Le péché des fils d'Aaron

Lévitique 10

ME 1896 page 101

 

L'une des positions dans lesquelles nous sommes placés, comme enfants de Dieu, est celle de «sacrificateurs». Mais tandis que nous sommes portés, et cela justement, à regarder cette position comme un immense privilège, nous oublions trop souvent en pratique que c'est une place de service constant. Les sacrificateurs en Israël vivaient dans une précieuse proximité avec Dieu, et, en vertu de cette proximité même, ils devenaient de simples serviteurs du peuple. Jésus, quoiqu'il soit devenu «sacrificateur pour l'éternité selon l'ordre de Melchisédec», est maintenant un «ministre du sanctuaire», d'après le modèle du service sacerdotal d'Aaron; et nous, «rois et sacrificateurs à Dieu», sommes placés comme les «fils d'Aaron» dans cette même position (*).

(*) Dans cette partie de l'Ecriture, «Aaron et ses fils» nous sont constamment présentés comme un type de l'Eglise. Quelquefois, cependant, Aaron est distingué et séparé de ses fils, comme, par exemple, lors de leur consécration. (Lévitique 8). Aaron est oint, mais il n'est pas fait sur lui d'aspersion de sang; eux, au contraire, sont consacrés par le sang. Ceci montre d'une manière évidente la perfection de la personne même de Christ, pour recevoir la plénitude du Saint Esprit; en revanche, nous ne pouvons bénéficier de cette plénitude qu'en vertu de ses perfections et de son sang qui a été versé pour nous. Je regarde Aaron comme un type de Christ; — «Aaron et ses fils», comme celui de l'Eglise tout entière.

Nous pouvons suivre dans toute l'Ecriture l'histoire de la chute de l'homme. Dans chaque condition où il a été placé, l'homme a failli. Et pourtant, comme nous l'avons vu souvent, toutes ces chutes aboutissent enfin à la gloire de Dieu, et à la louange de sa grâce. Quels trésors de bonté et de bénédiction nous trouvons là! Cette considération vient à l'encontre de l'orgueil de nos coeurs, de la tendance naturelle, que nous avons tous à nous confier en nous-mêmes. Adam, Noé, Israël sous toutes ses conditions, nous enseignent cette même leçon; la loi, la sacrificature, les prophètes, les rois, toute l'histoire du désert et de Canaan, nous répètent la même chose. La chute est toujours ce qui caractérise les voies de l'homme; le chapitre que nous allons étudier nous le montre dans des circonstances aussi remarquables qu'émouvantes.

Les «fils d'Aaron» furent placés dans une position de grâce, et c'est là même qu'ils faillirent.

Il va sans dire que la loi n'avait en elle-même aucun aspect de grâce. Si je la prends dans son sens le plus élevé, dans ce qui concerne même les anges, ces êtres parfaits qui ne sont jamais tombés, que trouverai-je? Ce que Dieu exige — ce qui devait être. «Ils exécutent sa parole, écoutant la voix de sa parole!» Et ainsi les dix commandements furent une demande catégorique de la part de Dieu; il voulait la justice de l'homme, ce que l'homme devait être envers lui et devant lui. «Tu aimeras l'Eternel ton Dieu, de tout ton coeur, et de toute ton âme, et de toute ta force, et de toute ta pensée, et ton prochain comme toi-même». Mais plus encore; la loi supposait le péché, — elle était adaptée à ceux qui ont une tendance au péché; mais la base et le centre de toutes nos bénédictions — ce que Dieu est pour l'homme en amour et en grâce — n'y furent jamais présentés. Ainsi la loi proprement dite ne réussit jamais à nous amener à Dieu.

Mais il y a des choses qui accompagnent la loi; — des sacrifices qui ont le caractère de la grâce, parce qu'ils sont offerts pour des transgresseurs. Et ici la sacrificature trouve sa place (voyez Hébreux 5). Le sacrificateur «est établi pour les hommes,… afin qu'il offre et des dons et des sacrifices pour les péchés». Voilà la grâce; — Dieu n'exigeant pas la justice, mais offrant une ressource aux pécheurs.

Nous trouvons donc ici les services de l'homme en grâce et le péché des fils d'Aaron dans ce développement pratique de la grâce.

Mais considérons premièrement un autre côté du service sacerdotal — le culte. Tout culte proprement dit se lie au sacrifice pour le péché, mais n'est pas, à strictement parler, fondé sur la présentation de ce sacrifice. Nous ne pouvons sans lui, comme rachetés, nous approcher pour rendre culte; il est pour nous la porte d'entrée, mais non le vrai caractère de notre culte. Ce culte est imprégné de «l'odeur agréable» de l'«holocauste»; nous nous approchons de Dieu, non seulement selon la valeur du sang, mais comme étant acceptés en Jésus; nous avons sur nous toute la saveur bénie de ce qu'il était et de ce qu'il fit pour Dieu. Précieuse pensée! Dans tout culte, il faut remarquer un grand principe; la mort doit intervenir entre nous et Dieu. Comparez le cas de Caïn et d'Abel. Caïn apporta devant l'Eternel des fruits de la terre maudite; — c'est ce que tout homme naturel présente à Dieu. Son culte lui coûtait «la sueur de son front», le labeur de la malédiction amenée par le péché, ce que ne fit pas celui d'Abel. Mais, chez Caïn, il n'y avait pas la foi; il ne reconnaissait pas sur quel pied il était devant l'Eternel; il était indifférent au jugement de Dieu, à sa miséricorde, à sa patience. L'offrande de Caïn (comme celle de tout homme en la chair), est la preuve de l'insensibilité la plus parfaite du coeur quant à ce qu'est l'homme devant Dieu. Tout ce que nous pouvons offrir, venant de nos coeurs naturels, n'est qu'un «sacrifice d'insensés». Le cas d'Abel est tout le contraire de celui-ci: son «sacrifice plus excellent» consistait en ceci: il confessait que la mort devait intervenir entre l'âme et Dieu. Il doit toujours en être ainsi; autrement, il ne peut y avoir de culte; en toutes circonstances la mort doit intervenir entre nous et Dieu.

La mort peut revêtir deux caractères très distincts; elle peut être le salaire du péché; elle peut être pour Dieu. Elle est le témoignage du péché de l'homme, mais en suite de la mort du Seigneur Jésus, elle est maintenant l'un de nos serviteurs. «Toutes choses sont à nous, soit vie, soit mort, soit choses présentes, soit choses à venir»; nous les possédons toutes. La mort qui était autrefois contre nous, est maintenant pour nous, parce que Christ l'a traversée. «Puis donc que les enfants ont eu part au sang et à la chair, lui aussi semblablement y a participé, afin que, par la mort, il rendit impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort, c'est-à-dire le diable; et qu'il délivrât tous ceux qui, par la crainte de la mort, étaient, pendant toute leur vie, assujettis à la servitude» (Hébreux 2: 14, 15). Ce fut par «la grâce de Dieu» que Christ goûta la mort. Dans sa mort, quoiqu'il dût la subir à cause du péché, nous voyons la grâce de Dieu. Tout ce qui était contre nous a disparu. Le Seigneur Jésus ne peut rien toucher qu'il ne le change en bénédiction. «De celui qui mange est sorti le manger, et du fort est sortie la douceur». Si je contemple la mort au faite de sa puissance — à la croix de Christ — je vois en elle la puissance de la grâce.

C'est ici que je trouve la bonne odeur du culte dans son caractère propre, c'est-à-dire l'holocauste. L'aspect le plus précieux de l'offrande de Jésus se trouve dans la perfection de sa volonté, et dans le complet sacrifice qu'il fit de lui-même à Dieu. «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que moi je laisse ma vie, afin que je la reprenne. Personne ne me l'ôte, mais moi, je la laisse de moi-même; j'ai le pouvoir de la laisser, et j'ai le pouvoir de la reprendre: j'ai reçu ce commandement de mon Père» (Jean 10: 17, 18). Il ne fut pas seulement la victime sans tache, mais il s'offrit encore lui-même à Dieu. «Lequel, étant en forme de Dieu, n'a pas regardé comme un objet à ravir d'être égal à Dieu, mais s'est anéanti lui-même, prenant la forme d'esclave, étant fait à la ressemblance des hommes; et, étant trouvé en figure comme un homme, il s'est abaissé lui-même, étant devenu obéissant jusqu'à la mort, et à la mort de la croix» (Philippiens 2: 6-8). Et encore: «Voici, je viens; il est écrit de moi dans le rouleau du livre. C'est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon plaisir, et ta loi est au-dedans de mes entrailles» (Psaumes 40: 7, 8; Hébreux 10: 7). Ainsi, dans le don de Jésus, nous ne voyons pas seulement la grâce de Dieu, mais le fait que Christ, «par l'Esprit éternel, s'est offert lui-même à Dieu sans tache» (Hébreux 9: 14).

La volonté, qui pour nous est péché, devient de l'obéissance dans l'offrande qu'il a faite de lui-même. Toutes les phases de son existence ne furent que perfection. Il fut parfait dans toutes ses voies, dans toute sa vie, dans sa consécration à Dieu; mais ce fut cet être parfait lui-même qu'il offrit à Dieu dans son obéissance complète: «Que ce ne soit pas ma volonté, mais la tienne qui soit faite». Il y avait là une glorification parfaite de Dieu. La volonté propre du premier Adam qui cherchait à se complaire à lui-même amena la mort; le second Adam, le Seigneur Jésus Christ, dans sa volonté de glorifier Dieu, nous acquit la vie par sa mort. En tant qu'il était question de l'homme, la gloire divine avait disparu. L'homme avait insulté le caractère et la majesté de Dieu, il avait prêté l'oreille aux mensonges de Satan, qui niait que la vérité et la bonté se trouvassent en Dieu; il avait pris le diable pour ami. Mais le Seigneur Jésus Christ, en s'offrant ainsi lui-même, glorifia Dieu entièrement. Aussi lorsque Judas fut sorti pour accomplir son oeuvre de trahison, le Seigneur put-il dire: «Maintenant le Fils de l'homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui» (Jean 13: 31). C'est là que Dieu a trouvé son repos.

Dieu a été glorifié. Dit-il vrai en affirmant que «le salaire du péché c'est la mort»? Satan affirme à Eve: «Vous ne mourrez point». Voyez Jésus. Fut-il sincère dans son amour pour l'homme? Satan avait mis cet amour en question. Jésus mourut pour l'homme. Satan tenta l'homme en disant: «Vous serez comme Dieu». Dieu donna son propre Fils, qui est l'image du Dieu invisible. Il revendiqua ainsi ses droits contre l'homme, mais il le fit en faveur de l'homme.

Lorsque le Seigneur Jésus, «par l'Esprit éternel, s'offrit lui-même à Dieu sans tache», Dieu trouva son repos en lui. Peu importe en quoi je trouve mon repos, si je ne le cherche pas là où Dieu a trouvé le sien. Dieu a trouvé son repos en Jésus (dans un sens, il ne peut rien chercher d'autre), et nous pouvons aussi nous reposer en lui. C'est là que nous trouvons le motif du culte, le culte lui-même: il s'imprègne de la bonne odeur de tout ce que Christ a été et a fait pour nous, et ainsi notre culte prend le caractère de l'holocauste.

Sous un autre caractère, celui de «sacrifice pour le péché», le péché fut placé sur lui. «Dieu l'a fait péché pour nous» (2 Corinthiens 5: 21). Ce n'était pas «un sacrifice par feu, une odeur agréable à l'Eternel»; mais le corps était brûlé hors du camp comme une chose impure (Lévitique 4).

Quand il est parlé des offrandes dans le Lévitique, nous trouvons premièrement l'holocauste, l'offrande du gâteau et le sacrifice de prospérités; ensuite vient le sacrifice pour le péché. Mais dans la pratique, l'adorateur, pris individuellement, devait présenter d'abord son offrande pour le péché, puis l'holocauste, et ainsi de suite; car il ne pouvait rendre culte tant que le péché n'était pas ôté, mais il s'approchait de Dieu par l'efficace du sacrifice qui le purifiait.

Bien que Dieu nous rencontre dans nos péchés par le sang de Christ, cependant, quand nous rendons culte, nous parlons de ce que Jésus est pour Dieu. Nous nous approchons dans la pleine efficace du sacrifice de Christ. Le péché a été ôté et nous sommes au bénéfice de la valeur pleine et entière du Sauveur.

L'holocauste était «un sacrifice par feu, une odeur agréable à l'Eternel» (Lévitique 1: 9). Plus le feu le pénétrait et plus aussi l'odeur agréable montait vers Dieu. Il en était ainsi de Christ. Le feu de la sainteté de Dieu qui éprouvait et sondait, les replis les plus profonds de son Etre, faisait ressortir dans toute sa perfection l'odeur agréable à l'Eternel. Nous aussi nous sommes ainsi acceptés. C'est dans cette perfection que nous nous tenons devant Dieu. Et dans cette position bénie, nous avons communion d'adoration devant lui. Dieu avait sa part dans les sacrifices; le souverain sacrificateur aussi, et les adorateurs en mangeaient. Nous pouvons, de la même manière, nous nourrir de Christ.

C'est sur l'autel de l'holocauste que devaient être pris les charbons destinés à allumer l'encens que le sacrificateur faisait monter devant l'Eternel. «Un feu étranger», provenant d'une autre source, ne pouvait être accepté. Notre culte tout entier, même s'il s'agit simplement du chant d'un cantique, doit avoir ce caractère, — il doit être imprégné de l'odeur agréable de Christ. C'est ainsi que Dieu l'accepte, malgré ses innombrables imperfections. Toutes choses doivent être «salées par le feu»; ce qui ne passe pas par le feu, ne peut rester debout; si cette condition n'est pas observée, il n'y a que condamnation et que jugement; et tel fut le caractère du péché de Nadab et d'Abihu. Le feu éprouve l'oeuvre de chacun; si le jugement s'est épuisé tout entier sur Christ, il ne nous reste plus que la bonne odeur de Christ dans laquelle nous puissions nous tenir devant Dieu.

C'est la valeur réelle de notre position devant lui. Là est notre joie. C'est la place que la grâce nous donne.

Mais c'est à cette place même que «les fils d'Aaron» commirent leur péché.

«Et les fils d'Aaron, Nadab et Abihu, prirent chacun leur encensoir, et y mirent du feu, et placèrent de l'encens dessus, et présentèrent devant l'Eternel un feu étranger, ce qu'il ne leur avait pas commandé» (verset 1). Nous voyons ici le service séparé de ce qui rend son acceptation possible, et par conséquent la chute de l'homme dans le lieu de la grâce. L'homme a failli sous la loi; on pouvait s'y attendre; mais lorsque, par grâce, il est approché de Dieu, il faillit de nouveau.

Le péché de Nadab et Abihu (type effrayant de l'église professante) fut dirigé contre la grâce même de Dieu; ils manquèrent au respect dû au sentiment de leur position, ils n'eurent pas de révérence pour la présence de Dieu. La position dans laquelle nous avons été placés, quoiqu'étant une place de joie parfaite, doit toujours être caractérisée par la crainte (Hébreux 12: 28, 29).

Mais qu'advient-il du péché? Il faut qu'il rencontre le jugement — un jugement qui sort du lieu même de la grâce: «Et le feu sortit de devant l'Eternel, et les dévora, et ils moururent devant l'Eternel» (verset 2). L'Eternel revêt ici un caractère terrible. Le «feu étranger» rencontre la sainteté, le vrai feu du jugement de Dieu; — «ils moururent devant l'Eternel». Pensée solennelle!

Dieu se révéla comme un Dieu de jugement, dans l'habitation même de la bénédiction et de la grâce. Il en sera toujours ainsi pour tout ce qui prend une position fausse «devant l'Eternel»; car après tout, le lieu de la grâce est encore celui du jugement. «Je serai sanctifié en ceux qui s'approchent de moi». Nous avons toujours à nous juger nous-mêmes, afin de n'être pas jugés par Dieu (1 Corinthiens 11: 31).

Nous lisons: «Mais comme celui qui vous à appelés est saint, vous aussi soyez saints dans toute votre conduite; parce qu'il est écrit: Soyez saints, car moi je suis saint. Et si vous invoquez comme père celui qui, sans acception de personnes, juge selon l'oeuvre de chacun, conduisez-vous avec crainte pendant le temps de votre séjour ici-bas» (1 Pierre 1: 15-17). Le Seigneur juge toujours selon la place dans laquelle nous avons été introduits, selon la position dans laquelle nous sommes. Nous en faisons autant quant aux autres hommes. Ainsi, je juge ceux qui habitent ma maison tout autrement que ceux du dehors. Je dis, non pas à un étranger, mais à celui qui est introduit chez moi: «Vous devez vous bien conduire ici». Dieu agit avec nous sur le terrain de la grâce, mais c'est aussi le terrain de la sainteté. La sainteté fait aussi bien partie de la grâce que n'importe quelle autre bénédiction. «Soyez saints, car moi je suis saint», exprime l'intimité, et n'est pas simplement un ordre. La grâce doit nous rendre saints, «participants de sa sainteté» (voyez Hébreux 12).

Dieu ne demande pas une sainteté à l'homme, mais il nous fait participer à la sienne. Que pourrions-nous désirer de plus? L'amour agit; et nous sommes rendus participants de la sainteté qui sépare Dieu de tout ce qui est inconséquent avec lui-même; de la sainteté, et non pas simplement de l'innocence. L'innocence consiste à ignorer le bien et le mal. Vous ne pourriez dire que Dieu soit innocent, mais il est saint. Il nous fait «participer à sa sainteté». Sa sainteté — la connaissance du mal, tel qu'il le voit, la capacité qu'il possède de s'élever au-dessus du mal. La sainteté est, tout autant que l'amour, une partie de la grâce.

Ils moururent. «Et Moïse dit à Aaron: C'est là ce que l'Eternel prononça, en disant: Je serai sanctifié en ceux qui s'approchent de moi, et devant tout le peuple je serai glorifié. Et Aaron se tut» (verset 3). Celui qui occupait la place d'intercesseur garda le silence. «Il y a un péché à la mort» (1 Jean 5: 16), devant lequel l'Eglise doit se taire. Dieu a pris la chose entre ses mains; il a agi dans son saint lieu; et tout ce que l'homme peut faire, c'est de garder le silence.

Mais ceci n'est pas tout. Le Seigneur saisit l'occasion fournie par ce péché, pour montrer quelle est notre position journalière «devant lui», et pour faire encore ressortir d'autres manquements.

«Et l'Eternel parla à Aaron». Dieu s'adresse à lui, parce qu'il s'agit de ce qui convient, aux sacrificateurs, à ceux qui entrent devant l'Eternel (*). Nous avons ici des instructions données par Christ, comme sacrificateur, tout aussi bien que comme législateur. Il est des choses qui sont bienséantes pour un chrétien, à part la question de justification, des choses que l'Esprit sait nous convenir dans notre position de sacrificateurs. Nous lisons, en Hébreux 5, que ceux-là sont sacrificateurs «qui sont appelés de Dieu, ainsi que le fut Aaron»; et aussi que «Christ ne s'est pas glorifié lui-même pour être fait souverain sacrificateur, mais celui-là l'a glorifié qui lui a dit: Tu es mon Fils, moi je t'ai aujourd'hui engendré». Ainsi, quoique dans un sens bien inférieur, nous sommes, nous devenons des sacrificateurs, étant nés de Dieu. Ce qui nous est présenté ici n'est pas simplement un précepte; c'est une instruction sacerdotale quant à la manière dont nous devons nous approcher de Dieu. La nouvelle nature dans laquelle nous sommes nés de Dieu comprend et apprécie ces choses.

(*) Ceci regarde tous les saints, car comme «fils d'Aaron», ils sont tous égaux; dans un autre sens, en les considérant comme Lévites, il peut y avoir des distinctions; ils sont tous serviteurs, mais l'un doit porter l'arche, l'autre les piliers, etc. Dieu parle de nous ici dans notre caractère le plus élevé. L'Eternel fait connaître à Aaron, le souverain sacrificateur, comment «les fils d'Aaron» doivent s'approcher de Lui.

 «Et l'Eternel parla à Aaron, disant: Vous ne boirez point de vin ni de boisson forte, toi et tes fils avec toi, quand vous entrerez dans la tente d'assignation, afin que vous ne mouriez pas. C'est un statut perpétuel, en vos générations, afin que vous discerniez entre ce qui est saint et ce qui est profane, et entre ce qui est impur et ce qui est pur, et afin que vous enseigniez aux fils d'Israël tous les statuts que l'Eternel leur a dits par Moïse» (versets 8-11). «Le vin et les boissons fortes», — tout ce qui excite la chair, tout ce qui n'appartient pas à la netteté de compréhension et de jugement spirituels qui conviennent à ceux qui pénètrent dans le sanctuaire, doit être exclu.

Je crois que nous sommes souvent empêchés d'entrer dans la présence de Dieu par le fait que nous «buvons du vin». Du moment que se manifeste ce qui agit sur la chair et excite la nature, le désir de chercher le plaisir et la joie dans des choses innocentes en elles-mêmes, n'importe lesquelles (la chair profite de toutes les occasions), alors nous pouvons être sûrs que «le vin» et «les boissons fortes» exercent leur influence et nous ôtent notre discernement spirituel. Ces choses sont donc inadmissibles.

Il y a dix mille choses qui peuvent nous exciter ainsi. L'éloquence, par exemple. Celui qui se laisse entraîner par elle, ne pourra faire jouir de la vérité ceux qui l'écoutent. Cette vérité ne changerait pas pour être présentée en simplicité, et ainsi ce qui est de Christ frapperait davantage. L'éloquence n'est pas en elle-même une chose mauvaise, et pourtant Paul dit: «Et moi-même, quand je suis allé auprès de vous, frères, je ne suis pas allé avec excellence de parole ou de sagesse, en vous annonçant le témoignage de Dieu; car je n'ai pas jugé bon de savoir quoi que ce soit parmi vous, sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié. Et moi-même j'ai été parmi vous dans la faiblesse, et dans la crainte, et dans un grand tremblement; et ma parole et ma prédication n'ont pas été en paroles persuasives de sagesse, mais en démonstration de l'Esprit et de puissance, afin que votre foi ne repose pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu».

Beaucoup de choses qu'on trouve liées aux choses de Dieu ne répondent pas à ce que nous venons de lire. Il y a du «vin» et des «boissons fortes», et cela rend impropre pour le sanctuaire. Tout ce qui n'est pas la joie spirituelle, vraie et calme, convenant à la présence de Dieu, rentre dans cette catégorie. Considérez bien; vous verrez ces choses dans toutes les formes de faux culte. Si nous pensons à la beauté et à l'élégance de l'édifice dans lequel nous nous rencontrons, nous tombons dans le même piège. Ces sensations agissent sur la nature, et tout ce qui a cet effet ne convient pas à la présence de Dieu et ne peut être porté dans le sanctuaire. Il en est de même pour toutes les choses autour de nous qui obscurcissent notre discernement spirituel, quoique, peut-être, elles ne soient pas mauvaises en elles-mêmes. Nous pouvons nous trouver dans un endroit ravissant sans en être occupés; dans ce cas, il n'est pas question de «boisson forte».

Le but de cette exhortation n'est pas seulement de nous faire agir comme nous le devrions. L'état d'esprit qui nous donne la capacité de juger entre ce qui est pur et ce qui est impur, découle de l'absence de ces choses; alors nous pouvons apprendre, par la communion avec Dieu dans le sanctuaire, à faire une différence entre ce qui est «saint et ce qui est profane». Ainsi l'apôtre prie pour les chrétiens qui étaient à Colosses, demandant à Dieu qu'ils fussent «remplis de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d'une manière digne du Seigneur, pour lui plaire à tous égards». Pour les Philippiens aussi, il demande qu'ils aient une connaissance de la volonté de Dieu telle, «qu'ils discernent les choses excellentes (éprouvant celles qui diffèrent), afin qu'ils soient purs et qu'ils ne bronchent pas jusqu'au jour de Christ»; sans une seule chute tout le long du chemin jusqu'au jour de la venue du Seigneur.

Quand nous péchons, nous ne pouvons jamais nous justifier en disant: «Nous n'y pouvons rien; la chair est en nous», car «aucune tentation ne nous est survenue qui n'ait été une tentation humaine; et Dieu est fidèle, qui ne permettra pas que nous soyons tentés au delà de ce que nous pouvons supporter, mais avec la tentation il fera aussi l'issue, afin que nous puissions la supporter». La théorie du chrétien est la suivante: la chair ne devrait jamais se montrer excepté en la présence de Dieu, où elle rencontre la grâce et aussi la sainteté.

Telle est la vraie force de notre marche. Elle ne se trouve pas dans un degré particulier de progrès; il s'agit simplement d'un homme, marchant selon sa communion, qui ne cède jamais à la faiblesse de la chair, car il ne la connaît que devant Dieu, et non pas devant Satan. Quand je connais la chair ainsi, je puis m'abreuver de ce qui en est l'opposé, de la grâce de Dieu, et marcher ainsi en avant dans la force de ce qui est en lui, et non dans la honte et la faiblesse de ce qui est en moi.

C'est ainsi que, purifié de tout ce qui agit sur la chair, et me trouvant près de Dieu, j'apprends dans le sanctuaire à connaître ses pensées et à «discerner entre ce qui est saint et ce qui est profane, et entre ce qui est impur et ce qui est pur». Alors je puis enseigner les autres et leur dire: Ceci est la pensée du Seigneur sur tel ou tel sujet. Comme il est dit dans notre passage: «Afin que vous enseigniez aux fils d'Israël tous les statuts que l'Eternel leur a dits par Moïse». Mais n'avons-nous pas souvent ressenti notre incapacité à juger des choses selon la pensée de Dieu, alors qu'il n'y avait pas manquement à l'égard des préceptes, mais simplement une incompétence spirituelle? Hélas! bien-aimés, nous nous étions laissés entraîner à «boire du vin et des boissons fortes», et ainsi nos facultés spirituelles avaient été obscurcies.

Il y a encore autre chose à remarquer. Les «fils d'Aaron» devaient manger de «l'offrande de gâteau», et du «sacrifice de prospérité» (versets 12-15). Nous trouvons ici la communion. Tout l'intérieur de l'animal, dans le sacrifice de prospérité, était réservé à l'Eternel; «un pain de sacrifice par feu à l'Eternel». Aaron et ses fils avaient leur part, l'adorateur lui-même aussi. Je ne puis en cette occasion me séparer de Dieu, parce qu'il m'est impossible de me séparer des délices que Dieu trouve en Christ, ni de toute la famille de Dieu dont chaque membre reçoit la portion qui lui est due. Il n'y a pas de vrai culte qui n'embrasse, dans son cercle, Dieu, Christ et toute la famille d'Aaron — l'Eglise. C'est un festin pour tous, quand il est réellement compris. Nous lisons en Ephésiens 3: «Afin, que vous soyez capables de comprendre avec tous les saints quelle est la largeur et la longueur, et la profondeur et la hauteur, — et de connaître l'amour du Christ, qui surpasse toute connaissance; afin que vous soyez remplis jusqu'à toute la plénitude de Dieu». Comment pourrais-je «comprendre avec tous les saints», si j'en omettais un seul? Je ne puis en laisser un de côté, sans diminuer ma propre réalisation de la plénitude de l'amour de Christ et de Dieu. Celui des saints que j'oublierais serait justement celui qui ferait la joie du coeur de Christ. Et c'est en ceci que nous manquons trop souvent.

Il y a plus encore. Nous devons dans un certain sens, comme sacrificateurs, porter les péchés et les tristesses de nos frères; non pour ce qui regarde la rédemption, cela va sans dire; Christ tout seul s'est occupé de cette oeuvre-là; son sang a été porté sur le propitiatoire; cependant il est vrai que nous avons à charger sur nous les fardeaux des autres. Or c'est de ce côté-là, plus qu'en tout autre peut-être, que nous montrons notre incapacité. Nadab et Abihu offrirent un feu étranger. Eléazar et Ithamar ne leur ressemblaient pas, mais leur faute n'en est pas moins rappelée. «Et Moïse chercha diligemment le bouc du sacrifice pour le péché; mais voici il avait été brûlé; et Moïse se mit en colère contre Eléazar et Ithamar, les fils d'Aaron qui restaient, et il leur dit: Pourquoi n'avez-vous pas mangé le sacrifice pour le péché dans un lieu saint? car c'est une chose très sainte; et Il vous l'a donné pour porter l'iniquité de l'assemblée, pour faire propitiation pour eux devant l'Eternel: Voici, son sang n'a pas été porté dans l'intérieur du lieu saint; vous devez de toute manière le manger dans le lieu saint, comme je l'ai commandé» (versets 16-18).

Voici quelle était l'ordonnance quant au «sacrifice pour le péché»: si le sang était apporté dans la tente d'assignation afin d'être répandu devant l'Eternel, le corps de la victime était brûlé hors du camp. Mais s'il s'agissait du «sacrifice pour des offenses, le sacrificateur devait en manger, et les fils d'Aaron recevaient aussi leur part.

Nous trouvons, en Jean 13, le parfait modèle de l'exercice de la grâce dans les saints quant aux manquements et aux péchés de leur frères. «Si donc moi, le Seigneur et le maître, j'ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres». Quand nous voyons une souillure chez notre frère, nous devrions toujours employer ce lavage, mais cela nous est impossible si nous ne portons en esprit, devant le Seigneur, tout le fardeau du péché que nous voulons confesser (le lavage des pieds n'est pas la rédemption). Et c'est là, dans l'exercice de ce devoir sacerdotal, que nous manquons tous.

Supposez que je marche vraiment dans la puissance de la position dans laquelle j'ai été placé; alors, si je vois le péché chez mon frère et que je prie pour lui, je trouve qu'il est identifié avec Christ, comme représenté devant le monde: le vêtement de Christ est souillé, l'honneur de Christ est atteint, la joie de Christ est compromise; tout est gâté, la communion avec Christ est perdue. C'est une chose terrible que de voir des saints de Dieu déshonorer Christ de cette manière! Maintenant je dois porter toute la misère et toute l'affliction qui découlent de ces choses, comme si j'avais péché moi-même. L'amour prend la place du pécheur, et la faute de mon frère devient l'occasion de l'intercession de mon coeur devant Dieu; elle produit l'activité de l'amour.

Un enfant est-il en proie à des souffrances aiguës; sa mère le voit convulsé par la douleur; elle ne ressent aucun mal physique, mais elle n'en souffre que doublement dans son coeur, dans ses affections. Il devrait en être ainsi pour nous, en sympathie avec les saints, quand nous les voyons aux prises avec de fausses doctrines, ou marchant d'une manière répréhensible. Jésus porte tout cela, mais nous devrions nous identifier avec lui quant à sa manière d'agir au sujet du péché, en mangeant le sacrifice pour le péché. Lorsque Daniel fait sa confession, dit-il qu'Israël avait péché? Non, mais: Nous avons péché; à nous la confusion de face; nous nous sommes rebellés. Telle est notre place.

Lorsque Moïse accuse Eléazar et Ithamar d'avoir péché, Aaron s'avance (verset 19) et répond à leur place. Il prend toute la charge sur lui. Christ fait de même pour nous. Il se rend responsable pour tout. Cependant, ç'aurait été leur privilège, comme c'est aussi le nôtre, de manger du sacrifice pour le péché; c'est la portion qui nous a été assignée. Dieu, dans les richesses de sa grâce, ne se borne pas seulement à nous bénir; il nous emploie à son service. Nous pouvons travailler sous sa direction. Paul plante, Apollos arrose, et Dieu donne l'accroissement.

Mais c'est Dieu qui a tout fait depuis le commencement. Si un homme est converti, à qui appartient-il de se réjouir? «Vous êtes notre joie», dit l'apôtre; c'était la sienne. Paul ne les avait pas rachetés, mais il avait la joie de l'amour.

En accomplissant ce service d'amour, nous avons son Esprit en nous, et ainsi la joie de l'amour nous appartient. Mais ce n'est pas seulement que nous devons aller annoncer l'évangile aux pécheurs. (La prédication correspond au ministère apostolique, tandis que l'enseignement et l'exhortation des saints, incombent à la sacrificature). Prier pour un frère, c'est le ministère sacerdotal en amour. S'il s'agit d'intercession, nous devrions porter toute l'iniquité de ce qui nous occupe sur notre propre coeur devant le Seigneur. Ainsi, le péché même devient une occasion de déployer l'amour et non le jugement.

Mais n'est-il pas vrai que nous avons failli? Tandis que l'église professante a offert un feu étranger devant l'Eternel, avons-nous su ce que c'est que de manger pour nos frères «le sacrifice pour le péché»? Ne les avons-nous pas chargés de leur offense selon la justice, les plaçant pour ainsi dire sous la loi, au lieu de manger du sacrifice dans un lieu saint?

La tristesse ne doit pas entraver notre service de sacrificateurs devant l'Eternel. Mais prenons garde aussi que la joie de la nature, «le vin et les boissons fortes», ne nous soient un empêchement. Je le demande une fois de plus: N'avons-nous pas reculé à l'idée de porter l'iniquité de nos frères, comme intercesseurs devant l'Eternel; avons-nous mangé du sacrifice dans un lieu saint? Combien nous sommes loin d'être affligés au sujet des fautes de nos frères autant que s'il s'agissait de nos fautes à nous! Avons-nous vraiment, comme sentant le mal, supplié le Seigneur selon l'intercession de la grâce? Cela ne nous arrive que bien rarement; et nous ne nous tenons guère à la brèche, pour ainsi dire. Nous avons tous failli, et failli gravement, quant à ces choses. Nous ne sentons pas assez que Christ s'identifie avec ses saints. Cette pensée nous placerait dans la position d'intercesseur.

Mais la voix d'Aaron se fait entendre (verset 19) et prévaut. «La chose fut bonne aux yeux de Moïse», de celui qui commandait et avait le droit de requérir (verset 20). Ainsi, lorsque Dieu entend la voix de notre Aaron intercédant en notre faveur, il est satisfait. Et tout en sentant que nous avons failli, nous trouvons la consolation dans cette pensée. La paix reparaît. Mais l'assurance qu'il en sera ainsi ne devrait pas nous faire traiter légèrement les péchés de nos frères.