«Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons»

1 Jean 1: 3  -  ME 1892 page 201

 

Les apôtres avaient vu de leurs yeux et entendu de leurs oreilles, ce qu'ils annonçaient. Pierre dit: «Ce n'est pas en suivant des fables ingénieusement imaginées, que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais comme ayant été témoins, oculaires de sa majesté» (2 Pierre 1: 16). Le Seigneur dit à Paul: «Tu lui (à Dieu) seras témoin, auprès de tous les hommes, des choses que tu as vues et entendues» (Actes des Apôtres 22: 15). Et enfin Jean rend aussi ce témoignage: «Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, et que nos mains ont touché… ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons» (1 Jean 1: 1-3).

L'effet béni produit sur les apôtres par ce fait, est que, quant à leur service et à leur marche, ils étaient maintenus à la hauteur de ce qu'ils avaient vu et entendu. Ils puisaient leur force dans la constante contemplation des gloires qui leur avaient été révélées, et c'est dans le même but qu'elles nous sont aussi annoncées. C'est notre précieux privilège de détourner nos regards de la scène présente de corruption et de ruine, pour les porter sur ce qui est complètement en dehors de la ruine; sur «ce que l'oeil na pas vu, et que l'oreille n'a pas ouï, et qui n'est pas monté au coeur de l'homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment» (1 Corinthiens 2: 9).

Toutes les bénédictions et toutes les gloires que les apôtres nous annoncent, ont leur origine et leur centre dans la gloire personnelle du Seigneur Jésus. Si celle-ci n'est pas honorée comme elle doit l'être, celles-là ne pourront être appréciées à leur vraie valeur. C'est seulement dans la mesure où nous le connaîtrons, lui, que nous pourrons comprendre ce que c'est que lui être semblables, ou ce qu'est la vie éternelle, ou quelle sera la gloire de son royaume. C'est pourquoi la connaissance du Seigneur Jésus est le fondement de toute vraie connaissance. Elle rend le coeur simple et le préserve de «la connaissance faussement ainsi nommée» (1 Timothée 6: 20), et des erreurs qui en sont la conséquence. Que seraient toutes les gloires du royaume ou du ciel sans Jésus, en supposant qu'il puisse y avoir sans lui une gloire ou une bénédiction quelconque pour une créature? Et de quelle utilité pourrait être une connaissance si élevée fût-elle, qui n'aurait pas sa source dans la connaissance de Christ? Elle laisserait le coeur froid et vide.

Dans toutes les choses glorieuses que les apôtres nous ont annoncées, si diverses soient-elles les unes des autres, la Personne de Jésus occupe néanmoins la première place. Et comme il a été dit, c'est seulement lorsque notre adorable Seigneur est l'objet de nos coeurs, que nous pouvons comprendre la vraie signification de chaque chose, et surtout des Ecritures; sans cela, leur étude n'est plus que la vaine spéculation de l'esprit humain. A quoi servait aux Juifs, par exemple, la possession des précieux oracles de Dieu, puisqu'ils n'y cherchaient pas Celui qui en est l'objet principal, savoir Christ? «Vous sondez les Ecritures, car vous, vous estimez avoir en elles la vie éternelle, et ce sont elles qui rendent témoignage de moi: — et vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie» (Jean 5: 39, 40). Combien aussi la chrétienté professante ne s'est-elle pas, sur ce même terrain, écartée de son but! De vrais croyants même sont tombés dans les plus tristes erreurs, lorsqu'ils ont perdu la simplicité quant au Christ, et n'ont pas cherché uniquement lui-même et sa gloire. En sera-t-il toujours ainsi? Non, Dieu en soit loué! Il va bientôt venir, et les paroles de l'épouse ravie à la vue de son Bien-aimé: «Mon bien-aimé est distingué entre dix mille» (Cantique des Cantiques 5: 10), sortiront mille fois répétées de la bouche de tous les rachetés.

Hélas! les dispositions égoïstes de nos pauvres coeurs nous font trop facilement perdre de vue la gloire de la Personne de Jésus, en nous portant à penser à notre propre gloire. Pierre, sur «la sainte montagne», tomba aussi dans cette faute, lorsqu'il voulut placer le Seigneur sur le même pied que Moïse et Elie, en étant plus occupé de sa propre gloire que de celle du Seigneur. «Maître, il est bon que nous soyons ici; et faisons trois tentes: une pour toi, et une pour Moïse, et une pour Elie» (Marc 9: 5). Mais la voix venant de la nuée lui montra son erreur. Et il la comprit, car, dans sa seconde épître, en rappelant la transfiguration, il place au premier plan la gloire du Seigneur. Il parle là du royaume comme de la période où la gloire de Jésus sera manifestée. Et, bien qu'ayant «part à la gloire» (1 Pierre 5: 1), il ne met pas cela en avant, mais parle uniquement de la majesté du Seigneur Jésus: «Comme ayant été témoins oculaires de sa majesté. Car il reçut de Dieu le Père, honneur et gloire, lorsqu'une telle voix lui fut adressée de la gloire magnifique: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai trouvé mon plaisir». Quelle honte pour nous, qu'il soit devenu nécessaire de nous rappeler ce qu'est le Fils aux yeux du Père! Combien tout serait différent dans l'Assemblée de Dieu sur la terre, si tous les membres de Christ étaient remplis de Lui et de sa gloire! Nous voyons ici, de quelle manière le Père veille à la gloire de son Fils. Il peut nous placer et il nous placera, selon sa grâce, dans la même gloire avec Christ, mais il ne peut permettre que la différence personnelle entre Christ et nous disparaisse, même pour un moment. Le Saint Esprit appuie aussi avec force sur ce fait, que Christ, «en toutes choses, tienne, lui, la première place» (Colossiens 1: 18). Notre gloire même ne servira un jour qu'à mettre la sienne en lumière:

A Toi seul, ô Jésus, à ta lumière pure,

O Soleil de justice, empruntant ses rayons,

L'Eglise portera, dans la gloire future,

L'éclat immaculé de tes perfections.

Cette différence personnelle entre lui et nous est encore rehaussée d'une manière particulière sur la sainte montagne, par ces paroles: «Et la voix s'étant fait entendre, Jésus se trouva seul» (Luc 9: 36). Au milieu des gloires du royaume et de celles des armées célestes, il aura une place dont sa gloire personnelle est digne et que personne ne peut partager avec lui. De même qu'avant la fondation du monde, comme aussi durant sa vie ici-bas, il était l'objet des délices du Père, de même le sera-t-il dans tous les siècles au milieu d'une création rachetée (Proverbes 8: 22-31). Alors sera pleinement révélé ce que le Fils était et sera éternellement pour le coeur du Père, et aussi que tout ce que nous sommes, est uniquement par lui. Ce n'est qu'en lui que Dieu peut nous avoir pour agréables. Lui seul est notre Sauveur, notre justice, notre vie: «Il nous a été fait sagesse de la part de Dieu, et justice, et sainteté, et rédemption». Il est pour nous l'unique source de force et de joie; il est notre consolation et notre secours durant tout le chemin, tout comme il est l'objet de notre espérance. Lui seul mettra fin à l'état actuel de ruine et de déshonneur jeté sur son nom, et se présentera les saints parfaitement glorifiés et purifiés en amour. Lui seul établira un règne éternel de justice et de paix et fera ainsi cesser les soupirs de la création. Par lui seul ont été créés les mondes, et par lui seul la rédemption pouvait être accomplie et les desseins de Dieu trouver leur achèvement. Combien infiniment précieux n'est donc pas le nom de Jésus! C'est pourquoi «que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur» (1 Corinthiens 1: 31).

Paul était si rempli de la gloire, de la Personne de Christ qu'il pouvait dire: «Pour moi, vivre c'est Christ» (Philippiens 1: 21). Autrefois ennemi de Christ, il avait pensé qu'il fallait faire beaucoup contre le nom de Jésus le Nazaréen (Actes des Apôtres 26: 9), et il avait livré les croyants à la prison et à la mort. Mais la contemplation de Christ glorifié, qui lui apparut sur le chemin près de Damas, et les paroles de sa bouche, lui découvrirent tout à coup les terribles ténèbres où il se trouvait. Il vit dans la lumière de cette gloire que l'homme naturel — même le plus excellent, avec une justice sans reproche selon la loi (Philippiens 3: 5, 6), ne peut subsister devant Dieu, et que lui-même, en persécutant les croyants, avait persécuté le Seigneur. Toute sa gloire et toute son espérance selon la chair étaient anéanties. Il vit le jugement de mort écrit sur sa vie entière, et dut reconnaître que «toute chair est comme l'herbe, et toute sa gloire comme la fleur de l'herbe» (1 Pierre 1: 24). Cette découverte douloureuse, mais nécessaire, qu'il fit, je le répète, dans la lumière de la gloire de Christ, eut pour effet l'entier abandon de son moi et de toute association avec ce monde; rien ne lui resta comme fondement d'espérance que Jésus seul. En Celui qu'il avait persécuté d'une manière si outrageante, il trouva son Sauveur qui l'avait aimé et s'était livré lui-même pour lui. Par la foi en Jésus, son coeur brisé trouva le repos et la paix. Plus que cela, il pouvait maintenant dire: «N'ayant pas ma justice qui est de la loi, mais celle qui est par la foi en Christ — la justice qui est de Dieu, moyennant la foi» (Philippiens 3: 9). Dans cette lumière qui surpassait en éclat la splendeur du soleil et qui le jeta dans la poussière, il n'avait pas seulement reconnu le néant du vieil homme, mais il avait vu aussi la position du nouvel homme en Christ selon les conseils de Dieu — position entièrement nouvelle et céleste qui a son expression parfaite en Christ ressuscité et glorifié.

Christ dans la gloire est l'expression de la justice de Dieu. Dieu a montré sa justice en ressuscitant et en plaçant à sa droite «au-dessus de tout nom qui se nomme», Christ qui, dans sa vie et sa mort ici-bas, l'avait parfaitement glorifié. Or en lui nous sommes devenus la justice de Dieu (2 Corinthiens 5: 21). Nous sommes devant Dieu en Christ, selon l'infinie valeur de sa Personne et de son oeuvre. En vérité, la connaissance de ce fait rend la Personne de Christ l'objet de nos plus intimes affections, de notre admiration et de notre adoration.

En même temps, comme membres du corps de Christ et comme son épouse, nous sommes placés dans une relation avec lui telle, qu'on n'en peut imaginer de plus étroite et de plus tendre. Dieu a donné Celui qu'il a glorifié, comme «Chef sur toutes choses à l'Assemblée qui est son corps, la plénitude de Celui qui remplit tout en tous» (Ephésiens 1: 23). L'Assemblée prend ainsi avec Christ la première place dans les conseils éternel de Dieu et dans la création tout entière. De même qu'Eve formait avec Adam; le chef de la création inférieure, un tout et complétait celui-ci, ainsi l'Assemblée est la plénitude du Christ, le dernier Adam. C'est pourquoi elle est l'objet de son amour le plus tendre. De même que l'homme et la femme sont une seule chair, ainsi en est-il de Christ et de l'Assemblée (Ephésiens 5: 29-33), et comme la femme procède de l'homme (1 Corinthiens 11: 8), l'Assemblée aussi procède de Christ. Dans toute la création, il ne se trouvait point pour Adam d'aide semblable à lui (Genèse 2: 20). Les anges étaient loin au-dessus de lui, les animaux bien loin au-dessous en Eve seul il trouva celle qui lui correspondait elle procédait de lui. L'Assemblée est de Christ qui est Chef sur toutes choses, aussi bien sur les choses terrestres, que sur les anges, les principautés et les puissances dans les cieux. Christ peut dire de l'Assemblée seule, comme Adam le disait d'Eve: «Cette fois, celle-ci est os de mes os et chair, de ma chair; celle-ci sera appelée femme (Isha), parce qu'elle a été prise de l'homme (Ish)» (Genèse 2: 23; Ephésiens 5: 30-33). Comme Eve portait le nom de son mari, ainsi l'Assemblée est nommée du nom de Christ (comparez Genèse 5: 2; 1 Corinthiens 12: 12). Et de même que l'homme quitte son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, de même Christ est venu de la gloire ici-bas, et s'est livré lui-même pour l'Assemblée (Ephésiens 5: 25). Il l'a aimée, parce qu'elle est de lui et que Dieu la lui a amenée.

C'est là le grand mystère qui, dès les siècles, était caché en Dieu, et qui fut révélé à l'apôtre Paul par le Saint Esprit, afin qu'il nous le communiquât. C'est pourquoi il dit: «A moi, qui suis moins que le moindre de tous les saints, cette grâce a été donnée d'annoncer parmi les nations les richesses insondables du Christ» (Ephésiens 3: 8). Il était l'instrument préparé et qualifié pour cette proclamation. Lui qui était auparavant un blasphémateur, un persécuteur et un outrageux, eut le privilège de faire dans son propre coeur l'expérience de la grâce insondable de Dieu (1 Timothée 1: 13, 14), et il lui fut accordé de jeter un regard dans la gloire de Christ. Et il fut choisi pour annoncer la grâce et la gloire de Christ à ceux qui étaient enfants de colère et n'avaient aucun droit quelconque à aucune bénédiction. Quelle merveilleuse grâce! Les païens, enfants de colère, et Saul, un blasphémateur, un persécuteur et un outrageux quant à Christ — tels étaient les cohéritiers, et du même corps, et coparticipants de la promesse dans le Christ Jésus! (Ephésiens 3: 6). Il n'y avait aucune différence entre Juifs et gentils. Le premier entre les Juifs était le premier des pécheurs (comparez Philippiens 3: 4-6 et 1 Timothée 1: 15); tous étaient sur le terrain d'Adam que Dieu avait chassé du paradis; le lot de tous était la malédiction, «les ronces et les épines», et finalement, la mort. Et voici, ces pécheurs perdus sans espérance, dans la plus profonde des misères, entrent par la foi dans la possession des richesses insondables du Christ, dans la perfection et la plénitude de ce que Christ est aux yeux de Dieu. «En lui habite toute la plénitude de la déité corporellement; et vous êtes accomplis en lui, qui est le chef de toute principauté et de toute autorité» (Colossiens 2: 9, 10). Quel fait surprenant! Christ, dans son amour divin, est venu vers nous, dans la condition de péché et de mort où nous étions, afin de satisfaire par sa mort à toutes les exigences de la justice de Dieu, et afin de nous introduire selon la puissance divine de sa résurrection dans la position même où il se trouve devant Dieu comme homme glorifié.

Tandis que Pierre place devant nos yeux le Seigneur dans sa gloire, comme Celui qui rétablit toutes choses, Paul nous montre le Christ glorifié et l'Assemblée en lui dans les lieux célestes. Sous le premier aspect, il est Celui qui accomplit les conseils de Dieu dans le temps, l'espérance d'Israël et le libérateur de la création; il établira son royaume et y introduira Israël — un royaume préparé pour eux dès la fondation du monde (Matthieu 25: 34). Sous l'autre aspect, il est, en union avec l'Assemblée, le point central des desseins éternels de Dieu: l'Assemblée, ou plutôt ses membres, sont élus en lui dès avant la fondation du monde (Ephésiens 1: 4). Mais afin que ces conseils pussent être accomplis, la rédemption était nécessaire, et quel autre pouvait l'accomplir que Celui-là seul qui est en même temps vrai Dieu et vrai homme? Celui qui, dans sa Personne, était le vrai Dieu et la vie éternelle, pouvait seul se présenter pour nous en jugement, et souffrir la mort sans être retenu par elle.

La gloire du Seigneur comme Fils de Dieu et vie éternelle, manifestée sur cette terre, est l'objet dont s'occupe l'apôtre Jean. Son évangile commence par l'exposition de cette gloire. «Au commencement était la Parole, et la Parole était auprès de Dieu, et la Parole était Dieu». Nous avons ici le Fils de Dieu comme seconde Personne de la déité dans son être éternel, avant que rien ne fût créé. C'est une chose des plus solennelles pour une créature, d'être admise à pénétrer dans le sanctuaire de l'éternité et d'y contempler la grandeur de Celui qui est la source de toute existence. «Toutes choses furent faites par elle, et sans elle pas une seule chose ne fut faite de ce qui a été fait». Les choses visibles et les invisibles avec toute leur gloire lui doivent leur être. Nulle intelligence humaine ne peut sonder la grandeur et la gloire des choses visibles, et les invisibles lui sont entièrement cachées. Combien grande et insondable doit donc être la gloire de Celui par qui elles sont venues à exister!

«En lui était la vie» (verset 4). Remarquez la différence que fait ici l'Esprit Saint entre ce qui était, et ce qui a été fait. La vie n'a pas été faite, mais elle était, divine et éternelle comme la Personne du Fils. Elle était dans le Fils et ne pouvait être révélée, à moins que le Fils lui-même ne le fût. Aussi personne ne peut la recevoir, si ce n'est en recevant le Fils lui-même. «Et cette vie est dans son Fils: celui qui a le Fils a la vie» (1 Jean 5: 11, 12).

Jusqu'au verset 4, il est seulement question de ce que le Seigneur était en lui-même, avant que le monde fût — la Parole, le vrai Dieu et la vie éternelle. C'est comme tel qu'il a été révélé dans ce monde: «Et la Parole devint chair, et habita au milieu de nous (et nous vîmes sa gloire, une gloire comme d'un Fils unique de la part du Père) pleine de grâce et de vérité» (verset 14). Tout ce que l'on voyait et entendait de lui, était l'expression de Dieu et de la vie éternelle. Lorsque les Juifs demandèrent à Jésus qui il était, il répondit: «Absolument ce qu'aussi je vous dis» (Jean 8: 25). Il avait fait connaître le Père, et celui qui le voyait, voyait le Père (Jean 1: 18; 14: 9).

Tandis que Paul voit l'homme en Christ devant Dieu dans les lieux célestes, Jean contemple Dieu devant les hommes sur la terre. Il suppose la ruine de toutes choses ici-bas, et introduit le Fils de Dieu comme Celui qui se révèle dans sa gloire propre, tel qu'il est. C'est le signe caractéristique particulier aux écrits et au service de Jean. Il annonce ce qui est éternel et immuable. Soir évangile commence avec ce qui était au commencement, et son épître avec ce qui était dès le commencement. Et dans son Apocalypse, il nous montre, comme résultat des voies de Dieu, l'état éternel, le domaine propre de la vie éternelle, où Dieu est tout en tous.

L'oeuvre des apôtres, pour autant que confiée à l'homme et dépendante de lui, est tombée en ruine. Pierre, l'apôtre de la circoncision, pouvait dire avec le Seigneur, par rapport à Israël: «J'ai travaillé en vain, j'ai consumé ma force pour le néant et en vain… Israël ne s'est point rassemblé» (Esaïe 49: 4, 5). C'est en vain qu'il fit entendre à Israël ces paroles: «Et maintenant, frères, je sais que vous l'avez fait par ignorance… Repentez-vous donc et vous convertissez, pour que vos péchés soient effacés: en sorte que viennent des temps de rafraîchissement de devant la présence du Seigneur» (Actes des Apôtres 3: 17-19). La lapidation d'Etienne et la dispersion de l'Assemblée par la persécution furent la réponse que donnèrent les Juifs. Paul, l'apôtre des nations pour tirer et rassembler du milieu d'elles l'Eglise, avait posé le fondement comme un sage architecte. Mais de son vivant déjà, la ruine avait atteint l'oeuvre, et il dut prononcer ces paroles: «Tu sais ceci, que tous ceux qui sont en Asie se sont détournés de moi». L'Eglise est devenue comme une grande maison dans laquelle se trouvent des vases à honneur et des vases à déshonneur (2 Timothée 1: 15; 2: 20). Ainsi, après que non seulement la ruine d'Israël, mais aussi celle de l'Assemblée considérée comme la dernière dispensation de Dieu sous la responsabilité de l'homme, ont été posées comme un fait, Jean nous ramène à ce qui était dès le commencement (*). Il nous signale, comme unique appui de la foi, le Fils de Dieu dans sa propre perfection divine et comme la vie éternelle.

(*) Il faut remarquer ici, que ses écrits ont paru les derniers d'entre les écrits inspirés, après que la ruine de l'Eglise s'était déjà fort accentuée — précieux témoignage des soins prévoyants de Dieu pour les siens.

Quel soulagement pour le coeur, au milieu de la ruine qui nous entoure, de pouvoir regarder à lui et nous reposer en lui qui est la perfection même! de posséder en lui ce qui n'est sujet à aucune ruine, c'est-à-dire la vie éternelle! C'est ce qui faisait la consolation de l'apôtre contemplant cette ruine avec douleur. Il disait: «Toutefois le solide fondement de Dieu demeure» (2 Timothée 2: 19). Lui, Christ, le Fils du Dieu vivant, est le Rocher duquel il disait lui-même: «Sur ce roc je bâtirai mon assemblée, et les portes du hadès ne prévaudront point contre elle» (Matthieu 16: 16, 18).

Dans son évangile, Jean nous montre le Fils de Dieu marchant sur la terre et traversant les diverses circonstances de cette vie; et tout ce que nous voyons et entendons de lui, est l'expression de la perfection, l'expression de la vie éternelle. Bien que véritablement homme, il était dans toutes ses paroles et dans toutes ses oeuvres l'expression de la perfection; tout était à sa vraie place et en parfaite harmonie avec sa nature divine. Son humanité même et les besoins qui s'y rattachaient, n'étaient que l'expression de l'amour parfait et divin qui l'avait conduit à descendre dans un aussi profond abaissement. Sa parfaite obéissance jusqu'à la mort, la mort même de la croix; son renoncement parfait à tout ce à quoi il avait droit; sa position au puits de Jacob, où assis, étant lassé du chemin, il sollicitait d'une misérable pécheresse un peu d'eau pour étancher sa soif; sa profonde sympathie au sépulcre de Lazare, où il versa des larmes — tout était l'expression de l'amour divin digne de toute adoration. Il s'était fait le serviteur de tous, et était venu afin de donner sa vie en rançon pour plusieurs. Quel amour! Le Père seul pouvait apprécier et honorer à sa pleine valeur un tel amour. «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne» (Jean 10: 17). Hélas! l'homme, au lieu de tomber en adorant devant le Fils de Dieu qui volontairement s'est abaissé si profondément, n'a trouvé dans cet abaissement qu'une occasion de le mépriser!

Ainsi, le Fils de Dieu fut en toutes ces choses la manifestation de la vie éternelle sur la terre. C'est lui que les apôtres ont entendu, vu de leurs yeux, contemplé et touché de leurs mains! et ce qu'ils ont entendu, vu et touché, était la «Parole de la vie», la vie éternelle. C'est ce qu'ils ont annoncé dès le commencement (du christianisme). «Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons» (1 Jean 1: 3).

Comme nous l'avons déjà remarqué, Jean suppose, non seulement la ruine du judaïsme, mais aussi celle du christianisme. Déjà de son temps, il y avait des antichrists et des séducteurs qui ne demeuraient pas dans la doctrine du Christ, mais qui menaient en avant (1 Jean 2: 18; 2 Jean 9). Nous voyons de nos jours à quel point la ruine est venue, même de vrais chrétiens se trouvent dans une terrible confusion. Mais cette confusion a sa source uniquement dans le manque de simplicité quant à Christ. Voulons-nous être préservés de toutes les spéculations de l'esprit humain, tenons ferme à «ce qui était dès le commencement». C'est ce qui nous maintient dans la simplicité, nous donne de la solidité, nous garde dans la communion du Père et du Fils et rend notre joie accomplie. Ce qui «était dès le commencement» suffit à tous les chrétiens, vieux ou jeunes, forts ou faibles, comme pierre de touche pour distinguer la vérité de l'erreur. C'est aux petits enfants qu'il est dit: «Pour vous, que ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous: si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père» (1 Jean 2: 24). Et des pères, il est dit qu'ils ont connu et connaissent «Celui qui est dès le commencement» (1 Jean 2: 13).

Les paroles: «Celui qui est dès le commencement», ont la même signification que celles-ci: «Ce qui était dès le commencement», et désignent le Fils de Dieu comme le commencement du christianisme. Il est ce qui imprime à celui-ci son caractère propre. Il est la vie du chrétien; par lui, nous sommes introduits dans sa propre relation avec Dieu, dans le même rapport intime avec le Père — rapport qui est en dehors de toute relation avec ce monde où ne règnent que la mort et les ténèbres. Nous sommes rendus propres à être dans cette relation avec Dieu, parce que nous sommes devenus participants de sa nature; car il est lui-même notre vie. En vertu de ce fait, nous sommes, un avec lui, et ses intérêts, ses sentiments et ses joies, aussi bien que ses expériences dans son sentier solitaire ici-bas, deviennent les nôtres. Envoyé par le Père dans un monde pécheur, où il était étranger et inconnu, il a marché dans une communion non interrompue avec le Père. Comme elle avait été dès l'éternité, telle elle demeura, parfaite et sans interruption, durant toute sa marche sur la terre. Homme parfait, il était cependant «le Fils unique, qui est dans le sein du Père… le fils de l'homme qui est dans le ciel» (Jean 1: 18; 3: 13). «Auprès du Père» est, Pour ainsi dire, la demeure propre de la vie éternelle.

Jean dit: «Nous avons vu, et nous déclarons, et nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père, et qui nous a été manifestée» (1 Jean 1: 2). Chacun de ceux qui possèdent cette vie, est introduit par là pour toujours dans la communion du Père et du Fils. C'est la vie du chrétien, c'est son privilège, de connaître le Père et le Fils. «Et c'est ici la vie éternelle, qu'ils te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ» (Jean 17: 3). Nul ne peut connaître le Père, s'il n'est pas un enfant de Dieu, né de lui. «Je le connais», dit le Seigneur, «car je viens de lui» (Jean 7: 29). Il faut posséder la nature divine, pour le connaître. La connaissance du Père n'est donc pas le privilège seulement de quelques chrétiens mûris et avancés, mais tous les vrais chrétiens la possèdent, qu'ils soient petits enfants, jeunes gens ou pères. «Je vous écris, petits enfants, parce que vous connaissez le Père» (1 Jean 2: 13). De tous il est dit qu'ils ont la vie éternelle, et ainsi la nature divine. «Je vous ai écrit ces choses afin que vous sachiez que vous avez la vie éternelle, vous qui croyez au nom du Fils de Dieu» (1 Jean 5: 13). Quel ineffable privilège qu'en vertu de cette vie, même le plus faible croyant soit introduit dans la communion du Père et du Fils!

C'est ce que nous confirme le Seigneur lui-même, lorsqu'il dit de tous ceux qui viendraient à croire en lui par la parole des apôtres: «Afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi, afin qu'eux aussi soient un en nous… moi en eux, et toi en moi, afin qu'ils soient consommés en un» (Jean 17: 21-23). Cette position bénie ne dépend absolument, point de notre connaissance ni de notre état spirituel, mais uniquement du fait que, par la foi au Fils de Dieu, nous avons la vie éternelle. C'est la position de tout vrai chrétien dès l'instant où il est devenu participant du salut. Il entre immédiatement dans la perfection de la nature divine, alors même que la connaissance qu'il en a puisse être extrêmement faible. C'est sur ce fait que Jean insiste constamment dans ses épîtres, et c'est ce qui dès le commencement a caractérisé le christianisme. «Quiconque confessera que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu» (1 Jean 4: 15). La connaissance et la réalisation de ces privilèges bénis sont autre chose, mais notre place est dans le Père et dans le Fils.

Il existe, sans doute, une grande différence dans l'état pratique des chrétiens, et malheureusement chez un grand nombre cet état répond très peu à leur haute position. En général, il est de nos jours à un degré bien bas, bien qu'il puisse y avoir beaucoup de connaissance. Mais ce qui caractérise un état vraiment spirituel n'est pas une grande connaissance, mais l'amour pour la Personne du Seigneur Jésus; et c'est là malheureusement ce qui est faible. Toutefois, quelque triste et humiliant que ce soit pour nous tous, cela ne change rien au fait que tout vrai chrétien possède la vie éternelle, et la divine perfection de cette vie n'en est nullement atteinte. La conscience de cette vérité est infiniment précieuse pour le coeur, et ne peut avoir pour effet que d'élever notre état spirituel. Nous possédons la vie par laquelle Dieu a été parfaitement glorifié dans un monde de péché, et qu'aucune puissance de l'ennemi n'a été capable de vaincre. Ni le monde, ni le péché, ni la mort, ni le diable, n'ont pu en rien y porter atteinte; elle est restée immuablement ce qu'elle était au commencement. Quel privilège pour le chrétien de pouvoir contempler la puissance et la pureté parfaite de cette vie, et dire: «C'est ma vie!»

Mais si la puissance et la perfection de la vie éternelle se sont ainsi révélées ici-bas sur la scène du péché et de la mort, que sera son plein déploiement dans son domaine propre, là où tout se trouvera en parfait accord avec elle! C'est ce que nous montre Jean, à la fin du livre de la Révélation. Là il lui est donné de contempler la vie dans toute sa puissance souveraine et sa plénitude, sous l'image d'un fleuve. De même que maintenant la domination de la mort répand partout la douleur et l'effroi, alors la puissance de la vie renouvellera tout pour un printemps éternel, «un matin sans nuages» (2 Samuel 23: 4). Il est intéressant de voir comme la conclusion de la parole de Dieu se relie à son commencement, pour montrer quels étaient les vrais desseins de Dieu dès le commencement, et comment toutes ses voies ont concouru à leur accomplissement.

Le fleuve et l'arbre de vie de l'Eden se retrouvent à la fin. Entre ces deux points extrêmes se voient l'activité de Satan, la chute de l'homme et la complète ruine d'une création déchue. Mais à travers tout, on voit couler pour ainsi dire le fleuve de la vie reliant comme par un fil d'or les deux extrémités, et dispensant la vie à tous ceux qui sont altérés et qui ne peuvent trouver aucune satisfaction dans ce monde. Ils puisent à ses eaux la consolation, la force et le rafraîchissement, et sont ainsi rendus capables de devenir pour d'autres des canaux d'eau vive. Aussi intarissable que le fleuve même, est la force de ceux qui s'y abreuvent. «C'est pourquoi nous ne craindrons point, quand la terre serait transportée de sa place, et que les montagnes seraient remuées et jetées au coeur des mers; quand ses eaux mugiraient, qu'elles écumeraient, et que les montagnes seraient ébranlées à cause de son emportement. Il y a un fleuve dont les ruisseaux réjouissent la ville de Dieu, le saint lieu des demeures du Très-haut. Dieu est au milieu d'elle; elle ne sera pas ébranlée. Dieu la secourra au lever du matin» (Psaumes 46; Jean 7: 37-39). Le cours du temps présent prendra fin, avec ses douleurs, ses difficultés et ses épreuves; la puissance du serpent ancien sera brisée et toute conséquence de son activité effacée jusqu'à la moindre trace; mais le fleuve de la vie, avec une force et une plénitude qui ne défaudront point, demeurera d'éternité en éternité les rafraîchissantes délices des rachetés.

Puissions-nous, semblables au prophète, chercher à sonder les insondables profondeurs de ce fleuve! (Ezéchiel 47: 3-5). Puissions-nous, par la foi et dans la puissance de l'Esprit, nous plonger dans l'immensité insondable de Celui qui nous est présenté par cette image — dans la gloire du Fils unique du Père, de Celui qui «était au commencement» — et de sa plénitude recevoir grâce sur grâce! Oui, que le Seigneur nous accorde de nous oublier nous-mêmes, pour nous perdre en Celui en qui habite toute la plénitude de la Déité corporellement.