Quelques conseils aux jeunes évangélistes

ME 1889 page 54

 

Après l'expérience d'une longue vie, j'aimerais à aider un peu ceux qui désirent être serviteurs de Christ. J'essaierai de le faire, en montrant comment Dieu a ouvert à mon âme les Ecritures de vérité.

J'avais été conduit, à une époque de ma vie, à lire avec un ami l'épître aux Romains. Pendant dix-huit mois nous l'étudiâmes ensemble, mais ce n'est pas l'oeuvre de quelques mois: une vie entière ne suffirait pas pour sonder tout ce que renferme cette merveilleuse épître. Il ne faut rien de moins que la révélation de la justice de Dieu manifestée en justifiant le pêcheur, pour soutenir l'âme à travers les tentations que présentent le monde, la chair et le diable, comme aussi pour être capable de prêcher fidèlement l'évangile aux autres. J'insisterai donc fortement auprès des jeunes évangélistes pour qu'ils étudient avec soin et prière l'épître aux Romains, quant à la base et à la révélation de la justice de Dieu.

Il est, sans doute, bien précieux d'annoncer l'amour de Dieu, mais cela seul ne peut donner une paix solide à l'âme. L'amour d'une mère est d'un grand prix; mais si une fille est tombée dans le péché et qu'elle soit allée cacher sa honte dans une contrée lointaine, est-ce que le souvenir des larmes et de l'amour de sa mère la rendra heureuse? Non, certes. Mais allez lui dire que l'amour de sa mère a trouvé un moyen de la ramener à la maison, en effaçant pour toujours tout son péché et toute sa misère — ce seront là de bonnes nouvelles pour son coeur brisé. Ah! dites premièrement aux âmes comment le bon Berger a donné sa vie pour les brebis; puis comment le Saint Esprit est venu chercher et trouver ce qui est perdu; dites ensuite la joie du père en recouvrant le fils prodigue. Oui, si Dieu a tant aimé le monde, c'est en donnant son Fils afin qu'il fût élevé sur la croix.

Que Dieu révélé en Christ demeure toujours devant vos yeux. Ce n'est pas l'homme se réconciliant lui-même avec Dieu, mais c'est Dieu réconciliant le monde avec lui-même. L'évangile dit ce que Dieu est, et ce qu'il a fait en envoyant son Fils mourir pour nous, puis en le ressuscitant. Comme cette pauvre fille plongée bien loin de sa mère dans la misère et dans la honte, nous aussi, nous étions loin, bien loin de Dieu, dans la dégradation profonde du péché. Et quelle chose Dieu n'a-t-il pas faite pour nous racheter pour lui-même! Nous le savons; oui, que les cieux chantent d'allégresse, car le Seigneur l'a fait.

Une autre chose nécessaire, est une entière et réelle dépendance du Saint Esprit, soit pour mener une vie sainte, soit pour prêcher l'évangile. Quant à notre marche, nous avons à apprendre cette leçon, si pénible et si difficile pour la plupart d'entre nous, savoir «qu'en moi, c'est-à-dire en ma chair, il n'habite point de bien». Quelle détresse pour l'âme de trouver que tout effort pour s'améliorer se termine par une chute! Désirer faire la volonté de Dieu et tout à coup, sans s'y attendre, tomber misérablement! Découvrir ainsi l'irrémédiable méchanceté du coeur humain! Oui, le moi doit être entièrement mis de côté, et Christ être tout. Alors, si l'on s'est écrié, comme Ezéchias: «Seigneur, je suis opprimé; garantis-moi!» on peut dire avec lui, dans une joie profonde de coeur: «Que dirai-je? Il m'a parlé, et lui l'a fait» (Esaïe 38: 14, 15). Ou bien, avec celui qui gémissait sous la loi: «Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort? Je rends grâces à Dieu par Jésus Christ, notre Seigneur» (Romains 7: 24, 25). Il peut se passer des années avant que l'on apprenne à connaître réellement les richesses de sa grâce et les profondeurs de sa miséricorde. Lorsque d'abord il nous a appelés, nous ne savions pas tout ce que nous étions et tout ce que nous ferions, mais lui le savait. Et il nous a garantis, et il a fait ce qui était à faire.

Toutes nos iniquités ont été mises sur lui. «Ce qui était impossible à la loi, en ce qu'elle était faible par la chair, Dieu, ayant envoyé son propre Fils en ressemblance de chair de péché et pour le péché, a condamné le péché dans la chair, afin que la juste exigence de la loi fût accomplie en nous, qui ne marchons pas selon la chair, mais selon l'Esprit». Le chemin de la délivrance est ainsi rendu clair. Nous apprenons que le «moi», le vieux «moi» a été entièrement et absolument jugé et condamné dans la sainte personne de notre substitut. Tout ce que je suis par nature a été jugé et mis loin de la vue de Dieu, et n'est plus compté comme étant à moi, ni moi-même. Le Saint Esprit en donne à l'âme la conscience. J'ai la même pensée que Dieu, et je porte le même jugement que lui, relativement à la chair, c'est-à-dire quant à moi-même comme enfant d'Adam. J'ai donc laissé toute pensée de marcher dans la chair, de manière à plaire à Dieu, et j'ai jugé le vieux moi comme entièrement mauvais.

Cela veut-il dire que nous pouvons marcher dans le péché? Non, mais dans l'Esprit. «La loi de l'Esprit de vie, dans le Christ Jésus, m'a affranchi de la loi du péché et de la mort». Si, étant dans la chair, je cherche à garder les commandements, je les transgresserai, car je trouverai dans mes membres la loi du péché plus forte que moi, et je serai aussi misérable que possible. Mais si j'ai abandonné le moi comme mauvais et perdu, et sans force pour s'améliorer, la nouvelle loi de l'Esprit de vie prend la place du moi. Quel bonheur alors de jouir de la liberté de l'Esprit de vie!

Quelquefois, c'est au moment de la conversion que l'on apprend à connaître cette délivrance, mais c'est rarement le cas lorsque nous sommes appelés à Dieu dans l'enfance. Dans les temps de faiblesse et de tentation, nous apprenons à estimer les autres comme «meilleurs que nous-mêmes». Alors se déploient devant nous les richesses de la grâce du Seigneur, et nous voyons combien nous avons besoin de la sacrificature de Christ, pleinement suffisante pour nous secourir au temps convenable, et de son office comme Avocat, afin de nous relever quand nous avons manqué. A cet égard, ce serait une triste chose si nous négligions la lecture de la Parole. Car nous avons besoin, non d'une nouvelle aspersion du sang de Jésus, mais du lavage constant d'eau par la Parole. Ce qui caractérise une âme qui marche dans la lumière, c'est que «le sang de Jésus Christ, son Fils, nous purifie de tout péché». Sans cette lumière, il n'y a pas de puissance pour une marche sainte.

Mais si la dépendance du Saint Esprit est nécessaire pour marcher saintement, elle ne l'est pas moins pour annoncer la parole aux autres. Sans la fraîcheur d'âme provenant du sentiment de la présence du Seigneur, toute prédication est vaine. Comme quelqu'un l'a dit: «C'est de beaucoup la meilleure voie de n'accepter jamais la pensée que vous allez prêcher sur tel passage de l'Ecriture. Etudiez l'Ecriture pour le bien et le profit de votre propre âme, mais non pas dans l'asservissement d'une préparation pour une prédication. Parlez alors sur telle portion ou telle autre, selon que l'Esprit vous dirigera».

Une autre chose très importante pour le serviteur de Christ, c'est de sonder les Ecritures relativement à la seconde venue de Christ. L'apôtre Paul avait toujours devant lui cette bienheureuse espérance, sans laquelle l'évangile est incomplet. L'effet de sa prédication était de convertir les hommes à Dieu pour attendre son Fils des cieux. L'attente de Christ donne à chaque pensée de nos coeurs un nouveau tour et une plus fraîche couleur. Il est remarquable de voir en combien de lieux et par quelle variété de moyens, des chrétiens ont été conduits à cette bienheureuse attente du retour de Christ pour prendre à lui l'Eglise, avant que les tribulations ne viennent sur la terre.

Dans un certain endroit, un petit garçon de huit ans avait lu un verset qui parlait de ceux qui sont morts en Christ et qui ressusciteront premièrement, quand Jésus viendra. L'enfant ne pouvait retrouver ce passage et pria ses parents de le chercher pour lui. Ils ne savaient rien de la vérité du retour du Seigneur, mais ils cherchèrent dans l'Ecriture, jusqu'à ce qu'ils eussent trouvé 1 Thessaloniciens 4: 14-18. Non seulement ce sujet les intéressa, mais en continuant d'étudier les Ecritures, ils acquirent une connaissance plus complète de cette précieuse vérité. Ils la communiquèrent à d'autres qui la reçurent avec joie. Je pense que des milliers ont été ainsi instruits par l'Esprit au moyen de la Parole, et venus à se connaître, ils ont trouvé que leurs vues étaient exactement les mêmes. Et ce n'étaient pas de vaines spéculations, mais la personne et la venue du Seigneur lui-même qui formaient l'objet de leur espérance. Là où cette vérité du retour du Seigneur a été reçue directement d'après les Ecritures, elle a eu pour effet invariable la séparation d'avec le monde. Ainsi que plusieurs l'ont dit, c'était comme une seconde conversion.

Enfin, il est de toute importance et plus que jamais nécessaire, de sonder directement soi-même les Ecritures sur ce sujet, et non de lire bien des livres qui, le plus souvent, ne sont que le produit de l'imagination de l'homme.