La sacrificature du chrétien

ME 1886 page 166  - 1 Pierre 2: 4-9  (Darby J.N.)

 

Ce qui ressort des versets que nous venons de lire, c'est que les croyants sont constitués une famille de sacrificateurs: une sainte sacrificature d'un côté, une sacrificature royale de l'autre, deux expressions d'un même fait, résultant des deux sphères dans lesquelles s'exerce notre sacrificature — le ciel et la terre. Et ce grand privilège appartient à tous ceux qui possèdent la vie en Christ, le Fils du Dieu vivant, qui sont «des pierres vivantes», et comme tels s'approchent de lui et sont édifiés une maison spirituelle, une sainte sacrificature.

Nous ne sommes pas seulement des pécheurs sauvés. C'est la première chose dont nous avons besoin, sans doute, la première dont il nous faut avoir la pleine certitude, mais notre Dieu, dans sa grâce, à cause du prix qu'a pour lui son Fils bien-aimé et l'oeuvre que Celui-ci a accomplie, nous confère bien d'autres richesses. Un salut actuel et parfait, suivant lequel nous sommes devant lui sans aucune conscience de péchés, justifiés, en paix avec lui, jouissant de sa faveur et de l'espérance de la gloire; — une position parfaite en Christ devant lui, agréables dans le Bien-aimé, étant dans ce monde comme Christ est là-haut; — une relation des plus intimes, enfants de Dieu, participants de la nature divine, ayant la vie de Dieu comme nés de lui et adoptés comme fils, pour avoir part à son héritage dans la gloire, ayant notre place avec Christ dans la maison du Père; — de plus, possédant la même vie que Christ en haut, unis à lui par le Saint Esprit, qui nous scelle comme enfants de Dieu et qui est les arrhes de notre héritage, en même temps que par notre union avec Christ, la Tête glorifiée dans le ciel, il nous fait membres de son corps sur la terre; — voilà nos grands et précieux privilèges. Mais outre cette position et ces relations dans lesquelles la grâce nous a introduits et dont nous jouissons, il y a une dignité dont nous sommes revêtus, une fonction des plus élevées que nous sommes appelée à remplir, et qui est aussi un des fruits de l'oeuvre et de l'amour de Christ: c'est la sacrificature. Lui-même est notre grand souverain sacrificateur, mais chaque chrétien est aussi introduit dans cet office. Le cantique des saints, au commencement de l'Apocalypse, est: «A Celui qui nous aime, et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang; — et il nous a faits un royaume, des sacrificateurs pour son Dieu et Père; — à lui la gloire et la force aux siècles des siècles».

Telle est la dignité à laquelle il nous élève, et c'est pour la gloire de Dieu son Père; ne méconnaissons pas un si grand privilège. Comme il est Roi et sacrificateur, — bien qu'il ne soit pas encore manifesté sous ce double caractère, — il veut que les siens le soient aussi. Il est sacrificateur dans le ciel, accomplissant son office, comme Aaron lorsqu'il entrait dans le sanctuaire (voyez Lévitique 9: 2, 3), mais il est aussi sacrificateur selon l'ordre de Melchisédec, roi de Salem et sacrificateur du Dieu Très-haut, et cela sera manifesté quand il sortira du ciel et qu'il sera «sacrificateur sur son trône» (Zacharie 6: 13. Comparez Lévitique 9: 23, 24, où Moïse, associé avec Aaron, représente la royauté unie à la sacrificature). Nous participons à cette double sacrificature.

Dans le ciel, comme nous le montrent les chapitres 4 et 5 de l'Apocalypse, les saints glorifiés sont revêtus des insignes de la royauté et de la sacrificature. Comme rois, ils ont des couronnes et sont assis sur des trônes; le jugement leur est donné (Apocalypse 20: 4); comme sacrificateurs, nous les voyons rendre culte à Dieu et à l'Agneau. Mais, déjà sur la terre, cette dignité et cette fonction nous appartiennent: «Vous êtes une sacrificature royale;» «vous êtes une sainte sacrificature».

Pour entrer de plus près dans notre sujet et comprendre ce qui convient à notre sacrificature et comment elle s'exerce, jetons un rapide coup d'oeil sur la sacrificature en Israël. A la tête des sacrificateurs se trouvait Aaron, type de notre souverain sacrificateur, Christ. Nous lisons les détails de sa consécration en Exode 29: 4-7. Premièrement, il est mis à part par le lavage d'eau en même temps que ses fils. Ainsi Jésus, dans sa prière à son Père, dit: «Je me sanctifie moi-même pour eux, afin qu'eux aussi soient sanctifiés par la vérité» (Jean 17: 19). Il s'est mis à part, pour nous, dans la position céleste et glorieuse qu'il a prise, afin que la connaissance vivante, selon la vérité, de ce qu'il est dans cette position, agisse en nous et nous mette ainsi aussi à part, — à part du monde pour Dieu, bien que, dans le monde, et revêtus là d'un caractère céleste. Ensuite le souverain sacrificateur était revêtu de ses saints vêtements de gloire et de beauté pour entrer en la présence de Dieu dans le sanctuaire, portant sur sa poitrine et ses épaules les noms des douze tribus du peuple de Dieu. Tel Christ, dans sa pureté parfaite, dans son caractère céleste et glorieux, paraît pour nous devant Dieu, nous portant sur son coeur, dans ses affections, intimes, et nous soutenant par sa puissance (lisez Hébreux 9: 24; 7: 25, 26). Enfin Aaron était oint de l'huile sainte, sans aucune aspersion de sang. Ainsi, notre précieux Sauveur, sans tache, ni souillure, n'avait pas besoin du sang d'un sacrifice pour que l'onction du Saint Esprit demeurât sur lui.

Il en est autrement pour les siens. La suite du chapitre 29 de l'Exode présente la consécration de la famille sacerdotale. Nous trouvons dans ce cas, d'abord le lavage d'eau, comme nous l'avons vu, puis l'aspersion du sang, ensuite l'onction d'huile, et enfin la présentation du bélier des consécrations. Or, ce qui avait lieu pour constituer la sacrificature sur la terre, en rapport avec un peuple terrestre, a lieu pour nous, non plus en figure, mais en réalité. Mais tandis que là, les sacrificateurs formaient une classe à part, au milieu du peuple de Dieu, sans qu'aucun des autres Israélites pût s'arroger cet honneur (Hébreux 5: 4, et voir Nombres 16: 1-10), nous ne saurions trop nous rappeler que maintenant tout le peuple de Dieu, tous les croyants sont sacrificateurs, comme l'aurait été Israël, s'il ne se fût pas placé sous la condition d'obéissance, au lieu de demeurer sous la dépendance de la grâce, et s'il n'eût pas transgressé (voyez Exode 19: 1-6).

Nous avons dit que notre consécration comme sacrificateurs n'a plus lieu en figure, mais en réalité. En effet, nous sommes tous nés d'eau et de l'Esprit, mis à part par ce lavage de la régénération, engendrés par la parole de la vérité; puis, pour enlever notre culpabilité et répondre aux droits de la justice de Dieu, nous avons part à l'aspersion du sang de Jésus Christ; par ce sang, nous sommes parfaitement lavés de tous nos péchés, et nous avons reçu l'onction de la part du Saint, le Saint Esprit de la promesse, par lequel nous sommes scellés. Nous sommes ainsi rendus propres à entrer dans le sanctuaire, en présence de Dieu même, dont la sainteté et la justice sont pleinement satisfaites; il n'y a plus devant lui, sur nous, de souillure ni de culpabilité, et de plus, en nous se trouve la puissance de l'Esprit pour réaliser notre position et les choses d'en haut, et ainsi pour adorer dans le sanctuaire, là où est Christ. Mais ne l'oublions pas, ce n'est pas un privilège appartenant à quelques-uns seulement, c'est celui des plus faibles croyants, car tous sont lavés, justifiés et oints du Saint Esprit (1 Corinthiens 6: 11). Oui, tous les croyants sont revêtus de la robe sacerdotale, tous sont consacrés pour être «une sainte sacrificature». Sainte, c'est-à-dire mise à part par la triple efficacité de l'eau, qui représente la parole (voyez Ephésiens 5: 26; Jean 15: 3; 17: 17), du sang qui expie, et de l'Esprit Saint présent en nous et agissant en nous; mise à part pour ce service béni du culte rendu dans le sanctuaire, dans le ciel même où nous avons accès.

Cher lecteur, réalisez-vous l'excellence de la dignité dont vous êtes revêtu, l'honneur qu'elle vous confère, le sérieux qu'elle imprime sur la vie, mais aussi la félicité dont est accompagné l'exercice de cette sainte sacrificature?

Nous entrons dans le sanctuaire pour rendre culte. Quelle est, en effet, la fonction des sacrificateurs? Approcher de Dieu et offrir des sacrifices. La maison spirituelle, la sainte sacrificature est instituée «pour offrir des sacrifices spirituels». Il ne s'agit plus, comme autrefois chez les enfants d'Israël, d'offrir des victimes. La victime sans tache, préfigurée par tous les sacrifices en Israël, la victime par laquelle tous nos péchés sont ôtés, a été offerte une fois pour toutes; c'est l'oblation du corps de Christ faite une fois (voyez Hébreux 9: 25, 26; 10: 10, 12, 14); le sang de cette victime a été présenté à Dieu et demeure devant lui dans son efficacité perpétuelle. L'oeuvre parfaite de la rédemption a été accomplie; c'est en vertu de cette oeuvre que nous approchons de Dieu. Christ n'offre plus; il s'est offert une fois lui-même à Dieu sans tache, et, entré dans le ciel, il est là notre grand souverain sacrificateur, paraissant pour nous devant la face de Dieu, et intercédant pour nous.

Mais la sainte sacrificature offre des sacrifices, et ce sont des sacrifices spirituels, en rapport avec la nature de Dieu qui est Esprit et qui demande à être adoré en esprit et en vérité; selon la vie que nous possédons, car nous vivons par l'Esprit, et dans la puissance de ce même Esprit par lequel nous rendons culte (voyez Jean 4: 24; Galates 5: 25; Philippiens 3: 3). Mais quels sont ces sacrifices? Des louanges et des actions de grâces (Psaumes 50: 14, 23; Hébreux 13: 15), produites en nous par le Saint Esprit qui déploie devant les yeux du coeur, animé de la vie de Dieu, les grâces excellentes dont nous jouissons en Christ, et la beauté parfaite de ce précieux Sauveur, seul objet digne des pensées et des affections de la vie divine.

Nous voyons dans Exode 29: 22-25, ce que présentaient les sacrificateurs d'autrefois dans leur consécration à Dieu, après avoir été mis à part par l'eau, le sang et l'onction d'huile sainte. Ils venaient les mains pleines de ce qu'il y avait de plus excellent dans la victime et de ce qui figurait Christ dans son humanité parfaite, savoir les pains et les gâteaux sans levain. Après avoir présenté ces choses devant l'Eternel, le tout était brûlé sur l'holocauste, en odeur agréable à l'Eternel. N'est-ce pas là un type remarquable de nos sacrifices spirituels? Pour le voir dans le passage de l'épître de Pierre qui nous occupe, remarquons, au verset 4, comment la Parole nous présente tout d'abord Christ, pour remplir de lui nos coeurs et nos pensées. Il est «la pierre vivante, rejetée des hommes, choisie et précieuse auprès de Dieu». Immédiatement, se trouve placée devant nous, la gloire de sa personne dans sa puissance de vie: Il est le Fils du Dieu vivant, fondement inébranlable et indestructible de l'Eglise; «le vivant» qui a été mort, mais qui est «vivant aux siècles des siècles» (Matthieu 16: 16-18; Apocalypse 1: 18). Mais ensuite nous sont présentés son abaissement et ses souffrances: Il a été rejeté des hommes; «méprisé et délaissé des hommes, homme de douleurs et sachant ce que c'est que la langueur, et comme quelqu'un de qui on cache sa face; il est méprisé, et nous n'avons eu pour lui aucune estime. Certainement, lui a porté nos langueurs, et s'est chargé de nos douleurs; et nous, nous l'avons estimé battu, frappé de Dieu et affligé» (Esaïe 53: 3, 4). Tel il a paru aux yeux des hommes:

Sous un voile d'ignominie,

Sous la couronne de douleur.

Mais quelle est l'appréciation de Dieu? Choisi, entre tous, comme homme obéissant, ainsi que le dit le prophète: «Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu en qui mon âme trouve son plaisir» (Esaïe 42: 1), choisi pour occuper la place la plus élevée et être l'espérance de ceux qui croient; puis précieux auprès de Dieu, ses délices dans l'éternité passée comme son Fils unique; ses délices quand il passait dans l'humiliation sur la terre, son Fils bien-aimé, en qui il trouvait son plaisir; ses délices, maintenant que comme homme il est entré dans la gloire du ciel. Ce qui est précieux à Dieu, quelle en doit être la valeur! Et pour nous qui croyons, il a ce même prix.

L'Esprit de vérité prend ainsi des choses de Christ et les montre aux yeux de notre âme. Il déroule devant nous ce qu'il était, ce qu'il est et sera, son amour, ses grâces et ses gloires; l'Esprit Saint remplit ainsi nos coeurs de l'excellence de la personne bénie de Celui en qui le Père prend son plaisir; nos affections (celles du nouvel homme) sont portées vers lui, nous jouissons de lui, c'est avec tout notre être intérieur rempli de lui que nous nous présentons devant Dieu, et quel est le résultat? Les louanges et les actions de grâce surgissent et débordent; elles montent vers Dieu du coeur et s'expriment par nos lèvres; elles montent vers le Dieu qui nous a donné son Fils, que nous connaissons par lui, comme Père, comme amour et lumière, et duquel nous avons été approchés par le sang de Christ. Nous voyons resplendir ce qu'il est et ce qu'il est pour nous, dans la face de notre Sauveur, soit que nous pensions à Jésus sur la terre et sur la croix, soit que nous le contemplions dans la gloire. Pour offrir des sacrifices spirituels, il faut que le coeur soit rempli de Christ. S'il en est ainsi, la louange en sortira nécessairement, peut-être pas en beaucoup de paroles, peut-être pas avec une grande correction de langage, avec des paroles d'éloquence humaine, mais ce n'est pas à quoi Dieu regarde. Ainsi les sacrifices sont spirituels, selon la nature de Dieu, quant à leur objet et quant à la puissance qui les fait offrir. Que le Seigneur nous donne de goûter toujours plus les fruits exquis de la Canaan céleste, afin que nous venions avec nos corbeilles pleines devant Dieu. (Deutéronome 26).

Remarquons, de plus, que ces sacrifices que nous avons le privilège d'offrir à Dieu, lui sont agréables. Nous lui sommes agréables dans le Bien-aimé, et les sacrifices de louanges que nous offrons, quand le Bien-aimé remplit nos coeurs, lui sont aussi agréables. Notre Dieu prend plaisir à voir ceux que son Fils lui a amenés se nourrir de ce qui fait ses délices et lui en rendre grâces. Et n'est-ce pas une chose merveilleuse que de pauvres êtres tels que nous, des pécheurs qui étaient coupables et souillés, et maintenant encore remplis d'infirmités, puissent offrir quelque chose d'agréable à Dieu? Mais cela nous montre l'excellence, la plénitude, la perfection et la valeur infinie de l'oeuvre de Christ. Par lui, nous sommes lavés, purifiés, approchés de Dieu, et nos louanges montent vers son Dieu et notre Dieu comme un parfum d'agréable odeur. Sur cette pauvre terre souillée de tant de péchés, il y a eu autrefois un homme qui y passait, sur lequel Dieu abaissait un regard de complaisance, en qui il prenait son plaisir, et maintenant que Christ est remonté au ciel, sur cette même terre, il y a quelque chose d'agréable à Dieu — ce sont ces sacrifices que des pécheurs sauvés et rendus parfaits par Christ, lui offrent. Pensons, bien-aimé lecteur, à cet immense privilège, à cette sainte sacrificature qui nous revêt, pour que nous offrions des sacrifices spirituels agréables à Dieu, et que ce soit pour nous une chose précieuse de faire monter cet encens devant notre Dieu.

Mais ce n'est pas par nous-mêmes que nos sacrifices peuvent être agréables à Dieu. Sans doute, nous les offrons dans la puissance d'une nouvelle vie et conduits par le Saint Esprit, mais c'est encore dans la faiblesse et dans l'infirmité; tout dans nos louanges, dans notre culte, en porte les traces. Il y a, hélas! souvent bien du mélange dans nos pensées et nos sentiments, beaucoup de faiblesse et d'incorrection dans nos expressions. Mais un parfum exquis est placé sur nos offrandes, leur donne du prix et les rend acceptables et agréables à Dieu — c'est Christ. C'est par lui que nous offrons; et nos louanges, nos actions de grâces et nos adorations montent vers Dieu portés par toute l'excellence de la personne du Bien-aimé.

Que craindrais-tu donc, mon frère, qui restes toujours silencieux dans ces moments bénis où, réunis au nom de Jésus, nous offrons ensemble nos sacrifices, où nous adorons ensemble? N'avons-nous pas tous part à la sainte sacrificature? Ne sommes-nous pas tous sacrificateurs? Il est vrai que, selon l'ordre divin, les soeurs ne peuvent que se joindre, en silence, à l'expression des louanges et des actions de grâces qu'un frère offre pour l'assemblée, mais tout frère a le privilège d'ouvrir la bouche pour bénir, selon Dieu et par l'Esprit, cela va sans dire. Ton coeur n'est-il pas assez rempli de Christ, tes mains ne sont-elles pas chargées de ce qu'il y a d'excellent en lui pour le présenter à Dieu? Lève les yeux en haut, demande à être rempli de l'Esprit pour que les préoccupations de la terre fassent place à Christ; contemple ce Bien-aimé là où il est et où il t'aime. Quelque chose en toi a-t-il contristé l'Esprit? Va et confesse à Dieu qui est fidèle et juste pour pardonner, et la communion étant rétablie, laisse l'Esprit conduire tes pensées et tes affections en haut où est Christ: comme ressuscité avec lui, c'est ton privilège. Ne laisse pas ton âme être envahie par les choses de la terre; ce sable du désert souille les offrandes divines; que Christ occupe toute la place, et alors, de l'abondance du coeur, ta bouche parlera à la gloire du Sauveur. Tu es timide, peut-être, mais l'Esprit Saint ne l'est pas; tu ne sais pas parler, mais Dieu ne demande pas de longues et belles phrases. Cinq paroles, venant d'un coeur rempli de Christ, ne valent-elles pas mieux que dix mille paroles éloquentes sortant d'une bouche et d'un coeur sans Christ? Et sur tes offrandes, si petites et chétives soient-elles à tes yeux, Christ n'est-il pas le parfum exquis qui les rend agréables à Dieu? Christ nous approche de Dieu, Christ rend digne, Christ est la vie, Christ est l'objet, Christ est le parfum, il est tout: qu'à lui soit la gloire!

Où et quand offrons-nous nos sacrifices? Nous entrons, par la foi, dans le sanctuaire, dans le ciel même, en présence de Dieu, dans la pleine lumière de sa face; c'est là notre lieu de culte:

Lavés, justes, parfaits, nous entrons au saint lieu,

Dans la pleine clarté de la face de Dieu.

Et, si nous avons le privilège d'offrir sans cesse à Dieu, par lui, un sacrifice de louanges, le fruit des lèvres qui bénissent son nom, c'est surtout le premier jour de la semaine, réunis au nom du Seigneur, ensemble autour de sa table, que nous venons offrir nos sacrifices. Ce jour nous rappelle sa résurrection, son triomphe sur Satan et sur la mort, son entrée dans une vie impérissable où il nous introduit; et le pain et le vin sur la table, nous parlent de l'amour qui l'a fait descendre pour nous jusque dans la mort, afin de nous amener à son Dieu et son Père, pour l'adorer comme notre Dieu et notre Père. Comment nos coeurs ne se sentiraient-ils pas saisis et pénétrés, en ce moment, de toute la grandeur et la beauté de son oeuvre et de sa personne? Si nous sommes réellement dans la puissance de l'Esprit, occupés de Christ seul, devant notre Dieu, alors, ayant laissé dehors toutes les pensées de la terre, tous, avec nos coeurs, nos mains et nos corbeilles pleines de Christ, nous bénirons et adorerons.

Mais est-ce seulement en ces moments bénis que nous serons sacrificateurs? En sortant du lieu où nous avons adoré ensemble, est-ce que nous déposons nos robes sacerdotales pour redevenir des hommes vivants dans le monde? Non; nous demeurons sacrificateurs, nous avons été consacrés pour cela; ce caractère ne s'efface point. Nous pouvons, hélas! le ternir par nos pensées et notre marche terrestres et mondaines, souiller, pour ainsi dire, notre robe, et ne pas manifester le caractère sacré dont nous sommes revêtus, mais nous sommes toujours des sacrificateurs. Quelle perte pour nous si notre vie n'en porte pas l'empreinte!

Ce n'est pas seulement que nous pouvons individuellement offrir sans cesse, par Christ, un sacrifice de louanges, le fruit des lèvres qui bénissent ou confessent son nom; ni que nous offrons nos corps, nos membres, nos actes par notre corps comme instrument, en sacrifice vivant et saint, agréable à Dieu. Nous sommes aussi une sacrificature royale. Cette sacrificature que notre Seigneur exercera dans la perfection, quand il reviendra et sera sacrificateur sur son trône, nous l'exerçons déjà sur la terre, qui est la sphère où elle se déploie, selon la gloire et les richesses de notre Dieu. Nous l'exercerons d'autant mieux, que nous aurons mieux saisi notre place et notre caractère comme la sainte sacrificature dont la sphère est le ciel. Des rois sont riches; ils répandent des bienfaits. En sortant du sanctuaire, en revenant, pour ainsi dire, sur la terre, nous sommes toujours sacrificateurs, mais rois aussi, bientôt héritiers avec Christ et devant régner avec lui. En attendant, nous exerçons notre royauté en répandant les richesses que Dieu nous a départies par grâce, et dont nous jouissons nous-mêmes.

C'est un trésor qui jamais ne s'épuise; plus on y puise pour soi, plus on désire que d'autres y participent. Sont-ce des biens matériels? Non; ce sont les immenses richesses de la grâce. Nous annonçons les vertus, tout ce qui est en Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière, tout ce qu'il est en puissance, en grâce, en amour, en vie, en espérance, en consolation. C'est pour cela que nous sommes une sacrificature royale. Quel trésor inépuisable que celui dont nous sommes enrichis et dont nos mains royales peuvent répandre les richesses! Ah! ne perdons pas la conscience de cette haute dignité, de ce privilège magnifique de pouvoir faire connaître Christ; non pour nous enorgueillir, — de quoi serions-nous orgueilleux? tout est par grâce, — mais pour jeter, d'une part, nos couronnes en adoration devant Celui qui nous a faits un royaume, des sacrificateurs pour Dieu son Père, et d'une autre, pour appeler les pécheurs à participer aux mêmes richesses. Sans doute, nous sommes appelés à faire part de nos biens matériels: «Dieu prend plaisir à de tels sacrifices» (Hébreux 13: 16); mais le plus pauvre en biens de ce monde, celui qui a besoin, peut-être, que ses frères l'assistent, un malade sur son lit d'infirmités, n'en fait pas moins partie de la sacrificature royale. «Je n'ai ni argent, ni or», dit Pierre à l'impotent; «mais ce que j'ai, je te le donne: Au nom de Jésus Christ le Nazaréen, lève-toi et marche». Pierre, pauvre comme il l'était, a exercé la sacrificature royale; il a annoncé et montré la vertu du nom de Jésus, de ce nom qui ne guérit pas seulement les malades, mais qui sauve les pécheurs (Actes des Apôtres 4: 12); il a donné à l'impotent ce qu'aucun trésor de la terre n'aurait pu lui acquérir.

Paul et Silas aussi, dans la prison à Philippes, exercent cette sacrificature. Ensanglantés, les vêtements déchirés, les pieds attachés au poteau, dans les ténèbres du cachot, ils sont des rois. Ils n'ont à offrir au geôlier ni argent, ni or; à quoi d'ailleurs cela servirait-il à un homme qui se voit perdu et qui crie après le salut? Mais ils ont Christ à lui donner: «Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé». Avec Christ il possède tout; lui aussi est amené des ténèbres à la lumière, et devient sacrificateur et roi. Paul et Silas, pauvres, méprisés, impuissants selon le monde, ont annoncé et montré les vertus, la merveilleuse puissance de Christ pour sauver et enrichir une âme pour l'éternité.

C'est ainsi que nous pouvons, nous aussi, dans notre mesure et dans notre sphère d'action, exercer notre sacrificature royale; annoncer les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière; faire connaître et répandre, comme des rois, les richesses de Christ, richesses de grâce, de consolation, de paix, de joie, d'espérances célestes, et quelles richesses valent celles-là?

Bien-aimés lecteurs, comment jusqu'ici avons-nous répondu à la haute dignité qui nous a été conférée, par grâce, en vertu du sang de Christ?

Combien cela devrait sonder nos coeurs! Puissions-nous ne pas perdre de vue la double sacrificature dont Dieu en Christ et par Christ, a bien voulu nous revêtir, et l'exercer à sa gloire!