimé: «Je suis à mon bien-aimé, dit-elle maintenant, et mon bien-aimé est à moi» (Cantique de Salomon 6: 3). Sa première pensée, c'est le fait qu'il la possède, quoique dans son coeur elle pense encore à ce qu'elle possède. Mais plus loin encore, nous voyons qu'elle s'oublie en pensant à l'amour qu'il éprouve pour elle. Elle se perd dans son amour; et si elle ajoute quelque chose à cette déclaration: «Je suis à mon bien-aimé», c'est seulement pour parler de nouveau de ce qu'elle connaît de ses pensées: «Son désir se porte vers moi» (chapitre 7: 10). Qu'il nous est précieux de pouvoir nous perdre dans la découverte merveilleuse de ce que nous sommes pour lui!

Mais Marie s'élève plus haut encore dans la connaissance du Seigneur Jésus. Et nous, serons-nous satisfaits d'un degré inférieur à celui qu'a atteint notre soeur avant nous? Il est précieux de savoir qu'il est à nous; plus précieux encore de connaître la place qu'il nous a faite dans son coeur, mais cela ne doit servir qu'à nous faire entrer plus profondément dans l'intelligence de Celui qui nous a tant aimés.

C'est ce que je trouve aussi dans l'expérience de l'épouse du Cantique. Car quand on lui demande (5: 9): «Ton bien-aimé, qu'est-il de plus qu'un autre bien-aimé?» elle répond: «Il est le porte-bannière entre dix mille», puis elle parle non pas des bénédictions qu'elle a reçues de lui, ni même de son intérêt pour elle, mais de tous ses attraits divers, et elle finit en disant: «Toute sa personne est désirable».

Ainsi, bien-aimés, avançons dans la connaissance du Seigneur et de son incomparable perfection, jusqu'à ce que nous puissions dire, non pour l'avoir appris d'un autre, mais parce que nous le savons personnellement: «Il est le porte-bannière entre dix mille». C'est pour cela que nous avons été attirés à lui, pour que, le connaissant lui et toute la perfection de sa personne adorable, nous puissions avoir communion avec le Père qui trouve son repos, sa joie et ses délices, dans le Fils de son amour.

L'Ecriture mentionne une autre circonstance remarquable, dans laquelle nous voyons quelqu'un entrer dans la pensée de Dieu et recevoir ainsi du Seigneur le sceau de son approbation. L'ancienne dispensation allait disparaître, mais avant que la nouvelle fût introduite, Jérusalem et le temple étaient encore le centre des pensées de Dieu. C'est ce que savait bien celle dont je parle; aussi, pour subvenir aux besoins de la maison de Dieu, la pauvre veuve jeta de son indigence deux pites dans le trésor; et c'était «tout ce qu'elle avait, toute sa subsistance» (Marc 12: 44).

Comme on aime à la voir entrer ainsi dans les pensées de Dieu, pour lequel elle oublie ses propres intérêts! Sans se soucier de sa pauvreté, elle donna tout ce qu'elle avait pour l'oeuvre de Dieu.

Cet acte était agréable au Seigneur. Il attira l'attention des disciples sur cette femme, car à Ses yeux elle avait jeté au trésor plus que tous ceux qui y avaient mis (Marc 12: 43). Mais, demandons-nous, quel est maintenant l'objet des pensées de Dieu? Nous le savons, car il nous a fait connaître le mystère de sa volonté. N'est-ce pas la gloire de Christ dans son corps qui est l'Eglise, — formée de matériaux qui étaient des pécheurs trouvés morts dans leurs péchés, — pour devenir «la plénitude de Celui qui accomplit tout en tous?»

Si tel est donc le conseil actuel de Dieu pour la gloire et la joie du Seigneur Jésus, demandons-nous s'il occupe réellement sa place dans nos coeurs et dans notre service? Sommes-nous prêts à entrer nous-mêmes et tout ce que nous avons, dans la voie de l'accomplissement de cette pensée de Dieu? Pour celui qui l'a comprise, elle deviendra le but de son service. Le monde prend plaisir à ce qui concourt au bien-être de l'homme et estime tout le reste comme de nulle valeur. Mais ce qui réjouit le coeur de Dieu, c'est ce qui a pour objet la gloire de Christ. Cela seul a de la valeur à ses yeux. Son approbation ne nous suffit-elle pas? Celui qui s'en contente est en état de mépriser aussi bien la désapprobation que la louange du monde. Bien-aimés, soyons en garde contre la flatterie du monde. Elle est plus dangereuse que son mépris. Nous savons à qui nous avons à plaire. Que ces paroles de Christ: «Elle a fait ce qu'elle a pu», puissent nous être appliquées et qu'elles nous suffisent!

«Pour moi, vivre c'est Christ». Que Christ soit l'objet qui règle notre vie dans la puissance de l'Esprit de Dieu! Il n'y a pas de repos, tant que le coeur est partagé entre Christ et le moi, ou le monde, ou les amis ou nos frères. Il connaît les joies de Dieu, celui qui fait de Christ et de Christ seul son objet.

Puissions-nous, bien-aimés, être trouvés, comme Marie, aux pieds du Maître! Puissions-nous écouter la voix de Jésus telle qu'elle se fait encore entendre à nous dans sa Parole! Et si nous sommes occupés ainsi, l'Esprit de Dieu prendra plaisir à dérouler toujours plus, devant nous, toutes les richesses de son amour. C'est son office et sa joie de prendre les choses de Christ et de nous les montrer, pour que nos coeurs soient complètement et uniquement à lui. «Hélas! dira quelqu'un, je n'ai pas encore compris combien Christ est précieux, mon coeur est froid en présence de son amour et insensible à sa grâce». Ne vous arrêtez pas là! Votre coeur ne pourra jamais être réchauffé par sa propre froideur. S'il est froid, vous ne serez jamais réchauffé en constatant seulement qu'il est froid. Ainsi vous ne ferez que vous refroidir encore. Vous ne serez réchauffé qu'en vous approchant de la source de la chaleur. O bien-aimés! pour nous, la source de toute lumière et de toute chaleur n'est-elle pas l'amour de Christ? Approchez-vous de son coeur, c'est la place qu'il vous donne, et celle que vous devez accepter avec joie. Reposez votre tête sur son sein. Vous répondez peut-être bien faiblement à son amour, mais le sien ne se mesure pas au nôtre. Il ne change pas; la mesure de son amour pour chacun de nous, c'est l'amour du Père pour lui. Jean ne s'appelait-il pas le disciple que Jésus aimait! Oui, mais cela veut dire que, par la foi, il prenait la place que Jésus avait donnée aux autres aussi bien qu'à lui, — la place qu'il veut que vous preniez, comme si son amour n'appartenait à personne d'autre qu'à vous. Un tel amour doit nécessairement fondre le coeur le plus froid qui l'accepte par la foi. Alors Christ sera naturellement le premier dans nos pensées et l'objet qui les absorbera toutes. Il en était ainsi de Marie; et c'est pourquoi son service était si agréable à Jésus. Il avait sa source dans un coeur qui était tout occupé de Lui, et qui connaissait l'excellence de sa personne. Le genre de résultat que Dieu a en vue en faisant proclamer l'évangile, était produit dans Marie. «En quelque lieu que cet évangile sera prêché dans le monde entier, ce que cette femme a fait sera aussi publié en mémoire d'elle» (Marc 14: 9). Bientôt, bien-aimés, nous le verrons face à face; alors nous connaîtrons comme nous avons été connus. Il n'y aura plus rien qui puisse détourner nos affections de lui. Nous ne rencontrerons plus de pièges dans notre service, car alors ce qui est l'objet de Dieu sera le seul objet de tous les coeurs.

Veuille le Seigneur que, dès maintenant, il en soit ainsi de chacun de nous!