Fragments d'une lettre

Tiré de L.

ME 1890 page 259

 

… Les difficultés qui surgissent si souvent parmi les enfants de Dieu et les débats auxquels elles donnent lieu, montrent, hélas! le misérable état où nous sommes; et ce devrait être pour nous un sujet de constante et profonde humiliation. En pensant à tant de questions qui se soulèvent, qui agitent et troublent, on se demande: Quel bien y a-t-il là pour les âmes? Quel bénéfice pour les pauvres du troupeau, pour les simples et les petits? Il leur faut Christ, et un Christ complet, tel que la Parole le présente: dans sa grandeur comme Fils de Dieu, dans sa tendre condescendance comme Fils de l'homme, et toujours la même et adorable Personne, «hier, et aujourd'hui, et éternellement», répondant seul et parfaitement à tous nos besoins. Plusieurs, bien intentionnés sans doute, voudraient relever chez les saints le niveau de la vie spirituelle. Mais y arrivera-t-on en repliant l'âme sur elle-même pour chercher quels progrès elle a faits, à quel point de spiritualité elle est parvenue? Non; le niveau ne se relèvera qu'en s'oubliant soi-même et en regardant hors de soi, en haut, Christ, l'Objet divin. Est-ce à dire qu'il faut vivre d'une vie de contemplation tout absorbée dans une sphère en dehors de ce monde? Non, ce serait un autre écueil. Notre vie spirituelle se poursuit au milieu des circonstances où Dieu nous place. C'est là qu'elle se développe. Il n'y a pas deux vies chez le chrétien. Celle de la chair a été jugée et mise de côté; il ne reste que celle de Christ et qui a Christ pour objet. Si notre coeur est occupé de lui, s'il lui est affectionné, cela se traduira dans tous les détails de notre marche. Pour accomplir notre tâche journalière, nous n'avons pas à sortir de la communion pour y rentrer ensuite. Nous avons le privilège de pouvoir tout faire en communion avec Dieu, quand notre vocation n'est pas en contradiction avec sa Parole. «Hénoc marcha avec Dieu». Quelle heureuse vie que celle qui, dans les moindres détails, se passe avec Dieu, où l'on cherche et trouve auprès de lui, à chaque instant, force, sagesse, secours, et où l'on jouit de lui, en lui rendant grâces en toutes choses! C'est cette vie que je trouve décrite dans les épîtres, celle que Christ a menée sur la terre, et qui maintenant pour moi découle de lui qui est ma vie, lui en haut, et mon coeur vivant là près de lui. S'il est vrai qu'il y a des moments où, dans le secret, l'âme se retrempe d'une manière spéciale auprès de Dieu par la lecture de la Parole et dans la prière, cela ne fait pas deux vies, l'une pour les choses visibles et l'autre de contemplation pour les choses invisibles. C'est une seule et même vie qui puise sa force en haut et se poursuit ici-bas à la gloire de Dieu…