Caractères distinctifs de l'évangile de Luc

Luc 22: 41-44   - ME 1888 page 419

 

Des éléments du plus profond intérêt et qui manifestent, de la manière la plus frappante, le caractère de cet évangile, apparaissent quand on le compare aux autres, et particulièrement dans la scène que présente le passage cité ci-dessus.

Luc fait ressortir plus complètement le combat du Seigneur en Gethsémané, mais sur la croix, il nous le montre supérieur aux souffrances qu'il endurait. Il n'en fait pas mention: le Seigneur est au-dessus d'elles.

Jean présente le côté divin du tableau. Dans ce dernier évangile, nous ne trouvons pas l'agonie en Gethsémané, mais quand Jésus dit à ceux qui viennent le saisir: «C'est moi», ils reculent et tombent par terre. Sur la croix, nous n'entendons pas le cri: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?» mais il remet son esprit à Dieu.

Il n'en est pas ainsi dans l'évangile de Luc. Nous y voyons, en Gethsémané, l'homme de douleurs; un homme qui sent, dans toute sa profondeur, ce qui était devant lui, et qui regarde au Père. «Et étant dans l'angoisse du combat, il priait plus instamment». Sur la croix, il apparaît comme un homme qui s'est courbé sous la volonté de son Père, et se trouve dans le calme parfait, au-dessus de la douleur et de la souffrance quelles qu'elles soient. Il dit aux femmes qui pleuraient, de pleurer, non sur lui, l'arbre vert, mais sur elles-mêmes, parce que le jugement allait venir sur le peuple coupable. Il prie pour ceux qui le crucifiaient. Il parle de paix et d'un bonheur céleste au pauvre brigand converti; lui-même allait dans le paradis, en attendant que le royaume fût établi.

La même chose se présente dans le fait de sa mort. En Jean, il est dit seulement: «Il remit son esprit»; mais Luc rappelle ses propres paroles: «Père! entre tes mains je remets mon esprit». Dans sa mort, il confie son esprit à Celui qu'il connaît comme Dieu, son Père, et en qui il croit. Dans l'évangile de Matthieu, nous avons l'abandon de Dieu et le sentiment que le Seigneur en avait.

Ce caractère de l'évangile de Luc, révélant d'une manière toute spéciale Christ comme Homme parfait, — l'Homme parfait par excellence, — est du plus profond intérêt. Il a passé avec Dieu à travers les souffrances, et ensuite, dans une paix parfaite, s'est trouvé au-dessus de toutes; sa confiance en son Père a été parfaite, même dans sa mort — un sentier que nul homme n'avait foulé, jusqu'alors, et que les saints ne fouleront jamais. Le Jourdain regorge par-dessus tous ses bords tout le temps de la moisson, mais l'arche, descendue dans ses profondeurs, y faisait un passage à pied sec jusque dans l'héritage du peuple de Dieu.