La lumière

 ME 1888 page 285

 

La lumière, en elle-même, est invisible (*), mais elle illumine tout. Ce que nous voyons autour de nous, dans le monde physique, n'est pas la lumière, mais la matière qu'elle éclaire. La voûte même du ciel, c'est-à-dire l'atmosphère, n'est rendue visible que par la lumière, qui luit sur elle et la traverse. Si nous pouvions être transportés dans l'espace vide, nous ne verrions pas la lumière même qui passe au travers, mais elle éclairerait et manifesterait nos personnes, comme aussi tout corps qu'elle rencontrerait.

(*) C'est par manière de parler que nous qualifions de visibles ou d'invisibles, les rayons du spectre solaire. Cela ne signifie pas précisément que les rayons mêmes soient visibles ou invisibles, mais qu'ils ont, ou n'ont pas, la propriété d'illuminer les surfaces.

La parole de Dieu se sert de ce fait comme d'une magnifique illustration des choses spirituelles et divines. «Dieu est lumière», tel est le message que nous avons reçu de lui, et «il n'y a en lui aucunes ténèbres». «Dieu est lumière», c'est sa nature. Il était éternellement lumière, avant même qu'il y eût un univers moral à illuminer, de même qu'il était éternellement amour, avant qu'il y eût une créature à aimer. «La lumière», selon ce qu'a dit quelqu'un qui n'est plus au milieu de nous, «est la pureté parfaite, invisible en elle-même, mais qui manifeste toutes choses telles qu'elles sont devant Dieu». Il est dit aussi que «Dieu habite la lumière inaccessible», invisible en elle-même.

Mais la lumière est venue dans le monde; elle a lui au sein des ténèbres, quand le Fils de Dieu parut sur la terre comme homme, sous la forme de serviteur. «Personne ne vit jamais Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l'a fait connaître». Rien n'est plus intéressant, et en même temps plus humiliant, que les déclarations de l'évangile de Jean relativement à la présence de la lumière dans ce monde de ténèbres morales, et à l'effet de cette présence sur les hommes. Rien ne pouvait échapper à la lumière; et, bien qu'il n'y eût pas d'yeux pour la voir, et que partout l'aveuglement de l'homme l'empêchât de rien discerner, la lumière luisait et démontrait si clairement l'état de l'homme, que nul ne pouvait passer devant elle sans que ses rayons ne le missent à découvert. Pharisiens, sadducéens, hérodiens, blasphémateurs orgueilleux, ou vrais Israélites en qui il n'y avait pas de fraude… tous, quel que fût leur caractère, étaient manifestés devant Dieu par la lumière qui brillait sur eux. «La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont pas comprise (*). Le Seigneur a quitté un monde aveugle, plongé dans les ténèbres, rempli de pécheurs qui, en prétendant voir, montraient, par leurs oeuvres, qu'ils aimaient mieux les ténèbres que la lumière (voyez la fin du 12e chapitre de Jean, et 3: 19, 20).

(*) Remarquez le changement de temps dans les versets 4 et 5 du premier chapitre de Jean. «La lumière luit dans les ténèbres»: le verbe est au présent; il exprime le fait abstrait, vrai en tout temps. Puis il est dit: «Les ténèbres ne l'ont pas comprise»: le verbe est au passé.

 «La vraie lumière était celle qui, venant dans le monde, éclaire tout homme», paroles qui n'ont rien à faire avec la conversion, mais qui se rapportent à notre sujet, c'est-à-dire au fait que l'homme a été extérieurement mis en contact avec la lumière. Qu'on ne vienne pas nous parler de «la lumière intérieure», éclairant tout homme qui naît dans ce monde, ni de rien de semblable, mais contemplons plutôt avec admiration la présence du Fils de Dieu sur la terre, au sein des ténèbres qui y régnaient, présence qui illuminait toutes choses, quoique les ténèbres ne comprissent pas la lumière. Quels sujets de méditation et d'étude nous présentent, sous ce rapport, les chapitres 8 et 9 de Jean, ou plutôt l'évangile en entier!

Nous avons, jusqu'ici, fait brièvement remarquer l'effet produit par la présence de la lumière dans ce monde, quand Jésus s'y trouvait. Or, quant au temps actuel, il est dit que nous, croyants, nous sommes lumière: «Vous étiez autrefois ténèbres, mais maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur» (Ephésiens 5: 8). Nous pouvons rapprocher ce merveilleux passage de celui où l'apôtre nous montre comme possédant la vie divine en vertu de notre union avec Christ (1 Jean 2: 8): «Ce qui est vrai en lui et en vous» (cela n'aurait pu se dire avant sa mort et sa résurrection), «parce que les ténèbres s'en vont (non pas s'en sont allées) et que la vraie lumière luit déjà». Dans le passage cité de l'épître aux Ephésiens, cette vérité est établie de la manière la plus positive: nous étions autrefois ténèbres, mais maintenant nous sommes lumière dans le Seigneur. Combien il est admirable, et précieux en même temps, que la vie divine en nous soit présentée ainsi! C'est sur ce fait qu'est basée l'exhortation qui nous appelle à marcher comme des enfants de lumière: «Car le fruit de la lumière (non pas de l'Esprit, comme on le trouve dans quelques versions), consiste en toute bonté, et justice, et vérité;» «marchez comme des enfants de lumière, éprouvant ce qui est agréable au Seigneur».

La différence essentielle entre les ténèbres et la lumière est ici clairement présentée, et l'apôtre insiste sur la séparation pratique d'avec les oeuvres infructueuses des ténèbres. Le verset 13 établit de nouveau le vrai caractère de la lumière, tel que nous l'avons déjà remarqué dans d'autres passages: «Ce qui manifeste tout, c'est la lumière». Et, en effet, malgré toute la faiblesse du témoignage actuel, on voit souvent le vrai caractère des personnes se manifester lorsqu'elles prennent leur place parmi ceux qui, malgré tous leurs manquements, cherchent à marcher comme enfants de lumière. Si la simple vérité était connue, combien n'en verrait-on pas qui, au fond, ne se retirent que parce que la lumière a dévoilé leurs motifs, — leur égoïsme, leur ambition, etc., — motifs jusqu'alors cachés dans un monde de ténèbres. «Vous êtes lumière dans le Seigneur», dit la Parole, et «le fruit de la lumière consiste en toute bonté, et justice, et vérité». La justice ni la vérité n'ont jamais été populaires, non plus que la lumière elle-même. Puissions-nous saisir plus pleinement cette vérité que, au milieu d'un monde de ténèbres, nous possédons la nature divine, qui juge en nous tout ce qui n'est pas pratiquement en harmonie avec elle. Comparons avec ce passage important, celui de 2 Corinthiens 4: 6, en demandant au Seigneur de nous donner l'intelligence de ces grandes vérités.

Ainsi, dans la période présente, — le temps de la grâce, — les saints sont la lumière du monde, et rendent manifeste, par leur marche, le triste état moral de tout ce qui les entoure.

On a traité si souvent le sujet des choses à venir que j'hésite à poursuivre. Je ferai seulement remarquer que «les ténèbres s'en vont, et que la vraie lumière luit déjà;» et que, quand notre Seigneur bien-aimé sera révélé en gloire, alors le jour luira dans sa perfection. «La nuit est fort avancée, et le jour s'est approché», et nous sommes appelés «fils du jour», aussi bien que «fils de la lumière», car nous appartenons à Christ, et cette gloire dans laquelle il sera révélé sera nôtre. Pendant le règne de Christ, la lumière resplendira d'une manière bien différente de celle dont nous avons parlé. Pensée solennelle et précieuse! nous, les rachetés célestes, nous verrons l'Agneau éclairer comme luminaire l'intérieur de la sainte Jérusalem; nous serons dans la présence même de la lumière incréée (car là il n'y a «pas besoin du soleil ni de la lune»), nous y serons sans intermédiaire et sans en être éblouis, «le voyant comme il est». Bienheureux ceux qui comprennent notre position actuelle: «dans la lumière, comme Dieu est dans la lumière;» mais que sera-ce alors, quand «la gloire de Dieu illuminera la cité et que l'Agneau sera sa lampe?» Et quant à la terre et aux nations du millénium, il est dit qu'elles marcheront par la lumière de la sainte cité. Celle-ci est éclairée directement par la gloire divine dont elle transmet la lumière à la terre, comme à travers un milieu, celui de la création rachetée, milieu figuré par les pierres précieuses, qui brisent et transforment la lumière de la gloire dont aucune créature non glorifiée ne pourrait supporter un seul instant les rayons. Ainsi la terre même sera illuminée par la lumière de la gloire céleste, non immédiate, mais d'une manière appropriée à la condition de ceux qui sont sur la terre.

Le déploiement de cette gloire n'est pas capable de changer le coeur de l'homme; l'Ecriture le montre. Notre objet était la lumière et sa manifestation dans des circonstances diverses.

Puissions-nous marcher dans un sentier de vraie séparation d'avec tout ce qui est des ténèbres, nous rappelant toujours que nous sommes maintenant «lumière dans le Seigneur».

Dans un précédent article, nous avons parlé brièvement de l'effet produit par la lumière sur les objets extérieurs. C'est sous ce point de vue que nous avons considéré la présence du Seigneur Jésus comme lumière de ce monde; puis celle des saints comme étant lumière maintenant ici-bas, et enfin le jour millénial à venir, où les nations marcheront à la lumière de la Jérusalem céleste.

Mais nous pouvons considérer l'effet de la lumière sous un autre aspect. Non seulement elle manifeste les personnes et les choses extérieures, mais le coeur aussi est illuminé par elle, ainsi que nous le voyons dans 2 Corinthiens 3 et 4. «Car c'est le Dieu qui a dit que du sein des ténèbres la lumière resplendit, qui a relui dans nos coeurs pour faire luire la connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Christ» (2 Corinthiens 4: 6). Le même Dieu qui, au commencement, a fait surgir la lumière du sein des ténèbres, est celui qui a relui dans nos coeurs. Le premier chapitre de la Genèse nous présente le fait auquel l'Esprit Saint fait allusion ici. Le second verset de ce chapitre dépeint l'état où se trouvait la terre, longtemps après la création; car, ainsi qu'il a été remarqué avec justesse, les choses ne furent pas créées dans cet état chaotique, et un long intervalle de temps s'étend entre le premier verset et le second. Tout était ténèbres et désolation, quand Dieu fit subitement resplendir la lumière et la sépara d'avec les ténèbres (versets 3, 4, 5). Mais comment Dieu les sépara-t-il?… Question qui appartient à Dieu seul; nous ne pouvons que nous incliner avec respect devant le tout puissant Auteur des glorieuses merveilles de la création.

La lumière resplendit à la parole de Dieu. Il dit: «Que la lumière soit. Et la lumière fut; c'est sans doute ce passage que l'Esprit Saint a en vue dans 2 Corinthiens 4: 6. C'est ce Dieu qui est lumière qui a relui dans nos coeurs, et c'est de cette lumière que nous nous occupons en ce moment. Ces coeurs étaient vides et ténébreux avant que la lumière les éclairât; maintenant, nous nous prosternons avec révérence et adoration devant le Dieu qui, par sa puissance souveraine, a fait briller la lumière là où précédemment tout était dans la nuit.

Plusieurs des expressions de ces versets (2 Corinthiens 4: 4-6), réclament notre attention. La lumière luit d'une manière particulière et définie; c'est pourquoi, au verset 4, elle est appelée «la lumière de l'évangile de la gloire du Christ, qui est l'image de Dieu;» cette pensée nous ramène au chapitre 3, où l'apôtre Paul parle avec hardiesse du Christ glorieux et de notre parfaite et heureuse liberté en la présence même de sa gloire, ayant été justifiés par son oeuvre, ayant reçu le Saint Esprit, ayant été rendus capables de contempler à face découverte la gloire de Christ, et étant ainsi transformés de gloire en gloire par le Seigneur, l'Esprit.

On a beaucoup écrit sur ce sujet, et notre tort a été qu'en parlant beaucoup de la lumière et de la gloire, notre témoignage pratique n'a été rien moins que glorieux; mais la précieuse vérité de Dieu ne peut être changée, et le Dieu qui a relui dans nos coeurs, les a illuminés, afin que la connaissance de sa gloire dans la face de Jésus Christ puisse reluire par eux dans ce monde. L'apôtre Paul réalisait cela d'une manière si merveilleuse et si simple, qu'il pouvait dire que, si l'évangile annoncé par lui était caché, il l'était par une action spéciale de Satan, le dieu de ce siècle ayant aveuglé les pensées des incrédules, pour que la lumière de cette gloire ne resplendît pas pour eux.

Mais nos manquements ne sont point une raison pour que nous négligions un sujet si merveilleux, celui de la lumière qui reluit maintenant dans nos coeurs, et qui provient d'un luminaire défini et bien connu, la face de Jésus Christ. Le luminaire même n'a point pâli depuis le moment où il a resplendi autour de Saul de Tarse, et a brillé dans les ténèbres du coeur de ce pharisien égaré, lui révélant la gloire de Dieu. La carrière entière de ce vase merveilleux de la grâce et de la Puissance de Dieu, est celle d'un homme rempli de la lumière qui l'avait éclairé. Les compagnons de Saul (Actes des Apôtres 22: 9) ont bien pu être éblouis un moment par la soudaine apparition de cette lumière plus éclatante que celle du soleil; mais sur lui-même, l'effet fut double: ses yeux furent aveuglés par la lumière resplendissant autour de lui, par cette lumière qu'aucun mortel ne peut supporter, tandis que son coeur fut illuminé par la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ. Cet effet intérieur de la lumière (et c'est là notre sujet) se manifesta durant toute la vie de l'apôtre, depuis le jour où, à Damas, il commença à prier, jusqu'à la dernière chose que nous apprenons de lui, lorsque, regardant encore avec confiance au Seigneur et comptant sur lui, il parle à Timothée de Jésus et de sa gloire, comme le voyant clairement devant lui. Nous pouvons bien dire qu'au sein des ténèbres qui s'épaississaient toujours plus autour de l'apôtre, la lumière de la gloire de Dieu brillait en son coeur aussi radieuse que jamais; et si nous parcourons le récit de sa vie entre ces deux points extrêmes et également merveilleux, nous y voyons un homme transformé de gloire en gloire. Nous voyons en lui un coeur fixé, par grâce, sur le Seigneur Jésus; la gloire de Dieu en rayonne pendant toute sa vie, vie de vraie patience, de douceur, de renoncement, où la gloire morale du Seigneur se manifeste dans son apôtre.

Or ce qui est vrai de lui, dans son service dévoué et son immense labeur, est vrai aussi de chacun de nous, dans notre petite mesure. Si pauvres et faibles que soient les paroles que nous présentons au lecteur, elles ne seront point perdues si quelque âme peut être conduite par elles à chercher avec prière, ce que signifie «la lumière qui a relui dans nos coeurs» (non pas seulement sur les hommes, comme nous l'avons vu en Jean 1). Puissions-nous être ainsi introduits dans une communion plus profonde avec notre précieux Sauveur, être amenés à une connaissance plus vraie de la gloire de Dieu, et à une manifestation plus entière de cette gloire dans une vie de patience et d'abnégation ici-bas. Que Dieu, dans sa grâce, y veuille conduire tous nos coeurs!