Lettres de Darby J.N.

 

Lettres de Darby J.N. 1

Lettre de J.N.D. no 59 - ME 1893 page 19. 2

Lettre de J.N.D. no 60 - ME 1893 page 59. 2

Lettre de J.N.D. no 61 - ME 1893 page 98. 3

Lettre de J.N.D. no 62 - ME 1893 page 119. 4

Lettre de J.N.D. no 63 - ME 1893 page 119. 4

Lettre de J.N.D. no 64 - ME 1893 page 139. 5

Lettre de J.N.D. no 65 - ME 1893 page 139. 5

Lettre de J.N.D. no 66 - ME 1893 page 139. 5

Lettre de J.N.D. no 67 - ME 1893 page 159. 6

Lettre de J.N.D. no 68 - ME 1893 page 178. 6

Lettre de J.N.D. no 69 - ME 1893 page 197. 8

Lettre de J.N.D. no 70 - ME 1893 page 216. 9

Lettre de J.N.D. no 71 - ME 1893 page 218. 10

Lettre de J.N.D. no 72 - ME 1893 page 238. 11

Lettre de J.N.D. no 73 - ME 1893 page 255. 12

Lettre de J.N.D. no 74 - ME 1893 page 268. 15

Lettre de J.N.D. no 75 - ME 1893 page 281. 17

Lettre de J.N.D. no 76 - ME 1893 page 283. 18

Lettre de J.N.D. no 77 - ME 1893 page 301. 20

Lettre de J.N.D. no 78 - ME 1893 page 331. 22

Lettre de J.N.D. no 79 - ME 1893 page 359. 22

Lettre de J.N.D. no 80 - ME 1893 page 371. 23

Lettre de J.N.D. no 81 - ME 1893 page 395. 25

Lettre de J.N.D. no 82 - ME 1893 page 435. 26

Lettre de J.N.D. no 83 - ME 1893 page 438. 27

Lettre de J.N.D. no 84 - ME 1893 page 475. 28

Lettre de J.N.D. no 85 - ME 1893 page 477. 28

 

Lettre de J.N.D. no 59 - ME 1893 page 19

à Mr L.B.

4 mai 1851

Prenez courage, cher frère, vous serez heureux lorsque l'oeuvre que Dieu fait en vous, sera achevée, et pas auparavant; mais il la fait, et j'espère qu'il la fera vite. Confiez-vous dans sa bonté. Tout ce qu'il fait maintenant, il le fait en grâce. Nos misères ne sont que l'occasion de l'exercice de sa grâce. Cela ne dit pas qu'il ne châtie pas, mais il châtie ceux qu'il aime. Prenez la Parole dans ses parties pratiques; et si elle vous condamne en quoi que ce soit, ou vous dise que, dans ces cas d'épreuve, Dieu vous châtie à cause du mal, occupez-vous de ce fait, et non à scruter ce que Dieu veut faire; ce qu'il fait, il le fait pour le passé; pour le présent, c'est ce dont nous avons à nous occuper, responsables que nous sommes; le reste est entre les mains de Dieu, et il agira en amour, car il n'est rien d'autre.

Lettre de J.N.D. no 60 - ME 1893 page 59

à Mr L.B.

1851

… Au reste, qui sait apprécier le péché, hormis Dieu lui-même? Sans doute, nous pouvons être confondus de ce que nous découvrons en nous-mêmes et l'apprécier dans la présence de Dieu dans la mesure où l'âme sait le faire devant lui, comme placée dans la lumière qui lui montre le péché et qui l'effraie. Ce qui donne la paix, c'est que Dieu a apprécié le péché sur la croix, lorsqu'il l'a ôté. Ce n'est pas pour dire que cette conviction de péché en sa présence ne soit pas nécessaire à la vraie paix, à une paix solide et durable de la part de Dieu; certes, oui. Mais ce n'est pas là une appréciation calme et juste du péché; cette dernière vient, autant que nous pouvons y parvenir, lorsque nous jouissons de la pleine communion de Dieu et que nous pouvons contempler la lumière sans crainte en y marchant. — La conviction de péché, bien que ce sentiment soit au fond le même, se mêle dans notre esprit avec les conséquences. Ce n'est pas là une appréciation juste du péché. Les théoriciens voudraient qu'on haïsse le péché d'une manière abstraite, parce qu'il est ce qu'il est: cela arrive en effet avec la nouvelle nature, existante en principe dès le moment où cette nouvelle nature est en nous. Mais l'oeuvre vivifiante de l'Esprit qui communique cette nature, réveille la conscience; alors on sent son péché, — non seulement on apprécie le péché pour ce qu'il est, — on le sent devant Dieu; on voit le jugement de Dieu à son égard. Dieu veut que nous le sentions ainsi; et c'est beaucoup plus humble et humiliant de le sentir de cette manière que de l'apprécier, si cela se pouvait, selon le jugement du nouvel homme, c'est-à-dire par l'Esprit de Dieu. Je suis pécheur, moi: voilà ce qui me place devant Dieu, ou plutôt ce qui est l'effet d'être placé devant lui. On ne fait pas de la théorie; on est quelque chose, et Dieu, nous le voyons, est quelque chose qui ne permet pas que nous soyons ce que nous sommes, qui ne l'accepte pas, qui ne nous accepte pas. Nous sommes moralement ce péché, identifiés avec lui; il a été dans nos pensées, dans nos affections. La Parole nous autorise maintenant (quoique nous n'ayons pas encore pu remporter la victoire) à dire: «Ce n'est plus moi qui fais cela, mais le péché qui habite en moi» (Romains 7: 17, 20). Mais c'est l'oeuvre de la grâce; c'est la grâce même qui nous permet de le dire à cause de la nouvelle nature qu'elle communique. — Ainsi, nous apprenons à haïr le péché comme des pécheurs et non pas comme des philosophes. Etant en paix, et marchant dans la communion de Dieu, nous voyons combien il est détestable, mais non sans le sentiment que nous étions sous ce joug, tout en étant maintenant délivrés.

Lettre de J.N.D. no 61 - ME 1893 page 98

à Mr L.B.

Amwell, Angleterre, 13 mars 1852

Je n'ai pas besoin de vous dire avec quelle vraie joie j'apprends que vous avez reçu la paix: aussi je ne veux pas remettre ma réponse. Lorsque Dieu nous a dépouillés de nous-mêmes, il n'a plus, dans sa bonté, qu'à nous donner la paix: c'est ce que l'on voit partout dans la Parole. Une fois l'âme dans le vrai, devant Dieu, il y a toujours pour elle la ressource de «la grâce;» rien que la grâce.

Mais maintenant, sans douter de l'autour de Dieu, vous avez quelques précautions à prendre, vu la manière dont vous avez été secoué. Je suis bien aise que vous trembliez à l'idée que vous pourriez perdre votre bonheur. C'est une chose sérieuse, quelle que soit la bonté de Dieu, que de trouver la paix avec un Dieu de sainteté. Christ a fait la paix; mais il veut que nous sentions ce que c'est que d'en avoir besoin, afin que nous le connaissions. Nos coeurs sont si rusés, si méchants, qu'après avoir reçu la paix ils se laissent aller à la négligence. Auparavant, nous craignions le péché; maintenant, déchargés de ce lourd fardeau, il nous arrive plus facilement de marcher en avant à la légère. Jouissez devant Dieu, et non pas sans Dieu, de la paix qu'il vous a donnée. Réjouissez-vous en tremblant: c'est le moyen, par la grâce, de conserver la paix.

En outre, prenez bien garde de ne jamais rien dire qui dépasse votre expérience: rien n'est plus important pour notre propre âme. Que l'oeuvre ne vous entraîne pas non plus à vous occuper d'autrui, de manière à négliger vos propres besoins. C'est devant Dieu que vous avez trouvé la paix, c'est aussi devant Dieu qu'on garde la paix, j'entends la jouissance et la vraie assurance de sa faveur. «Prends garde, dit l'apôtre, à toi-même et à la doctrine» (1 Timothée 4: 16), «car en faisant cela, tu te sauveras toi-même et ceux qui t'écoutent». Si vous faites ainsi, ce sera une leçon pour les frères, et une leçon plus réelle que beaucoup de prédications. Oui, cher frère, par-dessus tout, conservez votre âme devant Dieu.

Ne pensez pas que l'oeuvre dépende de vous: vous voyez qu'elle a été faite sans vous. Cela ne veut pas dire que ce ne soit une grande bénédiction de travailler à l'oeuvre du Seigneur, mais nous le faisons en disant: Nous sommes des serviteurs inutiles, et en sentant que Dieu seul fait l'oeuvre tout entière. Travaillez donc, édifiez les autres, mais ne travaillez pas au delà de votre communion. Rien ne serait plus propre à vous faire perdre la paix. Cherchez à marcher dans la crainte du Seigneur; c'est le commencement de la sagesse; c'est ce qui accompagne la consolation du Saint Esprit, dans les Actes.

D'un autre côté, ne soyez pas surpris ni découragé, si vous ne sentez pas toujours toute la joie que vous avez éprouvée au commencement. La joie a des choses plus profondes que cette première satisfaction, parce qu'elles tiennent plus immédiatement à la communion de Dieu lui-même; mais, pour ce qui est de la joie en nous, il est selon la nature humaine que la première impression s'affaiblisse. Ne vous contentez pas de cela. Cherchez à ce qu'elle soit remplacée par une communion plus profonde, par une révélation plus complète de Dieu, mais ne vous découragez pas.

Reposez-vous sur ce que Christ est, et non sur ce que vous en sentez. C'est là que vous avez trouvé la paix; c'est là que vous la garderez.

Lettre de J.N.D. no 62 - ME 1893 page 119

à Mr L.B.

25 mars 1852

A l'égard du témoignage, ou plutôt de sa réception, je pense qu'il y a une différence entre la foi en la parole d'un homme et la foi en la parole de Dieu. Cette dernière est bien, sans doute, l'acceptation d'un témoignage comme étant vrai: on a mis son sceau que Dieu est véritable; oïl a cru Dieu; mais de plus, il y a un changement moral, complet quand, croyant Dieu, on croit en un Dieu saint et véritable. L'âme a reçu Dieu dans son témoignage, elle s'est mise en relation avec Dieu, et sa position est totalement changée. La vie qui connaît Dieu est là; Dieu est révélé. Quel changement que celui-là! On a reconnu que Dieu est véritable; le voile est ôté; on est dans la lumière, dans la présence de Dieu; on a la vie éternelle.

Lettre de J.N.D. no 63 - ME 1893 page 119

à Mr L.B.

Angleterre, 29 juillet 1852

Je comprends que votre foi ne puisse pas se reposer sur une paix que vous avez eue, et qui s'en est allée. Mais il est certain que l'incrédulité n'est pas de Dieu, en sorte que si je doute de vos pensées actuelles et que je ne leur attribue pas plus d'autorité qu'aux précédentes, vous ne pouvez vous en étonner. Vos pensées actuelles ne sont pas divines, ni divinement données; elles sont de vous, — par conséquent, ne valent rien. Autrement, si la conviction du péché est divinement donnée, vous êtes sauvé, quoique vous n'ayez pas la paix. Je crois, certes, que votre condamnation est juste, comme la mienne le serait, eu égard à ce que je suis; mais là n'est pas la question; il s'agit de la grâce que Dieu fait à celui qui a mérité la condamnation. Pour ma part, je crois que vous êtes sous la discipline de Dieu, et je n'en doute nullement, — discipline amère, j'en conviens. Je crois que votre corps y est pour quelque chose; mais lors même que cela serait vrai, vous êtes entre les mains de Dieu, de sorte que cela n'empêche pas que ce ne soit sa discipline. Il y a un gouvernement de Dieu. Outre cela, Dieu ne peut, parce qu'il agit toujours moralement, dire le mot que vous demandez, jusqu'à ce que votre âme soit amenée au point où il peut se rencontrer avec vous. Lisez Job, voyez le discours d'Elihu, et vous comprendrez ce qui en est. Seulement, de temps en temps, Dieu soulage au milieu de la discipline, pour faire comprendre que la grâce est là, et pour rafraîchir. Le moment passé, cela ne donne nullement la paix, mais cela soutient le coeur qui succomberait s'il n'y avait pas un moment de relâche.

Lettre de J.N.D. no 64 - ME 1893 page 139

à Mr L.B.

1852

Je ne m'étonne pas que l'Ennemi vous ait ravi la paix en vous faisant regarder à vous-même. Il est impossible d'avoir la paix en regardant à soi et en mettant en question sa relation avec Dieu. C'est en lui qu'on trouve la paix dans la grâce, et la grâce est en lui: il l'a manifestée en Jésus. Si la conscience parle et cherche à détruire cette confiance, la réponse est dans l'oeuvre de Christ. Au reste, il arrive toujours qu'après un violent orage, alors que le vent est tombé, la mer n'étant plus soulevée, reste encore longtemps houleuse. Mais Dieu est fidèle, et, en regardant à lui, vous trouverez la paisible et permanente assurance de sa bonté. Il ne peut pas nous faire défaut.

Lettre de J.N.D. no 65 - ME 1893 page 139

à Mr L.B.

Lausanne, le 7 septembre 1852

Il est vrai que l'homme ne peut rien donner, mais il n'en est pas moins vrai que Dieu emploie le ministère de l'homme pour l'accomplissement de son oeuvre

Lettre de J.N.D. no 66 - ME 1893 page 139

à Mr L.B.

Amwell (Angleterre), 27 novembre 1852

Ce qui m'a souvent frappé, c'est que la Bible ne fournit pas nos expériences. On en trouve un peu, sans qu'elles en aient la forme, dans l'épître aux Philippiens; puis aussi, dans l'épître aux Romains, les principes qui expliquent le terrain sur lequel une âme, sous la loi, se trouve placée; mais la Parole de Dieu ne donne pas l'expérience de l'homme. Elle expose bien ce que l'homme est; elle expose, non pas ce qu'il pense dans son propre esprit à l'égard de lui-même, mais ce que Dieu pense de lui; elle légitime le jugement de Dieu; elle montre ce qu'il daigne faire en grâce, et dans ce but elle donne ce qu'il faut de l'histoire de l'homme. Vous trouverez dans la Bible les choses qui vous ont jeté dans cette pénible expérience, et la réponse à l'état qui en a été la cause. Nous n'avons pas besoin d'une révélation pour savoir ce que nous sentons nous-mêmes, mais pour savoir ce que nous sommes, ce que Dieu pense de nous, ce qu'il est, ce qu'il a fait pour nous. La chose est certaine, et la raison en saute aux yeux. — Les Psaumes font un peu exception à cette remarque. Nous y voyons soit Christ, soit un peuple fidèle au fond, entouré de ténèbres, ou se trouvant dans la lumière. Dieu nous montre qu'il s'y intéresse. Je me rappelle le temps où le Psaume 88 seul me consolait un peu, parce que dans ce psaume il n'y avait point de consolation; je me disais: C'est un saint qui l'a composé; ainsi moi-même je puis être un saint, puisque Lui a pu en être là, criant nuit et jour sans être consolé…

Lettre de J.N.D. no 67 - ME 1893 page 159

à Mr L.B.

1852

Dieu a la haute main sur tout; sa faveur gardera les frères. On apprend dans les temps où nous vivons, à s'appuyer sur lui. Mais rien n'arrêtera sa main, ni ne fermera la porte qu'il voudra tenir ouverte. C'est là depuis longtemps ma confiance. Des orages, il y en aura, mais jamais quelque chose sans sa volonté, pas un cheveu de nos têtes ne tombera sans elle.

Ne vous étonnez pas de vous trouver quelquefois abattu; le Seigneur lui-même l'a été. Attristés par la vue du péché qui est en nous? C'est ce que nous devrions être. L'incrédulité ne s'en mêle que lorsque ce sentiment détruit notre confiance en Dieu. Au reste, quand on a traversé un fort orage, la mer demeure toujours houleuse pour quelque temps, bien qu'il ne vente plus.

Ne dites pas un mot au delà de votre foi personnelle, de votre jouissance du Seigneur, et restez appuyé sur cette oeuvre dont la valeur ne change pas. Nous sommes la justice de Dieu en lui, et d'autre part sa bonté demeure à toujours. Gardez soigneusement votre propre coeur, non par des questions à l'égard de son amour, mais par la grâce, et en cherchant sa présence. Dieu n'aime pas le mal, mais il nous aime, tout mauvais que nous soyons, des «impies», «sans force». Ce n'est pas que Dieu n'ait pas voulu l'obéissance, mais c'est Christ qui la lui a présentée. Voilà le fondement de la paix, ce qui soutient le coeur dans les combats, tout en nous donnant la force pour combattre, parce que nous savons ainsi que Dieu est pour nous. Le sentiment d'affection particulière découle de la communion, et celle-ci est fondée sur la croix. «Il m'a aimé», n'est pas le fondement de la foi; c'est la joie du coeur qui connaît Christ…

Lettre de J.N.D. no 68 - ME 1893 page 178

à Mr L.B.

29 décembre 1854

… Quant à votre état actuel, j'ai encore un mot à vous dire. Vous dites avec raison, et vous savez bien que c'est ma pleine conviction, que Dieu seul peut agir efficacement dans l'âme. Mais il est important que vous détourniez vos regards de vous-même et les portiez vers Celui qui en est le digne objet. Ce qui me console dans votre cas, c'est que je pense à ce que Dieu est. Si je pense à vous, votre état est triste, les moyens paraissent inefficaces. Mais en pensant à l'amour de mon Père, je suis tranquille, parce qu'il est tout puissant, et qu'il est amour. Je compte sur lui sans penser aux difficultés que présente votre âme. Elles sont nulles pour lui; petites ou grandes lui sont égales; toutes ensemble elles ne sont rien. Il crée. Vous parlez ainsi, me direz-vous, parce que vous le connaissez. Oui, je puis le dire, parce que je le connais, mais la chose n'est pas ainsi, parce que je le connais: je le connais, parce qu'il est tel; et il est tel pour nous. Vous cherchez une oeuvre en vous, une réponse en vous; c'est très bien dans un sens, mais la réponse même serait de diriger vos yeux sur Christ. Vous cherchez une oeuvre en vous. Ne la cherchez plus, regardez à Christ lui-même, à ce qu'il a été, et ce qu'il a été pour chacun sur la terre, est ce qu'il est toujours. Portez vos regards sur lui seul; vous trouverez ce qu'il est en lui-même, sans question d'oeuvre en vous, ou même de ce qu'il est pour vous. Ce qu'il est, est notre consolation, notre refuge, quand nous nous réfugions auprès de lui, parce que nous sommes méchants, parce que nous ne trouvons point de changement, parce que nous n'avons point de consolation. Il ne peut pas être, et il n'est pas autre chose que ce qu'il est, tel qu'il s'est manifesté sur la terre. Il faut aller à lui, avec tous ses péchés, toutes ses fautes, toute sa dureté, tout son désespoir, sans le moindre changement: et si nous ne sommes pas changés, et ne pouvons nous changer, lui n'est pas changé, et ne peut ni changer, ni se renier. Ne pensez pas à votre foi ni à ce que vous pouvez trouver comme réponse à vos demandes, allez à lui; confiez-vous à la manifestation qu'il a donnée de lui-même dans ce monde. Il ne se reniera pas. Confiez-vous en lui, tel que vous êtes, sans aucun changement. Vous verrez bien que Dieu s'est manifesté là en chair. Reposez-vous sur ce qu'il est, ainsi manifesté, sans autre. Il est tel, et vous le connaissez tel. Vous n'avez qu'à vous abandonner sans effort à l'action et à l'influence de ce qu'il a été, et de ce qu'il est encore. Si vous vous abandonnez à lui, tel qu'il s'est manifesté sur la terre devant les hommes, il se renierait lui-même s'il ne vous bénissait pas. Il est venu n'imputant pas les péchés. Tel était Jésus Christ. — Il ne peut pas être autre. Sans doute, si on ne veut pas le recevoir comme tel, on ne l'a pas; mais ce n'est pas votre cas. Vous pensez que vous ne pouvez pas l'avoir, mais vous aimeriez bien l'avoir — indignement, pauvrement, sans foi en la valeur de son amour et de son oeuvre, d'accord; mais vous le voudriez bien. L'oeuvre est faite, je le répète, il s'agit de ce qu'il est. Il ne peut pas être autre pour vous; peu importe ce que vous êtes. Assurément il n'existe pas de bien en nous; c'est pourquoi nous nous reposons sur ce qu'il est, car il n'y a que du bien en lui. Regardez à Christ; il ne peut pas être, et il n'est pas autre chose pour vous que ce qu'il est, que ce qu'il s'est manifesté être sur la terre, peu importe ce que vous êtes, sans penser à l'oeuvre en vous ou à un changement quelconque. Tels que nous sommes, — il est pour nous ce qu'il est. Ce dont je parle est précisément ce que fit la pauvre Syrophénicienne. Elle n'était pas du peuple élu (autant que l'homme pouvait parler d'élection); elle n'avait pas droit aux promesses, et le Seigneur la repoussait sur ce terrain-là; mais se disant elle-même un chien, elle se reposait, en dépit de tout, sur ce que Dieu était en lui-même. Faisant abstraction de ce qu'elle était, elle se reposait sur ce que lui était, et lui ne pouvait pas dire qu'il ne l'était pas. Il aurait renié Dieu, — c'était impossible: Il était Dieu.

Lettre de J.N.D. no 69 - ME 1893 page 197

à Mr L.B.

Dillenbourg, 1857

… Vous comprendrez bien que le temps m'ait fait défaut tous ces jours-ci, car j'ai dû m'occuper de la traduction du Nouveau Testament. Elle est aujourd'hui terminée et avant d'entreprendre avec la même assiduité la tâche de la révision, déjà d'ailleurs à moitié faite, j'ai quelques moments pour vous écrire.

Je m'étonne de ma tranquillité à l'égard de cette traduction, j'espère que c'est un signe que Dieu est avec moi. Nous l'avons faite, je le crois, avec beaucoup de soin, — c'était un devoir évident, — mais je n'ai jamais eu un moment de souci ni d'inquiétude. Je ressentais un peu au commencement mon éloignement du travail actif du coeur au milieu des frères; mais Dieu m'a soulagé de ce poids en le lui présentant après les premiers jours; et j'ai fait ma tâche journalière sans autre sentiment que le désir de la bien faire.

Le mardi et le vendredi, nous avons des réunions ici, et j'en ai eu à Barmen et ailleurs. Je suis allé à la campagne tous les dimanches, car je médite maintenant la Parole en allemand, pourvu que ce soit devant des frères; j'ai eu l'occasion de le faire devant un nombre considérable d'entre ceux qui ne rompent pas le pain avec nous. Il y a beaucoup de chrétiens dans ces contrées, soit en relation avec le nationalisme, soit avec les frères, et on vient de fonder une église indépendante à la façon de Genève, seulement plus baptiste. Il y a aussi des baptistes étroits, et beaucoup d'entre eux sous la loi: leur nombre n'est pas grand, mais ils sont actifs; cependant leur état n'est pas satisfaisant, ils ne dépassent pas, si tant est qu'ils y parviennent, l'état des dissidents anglais.

Quant à Krummacher, il est à Berlin. Il a écrit une assez triste lettre à son ancien troupeau d'ici, prônant leur état, comme étant au-dessus de tout éloge, — ce qui se comprend, du reste, par l'état de sa congrégation à Berlin, où, dit-il, il ne peut faire allusion à la parole de Dieu dans ses discours, car personne ne saurait de quoi il s'agit: on ne l'a jamais lue. Quant à Kirchentag, il a beaucoup recommandé la liturgie à Francfort, et quelqu'un lui a répondu qu'on avait plus besoin de Christ que de tout cela. Il a certainement été béni ici, ainsi que d'autres hommes moins connus; mais il suit le courant religieux comme tant d'autres, cela n'exclut pas la bénédiction, car Dieu est miséricordieux, et il bénit malgré nos misères et nos fautes.

La Parole est toujours reçue à la campagne, et en Hollande les portes s'ouvrent. A dix heures d'ici, sept personnes ont été converties depuis mon départ. Il y a moins de vie à Elberfeld, à Barmen, et par ici, qu'ailleurs: ils sont habitués au christianisme, triste évidence de ce que sont nos pauvres coeurs. Cependant, j'ai été très heureux à Dillenbourg, ces temps-ci, en rompant le pain; et j'espère que Dieu accomplit, par ces réunions, une oeuvre d'approfondissement dans les âmes. Il y a plus de communion, plus de sérieux; tous avaient été sous la loi; ils ont été affranchis individuellement, mais l'oeuvre qui lie, qui met le coeur en rapport personnel avec Christ, manquait encore, du moins en profondeur. J'ai bon espoir que Dieu agira encore; au reste, les frères marchent bien, ils sont unis et en paix, mais ils se voient peu, car ils sont en général pauvres, et le travail accapare leur temps…

Je ne sais si je pourrai me rendre à Pau cette fois-ci. J'ai passé longtemps ici, car le travail qui nous a occupés, ne pouvait se faire à la hâte. Maintenant que nous n'avons plus qu'à corriger, cela ira plus vite. Matthieu est à peu près imprimé.

D'une manière générale, Dieu agit. Sachons nous attendre à lui et le chercher; sachons attendre son Fils du ciel, Jésus qui nous délivre de la colère à venir. J'espère, Dieu aidant, pousser jusqu'en Suisse, et voir en passant les frères de Montbéliard, visités des plus sérieusement par le choléra.

De la Parole, je ne vous dis pas grand-chose. J'attends que Dieu lui-même agisse… Je suis sûr qu'il faut être dépouillé de soi et apprendre à connaître la pure grâce…

Lettre de J.N.D. no 70 - ME 1893 page 216

à Mr G.

Nîmes, 3 janvier 1872

Cher frère,

L'étude que nous allons faire de la Parole n'est pas une chose nouvelle. Il y a trente ans à peu près que douze frères sont restés une année à Lausanne pour la lire de la même manière avec moi. Je le fis sur la demande de deux frères, et je craignais au commencement, que cela ne m'empêchât de travailler moi-même, mais je ne voulus pas refuser. D'autres vinrent ensuite. Je ne me mêlais nullement de leur consécration à l'oeuvre. Il y en eut que je ne croyais pas appelés de Dieu à cette oeuvre, mais je leur en laissais la responsabilité. Le résultat vérifia mon jugement en certains cas. Croyant que je pouvais leur être en aide quant à l'intelligence de la Parole, ils m'ont demandé de la lire avec moi, et je ne m'y suis pas refusé. Il en est de même actuellement; car je ne sais pas quels frères vont venir ici. Communiquer ce que Dieu m'a donné, à ceux qui se vouent à l'oeuvre, est une chose assez simple, me semble-t-il. Le dévouement et le développement du don sont autre chose; ce dernier vient de la proximité de Dieu dans laquelle l'âme se trouve. C'est ainsi seulement qu'on acquiert ce que Dieu donne. Pour cela, il faut la fidélité de l'âme sous la grâce, de la diligence, même pour profiter de ce qu'on apprend. Je trouve dans la Parole, que ce sont les âmes qui s'attachent au Sauveur, qui se trouvent dans la position où elles peuvent recevoir de vraies lumières. Ce que V. cite est bien dans la Parole, que Timothée devait communiquer ce qu'il avait appris à des hommes fidèles. Il ne les rendait pas fidèles, il ne leur communiquait aucun don; et il ne pouvait, sinon par les moyens ouverts à tout chrétien: la prière, l'exhortation, etc., développer leurs dons; il leur communiquait les vérités qu'il avait apprises.

Je veux croire que ces amis sont sincères en se vouant à l'oeuvre, et je sais que la grâce seule peut les en rendre capables; je ne juge pas de leurs dons, et je ne le puis pas. Je me fie à eux et au Seigneur; je les sers de mon mieux par ce que Dieu m'a donné, et j'espère que Dieu les bénira. Je crois qu'il a mis sa bénédiction en quelque mesure sur ce qui s'est fait il y a trente ans.

A Londres dernièrement, tous les mardis soirs, une trentaine de frères se réunissaient ainsi, tous plus ou moins occupés de l'oeuvre. Ils ont trouvé beaucoup de bénédiction. Dans ce cas, comme dans l'autre, nous avons simplement étudié la parole de Dieu.

Votre affectionné frère.

Lettre de J.N.D. no 71 - ME 1893 page 218

à Mr G.

Pau, 25 mars 1872

Merci beaucoup de votre lettre, cher frère.

J'espère aimer les frères sans distinction, mais nos entretiens à Nîmes m'ont doublement intéressé à ceux qui s'y trouvaient; j'ai donc été très heureux de recevoir de vos nouvelles. Je me réjouis fort de la bénédiction que notre Dieu a accordée dans vos contrées. Qu'il daigne garder ces chers jeunes hommes.

Il me paraît que Dieu ranime son oeuvre en France. Jamais je n'ai eu dans les Cévennes de réunions semblables. A Ganges, à l'heure du dîner, le local était tout rempli, et dans les montagnes, il n'y a pas assez de place. A Clairac, nous avons eu, je l'espère, une réunion utile; on y est venu des deux Charentes, qui sont assez loin, et du Béarn. Tous les soirs sauf un, j'ai tenu des réunions; la salle, qui est assez vaste, était comble; il y avait beaucoup d'hommes; à la dernière soirée, quand presque tous les frères étaient partis, les auditeurs se tenaient debout à la porte et aux fenêtres; il y avait des incrédules, même l'un des ministres, des gens de l'église libre, etc. J'espère bien que Dieu a été dans ces réunions. Les frères aussi ont été encouragés et stimulés. MM. T., H., et B., sont encore dans les Cévennes. M. T. a visité Ganges, St-Jean, St-André, Lassalle, St-Hippolyte et St-Laurent. Il a été très heureux du désir qu'il a rencontré d'étudier la Parole, et semble encouragé dans son travail. Je suis bien aise que ces amis soient ainsi visités. J'espère que l'état des frères dans le Midi sera un peu relevé et que notre séjour à Nîmes sera aussi béni à cet égard. Quoiqu'il en soit, le Seigneur, notre cher Sauveur, poursuit son oeuvre.

Nous faisons l'expérience de notre faiblesse. Les pleurs sont mêlés avec le travail, hélas! on les trouve quelquefois comme suite de la paresse. Lui ne nous fait jamais défaut; vous le savez, cher frère, mais souvenez-vous qu'être hors de sa présence, ou plutôt de la réalisation de sa présence, fait une différence du tout au tout quant à l'état de l'âme. On ne doute pas de son salut, soit, mais quant au discernement, à la connaissance de soi-même, à la force pour marcher, quant à estimer toutes choses comme des ordures, tout est changé: et de plus, il nous faut être avec lui, pour comprendre la douceur de son amour et l'empire qu'il exerce sur le coeur, rendant aussi notre oeil net.

J'espère que vous étudiez la Parole pour vous-même; ce n'est pas que, pour un évangéliste, la connaissance vienne en premier lieu, comme pour celui qui enseigne, mais l'évangile même devient plus clair, il est reçu plus directement de Dieu, quand nous sommes nourris de sa Parole; puis notre propre âme en ressent l'effet, ce qui est de toute importance. Une âme sèche ne donnera jamais un évangile d'eau vive, et pour nous-mêmes quelle douceur d'être près de lui, de jouir de son amour et de sa communion, d'être dirigés par son oeil et par les conseils intimes de sa grâce! Nous trouvons ces choses dans la prière et dans l'étude de la Parole. Aussi rien ne remplace cette communion individuelle avec le Seigneur. Posséder ce qui vient de lui-même, est le plus grand bonheur en travaillant, et la prière et la Parole sont également nécessaires pour cela.

Paix vous soit, cher frère. Saluez affectueusement tous les frères. J'espère que ceux qui ont été à Nîmes auront un aussi doux souvenir de notre séjour, que celui que j'en rapporte, en pensant aux relations que nous avons entretenues ensemble. Dieu a été bien bon pour nous, qu'il vous garde près de lui.

Votre affectionné en Christ.

Lettre de J.N.D. no 72 - ME 1893 page 238

à Mr G.

Boston, 9 septembre 1874

Bien cher frère,

J'ai été très heureux d'avoir de vos nouvelles, j'espère que Dieu vous garde près de lui. Qu'il maintienne la fraîcheur de sa grâce et de son amour dans votre âme; nous avons besoin d'être constamment renouvelés, l'énergie spirituelle ne se maintient pas sans cela: «Leur jeunesse», est-il dit, «se renouvelle comme celle de l'aigle». Ce n'est pas le progrès dans la connaissance qui fait cela, bien que ce progrès soit profitable pour enseigner les chrétiens, et même pour rendre plus pur l'évangile que nous prêchons. Le tout, c'est de se tenir près de Dieu: là l'amour se maintient et croit, son amour dans nos âmes, trouvant son activité et sa satisfaction à s'exercer envers les pauvres pécheurs et envers les saints; on cherche la gloire du Seigneur dans les âmes et leur avancement spirituel. Que Dieu nous donne de jouir de lui! Il se révèle à nous, non seulement comme ayant le bonheur infini en lui-même, mais aussi dans l'activité de son amour dans laquelle il trouve ses délices. Quand son amour est répandu dans nos coeurs, nous jouissons certainement de lui; mais cet amour est actif aussi en nous par sa grâce. L'activité, là où l'on ne se retrempe pas dans sa communion, peut être sincère, mais elle dégénère en routine et dans l'habitude d'agir, et est même dangereuse, car l'âme est loin de Dieu sans s'en douter; mais l'énergie spirituelle se soutient quand nous demeurons dans son amour. Si nous demeurons en Jésus, et que sa Parole demeure en nous, nous pouvons compter sur une réponse aux requêtes que nous lui adressons au cours de notre oeuvre.

Ici, je ne vois pas un grand mouvement dans les âmes; le peu qu'elles ont ne les détourne pas des voies humaines dans le sentier chrétien, et les pousse à l'activité avec des doctrines antiscripturaires. Parmi les frères, il n'y a pas d'activité dans l'évangile. Ils marchent très bien, mais il n'y a pas de dons, et le frère qui agissait est très malade. En général, il y a passablement de besoins dans ce vaste pays, et même les conversions ne manquent pas. L'état des églises est scandaleux, les âmes pieuses gémissent, mais où trouver des instruments pour les conduire dans le bon chemin? Dieu en a suscité quelques-uns; plusieurs ministres même ont quitté leurs systèmes, mais c'est une goutte d'eau dans une vaste mer. En outre, il y a un grand effort pour retenir les âmes dans les divers systèmes en se servant des lumières que possèdent les frères, et en prêchant leurs doctrines. Ils ne s'en cachent même pas. Un des plus actifs parmi eux, qui a visité l'Ecosse, a dit là aux ministres, qu'ils ne pourraient tenir tête aux frères s'ils ne lisaient pas leurs livres, mais en même temps il fait tout son possible pour empêcher les âmes de quitter les divers systèmes dits «églises»: c'est là une nouvelle ruse de l'Ennemi. Grâce à Dieu, cela ne me décourage pas. J'ai vu que Dieu est au-dessus de toutes ces choses, seulement c'est une difficulté de plus. S'il y avait l'activité de la grâce chez les frères, il y aurait encore pour eux une victoire à remporter. On cherche aussi à retenir les âmes, en présentant une fausse perfection comme le but à atteindre, une perfection qui n'en est pas une, et où Christ, le précieux Sauveur, est terriblement voilé.

J'ai eu une très bonne réunion hier soir, et des étrangers sont venus écouter. Je ne doute pas que, si un don s'exerçait ici d'une manière suivie, il y aurait du bien, mais la moisson est grande et les ouvriers sont en petit nombre; nous savons où il faut s'adresser pour en avoir. Que Dieu nous donne de le faire avec foi.

Cher frère, étudiez la Bible avec prière, et cherchez-y le Seigneur et non la connaissance; celle-ci viendra en même temps; mais le coeur est bien dirigé, quand il cherche le Seigneur; l'oeil est net, et ainsi tout le corps est plein de lumière. Saluez affectueusement tous les frères. Mon ardent désir est qu'ils soient très près du Seigneur, et le Seigneur très près d'eux; qu'ils ne se conforment pas au monde, mais soient transformés par le renouvellement de leur entendement. Christ est tout; plus on chemine ici-bas dans ses voies, plus on le sent.

Votre affectionné frère en lui.

Lettre de J.N.D. no 73 - ME 1893 page 255

à Mr G.

Commencée à Chicago, le 30 juin,
terminée à Brandford, juillet 1876

Bien cher frère,

J'ai été heureux de recevoir votre lettre et des nouvelles de l'oeuvre dans vos contrées.

La Nouvelle Zélande m'a tenu un peu éloigné de toute l'oeuvre en Europe, de corps, mais pas de coeur. Maintenant je suis sur mon retour, espérant arriver avant l'hiver. Quand votre lettre m'est parvenue, je venais de faire 31 jours de mer, plus 5 jours et 6 nuits de chemin de fer. Sauf la chaleur des deux derniers jours un peu éprouvante, je suis très bien, par la bonté de Dieu, et j'ai trouvé, grâces à Dieu, les frères d'ici, heureux et en paix. Ils manquent un peu, me semble-t-il, d'activité envers ceux de dehors, mais ils sont spirituels, pieux, unis, ayant soin les uns des autres.

A San Francisco aussi, cela ne va pas mal; l'assemblée avait été fondée un peu à la légère et avait dû être criblée, mais Dieu y a mis sa bonne main pour la rétablir.

A Détroit, il y a du progrès. Je ne m'y suis pas beaucoup arrêté, ensuite je suis venu à Brandford, dans le Canada, pour prendre part à une conférence. Nous étions très nombreux; il y avait beaucoup de nouveaux frères des Etats-Unis où l'oeuvre s'étend tous les jours. La présence de Dieu s'est fait sentir, et ces frères s'en sont retournés pleins de reconnaissance, n'ayant pas cru qu'il se trouvât parmi les chrétiens une bénédiction pareille. Tous ont senti la bonté de Dieu. Nous avons eu aussi des Indiens. Leur assemblée est dans le voisinage, à une quinzaine de kilomètres d'ici. Cette réunion aussi a été criblée, mais on y est encouragé, les âmes reviennent, et il y a des besoins chez ceux qui n'étaient jamais venus. C'est donc en général un temps de louanges; non qu'il n'y ait pas de combats, car sans doute il y en aura jusqu'à la fin. Mais comment ne se réjouirait-on pas, quand on voit Dieu faire son oeuvre?

A Boston et à New York, il y a progrès sensible, et l'oeuvre s'étend bien au delà de leurs limites.

De nouvelles réunions se forment, soit dans le Canada, soit dans les Etats-Unis, mais le manque d'ouvriers pour soigner ceux qui sont jeunes dans la foi est un sujet de sollicitude continuelle. Toutefois Dieu nous en a suscité quelques-uns récemment. L'un, solide, me semble-t-il, chassé de l'école normale de son pays, parce qu'il avait enseigné les vérités que nous chérissons dans une salle de la ville; le second, maître d'école aussi. Ils ne marchaient pas encore avec les frères. Nous craignons d'autre part qu'un frère, béni au commencement parmi les noirs de la Jamaïque, mais, à ce qu'il m'a semblé, longtemps sans boussole, ne tombe dans la doctrine du salut universel; toutefois, nous espérons encore.

Il y a là-bas des Français, très braves frères; ils sont avertis de ces choses, ainsi que des frères américains qui ne veulent pas de ces doctrines mais tout cela montre que nous ne sommes pas encore dans le repos. Cela nous fait sentir notre entière dépendance de Dieu. J'espère que le frère dont j'ai parlé sera ramené. On voit toujours, dans ces cas, des raisonnements remplacer la soumission à la parole de Dieu et la simplicité de la foi qui reçoit la vérité, au lieu d'imposer à Dieu une certaine ligne de conduite.

Mais les hérésies fourmillent dans les Etats-Unis; chacun croit ce qu'il veut. Néanmoins la Parole prend sur les chrétiens sérieux un empire qu'elle n'a jamais eu. Je crois aussi qu'en général les frères attendent le Seigneur plus réellement. Je ne parle pas de doctrine, mais d'une attente réelle. D'un autre côté, à mesure que leur nombre augmente, ils sont plus en danger de mondanité.

Voici deux ans que je suis loin d'Europe et je n'ai pas beaucoup de détails sur ce qui s'y passe.

Les frères qui sont à l'oeuvre en Palestine sont encouragés, bien que l'oeuvre soit petite et difficile, mais la vérité fait du progrès, et de petites assemblées se forment. Les dernières nouvelles que j'ai reçues de la France m'ont bien consolé; je craignais qu'il n'y eût division aux Ollières, mais il paraît que, bien que quelques-uns eussent subi l'influence de G., il n'en est rien actuellement. Dieu en soit béni; il est plus facile de faire des divisions que de les guérir. Le commencement de la contention est comme quand on laisse couler les eaux; c'est-à-dire que cela grandit. Mais Dieu est au-dessus de tout le mal et de toute la puissance de l'ennemi.

Je ne sais jusqu'à quel point les frères autour de vous comprennent l'unité du corps, et ce qui est appelé l'unité de l'Esprit dans le lien de la paix; la manifestation de l'unité du corps par la puissance du Saint Esprit agissant pour unir d'une manière pratique les frères dans ce monde.

Que Dieu nous donne, cher frère, de nous dévouer entièrement au Seigneur, — c'est notre privilège, comme affranchis par lui, — et de ne chercher que sa volonté, c'est tout ce qui restera de notre vie quand la fin arrivera. Quand on est beaucoup avec lui, et qu'on le consulte constamment dans l'humilité comme serviteur, on a la conscience d'être dirigé de lui, et cela, tout en faisant de nous des serviteurs de tous pour l'amour de lui, nous donne beaucoup de courage.

Quant à votre question, cher frère, je ne sache pas qu'il soit dit formellement «le Fils de Dieu est mort». On ne peut pas dire Dieu est mort, parce qu'alors on introduit la pensée de la divinité à part. Mais Fils de Dieu est, pour ainsi dire, un nom de sa personne. Le centenier a dit: «Certainement celui-ci était le Fils de Dieu», et il est dit en Galates 2: «Le Fils de Dieu qui m'a aimé et s'est donné lui-même pour moi». Même comme homme, il est dit de lui: «Cette sainte chose qui naîtra de toi sera appelée Fils de Dieu». Généralement en Jean, quand il est dit Fils de Dieu, il s'agit du côté divin de sa personne. Je ne crois pas qu'il soit dit que le Fils de Dieu mourut; mais si l'on se servait de ce terme comme d'un nom de sa personne, cela ne me troublerait pas. D'ordinaire il est dit: Le Fils de l'homme doit souffrir, etc.; il est clair que c'est comme homme qu'il est mort.

Je comprends que l'absence du cher frère M. fasse un grand vide, mais nous en sommes là; encore des peines et des douleurs devant nous, mais Celui qui nous a aimés et s'est donné pour nous, a vaincu, et nous l'attendons. De plus, si nous sommes absents du corps, nous sommes présents avec le Seigneur. On reconnaît la tristesse, mais pas un passereau ne tombe à terre sans notre Père, puis nous attendons que le Seigneur prenne tout entre ses mains. Je ne désire pas m'en aller jusqu'à ce que j'aie achevé ce qu'il me donne à faire, mais c'est une pensée douce que cela tend vers la fin, et par-dessus tout que je verrai Celui qui nous a aimés, face à face.

Saluez affectueusement tous les frères. Que nous soyons à lui en l'attendant du ciel.

Votre affectionné en Jésus.

Lettre de J.N.D. no 74 - ME 1893 page 268

à Mr G.

Belfast, 1er janvier 1878

Bien cher frère,

Ma réponse à votre bonne lettre a été retardée plus que je ne pensais par un travail non interrompu en corrigeant les épreuves de publications (qui ne me plaisaient guère non plus) et qu'un frère m'a envoyées, — c'étaient des choses que j'avais écrites, mais que je n'avais aucune intention de publier, et qui étaient tombées entre ses mains. Tout cela s'ajoutant à mon travail ordinaire, je n'avais plus un moment à moi.

Commençons par vos passages Ephésiens 4: 16 et Colossiens 2: 19. La même question m'a été faite d'Ecosse. Les Ephésiens n'offrent aucune difficulté, parce que l'apôtre a parlé (versets 11-15) des dons permanents; les deux premiers sont le fondement (conf. 2: 20), les autres toujours encore en exercice sont l'effet des soins continuels de Christ qu'il dispense à son corps. Puis le verset 16 montre ce qui sert à nourrir et à lier ensemble les divers membres du corps. Je pense que l'apôtre a en vue l'activité des frères, mais je ne nie pas que le sens général du verset 16, ne puisse aussi se rapporter aux soeurs, parce qu'il dit «chaque jointure», «tout le corps s'édifie». Toutefois dans ces temps-là, il y avait des soeurs qui prophétisaient, seulement elles devaient se taire dans l'assemblée; les jointures et les liens sont deux choses; ils nourrissent et lient ensemble toutes les parties du corps. La seule difficulté est que le mot traduit jointure, est aussi employé en grec pour les nerfs et la sensibilité qui en découle; mais cela ne modifie guère le sens, et le terme est employé plutôt ici pour jointure. En tout cas, fournissement et lien sont les mots qui, quoiqu'il en soit, déterminent le sens. Mais en général, nous trouvons les dons positifs aux versets 11-15, et tout ce qui peut servir à l'édification du corps, au verset 16. Les versets 11, 12, indiquent les dons; seulement la première phrase du verset 12: «en vue de la perfection des saints», est le but positif et direct; il est individuel. Les deux dernières phrases sont plus générales, s'appliquant à l'ensemble comme moyen et résultat. Colossiens 2: 19, est plus général. Mais remarquez, dans les Ephésiens, cher frère, le magnifique fondement du service chrétien en Christ: 1° chapitre 4: 8, il a emmené captive toute la puissance de l'ennemi, et quant à ceux qui étaient captifs de celui-ci, il en fait des vases de sa force dans la guerre qui continue toujours pour gagner du terrain sur l'ennemi; 2° lui, le Messie ici-bas, descend dans les parties les plus basses de la terre, puis il monte au-dessus de tous les cieux, et depuis la mort jusqu'au trône de Dieu il remplit tout de la puissance de la rédemption. De là-haut, il donne les dons pour le salut et pour l'édification.

Quant à 1 Corinthiens 12, il faut se souvenir que lorsqu'il y avait des dons qui manifestaient l'action miraculeuse du Saint Esprit, quoique bien moins fréquents, les soeurs les possédaient aussi, mais les dons dans le sens général (voyez Romains 12) passent insensiblement des dons exercés publiquement, à des services d'amour. Là les soeurs sont plus en avant que les frères. Dans 1 Corinthiens 12, l'apôtre a en vue, d'une manière générale, les dons qui se manifestent dans l'assemblée, mais toute soeur est membre du corps, comme un homme. Le ministère lui est interdit dans l'assemblée, ainsi que l'enseignement, et l'autorité sur l'homme; mais les femmes peuvent aider, comme en Romains 16: 12, puis si le don est exercé en particulier et selon la modestie qui est l'ornement d'une femme, elle peut montrer de la sagesse, mais ce n'est pas un jugement public et indépendant. Je trouve les femmes très honorées dans la Parole; on y voit plus de dévouement au Seigneur que chez les hommes, mais elles ne sont jamais envoyées pour agir en public. En 1 Corinthiens 6: 15, il s'agit de la moralité individuelle. Nos corps comme nos âmes sont pour le Seigneur et appartiennent au Christ; l'homme tout entier est membre de Christ, et il prostitue ce corps saint en le livrant à des convoitises pécheresses et en souillant ce qui appartient au Christ.

La soeur donc est membre du corps de Christ comme le frère; mais dans le service elle a sa part et lui la sienne: l'activité publique et les dons qui s'y rapportent, sont la part de l'homme, mais dans tout ce qui est service d'amour ou de sagesse, la femme peut glorifier le Seigneur par son dévouement, sa propre maison, si elle en a une, étant tout premièrement la sphère de son service chrétien. Remarquez que, dans la première épître aux Corinthiens, les dons sont des dons du Saint Esprit et sont gouvernés dans leur emploi par la Parole de Dieu. En Ephésiens 4, ils sont donnés par Christ qui prend soin de son Eglise, et il n'est question que de ceux qui se rapportent au fondement, à ce perfectionnement des saints, et à l'édification du corps.

Vous avez très bien fait de me donner des nouvelles des frères et de l'oeuvre; cela m'intéresse toujours très réellement. Il paraît que Dieu, dans sa grâce, soutient l'oeuvre; je l'en bénis du fond de mon coeur. Dieu sait s'il me permettra de voir les frères encore une fois.

J'ai reçu de bonnes nouvelles de l'Isère ces jours-ci.

L'oeuvre en Angleterre continue, des réunions se forment partout, et en général les frères vont bien, mais je crains le monde, à mesure que leur nombre s'accroît. On reconnaît qu'il y a de la force et de la vérité dans leur position. L'oeuvre s'étend au dehors. On rompt le pain à Nazareth. Dans les îles Baléares, il y a une cinquantaine de pauvres catholiques qui rompent le pain, et cette oeuvre se rattache maintenant aux frères.

En Hollande aussi l'oeuvre va bien. Mais les temps se hâtent.

En Angleterre et en Ecosse, l'incrédulité porte le front haut, et envahit le pays. Les ministres évangéliques se montrent excessivement lâches et abandonnent l'inspiration de la Parole au gré des méchants. Les dissidents sont incrédules, et là où ils ne le sont pas, ils sont indifférents quant à l'incrédulité des autres. Le nationalisme est partagé entre l'incrédulité et le puseyisme. Mais Dieu a les siens et il agira, et il agit même beaucoup au milieu de tout ce mal.

Saluez affectueusement les frères. Ce serait une joie pour moi de les revoir. Que Dieu vous garde et vous soutienne, cher frère.

Votre affectionné en Jésus.

Lettre de J.N.D. no 75 - ME 1893 page 281

à Mr G.

Londres, 1er mars 1880

Bien cher frère,

Je pensais vous écrire quand votre lettre est arrivée. Il m'est toujours précieux de recevoir de vos nouvelles et de celles des frères.

Je me rappelle très bien de la soeur F.; elle est heureuse; c'est là aussi que nous allons. Je me rappelle moins C., mais lui aussi est dans le repos. Tout en sentant la perte pour nous-mêmes, il est doux de suivre une âme jusqu'à la porte du ciel, et de la voir, pour ainsi dire, y entrer.

Dieu nous a frappés dernièrement dans les ouvriers; voici B. qu'il a repris subitement, et qui était la cheville ouvrière en Italie, puis H., un Suédois, très bon frère, et que j'aimais beaucoup, sage et dévoué, travaillant dans son pays avec beaucoup de bénédiction; aujourd'hui il n'y a personne parmi les ouvriers qui sache même la langue; sa jeune femme tout à fait dévouée, anglaise, mais qui parle le suédois, y reste.

Quand nous avons appris la mort de B., quoiqu'il fût un frère propre pour l'Italie, calme, doux, patient, ferme et désintéressé, généreux même autant qu'il le pouvait, j'eus, je ne sais pourquoi le sentiment: «Dieu va bénir l'Italie».

Quant à H., j'étais sûr que Dieu faisait toutes choses parfaitement bien, et que son amour ne fait jamais défaut; toutefois c'était une chose bien sérieuse, mais ma confiance en Dieu demeure, grâces lui en soient rendues, il ne peut manquer ni en sagesse, ni en amour, et pas un passereau ne tombe en terre sans lui.

Moi-même j'ai été retenu à la maison depuis mon arrivée, par une bronchite, puis par la goutte; mais c'était un repos que je désirais beaucoup, et j'ai travaillé à la maison, heureux avec Dieu tout en sentant ma faiblesse spirituelle. J'ai joui ces temps-ci profondément de la pensée que le Père nous a donnés à son Fils, à celui qui fait l'objet de ses infinies et éternelles délices, pour que nous en soyons l'objet avec lui. Puis le Fils a tout fait pour nous rendre propres pour cela, lui-même étant notre vie pour en jouir. Il s'en est allé à son Père et notre Père, à son Dieu et notre Dieu. Quelle position, et combien alors tout est grâce; mais nous, nous ne sommes rien sauf en lui. C'est la doctrine de Jean. Nous l'avons bien dans les écrits de Paul, comme par exemple à la fin d'Ephésiens 3, mais Paul présente davantage toutes choses au point de vue des conseils et des dispensations. Christ se présente l'Eglise à lui-même; c'est une grâce de plus, mais qui a un autre caractère; c'est une relation spéciale et intime, non pas la plénitude de Dieu, ni la révélation du Fils avec le Père; il y a quelque chose de cela au commencement d'Ephésiens 1, mais ce sont les pensées divines, les conseils, plutôt que la nature de Dieu. Nous vivons par la foi, cher frère, travaillons, à condition que nous le faisions réellement, avec le secret de Dieu dans nos coeurs. — La foi est en lui, et lui est au-dessus de toutes les difficultés. Dans ce sens, rien ne peut être un empêchement pour nous, quand nous avons trouvé le chemin de sa volonté. Mais il s'agit non seulement de nous tenir près de lui pour l'état de nos propres âmes, mais de puiser ce qu'il faut dans les ressources de sa grâce: s'agit-il de le servir ici-bas, tout est là. C'est tout ce que nous avons de positif sur la terre; car il agit en grâce à notre égard; tout le reste est dans le ciel. Que nos coeurs y soient, — là où Christ nous a devancés.

Depuis que j'ai commencé cette lettre, j'en ai reçu une du cher M. Saluez-le; je lui écrirai aussitôt que j'aurai un moment pour le faire.

Saluez tous les frères. Que Dieu vous bénisse tous.

Votre affectionné frère en Christ.

Lettre de J.N.D. no 76 - ME 1893 page 283

à Mr G.

Londres, 26 janvier 1882

Bien cher frère,

Il est temps que je réponde à votre lettre. J'ai été occupé presqu'au delà de mes forces, qui, dans ma quatre-vingt-deuxième année, ne sont pas ce qu'elles étaient. Je travaille toutefois comme toujours, seulement pas autant d'heures dans la journée. Quoique je ne me sois pas directement mêlé aux questions qui ont exercé les frères d'ici, ayant la conviction que Dieu agissait, j'ai eu, malgré moi, une correspondance volumineuse, puis des visites. Maintenant, on est beaucoup plus tranquille; on ne peut dire que tout soit fini, mais ce n'est pas loin de l'être. Dieu a agi; c'était son oeuvre. Tout ce remue-ménage a été en grande bénédiction aux frères: il y a chez eux plus de sérieux, moins de mondanité, plus de conscience de leur position, la conscience en général plus en exercice, et le mal qui pesait sur leur témoignage est à peu près écarté. Les frères n'avaient pas assez d'énergie spirituelle pour mettre le mal dehors, et Dieu, dans sa bonté, les a criblés pour atteindre ce but. Il se peut que nous ayons des difficultés locales, mais le ciel s'éclaircit. Il y a eu l'effort d'un parti organisé pour produire une réaction, mais en général le caractère des agents et des choses a trop mis en évidence de quoi il s'agissait, pour que cela ait pu produire grand effet. Nous étions, semblait-il, tranquilles avant ce dernier effort, et en général les trois royaumes le sont maintenant. Je ne connais guère d'endroit où l'affaire ne soit pas réglée.

On a cherché à entraîner la Suisse et l'Allemagne, mais je crois que Dieu les a gardées. Son nom en soit loué! Le fait est, cher frère, que les frères s'étaient plus ou moins mondanisés; ce n'était pas là précisément le mal, mais cela les a rendus incapables de s'y opposer avec succès, quand il est entré. Mais, dans sa souveraine bonté, Dieu a agi pour eux et a fait ce qu'ils ne pouvaient faire.

En considérant ce qui s'est passé (voici la troisième fois que je recommence ma lettre), la manière dont Dieu a agi est merveilleuse. Dans sa souveraine bonté, il a voulu conserver ce témoignage, mais il a mis de côté une masse de personnes qui ne pouvaient pas de droit pied porter un témoignage contre le monde, et cela par leurs propres actes. Quelques-uns ont été entraînés par l'affection personnelle. Mais la bénédiction a été très grande; le témoignage avait besoin d'être purifié, et Dieu, qui seul pouvait le faire, l'a fait. Je parle, cher frère, comme passant en revue tout ce qui a lieu, car si vous étiez en visite à Londres seulement pour un peu de temps, vous seriez tranquille comme à T…

Nous avons eu d'Amérique la visite de plusieurs frères à l'oeuvre, visite dont, à ce qu'il paraît, ils ont beaucoup joui, comme les frères d'ici, de leur présence.

Après la conférence dans laquelle la présence du Seigneur s'est beaucoup fait sentir, ils ont parcouru les provinces, et la bénédiction du Seigneur a été avec eux. L. avait grande envie de visiter la France, mais il n'a pu. Il s'en est peu fallu qu'il fût perdu sur l'océan, leur machine s'est rompue dans un grand orage, mais Dieu les a gardés, et ils ont pu retourner sans autre mal à leur point de départ.

Le temps presse, cher frère, et si nous voulons le Seigneur, il s'agit de vous tenir près de lui. Là sont nourries les affections qui sont en exercice dans son service, là même les objets dont il veut nous occuper en particulier se présentent à notre esprit. Là, en rapport avec sa personne, l'intelligence de la Parole se développe en nous.

On m'avait engagé à écrire une espèce de préface ou d'introduction, à notre traduction française de la Bible. Je l'ai fait, mais je doute fort que cela aille; pour une introduction, c'est trop long; c'est une espèce de résumé de tout l'Ancien Testament, et comment, par la grâce, cela fait face au Nouveau, l'homme ayant manqué à sa responsabilité. Je pense qu'on la publiera d'une manière ou d'une autre; je la fais copier à présent pour l'envoyer à Pau. Pour moi-même, j'en ai joui en l'écrivant.

J'ai été de nouveau malade depuis le second commencement de cette lettre; enrhumé, ce qui, dans l'état actuel de mes poumons, a été sérieux, et affaiblit extraordinairement. De nouveau depuis bien des semaines, je ne puis plus m'allonger dans mon lit, mais j'ai appris à dormir sur mon séant; je n'ai pas non plus la même force pour travailler longtemps de suite, mais le Seigneur est avec moi, et sa force s'accomplit dans la faiblesse.

J'ai été tout étonné de lire ce que vous me dites de C.; dites-lui le plaisir que cela me fait, et que j'en bénis Dieu. Est-ce que tout est réglé à R.?

Saluez affectueusement tous les frères, et qu'on me dise comment va B. Je crains l'hiver pour lui; ici il fait un temps extraordinairement doux.

Il paraît que cette publication spéciale de la Bible a très bien réussi. Les frères en Angleterre s'y sont intéressés.

Saluez L., et vos chers parents aussi. Le cher M. chemine un peu avec moi vers la fin.

Votre affectionné frère en Christ.

Lettre de J.N.D. no 77 - ME 1893 page 301

à Mlle M.B.

18…

Aussi longtemps que nous ne sommes pas fondés sur la justice de Dieu, la foi n'est pas solidement établie quant à la conscience; alors, qu'un mal quelconque s'établisse dans l'âme, et qu'ainsi la jouissance directe de la bonté de Dieu vienne à manquer, la confiance est détruite. En temps ordinaire, on ne s'aperçoit pas du fond d'incrédulité qui nous reste, on va son train, s'occupant d'une manière vague des vérités auxquelles on croit sincèrement, jouissant des bonnes choses qu'on entend, mais ne connaissant pas l'état véritable de son âme dans ses rapports avec Dieu. Mais survienne une chose qui place l'âme en la présence de Dieu: une prédication, une maladie ou tout autre moyen que Dieu emploie, on découvre que l'âme n'est pas en règle avec Dieu pour elle-même. Ce n'est pas qu'il y ait manque de sincérité, ni qu'on ne croie pas aux vérités que le précieux évangile de Christ nous enseigne, mais le lien avec Dieu, que ces vérités forment par la grâce, n'est pas net et clair dans l'âme. Les affections divines ne courent pas librement; il y a malaise, doute, détresse. Le mal présent, le mauvais état d'âme, ou du moins le mauvais état dans lequel elle a été, est bien une cause de ce malaise; on a raison, en tout cas, de se reprocher amèrement tout ce qui ne répond pas à la croix de notre précieux Sauveur; mais la forme que prend ce malaise tient à ce qu'on n'est pas bien fondé dans la grâce, dans cette grâce qui règne par la justice.

Je crois que vous avez fait des progrès, et que notre bon Dieu veut rendre son oeuvre plus profonde dans votre coeur; mais je ne sache pas que votre âme soit réduite à un tel sens de ce que c'est que le péché, à un tel sens de votre état de péché, que vous ayez renoncé à vous-même en fait de justice (en théorie, vous l'avez fait très sincèrement, je n'en doute pas), que vous ayez été dépouillée de vous-même, de manière à vous reposer dans une sainte humilité sur une justice autre que la vôtre, la justice de Dieu, mais qui est votre par la foi. Ce dépouillement de soi-même est une oeuvre profonde, opérée par Dieu, et par la révélation de ce qu'il est. La conviction particulière du péché et la découverte de notre insuccès en luttant contre lui, ne sont que le moyen d'y arriver. Je trouve d'abord que le résultat de mes efforts pour atteindre la sainteté (efforts qui ne peuvent manquer dans une âme vivifiée par Dieu), n'est que la découverte que je ne l'atteins pas. Puis, arrivé dans mes haillons en la présence de Dieu qui ne veut autre chose en nous, dans sa maison, qu'une parfaite conformité à Christ, je suis forcé de me soumettre à voir Dieu se jeter à mon cou lorsque je suis encore dans mes haillons, à le voir me revêtir (parce que cela plaît à sa grâce) de la meilleure robe, de Christ lui-même. Cette robe n'était à moi ni avant mon péché, ni après; ce n'est ni la robe d'Adam innocent, ni celle d'Adam pécheur, mais une robe qui a été et qui est dans les trésors de Dieu pour ceux qui sont appelés par la grâce. Après cela, je suis appelé à marcher comme fils de la maison, c'est-à-dire comme Christ a marché. Si dans cette condition l'on manque, on se le reproche mille fois plus que lorsqu'on était encore dehors, n'ayant que l'espérance d'entrer dans la maison; mais mon manquement ne soulève pas la question de savoir si je suis de la maison: c'est parce que j'en suis, que le péché a un caractère si horrible à mes yeux, si horrible, quand je pense à ce que Christ a souffert à cause du péché, et que je m'humilie de mon inconséquence à moi, enfant de Dieu, ainsi vêtu. Vous avez été convertie et je vois que la grâce a aidé au développement de votre caractère, mais vous n'avez pas été dépouillée de vous-même et vous êtes restée dans une ignorance plus ou moins grande de votre propre coeur. — Dieu vous parle maintenant par les circonstances qu'il vous fait traverser: soyez sûre que c'est en amour, et parce qu'il vous aime. Souvenez-vous que Christ est votre justice de la part de Dieu, mais la justice d'une âme convaincue de deux choses, d'abord qu'elle n'a point de justice, et ensuite, qu'elle a besoin de justice, besoin d'être en paix avec Dieu. Ce besoin est produit par la conscience de votre péché, sans la velléité d'un désir que Dieu abandonne quelque chose de sa sainteté. C'est pourquoi j'ai dit que c'est une oeuvre profonde; elle rend l'âme simple, mais elle ne la trouve pas telle. Je ne m'attends pas à ce que vous vous en rendiez compte intellectuellement, mais à ce que la chose se produise en vous et que, dépouillée de vous-même par la découverte du péché, vous soyez appuyée sur la justice de Dieu, qu'il a fait nôtre en nous donnant Christ, notre précieux Sauveur. Paix vous soit donc au nom de ce sang précieux qui purifie de tout péché, qui fait ma confiance à moi, pauvre pécheur, comme il m'inspire toute confiance pour vous. — Veillez, et regardez à Dieu, en lui ouvrant tout votre coeur dans une entière confiance. C'est ce qui met la vérité dans l'âme; il est digne de cette confiance par sa bonté parfaite envers nous.

Ne vous étonnez pas, si quelquefois vous ne vous trouvez pas disposée à lire la Parole. Il y a deux espèces de ce manque de disposition on n'est pas disposé du tout, ce qui est fâcheux ou bien, on ne trouve, en se mettant à lire, ni entrain, ni impressions produites. Le premier cas est le signe d'un mauvais état d'âme; le second a deux sources: un état de sommeil spirituel, ou bien, que Dieu n'agit pas sur l'état actuel de l'âme, par le moyen de passages que nous lisons. Mais j'ai toujours trouvé qu'en demandant à Dieu de me donner quelque chose pour mon âme, j'ai reçu de lui quelque chose. Quoiqu'il en soit, il faut persévérer à demander à Dieu de disposer nos coeurs, et d'agir par son Esprit… Pensez beaucoup à Jésus, ensuite vous le trouverez dans la Parole. Vous trouvez votre coeur sec, en la lisant, — hélas! je puis dire de même, plus souvent que je ne voudrais, quoique la Parole fasse mes délices.

Enfin, veillez diligemment contre tout ce qui peine le coeur de Christ, contre tout ce qui contriste l'Esprit qui demeure en nous. Si cela ne détruit pas l'efficace du sang de l'Agneau, cela détruit l'action de l'Esprit en nous, et nous prive de la communion; cela nous éloigne de Dieu quant à notre conscience et à notre coeur, et met des armes entre les mains de l'ennemi pour affaiblir notre confiance en Dieu et dans son amour. On a de la peine à se sentir sien, quand on se sent tout différent de ce que les siens doivent être; je ne justifie pas les doutes, mais je dis que c'est le moyen d'en avoir.

Lettre de J.N.D. no 78 - ME 1893 page 331

à Mlle M.B.

27 octobre 1860

J'attire particulièrement votre attention sur ce que nous lisons en Colossiens 2: 10, 11: «Vous êtes accomplis en lui, qui est le chef de toute principauté et autorité, en qui aussi vous avez été circoncis d'une circoncision faite sans main, dans le dépouillement du corps de la chair, par la circoncision du Christ;» et puis sur les conséquences pratiques qui en découlent, et qui nous sont données dans le verset 20 du même chapitre et verset 1 du chapitre 3 — les versets 1-17 du chapitre 3, viennent ensuite, — le tableau le plus complet, je crois, que nous fournisse la Parole, de la vie chrétienne, depuis la mortification du péché, jusqu'à ses principes les plus élevés et à ses traits les plus bénis. Mais ces exhortations sont fondées sur la position qui a été faite au chrétien, dans le verset 10 du chapitre 2; et c'est la conscience de cette position, par la foi, qui donne la force pour profiter des exhortations. Les expériences qui précèdent servent à nous faire apprendre la leçon si difficile que nous sommes privés de toute force; Christ est mort pour des impies; et lorsqu'on est affranchi, le combat continue, mais dans la liberté divine d'une nouvelle nature à sa place devant Dieu, en vertu de l'oeuvre de Christ. Cherchez Christ, Christ lui-même. Occupez-vous de la beauté et de la perfection de sa personne et de ses voies. Cherchez de l'instruction pour votre conscience dans les épîtres, et la nourriture de votre coeur dans les évangiles. Si vous êtes encore dans les combats d'une âme non affranchie, vous trouverez du soulagement dans les Psaumes, mais il ne faut pas en rester là.

Lettre de J.N.D. no 79 - ME 1893 page 359

à Mme B.

Le 20 mars 186.

Chère soeur,

Oui, sans doute, la perte de votre chère M. sera un coup douloureux, une grande brèche dans votre famille, mais, je ne sais, depuis de longues années, je me suis habitué à la mort en Christ, et pour le chrétien elle me sourit. En elle-même, la mort est une chose terrible, j'en conviens pleinement, mais elle est maintenant un gain. Dieu nous veut dans la parfaite lumière. Pour Christ, à cause de nous, le chemin de la vie était à travers la mort; il ne l'est pas nécessairement pour nous, car la mort est complètement vaincue, mais Christ qui a vaincu est là avec nous, s'il nous faut prendre cette route-là pour sortir du mal et de la souillure, pour entrer dans la lumière et la parfaite joie de sa présence. S'il y a quelque chose que notre âme n'ait pas vidé avec Dieu, il peut y avoir un moment pénible, car il faut que l'âme réponde à la joie qui nous est préparée, mais en elle-même la mort n'est que le dépouillement de ce qui est mortel et le passage de l'âme dans la lumière, dans la présence de Jésus. On quitte ce qui est souillé et en désordre; quelle joie que celle-là! plus tard le corps se retrouvera dans sa vigueur, et sa gloire incorruptible et immortelle; il nous faut attendre encore un peu pour cela.

Saluez avec beaucoup d'affection tous vos enfants. Je sens bien la perte pour eux; votre M. aurait fait la joie de quelque famille que ce fût, dans laquelle elle se serait trouvée. Elle va faire la joie de celle de Christ, car nous avons le droit de le dire; c'est une consolation pour ceux qui sont encore en route ici-bas. Dieu nous prépare pour le ciel, en tranchant peu à peu les liens qui nous attachent encore à la terre, comme enfants d'Adam. Christ remplace tout, et ainsi tout va bien, tout va mieux.

Que Dieu daigne bénir pour toute votre famille cette peine de coeur si réelle, mais où Dieu toujours plein de bonté a mêlé tant de ménagements et de grâces à l'amertume de la coupe.

Je vous envoie une petite lettre pour M., j'ai craint de la faire trop longue, mais je suis sûr que, par la bonté de Dieu, elle jouira de ce petit moment en la lisant à son loisir et comme sa force le lui permettra. Elle pensera à Christ et, sera rafraîchie.

Que Dieu vous bénisse et vous fasse sentir sa bonté dans cette perte même.

Lettre de J.N.D. no 80 - ME 1893 page 371

Mlle M.B.

20 mars 186.

Chère M.,

J'aurais beaucoup aimé vous voir encore une fois ici-bas avant votre départ, mais Celui qui dirige tout avec un amour parfait en a ordonné autrement.

Vous allez dans le ciel avant moi. La mort n'est pas un accident qui arrive sans la volonté de Dieu, elle n'a plus d'empire sur nous: Celui qui est ressuscité en tient les clefs. — Quel bonheur immense que de savoir qu'il a remporté une victoire complète et finale sur la mort et sur tout ce qui était contre nous, et que la délivrance est entière! Nos corps exceptés, nous sommes délivrés hors de la scène où le mal avait son empire, et transportés dans une région où la clarté de la face de Dieu luit toujours en amour, où il n'y a que lumière et amour, où Dieu remplit la scène selon la faveur qu'il porte à Christ, comme à Celui qui l'a glorifié en accomplissant la rédemption, et selon les perfections qui ont été mises en évidence par le moyen de cette oeuvre. Dieu a dû être manifesté dans ces perfections en réponse à l'oeuvre de Christ; il a dû répondre, à cette oeuvre en amour, en gloire, dans l'expression des délices qu'il y a trouvées; en vertu de cette oeuvre, le nom de son Dieu et Père en amour s'est dévoilé dans toute sa splendeur: «Tu m'as répondu d'entre les cornes des licornes». Il a été ressuscité d'entre les morts par la gloire du Père. Or Christ déclare ce nom à ses frères, et le loue au milieu de l'assemblée (Psaumes 22: 22). C'est là que je voulais vous amener par ces remarques qui pourraient paraître un peu abstraites. Toute cette faveur luit sur vous; ce que Dieu a été pour Christ homme, parce qu'il l'a glorifié à l'égard du péché qui le déshonorait; ce qu'il a été en introduisant Christ dans sa présence en gloire, Dieu l'est pour vous. Christ a acquis cette gloire, est entré dans la jouissance de la clarté de la face de son Père, à cause de ce qu'il a fait pour vous. Ainsi vous y êtes. Tout ce que le Père est pour Christ, il l'est pour vous, fruit du travail de son âme. Pensez-y, chère soeur; puis Christ nous est devenu infiniment cher à cause de ce qu'il a fait pour nous. Il s'est livré lui-même, parce qu'il avait pour nous un amour sans bornes; il n'y a rien en Christ qui ne soit à vous; il ne peut donner plus que lui-même, et quel don! Je vous ai écrit dans le temps que c'est en pensant à lui, à lui-même, qu'on a de la joie. Vous n'êtes pas une chrétienne joyeuse, je le comprends, je le sais; il y a discipline en cela. Christ n'a pas eu la place qu'il aurait dû avoir dans votre âme.

Vous le voyez, je ne vous cache rien; mais tout n'est pas là, vous n'avez pas assez de confiance dans sa grâce. Reconnaissez tout ce qui pourrait être un nuage entre votre âme et son amour. — Vous le faites, je le sais, mais la grâce, l'amour profond, parfait, de Jésus, l'amour qui est au-dessus de toutes nos fautes, qui s'est donné pour tous nos péchés, l'amour qui a trouvé dans nos faiblesses l'occasion de montrer sa perfection, vous n'y pensez pas assez. Cet amour divin, mais aussi personnel du Sauveur, remplira votre coeur; Jésus le remplira, et vous serez non seulement en paix, mais joyeuse. J'attache plus d'importance à la paix qu'à la joie; je désirerais vous voir habituellement dans une joie plus profonde qu'éclatante, mais si Jésus est au fond de votre coeur, ce Jésus qui a effacé toute trace de mal en nous, car en lui nous vivons devant Dieu, votre joie sera plus profonde. Qu'il en soit ainsi! Oh! que votre coeur soit rempli de Jésus lui-même et de son amour, et du sentiment de sa grâce! Il vous a sauvée, il vous a lavée, il est devenu votre vie, afin que vous jouissiez de Dieu. Que voulez-vous de plus que lui? Vous pouvez voir sa bonté dans la paix qu'il vous donne et dans la manière dont il vous entoure de soins et d'affections. Pour moi, ce n'est qu'un membre de la famille qui se transporte un peu à l'avance là où toute la famille va demeurer. Partout ailleurs on n'est qu'en passage. Bientôt tout sera fini pour vous. Quel bonheur, quand toute trace de ce qui nous a tenus liés, d'une manière ou d'une autre, à ce monde de misère et de mal aura complètement disparu, et que nous nous trouverons dans la lumière où tout est parfait! Confiez-vous donc dans son amour. Je le répète, il a complètement vaincu tout ce qui est entre nous et la pure lumière, comme il a parfaitement effacé tout ce qui, en nous, ne convenait pas à cette lumière. Qu'il est bon! Quelle grâce! et vous allez être avec lui! quel bonheur! Réjouissez-vous, chère M., bientôt nous serons tous là; encore un peu de travail, et ce sera fini, dans la pure gloire et dans l'amour. Vous nous devancez; il vous faudra attendre dans le ciel, pendant que les autres attendent et accomplissent leur tâche sur la terre.

Que Dieu soit avec vous, chère M., que la présence de ce fidèle Jésus, tout bon, vous soutienne et réjouisse votre coeur.

J'espère qu'une si longue lettre ne vous aura pas fatiguée. Je pourrais vous dire encore bien des choses: bientôt vous les saurez mieux que moi; c'est un grand sujet de joie, et quelle grâce immense!

Paix vous soit! Je demande à Dieu de vous bénir, et cela fait du bien au coeur.

Lettre de J.N.D. no 81 - ME 1893 page 395

à Mme B.

9 avril 186.

Ainsi notre chère M. est déjà dans le ciel. Je vous remercie, chère soeur, de m'avoir donné ces détails. J'en avais besoin, car je l'aimais bien sincèrement, mais j'y vois aussi le tableau très vrai de l'oeuvre de l'Esprit en elle, en rapport avec toute sa vie. Quand je dis vrai, je veux dire que ce n'est pas seulement quelques sentiments que des amis reproduisent pour faire valoir la piété d'un défunt, mais une véritable oeuvre de Dieu telle qu'il en produit dans une âme avec les expériences réelles de cette chère M. Cela vaut beaucoup mieux que quelques fleurs artificielles qu'on jette sur une tombe. Je comprends que sa mort fasse une grande brèche dans sa famille, pour vous-même et pour tous: mais Dieu dispose de tout, et il fait tout bien.

Elle va être déposée, au moins sa dépouille mortelle, auprès de son père. Eh bien! ils ressusciteront ensemble. Nous ne nous devançons pas beaucoup les uns les autres en quittant ce monde; nous serons tous ensemble, Dieu soit béni, quand nous nous relèverons de la poussière.

Que j'ai de plaisir à penser que ce cher B. se réveillera là où il n'y a point de souci ni de peine. Il sera auprès de son Sauveur, puis M. avec lui, puis tant d'autres, sur lesquels la tombe s'est fermée et qui ont disparu de cette scène agitée. Il me semble qu'il y a un certain changement dans ma manière de sentir à l'égard de ceux qui meurent plus jeunes que moi. Il y avait un temps où je me disais: Si ceux-là s'en vont, mon tour devrait être là. Maintenant, j'ai plus le sentiment d'être mort et de les voir défiler devant moi, pour arriver auprès du Seigneur; vieux ou jeunes, n'importe; et moi, je reste ici pour servir, peut-être jusqu'à ce que le Seigneur vienne; pauvre dans mon service, j'en conviens bien, mais ayant cela, et cela seul comme motif de ma vie. Immense privilège, si l'on savait seulement le réaliser, car il nous rend étrangers partout, ce qui est un vrai gain, même pour le temps présent.

Lettre de J.N.D. no 82 - ME 1893 page 435

à Mlle C.B.

186.

Je comprends que vous sentiez que vous êtes plus loin de la conversion que jamais, je ne dis pas que vous le soyez, mais que vous le sentez. Je sais et vous le savez que vous avez l'esprit très vif, et que vous avez de la peine à vous gouverner… c'est un mal, un mal devant Dieu, et un mal qui vous rendra souvent malheureuse; mais vous avez déjà fait l'expérience de la grande difficulté qu'il y a à résister, quand le mal nous assaille. L'irritation est au dedans, dans notre nature, quoique l'occasion soit en dehors de nous. Votre volonté n'est pas brisée, et vous en avez beaucoup. Vous voyez que je ne vous flatte pas. Mais voici comment nous pouvons tourner à profit, même nos fautes et nos chutes. Nous apprenons que nous n'avons pas de force. Je ne doute pas que vous voudriez être douce. («Que votre douceur soit connue de tous les hommes», vous vous rappelez ce passage); et voilà que vous ne réussissez pas. C'est une preuve humiliante que le péché nous a privés de la force comme de la justice: si le vouloir est bien présent avec nous, nous ne trouvons pas le moyen d'accomplir le bien. Triste position! Quelle en est la conséquence? Au lieu de faire de vains efforts, lorsque nous avons déjà tout essayé et que nous ne pouvons pas surmonter, notre méchante nature, si vraiment nous désirons la sainteté et d'être avec Dieu, nous sommes forcés de nous humilier en confessant que nous n'y pouvons rien, et qu'il nous faut nous soumettre à cette grâce qui nous a aimés lorsque nous n'étions que pécheurs. Croyez-vous que le Seigneur, puisse vous aimer, lorsque vous êtes méchante? Si non, vous ne serez jamais aimée de lui. Quelle consolation, lorsque nous sommes vraiment humiliés de nos fautes et de la méchanceté de nos coeurs, de savoir que Dieu nous aime tendrement malgré tout. C'est là la grâce; c'est ce qui nous fait haïr le mal, ce qui nous donne, par la grâce, de nouvelles forces contre le mal. Mais il faut que nous reconnaissions que nous sommes méchants, privés de toute force, que tout est grâce, que nous avons besoin de cette grâce; et que nous nous rejetions complètement sur Dieu, qui n'a pas épargné son Fils pour nous, lorsque nous n'étions que pécheurs.

Je vous demande encore une fois: croyez-vous que ce tendre et bon Sauveur puisse vous aimer lorsque vous êtes une pécheresse? C'est la grâce, c'est l'Evangile. La loi exige que nous soyons justes et parfaits comme hommes; la grâce nous visite, lorsque nous ne le sommes pas, et lorsque nous sommes perdus. C'est à cela qu'il vous faut penser, même pour avoir de la force, — que l'amour de Dieu est pour ceux qui en ont besoin, qui n'ont ni justice, ni force, pour l'acquérir. C'est votre cas: vous êtes déjà perdue et loin de Dieu, vous n'avez pas de force en vous-même pour guérir votre méchante disposition. Il faut regarder à Jésus qui nous aime, lorsque nous n'avons rien de bon en nous. Lisez la vie de Jésus, et voyez s'il était autre chose qu'amour, même pour ceux qui étaient d'indignes pêcheurs. C'est à cela qu'il vous faut penser, savoir à l'amour de Dieu pour vous, telle que vous êtes. Allez ainsi vers ce tendre Sauveur. Faites-le; peut-être en apparence ne trouverez-vous pas tout, au moment où vous le voudriez? Mais le Seigneur nous fait apprendre ce que nous sommes, il nous convainc que nous avons besoin de lui, et nous attire par son amour jusqu'à ce que nous comprenions qu'il nous a parfaitement sauvés. Alors, et pas avant, nous trouvons de la force contre le péché qui est en nous. Allez à Lui, vous trouverez qu'il est amour.

Lettre de J.N.D. no 83 - ME 1893 page 438

à Mlle C.B.

1866

L'âme dont vous parlez a été subitement enlevée de ce monde. Nous pouvons laisser tout cas semblable entre les mains de Celui à qui jamais la miséricorde ne manque, et qui est plein d'amour et de bonté. Bientôt nous comprendrons toutes ses voies et nous en reconnaîtrons la sagesse, et même la bonté… Souvent nous avons à apprendre que les voies de Dieu sont inscrutables, mais son amour nous a été démontré de la manière la plus absolue. Il nous fait sentir qu'il est Dieu, mais un Dieu qui veut que nous sentions qu'il est amour, et que nous ayons confiance en lui. Je ne saurais douter que vous ne soyez chrétienne depuis que j'ai parlé avec vous. Vous n'êtes pas toujours joyeuse, je le comprends très facilement. Ni votre caractère, ni vos circonstances, ne tendent à vous rendre simplement joyeuse; mais Dieu, soyez-en sûre, adapte les circonstances à votre caractère: Il fait contribuer toutes choses au bien de ceux qui l'aiment. Il y a des choses à vaincre chez vous; au reste, c'est le cas de nous tous, et en particulier de ceux qui sont jeunes, comme vous pouvez le voir en 1 Jean 2. Mais fiez-vous à Dieu dans ces doutes. «Il ne retire pas ses yeux de dessus les justes». Il vous a rendue parfaitement agréable dans le Bien-aimé; et maintenant, il vous façonne pour votre propre bonheur avec lui. Pensez à une telle grâce! il n'y a pas un instant dans lequel Dieu ne s'occupe de vous, pour vous rendre éternellement heureuse avec lui. Qu'on doive passer par des luttes et des peines qui nous font faire connaissance avec nous-mêmes, c'est une conséquence de ses soins. Voyez Job; c'est à la suggestion de Dieu, et non pas de Satan, que toutes ces choses lui sont arrivées. Job perd tous ses enfants à la fois, cependant le fond de son coeur n'est pas encore atteint, et Dieu continue. Il y a des voies de Dieu envers les siens: — vous avez entendu parler de la patience de Job, et vous avez vu la fin du Seigneur, que le Seigneur est plein de miséricorde. Vous verrez la fin du Seigneur avec vous. Quelle glorieuse fin, quelle grâce souveraine! Ensuite, considérez Christ, sa grâce, sa douceur, sa débonnaireté, toute sa divine perfection dans ce monde, ce coeur touché de compassion… il n'est pas changé. Il n'a pas dit seulement: «Venez à moi;» mais «Prenez mon joug sur vous et apprenez de moi, car je suis débonnaire et humble de coeur, et vous trouverez le repos de vos âmes». Oui, pensez à lui, à lui tel qu'il a été ici-bas, navré, froissé, toujours prêt à penser aux autres et à vous aussi… C'est un monde de tristesse que celui-ci. Vous êtes jeune pour l'apprendre, mais c'est une excellente leçon. Le Seigneur l'a apprise par expérience. Vous ne l'apprendrez jamais comme il l'a apprise; du reste, il en a ôté toute l'amertume. Pensez à cet homme de douleurs, et vous serez soulagée, — à l'homme glorieux qui vous représente dans le ciel, et vous serez relevée et encouragée. Au reste, vous lui appartenez, et vous possédez bien des choses pour lesquelles vous avez à le bénir; faites-le; cela relève le coeur. Un cantique de louanges chasse souvent notre misérable «moi».

Lettre de J.N.D. no 84 - ME 1893 page 475

à Mlle C.B.

Toronto (Canada) 18..

Dites à votre mère, si elle est encore avec vous, de regarder beaucoup à Christ lui-même, à Christ humilié. C'est ce qui inspire de la confiance et des affections. On voit quelqu'un (Dieu manifesté en chair) qui est témoin à tout instant de l'amour de Dieu, — amour qui s'adapte à nos besoins, qui cherche à nous inspirer de la confiance, qui demande que nous ayons cette confiance en lui, que nous ouvrions notre coeur à un coeur qui est tout à nous. Le Christ, c'est Dieu ici-bas, fait homme pour gagner nos coeurs à lui-même quand nous étions perdus, perdus, parce que nous avions eu plus de confiance en notre propre volonté et dans le diable, qu'en Lui, pour nous rendre heureux. Il est au-dessus de nous et de nos misères pour regagner cette confiance. Le coeur se repose en regardant à lui. — Dites à votre chère malade d'être comme un enfant qui se jette dans les bras de sa mère, convaincu qu'elle n'a rien à faire qu'à le soigner: ce n'est pas la force, c'est la confiance. Puis, qu'elle regarde au Christ glorifié: là, nous voyons l'oeuvre achevée, le résultat atteint, et, dans la gloire, Celui qui a porté nos péchés. Cela scelle notre paix, et reporte l'âme en haut. Il est frappant que l'apôtre ne parle pas d'aller au ciel, bien qu'il y allât, mais d'être présent avec le Seigneur, d'être avec Christ. C'est en pensant à Lui, qu'on trouve la joie et l'élan du coeur dans les choses célestes, car Celui qui nous aime et que nous aimons, nous a devancés, et se trouve là pour nous recevoir, selon la parole d'Etienne: «Seigneur Jésus, reçois mon esprit». J'ai vu une âme qui se savait déjà pardonnée, rayonner de joie en saisissant la pensée qu'elle allait trouver le Seigneur qu'elle avait appris à aimer, et le voir là, devant elle, en haut, quand elle s'en irait… Souvenez-vous aussi pour vous-même, que Dieu ne trace jamais de sillons dans nos coeurs, si ce n'est pour y semer de bonne semence; qu'il veut nous sevrer des choses d'ici-bas, pour nous attacher à lui par des liens qui ne se rompent pas. Le coup de hache peut être fort pénible; mais c'est pour nous rendre libres, libres dans les parvis célestes. Votre chère malade y va; peut-être, quand vous recevrez ces lignes, sera-t-elle partie. Quelle joie et quel repos pour elle! Quelle part que d'être avec le Seigneur!

Lettre de J.N.D. no 85 - ME 1893 page 477

à Mme B.

Toronto (Canada) 18..

Dans toutes nos peines, les consolations du Seigneur nous fortifient et nous soutiennent. Si l'homme extérieur dépérit, l'homme intérieur se renouvelle de jour en jour. J'espère que vous jouissez de la paix; Christ a fait la paix, une paix parfaite par le sang de sa croix; et dans toutes les choses où nous nous sommes éloignés de lui, il restaure l'âme. Si notre âme est tout à fait ouverte devant lui, nous trouvons qu'il la retrempe dans sa grâce.

J'ai été très malade moi-même, fatigué de travaux à New York. J'ai été atteint d'une inflammation violente du poumon, mais au fond c'était le surcroît de fatigue. Pendant deux jours, je ne savais si je me remettrais. J'ai repassé ce qui a occupé mon esprit ces derniers temps, puis j'ai pu beaucoup adorer Dieu en lui-même, et penser à ce que je sentirais si le Seigneur était là devant moi, ce qui, par la grâce, m'a été fort précieux. Une chose est toujours certaine: Il est amour et bonté, et plein de compassion pour nous. Regardez à Lui, — je ne doute pas que vous ne le fassiez, — et vous en serez illuminée; et, tout en vous sondant comme il le fait toujours, il vous révélera toute la plénitude de sa grâce.