Le Sauveur et le pécheur

Darby J.N.  -  ME 1895 page 361

 

Toute la parole de Dieu, du commencement à la fin, proclame qu'il n'y a rien que le sang de Christ pour un pécheur. Toute l'expiation dont il peut jouir, toute la réconciliation dont il peut se réclamer, toute la réponse aux exigences du trône où siège le jugement pour maintenir les droits de Dieu, dépendent du sang.

C'est le sang de l'Agneau de Dieu que Dieu présente à la foi du pécheur, et c'est ce que la foi du pécheur saisit et en quoi il se confie.

Dès que le péché fut entré dans le monde, le sacrifice préparé dans les conseils éternels, fut révélé. La toute première parole de promesse annonce la mort de Christ: «La semence de la femme te brisera la tête, et tu lui briseras le talon». Ce fut la chose — l'unique chose — communiquée à l'homme comme pécheur; le pécheur se confia en elle; Adam sortit du lieu où il se tenait caché, et eut confiance en la vertu réconciliatrice du sacrifice de l'Agneau de Dieu.

Dès que fut venu le temps propre pour la manifestation publique de la rédemption, c'est encore le sang de Christ qui fut révélé, et cela seul. Israël, dans le pays de la mort et du jugement, avait besoin de délivrance. Il avait trouvé grâce aux yeux du Dieu de ses pères, et devient un peuple mis à l'abri dans le lieu où le jugement s'exerçait, et racheté pour sortir du domaine de la mort. C'est ce précieux sang, et lui seul, qui joue son rôle dans cette occasion. Il devait être placé en dehors sur les poteaux et le linteau des portes des Hébreux, dans le pays d'Egypte, et chaque famille, dans la maison, se nourrissait de la victime dont le sang les avait rachetés. Rien de plus. D'une manière appropriée au rite, les Israélites devaient manger l'agneau rôti — non pas à demi-cuit, ni cuit dans l'eau, mais rôti au feu, la tête, les jambes, et l'intérieur. Ce devait être leur nourriture. C'est en figure comme si Christ leur disait: «Prenez, mangez; ceci est mon corps».

Et, en harmonie avec cela, c'est ce que nous trouvons dans le Nouveau Testament. Nous le lisons en Matthieu 26, Marc 14, et Luc 22. Le Seigneur est là, comme dans la nuit de la Pâque, en Exode 12. Il était encore un Christ vivant, mais il se présente comme un Christ crucifié, un Agneau immolé, un sacrifice sur l'autel. Il ne se voit plus comme homme vivant, mais comme victime. Il prend le pain, et dit: «Prenez, mangez; ceci est mon corps». Il prend la coupe, et dit: «Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang». C'est le Christ crucifié que le Christ vivant présente ainsi à la pensée et à l'acceptation des pécheurs, comme le fondement de toutes nos bénédictions et le droit que nous y avons.

C'était donner à la famille élue l'Agneau pascal, dont le sang sur les poteaux des portes est son abri et sa délivrance. Elle avait à le prendre et à le manger, comme les Israélites dans la nuit où ils sortirent d'Egypte.

Dans l'évangile de Jean, nous n'avons point la scène du dernier souper. Nous n'y lisons pas: «Prenez, mangez; ceci est mon corps»; mais nous y trouvons une parole adressée par le Seigneur aux Juifs, et où il dévoile le grand secret de la Cène. Au sixième chapitre, il dit à la multitude qu'il était le pain descendu du ciel, la vraie manne, de laquelle, si quelqu'un en mange, il vivra éternellement. Mais dans la suite de cet entretien, il déclare que ce pain du ciel était sa chair qu'il donnerait pour la vie du monde; que sa chair était vraiment un aliment et son sang vraiment un breuvage. Cela veut dire que c'est en le recevant comme l'Agneau de Dieu, en allant à lui comme étant descendu dans la mort et placé sur l'autel, que le pécheur reçoit la rédemption et la vie. Ce n'est pas en le connaissant comme un Christ vivant, mais comme un Christ crucifié, que nous avons le salut de Dieu.

Il en est ainsi; nous l'avons devant nos âmes avec une entière certitude et une grande simplicité. Dès le commencement, le sang de Christ, le sacrifice de l'Agneau de Dieu, est présenté aux pécheurs comme l'unique objet sur lequel ils aient à arrêter le regard de la foi, et en qui ils doivent placer leur pleine et absolue confiance. L'Agneau vivant ne trouve point sa place dans ce grand mystère de la rédemption, sauf en ce que sa vie a témoigné qu'il était bien la victime pure et sans tache propre pour l'autel c'est l'Agneau immolé, Jésus le crucifié, qui est tout dans ce grand fait de la rédemption des pécheurs. Le sang du Dieu fait homme, et cela seul, a été la rançon.

Non seulement les Ecritures qui nous parlent des patriarches, les récits mosaïques et les évangiles, nous enseignent cette merveilleuse leçon: dans le troisième chapitre de la Genèse, le douzième de l'Exode, l'institution de la Cène, et le sixième chapitre de Jean, mais les épîtres la présentent aussi. Le dixième chapitre de l'épître aux Hébreux le fait d'une manière frappante. Là, nous entendons le Christ de Dieu dire: «Voici, je viens». Et dans quel but venait-il? Etait-ce pour vivre? Non, mais pour mourir. Pourquoi un corps lui avait-il été formé? Etait-ce seulement pour agir dans ce corps et y passer trente-trois années dans le service actif, comme un témoin et un ministre pour le Dieu et Père? Non; mais pour l'offrir en oblation sur la croix (Hébreux 10: 5-10). Sans doute, il a vécu et cela sous la loi, lui le vrai Israélite. Sans doute, il a vécu, accomplissant un saint ministère de grâce et rendant témoignage à son Dieu et Père. Mais l'Ecriture (Hébreux 10: 5-10) passe, pour ainsi dire, par-dessus sa vie, et immédiatement conduit jusqu'à la croix Celui qui était venu dans le monde. C'est ainsi que lui-même, à la table de la Cène, comme nous l'avons vu, ne parle point de lui comme vivant, mais se présente comme le Crucifié, Et alors, dans ce même passage de l'épître aux Hébreux, nous apprenons que c'est par l'offrande de ce corps formé pour lui, par le sang du Fils de Dieu, que les pécheurs sont sanctifiés et rendus parfaits. Nous lisons encore plus loin dans la même épître: «Jésus, afin qu'il sanctifiât le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte» (chapitre 13: 12) — la sanctification du pécheur dépend donc absolument du sang de Christ (*).

(*) J'admets pleinement la sanctification dans un autre sens; celle d'un saint — je veux dire la purification graduelle d'un élu par la vérité sous la puissance de l'Esprit (Jean 17: 17). Mais ici, je parle de la sanctification d'un pécheur.

Je n'en dis pas davantage, bien que toute l'Ecriture fournisse beaucoup plus sur le sujet. Les ordonnances de la loi, ombres de ce qui devait venir, et l'enseignement dogmatique direct des apôtres, tout s'accorde pour nous dire que le sang du Christ de Dieu est tout pour le pécheur.

Mais si Dieu nous communique ainsi sa pensée, la foi la saisit et la reçoit. Le cinquante troisième chapitre d'Esaïe en est témoin. Là, la foi de l'Israël de Dieu réveillé peut, en passant, jeter un regard sur la personne, la vie et le ministère du Christ, mais ce n'est qu'en passant, elle va directement à la croix, et trouve là tout pour que les pécheurs soient rendus parfaits quant à la conscience, et y trouve aussi l'origine et le fondement de toutes les gloires de Christ. A la croix, ils découvrent que le châtiment qui nous apporte la paix a été sur lui, que là il a été blessé pour nos transgressions et meurtri pour notre guérison, et qu'ayant livré son âme en sacrifice pour le péché, il a pu voir devant lui sa famille et le plein accomplissement du bon plaisir de Dieu dans le maintien et le déploiement de ses propres gloires pour toujours. «Il verra une semence; il prolongera ses jours, et le bon plaisir de l'Eternel prospérera en sa main».

De même, la joie de la vie de foi dans Paul, l'apôtre des gentils, a sa source dans la mort du Seigneur pour lui: «Le Fils de Dieu qui m'a aimé, et qui s'est livré lui-même pour moi» (Galates 2: 20). Ainsi, il présente cette Personne à la foi des pécheurs, comme l'unique objet de la foi qui justifie (Romains 4: 23-25). Ainsi encore, il nous enseigne que Christ crucifié est simplement offert aux regards du pécheur, afin qu'il soit béni avec le croyant Abraham (Galates 3: 1-14). «Qui lui-même a porté nos péchés en son corps sur le bois», dit un autre apôtre (1 Pierre 2: 24). «Le sang de son Fils Jésus Christ nous purifie de tout péché», annonce Jean (1 Jean 1: 7). Mais ce que nous venons de voir est suffisant; dans toutes les Ecritures, nous le répétons, Moïse, les prophètes, les évangiles, et les apôtres, s'unissent pour rapprocher «l'Agneau de Dieu» et «le pécheur», en vue de la rédemption et la justification de ce dernier: l'Agneau donné dans les richesses de la grâce de Dieu, et accepté par la foi du pécheur, Dieu le Saint Esprit opérant en lui, l'attirant et l'éclairant par son enseignement.

Ensuite, ce qui est ainsi donné en grâce, accepté par la foi, et à quoi toute l'Ecriture rend témoignage, sera célébré à jamais dans les royaumes de la gloire. Nous le voyons dans la dernière portion des Ecritures, l'Apocalypse. Tandis qu'ils sont encore sur la terre, les saints nous font connaître qu'ils ont trouvé, dans l'Agneau qui fut immolé, l'objet de leurs louanges et la source de leur joie. Lorsque Jean a déroulé devant eux les gloires de Christ, nous les entendons s'écrier avec ferveur «A celui qui nous aime, et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang; — et il nous a faits un royaume, des sacrificateurs pour son Dieu et Père; — à lui la gloire et la force aux siècles des siècles!» (Apocalypse 1: 5, 6). Et après qu'ils ont été transportés loin de la scène présente, qu'ils ont échangé la terre pour le ciel et ont atteint leur demeure de gloire, nous entendons encore les mêmes accents de joie: «Et ils chantent un cantique nouveau, disant: Tu es digne de prendre le livre, et d'en ouvrir les sceaux: car lu as été immolé, et tu as acheté pour Dieu par ton sang, de toute tribu, et langue, et peuple, et nation; et tu les as faits rois et sacrificateurs pour notre Dieu; et ils régneront sur la terre» (Apocalypse 5: 9, 10). Et les royaumes de gloire, aussi bien que la demeure de gloire, les nations (sur le marchepied) au temps millénaire, comme les saints glorifiés dans le ciel, font écho à ce concert — car c'est l'unique pensée qui ravira les coeurs, la pensée qui occupera l'éternité et remplira la création, aussi nous entendons de nouveau les mêmes voix des saints: «Ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation, et ils ont lavé leurs longues robes, et les ont blanchies dans le sang de l'Agneau» (Apocalypse 7: 14). Ceux-là peuvent n'avoir pas à ajouter un mot touchant leur règne, comme les saints glorifiés le font, ils peuvent ne connaître que le fait qu'ils seront devant le trône, et serviront Dieu jour et nuit dans son temple; que toute larme sera essuyée de leurs yeux, et qu'ils seront conduits par le Seigneur aux fontaines des eaux de la vie (versets 15-17), mais «le sang de l'Agneau» est l'objet commun de la louange, la commune source de joie, l'unique titre à toutes les bénédictions, soit des saints glorifiés dans le ciel, soit des nations rachetées qui occuperont la terre dans les jours millénaires de rétablissement et de rafraîchissement. Les pécheurs voyageant et luttant dans des corps non encore rachetés, pèlerins encore militants; les pécheurs dans leur demeure de gloire au ciel ou dans les royaumes de gloire sur la terre, ne connaissent rien que le Sauveur dans son sang versé pour eux, dans la vie qu'il a donnée pour les racheter, le Sauveur, comme l'Agneau de Dieu sur la croix du Calvaire. Toute gloire lui sera rendue en cela, en cela seul.