La femme de la Samarie

Jean 4: 1-29

ME 1895 page 141

 

Trois passages de l'évangile de Jean parlent des opérations de l'Esprit de Dieu et des effets produits par son action dans l'âme. Le premier, qui nous est sans doute familier, se trouve dans le troisième chapitre. Il place devant nous la puissance et l'efficacité de l'Esprit Saint agissant sur des âmes mortes pour les régénérer, pour produire en elles une nouvelle vie. Le septième chapitre montre les effets intérieurs résultant de l'habitation de l'Esprit dans le croyant. Le Seigneur les décrit sous l'image de «fleuves d'eau vive»: — «Celui qui croit en moi, selon ce qu'a dit l'Ecriture, des fleuves d'eau vive couleront de son ventre»; telles sont les paroles de Jésus, et l'évangéliste ajoute: «Or il disait cela de l'Esprit qu'allaient recevoir ceux qui croyaient en lui». Et enfin, dans le quatrième chapitre, le Seigneur parle expressément de l'Esprit lui-même comme d'une «eau vive»; d'une «fontaine d'eau qui jaillit en vie éternelle».

Il nous sera profitable de porter notre attention sur ce sujet et de le considérer attentivement, afin de préciser comment il est parlé de l'Esprit, et quelles sont ses opérations; afin de discerner s'il est en nous, comme croyants, une fontaine d'eau jaillissante, et enfin de montrer comment il est rejeté par ceux qui ne croient pas.

Le Seigneur Jésus Christ est Celui qui donne l'Esprit de Dieu à ceux qui croient. Il est la Source et le Donateur de tout bien. Toutes les bénédictions découlent de son sacrifice et de son intercession, et ne peuvent être obtenues par aucun autre moyen. En fait, c'est par lui seul, que Dieu peut être un Donateur pour l'homme coupable; il est impossible que Dieu nous dispense, à nous pécheurs, aucune grâce, si ce n'est par ce canal. Tels que nous sommes par nature, notre communion avec Dieu est suspendue pour toujours; mais par Christ elle est rétablie de la manière la plus intime. Nous l'avions perdue par le péché; nous étions, en conséquence, bannis de la présence de Dieu, portant dès lors du fruit pour la chair, pour le monde et Satan. Comment, dans cet état, la communion avec Dieu pourrait-elle subsister à un degré quelconque? C'est impossible. Mais par l'oeuvre parfaite de Christ et en vertu de sa résurrection, il tire les siens de leur précédente position, et, les ayant introduits dans un état entièrement nouveau, il les amène dans la communion du Père, une communion avec Dieu que rien n'entrave, au moins pour ce qui regarde son oeuvre. Les croyants connaissent donc Christ comme Celui par qui seul existent et subsistent toutes communications, toutes relations et toute communion avec Dieu; par la foi, ils se voient devant Dieu dans la personne de Christ, et ont ainsi avec Dieu une communion libre et sans rien qui la restreigne. La foi leur montre qu'ils étaient bannis loin de Dieu, mais par la foi ils se savent réintroduits en sa présence. Ils sont maintenant pratiquement conscients qu'ils avaient été chassés et étaient exclus avec justice, s'étant égarés loin du chemin de la sainteté. C'était le fruit de leur propre travail. Actuellement, par la foi, ils apprennent pratiquement que par l'oeuvre du Seigneur ils sont associés à lui, faits un avec lui, et ainsi amenés dans l'union la plus étroite et le rapport le plus intime avec Dieu. Ils voient que c'est le transfert de leur péché sur Christ et le transfert de la justice sur eux en lui, qui les a introduits dans cette condition: «Celui qui n'a pas connu le péché, a été fait péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en lui» (2 Corinthiens 5: 21). En lui nous voyons tout le corps — l'Eglise réunie en un — faite entièrement justice et présentée à Dieu. Nous voyons Christ parfait devant Dieu, et nous, les croyants, en lui. Le Saint Esprit que Christ a envoyé du ciel, nous révèle cette justice bénie, et conduit ainsi nos âmes à participer au bonheur de Christ. Il nous donne la connaissance de ce que nous sommes dans notre état naturel, puis nous conduit hors de nous-mêmes pour nous placer en Christ.

Or c'est là le don de Dieu. C'est ce que Christ a promis lorsqu'il était sur la terre: «Quand le Consolateur sera venu, il convaincra le monde de péché, de justice, et de jugement» (Jean 16: 8). Et c'est en plein accord avec cela que se déroule le chapitre 4 de l'évangile de Jean, chapitre rempli des actes les plus merveilleux de la sagesse de Dieu, et de son puissant amour.

Les pharisiens étaient jaloux et murmuraient, parce qu'ils entendaient dire que Jésus faisait plus de disciples que Jean. Jésus donc, «poursuivant la paix avec tous les hommes», quitta la Judée et s'en alla encore en Galilée, en traversant la Samarie. Il y avait, selon ses conseils éternels, une nécessité à ce qu'il passât par là; c'était pour rencontrer une pauvre pécheresse. Il avait fait une longue marche; il était fatigué, et, pour réparer ses forces épuisées, il s'assit sur le bord de la fontaine qui se trouvait là. C'était, en effet, un monde de fatigue que celui où il était venu travailler. Il avait laissé le repos dont il jouissait de toute éternité auprès du Père; il avait quitté son séjour de gloire et de bonheur, et était descendu dans ce monde de péché pour y éprouver la fatigue. Autour de lui tout se réunissait pour la lui faire sentir: le péché, la haine, l'ingratitude, la malveillance, l'opposition ouverte et le labeur; mais, bien que fatigué par la vue de toutes ces choses, il ne se lassait jamais dans son témoignage d'amour: c'était sa nourriture et son breuvage. Lorsque l'épuisement et la persécution l'éloignent de la foule, l'amour le conduit dans les lieux déserts, à part, pour y prier. Il n'y avait en lui aucune recherche de ses aises; jamais l'égoïsme ne lui dicta une seule de ses actions: sa vie présentait une scène non interrompue d'amour actif. Il était tout entier à l'unique objet pour lequel il était descendu sur la terre, et rien ne pouvait l'en distraire. Les faits racontés dans ce chapitre font voir combien son âme en était remplie. Dieu l'avait conduit dans la Samarie; dans quel but, et que fait-il là? Il est en tête à tête avec une misérable pécheresse, au bord d'une fontaine, et il lui parle pour résoudre avec elle la grande question de l'éternité, pour lui donner la connaissance d'elle-même, et pour lui révéler ce qu'il est pour elle. C'est ce qu'il fait encore maintenant à l'égard de chacun de ceux qu'il appelle à lui. Il s'assied seul auprès d'eux; il les conduit et les fait pénétrer dans les replis profonds de leur coeur, et alors leur révèle en la présence de qui ils se trouvent, les amenant ainsi à lui demander les dons qu'il leur a préparés, et qu'il tient en réserve pour eux.

Nous voyons par quel chemin de grâce le Seigneur conduit cette pauvre femme pécheresse. Tout entière à ses occupations ordinaires de la vie d'ici-bas, ignorant qui elle allait rencontrer, elle vient à la fontaine. Il lui demande d'abord à boire — quelques gouttes d'eau fraîche! — le moindre des dons que ce monde puisse offrir. Contemplez comme le Seigneur s'abaisse lui-même! Les Juifs considéraient comme une chose des plus dégradantes d'avoir une relation quelconque, ou même de converser avec des Samaritains; bien moins encore eussent-ils voulu implorer d'eux une faveur. Et voici, le Seigneur de gloire qui demande une gorgée d'eau à la pire des femmes de la ville des Samaritains! Si grande était son humiliation en agissant ainsi, que la femme elle-même s'étonne d'entendre sortir de la bouche d'un Juif une requête s'adressant à quelqu'un de ceux que ses compatriotes regardaient et traitaient avec le plus profond mépris.

Chers amis, pensez à cela. Contemplez le sentiment et l'esprit dans lesquels il vient au-devant de cette femme méprisée, de cette misérable Samaritaine. Il n'entre avec elle dans aucune discussion. Il ne recherche pas si, de la part des Juifs, il y avait d'injustes préjugés, ou s'ils avaient raison de traiter ainsi leurs voisins; non, la pensée du Seigneur est tournée vers un seul objet — le salut de cette femme. Il ne voulait pas autre chose. Il répond donc et lui dit: «Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te dit: donne-moi à boire, toi, tu lui eusses demandé, et il t'eût donné de l'eau vive». Et c'est là la grande vérité que le monde ignore, et dont l'ignorance cause sa ruine. Les hommes du monde ne savent pas qui est Celui qui leur demande à boire, qui a soif de leur salut, qui les supplie d'être réconciliés: «Nous supplions pour Christ: Soyez réconciliés avec Dieu». Il les invite, en termes pleins de grâce et qui expriment le plus grand amour, à venir à lui; il le leur demande comme une faveur. Le monde ne discerne pas que c'est le Fils de Dieu qui s'abaisse ainsi lui-même pour appeler les pécheurs, que c'est le Seigneur de gloire, le Fils du Dieu éternel. Ils ignorent qui est Celui qui leur demande de venir, et ainsi ne lui demandent pas ce don sans lequel ils ne peuvent entrer dans le royaume de Dieu. «Si tu connaissais qui est celui qui te dit: Donne-moi à boire, tu lui eusses demandé».

Quel est ce don, le don de Dieu? C'est l'eau vive: «une fontaine d'eau jaillissant continuellement en vie éternelle». Deux choses sont à considérer: premièrement, qu'est-ce que cette eau vive? C'est l'Esprit Saint; et secondement, qui le donne? C'est Christ. Connaître celui-ci, conduit à demander l'eau vive, le don de Dieu. C'est la connaissance de Celui avec qui nous avons affaire, qui nous pousse à demander ses dons. Et ce don de l'Esprit Saint que Christ confère, est une fontaine d'eau toujours vive et jaillissante, et non un étang qui, bien que plein à un certain moment, pourrait être asséché. C'est une fontaine qui ne saurait jamais être épuisée, qui ne peut tarir, qui est donnée au croyant, et mise en lui, vivante et demeurant pour toujours. La possession de cette eau vive suppose d'abord la connaissance du Donateur; sans elle, il y a complète ignorance, ténèbres, entière incapacité de comprendre ou reconnaître l'excellence et le prix du don, ainsi que sa signification spirituelle.

Nous le voyons dans le cas de la femme samaritaine. Son esprit ne saisit rien de ce que Jésus veut lui dire, parce qu'elle ne connaît pas qui est Celui qui lui parle. Son âme ne pouvait donc point saisir la vérité; sa pensée charnelle s'en écarte entièrement et donne un autre sens aux paroles du Sauveur. «Seigneur», dit-elle, «tu n'as rien pour puiser, et le puits est profond; d'où as-tu donc cette eau vive?» Ses pensées étaient remplies du monde, des devoirs et des occupations qui sont le propre de la vie terrestre, des choses que le monde poursuit, et ainsi elle ne pouvait s'élever plus haut, et discerner ni qui était Celui qui lui parlait, ni ce qu'il présentait à son attention. Tel est le monde, aveuglé, détourné des choses de Christ par celles qui sont temporelles et qui frappent les sens. Satan se sert d'elles pour tenir les âmes éloignées de Christ. Peu importe l'objet — ne fût-ce qu'une cruche — il n'en a point souci, pourvu que cet objet occupe la pensée à l'exclusion de la connaissance de Christ, et que lui, Satan, arrive à ses fins qui sont d'empêcher l'âme de saisir et de goûter les choses spirituelles. Plaisirs, amusements, désir du gain, amour de la renommée, devoirs de famille ou occupations légitimes, tout lui est bon, s'il parvient à détourner l'âme de Christ. C'est tout ce qu'il désire. Une cruche, aussi bien qu'un palais, servira à ses desseins: il ne demande qu'à tenir les âmes dans l'aveuglement, «de peur que la lumière de l'Evangile de la gloire de Christ, qui est l'image de Dieu, ne resplendisse pas pour eux».

Laissez-moi, chers amis, vous poser une question. Y a-t-il quelque objet qui vous empêche de connaître Christ, de discerner le grand salut qu'il a accompli, de vous abandonner à lui, et d'obtenir de lui cette eau vive? Il peut n'y avoir aucun mal en cette chose; elle peut être innocente en elle-même; elle pourrait même être digne de louange; mais n'a-t-elle pas sur vous assez d'influence pour vous tenir loin de Christ? Est-il encore un étranger pour vous, et êtes-vous étranger à ses dons précieux? A ce moment même, y aurait-il une chose — quelle qu'elle soit — devoirs de famille ou occupations légitimes, qui vous retienne? Peut-être est-ce quelque objet moins insignifiant et moins innocent, qu'une cruche, qui a assez de poids pour tenir votre âme dans la mort et vous empêcher de saisir le sens spirituel des paroles de Christ.

Dans cette femme de la Samarie, contemplez ce que vous êtes, pour autant du moins que nous avons vu jusqu'ici ce qu'elle était. Son esprit était occupé de ce qui l'avait amenée à la fontaine — et c'était une chose légitime et nécessaire — mais occupée ainsi, sa pensée était loin des choses que le Sauveur plaçait devant ses yeux. Elle ne voyait en elles que ce qui se rapportait à son travail, et n'y apercevait point l'amour, la grâce et la compassion du Seigneur qui voulaient se manifester envers elle. Le Seigneur de gloire, le Prince de la vie, était là, fatigué auprès de la fontaine, mais le coeur rempli de pensées de délivrance pour elle, pauvre femme enserrée dans des liens de péché. Mais elle ne le discernait pas: son esprit était occupé de sa cruche et de l'eau qu'elle venait puiser; elle les estimait plus que l'eau vive dont Jésus avait parlé. Poursuivant le train charnel de ses pensées, elle lui dit: «Es-tu plus grand que notre père Jacob, qui nous a donné le puits; et lui-même en a bu, et ses fils, et son bétail?» Jésus lui répond: «Quiconque boit de cette eau-ci aura de nouveau soif; mais celui qui boira de l'eau que je lui donnerai, moi, n'aura plus soif, à jamais; mais l'eau que je lui donnerai, sera en lui une fontaine d'eau jaillissant en vie éternelle».

Il semblerait qu'une parole aussi puissante, sortant de la bouche de Celui qui est la vérité, aurait dû réveiller cette femme de son rêve et la tirer de ses idées matérielles, en lui montrant qu'il y avait là plus que la nature charnelle ne pouvait discerner. Mais non; elle n'en voit rien, et réplique: «Seigneur, donne-moi cette eau, afin que je n'aie pas soif, et que je ne vienne pas ici pour puiser». L'homme naturel a son esprit tourné vers les choses matérielles; c'est le prisme à travers lequel il voit tout. Il reste renfermé dans le cercle étroit des sentiments et des idées terrestres; il n'aperçoit rien au delà. C'est de là qu'il attend toutes ses jouissances; c'est là qu'il vit et qu'il meurt. «L'homme animal ne reçoit pas les choses qui sont de l'Esprit de Dieu… et il ne peut les connaître, parce qu'elles se discernent spirituellement» (1 Corinthiens 2: 14). Et en voici la raison. Les hommes n'ont point discerné et n'ont point connu le Dieu en la présence duquel ils se trouvent; ils n'ont point été faits participants, par la foi en Christ, du don de Dieu, de l'Esprit Saint, par lequel on discerne spirituellement; ils n'ont aucune idée de l'état d'éloignement où ils se trouvent à l'égard de Dieu et du ciel; ils ignorent l'entrée dans la nouvelle vie, dans la nouvelle création, parce qu'ils n'ont jamais expérimenté dans leurs cœurs l'action de l'Esprit: ils sont insensés et mondains, et ne savent rien de Dieu.

Mais combien est admirable la persévérance de notre Dieu! En dépit de la stupidité d'esprit de cette pauvre pécheresse samaritaine, le Seigneur poursuit envers elle son oeuvre d'amour, mais il va agir d'une manière différente. Il change de méthode. La patience du Dieu de grâce n'est jamais lassée par la perversité obstinée de ses créatures. A juger d'après nos propres sentiments, nous aurions supposé que le Seigneur l'aurait laissée dans son ignorance stupide et l'aurait abandonnée. Mais non; il est Dieu et non pas un homme; c'est pourquoi il ne nous laisse pas dans notre aveuglement. La patience de son amour n'est jamais épuisée, car elle procède d'une source inépuisable: «Dieu est amour».

Le Sauveur prend une autre voie avec cette pauvre femme — douloureuse et amère, sans doute, mais le but est le même, et le mobile est toujours l'amour. Il avait essayé d'éveiller son esprit aux choses spirituelles, mais elle n'avait pas compris. Il lui dit donc: «Va, appelle ton mari». Tu es insensible à ce que je t'ai offert; tu ne comprends pas mon motif; tu ne vois pas le dessein de mon amour; il faut donc que je te montre ce que tu es, que je te fasse voir ton état de ruine et de misère absolues. Par cette simple parole «appelle ton mari», le monde d'iniquité qui était en elle, apparaît à son esprit. Le Seigneur l'amène ainsi à sentir ce qu'elle est, et à connaître qui il est. Elle répond: «Seigneur, je vois que tu es un prophète». Les secrets de son coeur et de sa vie étaient mis à nu par quelqu'un qu'elle n'avait jamais vu auparavant. Le Seigneur avait touché une corde dans la conscience de la pécheresse — et elle vibrait. L'étranger qui lui parlait la convainquait de ce qu'elle n'avait jamais réellement vu jusqu'alors, savoir qu'elle était une pécheresse. Il dévoilait ce qu'elle avait si soigneusement caché, il la dépouillait de son masque, et lui montrait qu'il connaissait les replis cachés de son coeur. Et c'est là toujours ce qui suit le témoignage de la vérité, lorsqu'il est appliqué avec puissance à l'âme du pécheur. «Il est convaincu par tous; et il est jugé par tous: les secrets de son coeur sont rendus manifestes; et ainsi, tombant sur sa face, il rendra hommage à Dieu, publiant que Dieu est véritablement parmi vous» (1 Corinthiens 14: 24, 25).

Telle est la manière dont en général agit le Seigneur. Avant que nous arrivions à saisir distinctement que nous sommes en la présence de Celui qui a les clefs de notre conscience et qui connaît les secrets de notre vie et de nos coeurs, entre les mains duquel nous luttons et nous nous débattons en vain pour avoir du soulagement, nous sommes jugés, nous sommes convaincus, nous sommes muets devant lui; nous sentons son pouvoir et sommes contraints de nous écrier: «Venez, voyez un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait!» Même alors qu'elle n'a encore aucune perception manifeste de la bénédiction qui lui est offerte, l'âme est amenée, à voir et à sentir la puissance de Celui à qui elle a affaire, à voir et à sentir que Celui qui sonde le coeur et dévoile le péché, vient à elle dans la puissance de Dieu, et que c'est en vain que l'on voudrait dissimuler avec lui.

La pensée de la femme est maintenant détournée de sa cruche. Elle s'informe du lieu où elle doit adorer Dieu. Il y aurait beaucoup à dire sur la réponse que lui donne le Seigneur touchant le seul culte que Dieu réclame, un culte spirituel. L'enseignement tout entier de l'Esprit de Dieu, quant à la communion avec lui, est placé devant nous. Mais, laissant ce sujet, nous passerons à la considération de l'heureux résultat de la conversation de Jésus avec la femme samaritaine.

Son esprit est maintenant ouvert à la lumière. Elle s'approche de Celui lequel connaître est la vie éternelle; et elle semble regarder en avant vers le temps où le Rédempteur doit se révéler. L'Esprit la conduit à lui: «Je sais que le Messie, qui est appelé le Christ, vient; quand celui-là sera venu, il nous fera connaître toutes choses. Jésus lui dit: Je le suis, moi qui te parle».

Retracez maintenant les pas qu'elle a faits, et vous verrez par quel chemin de parfaite bénédiction et de grâce, elle a été amenée à la connaissance de Christ. Bien qu'elle fût une vile pécheresse, stupide et insouciante des merveilleuses bénédictions qu'il lui offrait, pas une parole d'irritation, pas un mot de reproche, ne sort de la bouche du Seigneur. Il lui rappelle son péché: «Tu as bien dit, tu n'as pas de mari»; il l'amène à désirer la révélation du Messie, puis, de la manière la plus simple et en même temps la plus saisissante, il se fait connaître à elle. Qui de nous, si le Seigneur venait ainsi nous dévoiler à nous-mêmes ce que nous sommes, ne serait prêt à fuir loin de lui-même pour chercher Jésus? Mais nous n'apercevons pas quel est notre état naturel; nous sommes trop affairés — trop occupés des soucis, des devoirs, des obligations et des plaisirs du monde, pour nous voir tels que nous sommes réellement. Nous sommes trop préoccupés de notre cruche pour discerner le Seigneur de gloire assis auprès de la fontaine. Mais que la lumière de la vérité vienne à briller dans l'âme, alors le monde, tout égoïste qu'il est, se haïra lui-même.

Par quelle voie d'amour elle fut conduite! Pas un reproche, pas une parole dure, pas un mot désobligeant! Il lui ouvre simplement le coeur, puis crée en elle le besoin de le connaître, et enfin lui dit: «Je le suis, moi qui te parle». Elle a trouvé ce que son âme attendait. Elle pouvait avoir eu quelque espérance lointaine de sa venue, mais comment aurait-elle pu s'attendre à le voir venir à elle humble et plein d'amour, et lui dire: «Donne-moi à boire»? C'est ainsi que Christ se révèle à une âme, avant qu'elle lui demande quelque chose. C'est, amenés dans cette position, que nous sommes capables de nous adresser à lui. Nous apprenons ainsi toute sa douceur et tout son amour, sa merveilleuse condescendance pour notre faiblesse et notre indignité. Il nous fait voir la grandeur de sa puissance en nous révélant les secrets de notre coeur, puis il nous amène à la jouissance de la plus grande des félicités, en se révélant lui-même: «Je le suis, moi qui te parle».

Voilà donc ce que nous avons à rechercher, la connaissance de Christ afin d'obtenir le don de Dieu. L'Esprit Saint est donné à ceux qui croient en Christ. «Si tu connaissais qui est Celui qui te parle, tu lui eusses demandé, et il t'eût donné de l'eau vive». Il aurait mis en toi cette fontaine d'eau qui jaillit en vie éternelle. C'est ainsi que le Seigneur agit maintenant encore. Quand l'âme se roidit, pour ainsi dire, contre les invitations de sa grâce, il envoie la parole qui porte la conviction dans le coeur. L'épée de l'Esprit, qui est la parole de Dieu, atteint l'âme, et l'amène à voir sa vraie condition, son état de dépravation, de ruine et de perdition. Elle lui fait connaître qu'elle ne peut se tenir pour être sans péché devant la face de Dieu. «Seigneur», s'écrie-t-elle, «je vois que tu es un prophète». «Il m'a dit tout ce que j'ai fait», telle est l'expérience du coeur, quand l'Esprit Saint l'a convaincu de son état de péché. Il nous apprend — ce qu'auparavant nous ne pouvions savoir — que nous sommes en la présence de Dieu, et que c'est Jésus lui-même qui nous parle. Alors nous venons à lui, et il nous fait part du précieux don que tout le temps il avait en réserve pour nous. Dès lors nous sommes tirés hors de notre position précédente. Nous ne sommes plus des étrangers, des gens du dehors, des ennemis, nous sommes entrés dans une nouvelle position. Notre part n'est plus du monde; elle est céleste: c'est celle de Christ. L'Esprit Saint est donné pour en rendre témoignage; pour montrer que maintenant la vie que le croyant possède, est la vie de Christ, et qu'ainsi le chrétien se trouve dans la même position que Christ.

Qu'est-ce qui s'en suit? Quels sont les effets produits par la jouissance d'une telle bénédiction? «La femme donc laissa sa cruche», et rapporta à tous ceux qu'elle rencontra, ce qui lui était arrivé, les pressant de venir aussi à Christ. Et tel sera toujours l'effet qui suivra la claire perception de Christ par l'âme. Elle abandonnera tout ce sur quoi la pensée charnelle se concentrait auparavant. La femme était venue chercher de l'eau. C'était alors ce qu'elle désirait; son esprit était tourné vers cette seule chose. Mais bientôt le puits, l'eau, la cruche, sont oubliés. Elle est occupée tout entière d'un autre objet; c'est vers lui qu'elle est maintenant attirée. Christ s'est révélé lui-même à elle; la gloire du Messie est maintenant son but et sa fin. Elle le connaît, non plus par ouï-dire, mais par la révélation personnelle de lui-même à son âme, et aussitôt elle commence à l'annoncer à d'autres. Une complète révolution s'est opérée en elle; toutes choses prennent leur vraie place; l'ordre s'établit là où tout était désordre et chaos. Nous le voyons comme notre vie, lui qui l'est réellement, et en ceux qui ont ainsi vu le Seigneur, la révolution est entière. L'âme alors se demande: «Est-il bien vrai, suis-je réellement en lui? Suis-je associée à ses intérêts, à ses privilèges, à sa gloire? Est-il ma vie? Mais, dans ce cas, qu'est le monde pour moi? Pour quelle chose ai-je à vivre, sinon pour Sa gloire et pour lui montrer ma gratitude pour ses ineffables miséricordes?»

Amener l'âme de la femme à cet état était ce qui occupait les pensées du Sauveur dès le commencement, et qui continuait à les occuper à travers tout ce qui conduisait la femme à la conviction de son péché et de sa honte. C'est ainsi qu'une nouvelle vie est donnée, que l'âme est vivifiée, qu'une fontaine d'eau vive vient à jaillir en nous. Elle jaillit toujours dans sa puissance rafraîchissante, et tend à remonter vers la source, la vivante fontaine des eaux, Jésus lui-même. Elle tend vers la gloire du Seigneur, et reçoit de là toute sa gloire. Sous l'impression profonde produite par la pleine connaissance et la vivante perception de ces choses, le monde apparaît comme un néant; richesses, puissance, honneurs, ne sont rien. L'âme ne trouve de richesses et de puissance qu'en Christ; elle ne veut d'honneur que celui qui vient de lui. Plus la perception de ces choses sera puissante en nous, plus notre joie sera entière. Elle jaillira de la nature divine qui est en nous et qui tend vers son glorieux Donateur, Christ. C'est une source rafraîchissante et toujours nouvelle, qui découle du Seigneur de gloire; l'âme a communion avec lui; toutes ses relations sont avec lui.

Qu'en est-il de vous, chers amis? Cette fontaine d'eau vive est-elle en vous, jaillissant sans cesse, et remontant vers sa source? «Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te dit: Donne-moi à boire, tu lui eusses demandé, et il t'eût donné de l'eau vive». Qu'il veuille donner, comment en douter lorsqu'il dit: «Tu lui eusses demandé, et il t'eût donné». Connaissez-vous Christ? Lui avez-vous demandé? Avez-vous au dedans de vous cette fontaine? Et jaillit-elle en vous? Il y a une immense différence entre tirer d'autrui, et avoir en soi-même. Une âme altérée peut-elle tirer profit de ce qui est en vous, si elle n'a pas goûté le rafraîchissement en elle-même? Et si vous l'avez goûté, quelle influence pratique cela a-t-il sur vous? Etes-vous séparés du monde, et séparés pour Dieu? Comprenez-vous et considérez-vous quelle est votre haute vocation — héritiers de Dieu, cohéritiers de Christ? Etes-vous imitateurs de Christ? Qu'était-il ici-bas? Saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs. Etes-vous tels? Si vous êtes de Christ, son Esprit a rendu témoignage dans votre coeur qu'il a été tel, et il manifeste ceci à votre âme: «Que vous abondiez en espérance, par la puissance de l'Esprit Saint». La gloire du Seigneur est maintenant manifestée dans la puissance de l'Esprit de Dieu sur les âmes des siens. C'est ce qui les distingue intérieurement de tout le monde. Ils sont sortis de leur position dans le premier Adam; ils sont participants de la nature divine et ont leur part avec le dernier Adam: ils sont ressuscités avec lui. Et c'est ce qu'ils sont appelés à manifester extérieurement. Si vous connaissez l'amour de Dieu en Christ et son droit sur vous, si vous l'avez vu des yeux de votre âme et lui avez demandé ce qu'il vous presse de recevoir, ce sera votre désir, votre but et votre bonheur de le faire connaître.

Chers amis, encore une fois, y a-t-il en vous cette source, cette fontaine d'eau vive? Si cela n'est pas, vous n'avez pas jusqu'à présent connu le don de Dieu. Ne vous abusez pas; si vous ne J'avez pas en vous, vous n'avez rien. Si vous ne possédez pas la source intérieure, rafraîchissante, que Christ donne à tous ceux qui lui appartiennent, tout ce que vous auriez d'autre est de peu ou d'aucun profit, car lorsque le soleil de la tentation, ou de l'épreuve, ou de l'affliction, se lèvera, ce qui est en vous séchera comme un étang inutile, sans fontaine d'eau vive, sans aucune source rafraîchissante.